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Citations sur Tokyo-Montana Express (28)

La plus petite tempête de neige jamais recensée

Il y a une heure de ça, dans le jardin de derrière chez moi, s’est produite la plus petite tempête de neige jamais recensée. Elle a dû faire dans les deux flocons. Moi, j’ai attendu qu’il en tombe d’autres mais ça n’a pas été plus loin. Deux flocons : voilà tout ce qu’a été ma tempête.
Ils sont tombés du ciel avec tout le poignant dérisoire d’un film de Laurel et Hardy : même qu’à y songer, ils leur ressemblaient bien. Que tout s’est passé comme si nos deux compères s’étaient transformés en flocons de neige pour jouer à la plus petite tempête de neige jamais recensée dans l’histoire du monde.
Avec leur tarte à la crème sur la gueule, mes deux flocons ont paru mettre un temps fou à tomber du ciel. Ils ont fait des efforts désespérément comiques pour tenter de garder leur dignité dans un monde qui voulait la leur enlever parce que lui, ce monde, il avait l’habitude de tempête beaucoup plus vastes – genre soixante centimètres par terre et plus –, et que deux flocons, y a de quoi froncer le sourcil.
Et puis ils ont fait un joli atterrissage : sur des restes de tempête précédentes – cet hiver, nous en avons déjà eu une douzaine. Et après ça, il y a eu un moment d’attente – dont j’ai profité pour lever les yeux au ciel, histoire de voir si ça allait continuer. Avant d’enfin comprendre que mes deux flocons, c’était côté tempête aussi complet qu’un Laurel et Hardy.
Alors je suis sorti et j’ai essayé de les retrouver : le courage qu’ils avaient mis à rester eux-mêmes en dépit de tout, j’admirais. Et tout en les cherchant, je m’inventai des manières de les installer dans le congélateur : afin qu’ils se sentent bien ; qu’on puisse leur accorder toute l’attention, toute l’admiration, qu’on puisse leur donner les accolades qu’ils mettaient tant de grâce à mériter.
Sauf que vous, vous avez déjà essayer de retrouver deux flocons dans un paysage d’hiver que la neige recouvre depuis des mois ?
Je me suis propulsé dans la direction de leur point de chute. Et voilà : moi, j’étais là, à chercher deux flocons de neige dans un univers où il y en avait des milliards. Sans parler de la crainte de leur marcher dessus : ça n’aurait pas été une bonne idée.
J’ai mis assez peu de temps avant de comprendre tout ce que ma tentative avait de désespéré. De constater que la plus petite tempête de neige jamais recensée était perdue à jamais. Qu’il n’y avait aucun moyen de la distinguer de tout le reste.
Il me plaît néanmoins de songer qu’unique en son genre, le courage de cette tempête à deux flocons survit, Dieu sait comment, dans un monde où semblable qualité n’est pas toujours appréciée.
Je suis rentré à la maison.
Derrière moi, j’ai laissé Laurel et Hardy se perdre dans la neige.
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"La plus petite tempête de neige jamais recensée
Il y a une heure de ça, dans le jardin de derrière chez moi, s’est produite la plus petite tempête de neige jamais recensée. Elle a dû faire dans les deux flocons. Moi, j’ai attendu qu’il en tombe d’autres mais ça n’a pas été plus loin. Deux flocons : voilà tout ce qu’a été ma tempête.
Ils sont tombés du ciel avec tout le poignant dérisoire d’un film de Laurel et Hardy : même qu’à y songer, ils leur ressemblaient bien. Que tout s’est passé comme si nos deux compères s’étaient transformés en flocons de neige pour jouer à la plus petite tempête de neige jamais recensée dans l’histoire du monde.
