Citations sur En attendant Bojangles (678)
Elle avait réussi à donner un sens à ma vie en la transformant en un bordel perpétuel. Sa trajectoire était claire, elle avait mille directions, des millions d'horizons, mon rôle consistait à faire suivre l'intendance en cadence, à lui donner les moyens de vivre ses démences et de ne se préoccuper de rien.
Le temps d'un cocktail, d'une danse, une femme folle et chapeautée d'ailes, m'avait rendu fou d'elle en m'invitant à partager sa démence.
Je voyais bien qu'elle n'avait pas toute sa tête, que ses yeux verts délirants cachaient des failles secrètes, que ses joues enfantines, légèrement rebondies, dissimulaient un passé d'adolescente meurtrie, que cette belle jeune femme, apparemment drôle et épanouie, devait avoir vu sa vie passée bousculée et tabassée. Je m'étais dit que c'était pour ça qu'elle dansait follement, pour oublier ses tourments, tout simplement.
Je ne regrettais rien, je ne pouvais pas regretter cette douce marginalité, ces pieds de nez perpétuels à la réalité, ces bras d'honneur aux conventions, aux horloges, aux saisons, ces langues tirées aux qu'en-dira-t-on.
Elle a commencé par se demander à ahute voix ce que j'aurais fait ne 39. Alors, je lui ai répondu en regardant mes chaussures que la question ne se posait pas, que je chaussa is du 33 et que si j'avais fait du 39, j'aurais été probablement dans la classe du dessus ou même dans l'école des grands.
Pour partager notre peine,Papa avait demandé à l'Ordure de prendre des grandes vacances à l'improviste.Il était arrivé le lendemain même avec son cigare éteint et son teint blême.Il était tombé dans les bras de Papa et s'était mis à pleurer, je n'avais jamais vu ses épaules trembler comme ça,il pleurait tellement qu'il avait de la morve plein sa moustache et des yeux rouges qui dépassaient largement l'entendement. Il était venu partager notre peine et finalement il était arrivé avec la sienne,ça faisait beaucoup de peine au même endroit...
Ils volaient mes parents, ils volaient l'un autour de l'autre, ils volaient les pieds sur terre et la tête en l'air, ils volaient vraiment, ils atterrissaient tout doucement puis redécollaient comme des tourbillons impatients et recommençaient à voler avec passion dans une folie de mouvements incandescents. Jamais je ne les avais vu danser comme ça, ça ressemblait à une première danse, à une dernière aussi. C'était une prière de mouvements, c'était le début et la fin en même temps.
Les ennemis les plus dangereux sont ceux qu'on ne soupçonne pas !
Ils volaient mes parents, ils volaient l'un autour de l'autre, ils volaient les pieds sur terre et la tête en l'air, ils volaient vraiment, ils atterissaient tout doucement puis redécollaient comme des tourbillons impatients et recommençaient à voler avec passion dans une folie de mouvements incandescents. Jamais je ne les avaient vu danser comme ça, ça ressemblait à une première danse, à une dernière aussi. C'était une prière de mouvements, c'était le début et la fin en même temps. Ils dansaient à en perdre le souffle, tandis que moi je retenais le mien pour ne rien rater, ne rien oublier et me souvenir de tous ces gestes fous.
Et moi, j'allais devoir apprendre à vivre sans eux. J'allais pouvoir répondre à une question que je me posais tout le temps. Comment font les autres enfants pour vivre sans mes parents?