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Michel Doury (Autre)
EAN : 9782264006059
187 pages
10-18 (01/02/2006)
3.78/5   117 notes
Résumé :
Le roman de Brautigan est habité par un peuple de grotesques : un vieux monsieur dit bonjour le matin et bonsoir le soir; une vieille dame devient le céleri-rave qu'elle consomme quotidiennement; Roy, "le cinglé en cavale", un milliardaire que sa femme et ses enfants veulent faire enfermer afin de disposer de sa fortune, rejoint Lee Mellon et ses troupes à Big-Sur. Pas de morale, pas de philosophie, pas de politique (agressivement présente) dans ce déferlement d'av... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
« Lee Mellon n'avait pas l'accent du Sud. Je lui ai dit : « T'as pas tellement l'accent du Sud. »
« Exact, Jesse », répondit Lee Mellon. « Mais quand j'étais gosse, j'ai beaucoup lu Nietzsche, Schopenhauer et Kant. »
Ce qui d'une façon ou d'une autre avait dû le débarrasser de son accent du Sud. C'est du moins ce que pensait Lee Mellon. Impossible de discuter, car je n'ai jamais fait l'essai d'un accent du Sud contre les philosophes allemands. »

Jesse, le narrateur de ce roman loufoque, mais pas que, fait une rencontre décisive avec ce vagabond de Lee Mellon qui se fantasme descendant d'un général sudiste. On est pourtant bien loin du Sud : Big Sur est située en Californie, sur une bande littorale étroite et encore sauvage dans ces années 1960. Ils ont Henry Miller pour voisin.

Ils vivront dans des cabanes faites de bric et de broc, manquant de presque tout. Alcool, tabac, nourriture, sexe sont leurs obsessions. Ils flambent dès que la chance les mets en contact avec des pigeons. Les femmes ne sont pas insensibles à leur charme sauvage et musqué (ce ne sont pas de grands amateurs d'hygiène corporelle!).

C'est le premier roman de Richard Brautigan, le premier publié du moins. Je l'ai découvert avec les nouvelles « La vengeance de la pelouse » et je savais donc à quoi m'attendre : images très inventives et inattendues, humour léger teinté d'idées noires. Ces caractéristiques sont déjà entièrement là. Brautigan possédait un style tout à fait personnel, qui atteint toujours son but malgré ses moyens peu ordinaires. Si vous n'avez jamais essayé de le lire, vous passez peut-être, si vous êtes réceptif à ses étrangetés, à côté d'un écrivain majeur.
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Ce livre illustre le mode de vie de la « beat génération » et son passage, ensuite au mouvement hippie ou « beatnik ». Il illustre ces mouvements à la fois par l'histoire narrée, mais aussi par le style littéraire employé et qui va se transformer au fil du livre. Très bel exercice de style de Brautigan dans ce livre.

Au départ une amitié naît entre ce qu'on appelle deux "clochards célestes", ces personnes qui ont décidé de ne pas souscrire au mode de vie « main-stream » proposé par la société (pas de travail, pas d'argent, des moeurs libres), mais qui le font par conviction et qui cultivent la littérature et la poésie et surtout la poésie de la vie, la poésie de l'instant.
On retrouve des personnages similaires par exemple dans les parents du film "le château de verre". Ils étaient beat, mais pas hippie.

On retrouve les thèmes chers à la « beat generation » : vivre à contre-courant de la société de consommation, ne pas être matérialiste, être dans le contre-culture américaine.
Pas de travail, pas d'argent, mais on s'en fiche, pas de logement non plus si ce n'est du précaire, du nomadisme, et surtout des moeurs libres à contre-courant du puritanisme américain. Et aussi un peu de rébellion, d'illégalité.
Être original dans son mode de vie aussi, sa manière de voir le monde, sa manière de penser.

Les deux héros du début sont typiques de la première génération beat, Kerouac, Burrough, ce sont des clochards célestes.
Puis dans la deuxième partie, il y a naissance d'une communauté hippie avec les deux filles.
Les deux filles sont plus de type hippie que beat.
Elles sont belles, les hippies devaient être beaux, comme l'a fait remarquer Houellebecq dans les particules élémentaires. Il y a aussi l'importance du vêtement chez les hippies qui n'était pas présent chez les beats. Chez les hippies le costume est très important, la coiffure aussi.
Les beats sont nomades mais les hippies se fixent dans un lieu et font communauté, même s'ils leur arrivent de changer d'endroit de temps à autre, mais ce n'est plus du vrai nomadisme.
Les beats sont des hommes, nomades, sur la route, les hippies sont mixtes et vivent en communauté. Si des enfants naissent ce ne sont pas des enfants d'une famille mais les enfants de la communauté.