Avec leur tarte à la crème sur la gueule, mes deux flocons ont paru mettre un temps fou à tomber du ciel. Ils ont fait des efforts désespérément comiques pour tenter de garder leur dignité dans un monde qui voulait la leur enlever parce que lui, ce monde, il avait l’habitude de tempêtes beaucoup plus vastes – genre soixante centimètres par terre et plus -, et que deux flocons, y a de quoi froncer le sourcil.
Et puis ils ont fait un joli atterrissage : sur des restes de tempêtes précédentes – cet hiver, nous en avons déjà eu une douzaine. Et après ça, il y a eu un moment d’attente – dont j’ai profité pour lever les yeux au ciel, histoire de voir si ça allait continuer. Avant d’enfin comprendre que mes deux flocons, c’était côté tempête aussi complet qu’un Laurel et Hardy.
Alors je suis sorti et j’ai essayé de les retrouver : le courage qu’ils avaient mis à rester eux-mêmes en dépit de tout, j’admirais. Et tout en les cherchant, je m’inventais des manières de les installer dans le congélateur : afin qu’ils se sentent bien ; qu’on puisse leur accorder toute l’attention, toute l’admiration, qu’on puisse leur donner les accolades qu’ils mettaient tant de grâce à mériter.
Sauf que vous, vous avez déjà essayer de retrouver deux flocons dans un paysage d’hiver que la neige recouvre depuis des mois ?
Je me suis propulsé dans la direction de leur point de chute. Et voilà : moi, j’étais là, à chercher deux flocons de neige dans un univers où il y en avait des milliards. Sans parler de la crainte de leur marcher dessus : ça n’aurait pas été une bonne idée.
J’ai mis assez peu de temps avant de comprendre tout ce que ma tentative avait de désespéré. De constater que la plus petite tempête de neige jamais recensée était perdue à jamais. Qu’il n’y avait aucun moyen de la distinguer de tout le reste.
Il me plaît néanmoins de songer qu’unique en son genre, le courage de cette tempête à deux flocons survit, Dieu sait comment, dans un monde où semblable qualité n’est pas toujours appréciée.
Je suis rentré à la maison. Derrière moi, j’ai laissé Laurel et Hardy, se perdre dans la neige."
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Il est de ces gens qui, même lorsqu'on les regarde, on les oublie, tant et si bien qu'à la seconde même où ils disparaissent à la vue, ils sont totalement oubliés.
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A six heures, juste après ça, la poésie viendra donc au Montana.
Elle y viendra sous la forme d'une émission intitulée : Des Poètes Vous Parlent.
Commentaire de la Revue Télé : "des subtils changements qui affectent l'oeuvre poétique lorsqu'on la traduit."
Je ne vois pas que le Montana ait vraiment besoin de rien d'autre : l'accueil du public sera certainement massif et enthousiaste. Tiens, même que je me les vois bien, mes fermiers, par milliers les yeux rivés sur le petit écran, à six heures du matin en train de découvrir la poésie, d'en discuter et par après de tout le reste du jour en parler avec les voisins :
- Holà ! Qu'est-ce t'en dis touai, de c''t'histoire de poésie qui perd de sa signification quand c'est qu'on la traduit ?
- Bah, mouai, la s'maine dernière, c'est un veau que j'ai perdu. Y a aussi qu'la première femm', alle s'est barrée avec mon meilleur copain le jour ed'mon anniversaire. Ah ben ça non qu'j'ai pas envie d'avoir vingt-sept ans une deuxième fouais ! C'qui fait qu'j'ai écouté tout ça d'une oreille sympathique et que c'est pour sûr qu'j'espère qu'i' vont les r'trouver tout' ces significations. L'veau, ça c'est sûr qu'i'm'manque. La femm' ? Ben non. Faut dire que ma deuxième, alle fait bien la cuisine. Ca, on peut pas dire qu'alle soit géniale à r'garder, m'enfin, la cuisine, alle sait faire; et pis comme ça, y a pas d'risque qu'alle s'tire avec un aut' bonhomme !
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La plus petite tempête de neige jamais recensée

