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Citations sur Dernier tramway pour les Champs-Elysées (6)

Il arrive que les gens ordinaires commettent de mauvaises actions. Une décision professionnelle prise sur un coup de tête, une rencontre romantique dans un bar de nuit, une rivalité avec un voisin à propos de l'emplacement d'une clôture, n'importe lequel de ces moments apparemment insignifiants peut déclencher une série d'évènements qui, comme un clou rouillé dans la plante du pied, sont à même d'empoisonner systématiquement l'existence d'un individu normalement respectueux des lois et de le propulser dans un monde qui, jusque-là, n'existait à ses yeux que dans l'imagination perverse des romanciers de gare.
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La semaine qui suivit Labor Day, après un été de sécheresse dont les vents chauds avaient réduit la terre des champs de canne en pous­sière aride tissée de craquelures comme des toiles d'araignée, les averses se remirent de la partie sur les marais, la température baissa de dix degrés et le ciel immaculé d'un bleu dur de céramique se mit à ressembler à l'intérieur d'une énorme coupe renversée. Je passais mes soirées sur le perron arrière d'une maison de location bâtie tout en longueur sur Bayou Teche, d'où je regardais passer les bateaux aux lueurs du crépuscule en écoutant le sifflement lointain du Sunset Limited. Dès que le ciel se vidait de sa lumière, la lune se levait pareille à une planète orange au-dessus des chênes qui couvraient mon arrière-cour et je choisissais ce moment pour rentrer et préparer mon dîner que je mangeais en solitaire à ma table de cuisine.
Mais dans mon coeur, comme à chaque automne, les odeurs de gaz portées par le vent, le vert sombre moucheté d'or des arbres, le pourtour des feuilles illuminé de flammes étaient moins les signes d'un été indien que le prélude aux pluies de l'hiver et à ses journées de décembre et de janvier brèves et grises, où l'on verrait alors monter dans le ciel le panache de fumée des feux de chaumes dans les champs de canne, tandis que le soleil ne serait plus qu'une vapeur jaune à l'ouest.
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La semaine qui suivit Labor Day1, après un été de sécheresse dont les vents chauds avaient réduit la terre des champs de canne en poussière aride tissée de craquelures comme des toiles d’araignée, les averses se remirent de la partie sur les marais, la température baissa de dix degrés et le ciel immaculé d’un bleu dur de céramique se mit à ressembler à l’intérieur d’une énorme coupe renversée.
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-J’ai pris mes renseignements sur toi Robicheaux.T’es un imbibé des AA et les gens ont pitié de toi.Mais ça ne te donne pas le droit de chercher des crosses à un gars comme moi pasque je suis italien ou que je viens de la Nouvelle-Orléans,ou à cause de n’importe quelle putain de raison qui te pose un problème.
Je consultai ma montre.
-Ton carrosse est sur le point de se changer en citrouille,dis-je
Il s’avança vers moi.
-On est dans un pays libre,ça te plait pas ,ce que cette dame et moi on fait ,moi je te réponds :suce-moi la bite .Maintenant ,arrête de me gonfler et dégage de là pasque ,bordel,moi non plus je t’aime pas ,mais pas du tout ,mec.
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" Ce soir-là, je préparai une écuelle de lait pour un chat errant et le regardai boire sur la galerie. Il était blanc et non castré, le corps ferme, le poil court et les oreilles déchiquetées, sa fourrure marquée de cicatrices roses, séquelles d’anciens coups de griffes. Sa queue était aussi épaisse qu’un manche à balai. Lorsque je le caressai, il me lança un regard indifférent et retourna à son repas.

Theodosha engagea sa Lexus dans l’allée et se rangea sous le pacanier contre le mur pignon de la maison. Un étui à guitare de prix trônait debout sur sa banquette arrière. Elle portait des mocassins, un chemisier en tissu éponge bleu et un jean taille basse qui laissait son ventre à l’air. Une bourrasque de vent souleva les feuilles autour d’elle et un rai de soleil couchant barra son visage à l’oblique.

─ Comment s’appelle ton petit ami ? me demanda-t-elle en s’asseyant sur une marche à côté du matou.

─ Il ne me l’a pas dit, répondis-je.

Elle prit le chat dans ses bras et l’embrassa sur le haut du crâne. Puis, le basculant sur le dos, elle l’installa dans le creux entre ses cuisses, l’allongea de tout son long en lui tirant sur la queue comme s’il s’agissait de la sangle de traction d’un bagage, puis se mit à le gratter derrière les oreilles et sous le menton.