Avec les hommes, au début, on est dans la poésie des beats, une poésie du voyage, une poésie littéraire, quand les femmes apparaissent, on passe dans le psychédélique. D'où le côté de plus en plus absurde de la deuxième partie.
Au début, avec les hommes, on est surtout dans l'alcool, quand les femmes apparaissent on passe dans les drogues, les paradis artificiels.
Il y a comme l'illustration du passage de l'ère beat (années 50-60) à l'ère beatnik ou hippie (années 60-70).
Derrière l'histoire, il y a la propagande d'un mode de vie, et l'illustration d'une façon de voir la vie, le monde, les modes de relations. C'est la propagande d'un mode de vie et le style du livre lui-même illustre ce mode de pensée : poésie, rêverie, sens de l'absurde, culture de l'absurde, d'une vision psychédélique du monde et des relations, aidée par l'usage de stupéfiants.
L'argent est méprisé.
On doit sortir de sa zone de confort et accepter de ne pas toujours manger à sa faim, de loger dans des conditions précaires voire insalubres, ne pas avoir accès aux soins médicaux (les dents de Lee Mellon) et accepter de devoir pratiquer des activités illégales, la triche, le vol, se cacher des autorités, de la police.

Le lieu de la deuxième partie, Big Sur est très important.
Ce lieu se situe entre San Francisco et Los Angeles sur la côte. Il est désertique et aride. Il culmine à 1600 mètres et se jette dans la mer, c'est très abrupt, il y a beaucoup de falaise. C'est un des derniers endroits des Etats-Unis, du coup à avoir été civilisé. Ils ont été raccordés au réseau routier et ont reçu l'électricité très tard.

Ce n'est pas un hasard si Henri Miller, le grand père de la « beat generation » avait choisi ce lieu pour sa retraite quand il est rentré aux Etats Unis.
Miller est le père de la « beat generation ». Les moeurs évoquées dans ses livres lui ont valu une censure sévère outre-Atlantique : ses livres étaient interdits aux Etats Unis, mais pas en France. Pour autant, les livres de Miller étaient lus aux Etats Unis, importés et lus en toute illégalité. Donc quand Miller est rentré au pays, il a aussitôt pris le maquis. Big Sur, à l'époque, c'était un peu le Larzac des USA.
Ce qui explique que les écrivains Beat, dont Brautigan, sont pratiquement tous venus vivre à Big Sur.
Je crois qu'il y a le musée Henri Miller là-bas. D'ailleurs, dans le livre, à un moment, ils croisent Henri Miller.

Voilà, un livre plein de poésie, beat, psychédélique qui montre une autre façon de vivre. A la croisée de la propagande, du reportage, de la réflexion sur un autre mode de vie, et écrit avec ce même style poétique, littéraire, psychédélique. Une ouverture sur d'autres mondes, modes de vie, sur d'autres possibles.

Cela étant, on peut critiquer ce qu'ont été les mouvements beat et hippie. Ça fonctionnait pendant les trente glorieuse, la période d'abondance, il y avait profusion alors on pouvait choisir le dénuement, parce que justement il y avait abondance et surconsommation. Quand les crises économiques sont arrivées, il n'était plus raisonnable de se priver, ça devenait très dur dans un monde devenu très égoïste. Peut être que la privation, le manque étant devenus « main-stream », il n'était plus de bon ton de se priver pour être dans la contre-culture, ou du moins ça n'avait plus aucune utilité pour marquer sa différence.