Il y a une heure de ça, dans le jardin de derrière chez moi, s'est produite la plus petite tempête de neige jamais recensée. Elle a dû faire dans les deux flocons. Moi j'ai attendu qu'il en tombe d'autres mais ça n'a pas été plus loin. Deux flocons : voilà tout ce qu'a été ma tempête.

Ils sont tombés du ciel avec tout le poignant dérisoire d'un film de Laurel et Hardy : même qu'à y songer, ils leur ressemblaient bien. Que tout s'est passé comme si nos deux compères s'étaient transformés en flocons de neige pour jouer à la plus petite tempête de neige jamais rencensée dans l'histoire du monde.

Avec leur tarte à la crème sur la gueule, mes deux flocons ont paru mettre un temps fou à tomber du ciel. Ils ont fait des efforts déséspérément comiques pour tenter de garder leur dignité dans un monde qui voulait la leur enlever parce que lui, ce monde, il avait l'habitude de tempêtes de neige beaucoup plus vastes - genre soixante centimètres par terre et plus -, et que deux flocons, y a de quoi froncer le sourcil.
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Les gens que joseph Francl rencontre sur la route de l'Ouest ? Coté cervelle, ça louche beaucoup : archétypalement parlant, on est plutôt pété. Il ne semble pas que les ceusses qui vous défrichent le pays appartiennent aux classes les plus équilibrées de la nation.
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Elle porte une paire de pantalons d'un bleu très léger. À son corps ils collent aussi étroitement que le ciel est ajusté à la terre.
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Plus tard il me parle du grand tremblement de terre qui s'est produit il y a quelques jours à Tokyo. Il me dit qu'il a un fils qui n'est pas tout à fait normal et qu'il essaie de lui expliquer ce qu'est un tremblement de terre pour qu'il comprenne et n'ait pas peur, mais qu'il n'arrive pas à trouver la façon de le lui dire.
- Et le vent, il comprend ce que c'est ?
- Oui.
- Dites-lui qu'un tremblement de terre, c'est du vent qui traverse la terre.
L'idée plaît au romancier japonais.
Ce que je peux l'admirer.
(Du vent dans les sous-sols)
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Ce que je savais jadis et qui m'était si important, je ne m'en souviens plus aujourd'hui.
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Sonate en forme de dindon et céréales pour petit déjeuner

Les dindons s’étaient lancés dans une bataille où pour abattre l’adversaire tous les coups sont permis : ça y allait sans compter. Sauf que les poneys eux, en eurent marre et des bois galopèrent vers un champ découvert, derrière eux laissant aux dindons le soin de se démerder de leurs querelles de famille.
J’avais déjà fait quatre cents mètres en direction du refuge : il était fermé sauf que ça, je le savais avant même de me mettre en route. Non, tout ce que je voulais, c’était encore une fois lire le panneau bleu qu’on avait apposé à la vitre de la porte d’entrée.
Bien sûr, je n’ignorais rien de son contenu et si tout simplement je désirais quand même le relire c’était qu’à ma balade il n’y avait aucune autre justification possible et que ça, me faire une promenade matinale je le voulais et donc me raccrochai à cette excuse tout le temps qu’il me fallut pour traverser la très paisible et encore très modeste commune de Pine Creek.
La virée fut agréable : dans la neige fraîche mes pas à s’enfoncer firent teinter le bruit de riches céréales qui craquent au déjeuner et presque ce fut comme si les Grands Moulins Généraux s’étaient mis à chanter.
Sur la porte le panneau bleu n’avait pas bougé et toujours disait la même chose. A savoir merci de bien vouloir être de nos clients, bien des choses de la part de l’ancien patron et aussi que l’on resterait fermé jusqu’au 20 février, date à laquelle les nouveaux propriétaires reprendraient l’affaire ; lesdits propriétaires étant d’ailleurs fort impatients d’accueillir tout un chacun.
Je me demandai comment et jusqu’à quel point la nouvelle direction allait transformer le refuge. J’essayai de deviner qui ils pouvaient bien être à ainsi vouloir tenir un petit refuge où, en dehors d’une pompe à essence, il n’y avait en tout et pour tout qu’une boutique mi-café mi-alimentation et quelques cabanes de rondins perdues autour d’un point à peine visible sur la carte : Mill Creek, Etat du Montana, c’était si loin de Paris, de New York ou de Tokyo !
En savoir plus long sur leurs projets, si à tout le moins ils en avaient, et enfin les voir, cela ne m’arriverait que dans quelques jours. Pour l’instant rien n’avait changé au refuge et il n’y avait là âme qui vive.
Tout petit mystère, les nouveaux patrons allaient m’occuper plusieurs jours encore : cela me donnerait un sujet auquel réfléchir pendant les soirées d’hiver.
C’est alors que les dindons se mirent à se battre dans le bois de l’autre côté de la route, que les poneys soudain du même bois sortirent en galopant vers un champ et qu’après avoir fait demi-tour, je rentrai chez moi l’oreille fort attentive aux bruits de petit déjeuner aux céréales qui montaient de mes pas.
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