Et puis les mouvements beat et hippie reposaient sur une contre-culture et un style de vie. Les beats étaient encore très poétiques, inspirés, littéraires, mais avec les hippies, c'est devenu beaucoup plus superficiel, basé sur le style, la beauté, la jeunesse.
Les gens n'étaient pas vraiment liés par quelque chose de profond, mais la superficialité d'un mode de vie, d'un style de vie, de moeurs libres.
Finalement, les beats et les hippies ont très mal fini. Brautigan s'est suicidé, Kerouac est devenu asocial, violent, méchant.
Leurs enfants ont beaucoup souffert. Cette souffrance des enfants de l'époque, maintenant adultes, a parfois inspiré, à son tour, des oeuvres narratives comme les particules élémentaires de Houellebecq ou le film "le château de verre".
Il manquait peut-être aux hippies une réelle vision, une réinvention profonde du monde, une vraie contre-culture, une spiritualité authentique.
Mais finalement, lire ce livre fait du bien. C'est une grande bouffée d'air pur, de liberté, de poésie, de légèreté, et de joie, de lâcher prise.
Il ne faut pas oublier que les années 68 ont été nommées "la parenthèse enchantée", les gens ont atteint à l'époque un niveau de légèreté, d'insouciance, inouï, jamais trouvé ni avant, ni après : pas de crise économique, le plein emploi, la libération sexuelle, pas de Sida, idéalisme, poésie, théâtre et musique en permanence sur fond de fêtes, de drogues, d'alcool... Cette légèreté, cette insouciance manque beaucoup aujourd'hui, c'est pour ça que de temps en temps, ça fait du bien de se souvenir qu'on a vécu ça car rien ne nous empêche de nous remettre dans cet état.

J'ai beaucoup aimé ce livre de ce point de vue, et aussi pour son originalité, à mi-chemin entre la poésie, la littérature et l'humour.

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Il y a indéniablement une tradition de l'absurde dans la littérature anglo-saxonne. J'ignore d'ailleurs d'où elle remonte mais selon moi, elle englobe pas mal de genres, de la SF du grand Douglas Adams à la Fantasy du non moins immense Terry Pratchett, de la comédie dramatique de Tom Sharpe au polar de Charles Williams, on ne peut nier la qualité de ce groupe hétérogène.
Brautigan fait partie du lot, version Beat generation, matinée d'un poil de John Fante pour le soleil californien, du soupçon de Bukowski pour le pinard californien et finalement un presque rien d'Henry Miller pour l'outrance légère faite aux bonnes moeurs californiennes. On trouve quand même pire références.
Le général sudiste de Big Sur raconte -à peu près- l'histoire d'un jeune hippie de Frisco, de sa colision opportune avec Lee Mellon, déscendant auto-proclamé d'un général sudiste de la guerre d'Indépendance. Brautigan s'amuse à tout mélanger dans un style alerte, extrêmement drôle si bien que les 175 pages du roman s'enfilent dans un rire un peu gras. Pas vraiment subtile, c'est surtout la gaudriole qui est invoquée ici. Tant mieux pour le lecteur car au final, s'il n'y a tout de même pas grand-chose à retenir, on s'est quand même bien marrés.
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Voici un général sudiste pas comme les autres, dont le cheval de bataille est la juxtaposition humoristique. La guerre de Sécession vient ainsi s'accoler à des pérégrinations dans l'Amérique des années 60. Le tout n'est lié que par la douteuse ascendance de l'un des héros, Lee Melon. Son existence décadente entretient un rapport burlesque avec la gloire supposée de son ancêtre… dont la véritable histoire finit par s'insérer en filigrane entre les chapitres, pendant que le récit dérive au fil de comparaisons baroques et de plus en plus incongrues (on observe ainsi « les étoiles pareilles à des camions de pompiers suspendus dans les airs et, jaillissant de leurs lances, des flots de lumière  »), agrémentées de citations littéraires et cinématographiques (l'image précédente se réclame du « capitaine des pompiers Walt Whitman »).

Brautigan maîtrise l’art de faire rire en rapprochant plusieurs éléments mal assortis. Et pas seulement dans le regard poétique du narrateur, Jesse, mais aussi à travers le comique de situation du récit principal, où l’on suit la lutte à mort de l'homme contre la grenouille, et son apprivoisement incertain de l'alligator. Les analogies fantasques de la narration amplifient l’humour, mais aussi les directions que peut emprunter le texte, ses sens possibles. Si bien que même Jesse alias Brautigan finit par en bégayer, hébété de cette drôle de vie qu'il mène là.

Oui, ce livre est stupéfiant, et le lire s'apparente donc à la consommation de stupéfiant, puisque à la fin je me sentais un peu planer comme les personnages... ou comme les goélands… ou comme un albatros des paradis artificiels… ou comme un alligator en plein festin, qui fait : « GRRR - op/op/op/op/op/op/op/op ! »

Il y aurait bien d'autres comparaisons fumeuses susceptibles de conclure cette critique, n'en doutons pas. Libre à vous de proposer vos fins alternatives, ou d'aller piocher dans celles de Brautigan : il en a plein en stock, et il les fait tourner.
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Richard Brautigan nous raconte l'improbable rencontre entre le narrateur Jesse et Lee Mellon, descendant d'un général sudiste ayant combattu pendant la guerre de Sécession "fleur de la chevalerie sudiste, et lion sur le champ de bataille."

"Lee Mellon regarda la ciel Parfois, quand on rencontre des gens pour la première fois, ils regardent le ciel. Il le regarda longtemps."

Lee devient son voisin avant de s'exiler à Big Sur où Jesse finit par le rejoindre. Là-bas, Lee habite une cabane qu'il a lui même édifiée, si bien qu'elle est quelque peu bancale : dotée d'un mur en terre, d'un en verre, et pas de mur qui donne sur une mare au grenouilles. le plafond est trop bas, les grenouilles croassent de façon un peu trop envahissante si bien que les solutions germent pour les chasser : le lancée de pierres, le tapage de balai, l'eau bouillante dans la mare ou encore le vin rouge aigre jeté sur les fautives. Rien n'y fait. Jusqu'à ce que deux mastodontes interviennent... le coin est aussi agrémenté d'un fantôme vétéran de la guerre hispano américaine. Entre rencontres délirantes, expériences avec de la marijuana, le temps file doucement et sereinement dans ce coin perdu du monde.




Ce roman est totalement délirant, décalé, les personnages vivent dans une autre dimension pour le plus grand plaisir du lecteur !
Lien : http://www.lecturissime.com/..
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Elle faisait tout ce qu’on lui demandait. Ils lui donnaient ses cent dollars, parfois davantage, car elle était très rassurante, elle ne leur donnait pas de complexes, sauf à ceux qui souhaitaient en avoir, naturellement, elle leur en donnait alors pour leur argent, et ils lui faisaient un petit cadeau supplémentaire pour leur avoir donné de si beaux complexes.
C’était une technicienne très bien payée, elle travaillait trois mois par an et mettait son argent de côté. Elle revenait ensuite à Big Sur, étalait ses longs cheveux sur ses épaules, et menait alors une vie de contemplation spirituelle et physique, et ne supportait pas de tuer un être vivant.
Elle était végétarienne. Les œufs, c’était son seul vice. Il y avait dans le coin des serpents à sonnettes avec lesquels jouaient ses enfants, mais elle n’y faisait rien.
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Le reste de la journée s’est passé tranquillement. Elizabeth était très belle. Elaine était nerveuse. Roy Earle s’est absorbé dans la contemplation des alligators.

Il les a regardés, un sourire aux lèvres, et il est resté comme ça le restant de la journée, jusqu’au coucher du soleil, content comme tout, tranquille. ET PUIS TOUT D’UN COUP il a regardé la mare fixement et il a dit, d’une voix qu’envahissaient des tremblements de terre, des épidémies et des apocalypses : « NOM DE DIEU C’EST DES ALLIGATORS ! »
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Un goéland est passé au-dessus de nous, ses cris chevauchant la lumière, ses cris traversant historiquement des chansons aux couleurs douces. Nous avons fermé les yeux et l’ombre de l’oiseau s’est nichée dans mon oreille.
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Lee Mellon vivait dans la maison abandonnée d'un ami qui était alors champion de ping-pong série C d'un asile pour aliénés aux fins fonds de la Californie.Le classement A, B ou C était fonction du nombre d'électrochocs subis par les patients.
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Elle décréta un beau jour qu'elle était peintre et, comme elle était intelligente, elle comprit tout de suite qu'il est beaucoup plus facile de parler de peinture que de peindre pour de bon.Elle se mit donc à fréquenter les bars et à parler des peintres de génie comme Van Gogh.Il y avait un autre peintre dont elle parlait tout le temps aussi, mais j'ai oublié son nom.
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