─ On va l’appeler Monsieur Adorable. Non, on va l’appeler Snuggs (douillet, moelleux et chaud N.d.T.) dit-elle.

─ Qu’est-ce qui se passe, Theo ? demandai-je.

─ J’ai appris que tu étais passé voir mon père à son domicile, répondit-elle.

─ Ton père a un problème avec la vérité. Il estime qu’il n’a pas à la dire.

─ Lui prétend que tu t’es adressé à lui comme s’il était un criminel.

─ Je lui ai parlé comme à un citoyen ordinaire et il n’a pas apprécié. A la suite de quoi, au lieu de m’affronter directement, face à face, il a signalé la chose au shérif par l’intermédiaire de son avocat.

─ Il appartient à une autre génération, Dave. Pourquoi ne pas faire preuve d’un peu de compassion ?

Il est temps de rompre le duel, me dis-je en moi-même. Les lampadaires s’allumaient sous les chênes, l’air était froid et humide, chargé d’une odeur de mélasse calcinée dégagée par les cheminées des sucreries. Theo reposa le chat par terre et lui caressa le dos.

─ Tu veux voir ma nouvelle guitare ? me demanda-t-elle en se relevant.

─ Bien sûr. Je ne savais pas que tu étais musicienne, dis-je.

Elle revint avec son instrument et ouvrit l’étui.

─ Je ne suis pas très douée. Ce n’est pas comme ma mère. Il me reste encore d’elle d’anciennes bandes où elle interprète des vieilles chansons de Bessie Smith. Elle aurait pu en faire son métier. La seule personne que j’ai jamais entendue chanter aussi bien qu’elle, c’est Joan Baez, dit-elle.

Theo sortit sa guitare et vint s’asseoir sur les marches. Elle plaqua un accord sur le manche et passa le pouce sur les cordes avant d’entamer Corina, Corina en français cajun. Elle s’était montrée trop modeste. Elle avait une voix superbe et s’accompagnait à la perfection au fil des accords. En fait, comme tous les vrais artistes, elle donnait l’impression de disparaître au cœur de sa création, comme si l’identité sous laquelle les autres la connaissaient n’avait strictement rien à voir avec les réalités intérieures de son être.

Sa chanson terminée, le sourire qu’elle m’offrit m’évoqua presque le baiser que donne une femme à son amant après avoir fait l’amour.

─ Bon sang, mais tu es magnifique, Theo, dis-je.

─ Ma mère chantait ça. Je ne me souviens pas bien d’elle, mais je me rappelle qu’elle me chantait cette chanson avant que je m’endorme.

Elle remisa sa guitare de côté et le chat qu’elle avait baptisé Snuggs nicha son museau contre son genou. Le vent fit frissonner les branches de pacanier et de chêne au-dessus de nos têtes, et un groupe de gamins rigolards en route vers la bibliothèque passa en vélo devant la maison, sous les lampadaires qui brillaient dans le soir humide comme des lampes à pétrole dans une toile de Van Gogh. Aucun bruit de moteur ne résonnait dans la rue et l’on n’entendait que le souffle régulier du vent et le raclement des feuilles mortes sur le trottoir. J’aurais voulu que cet instant ne finît jamais.

Mais pareil au ver dans la rose ou au serpent qui se déroule dans un pommier, il y avait dans la chanson de Theo un élément qui me dérangeait et que je ne pouvais pas laisser passer.

─ La mélodie de Corina, Corina est la même que Midnight Special, dis-je.

─ Mmm, répondit-elle vaguement.

─ C’était la chanson de Leadbelly. Le Midnight Special était le nom du train qu’il a dû prendre jusqu’au pénitencier de l’Etat du Texas à Huntsville. Selon la légende des prisons, le détenu qui voyait briller la lumière de la locomotive dans son sommeil allait être libéré l’année suivante.

Mais je constatai qu’elle n’avait toujours pas fait le lien.

─ Ton père n’a pas voulu répondre à mes questions à propos de Junior Crudup, Theo, lui expliquai-je. A Angola, Crudup a été l’ami de Leadbelly et ils ont probablement composé des chansons ensemble. Je pense également que Crudup le bagnard a travaillé comme ouvrier sur les terres de ton père.

Elle s’affaira à refermer son étui à guitare sans jamais m’adresser le moindre regard pendant que je lui parlais, mais je crus lire dans ses yeux une grande tristesse. Elle tendit la main et dit au revoir au chat d’une caresse, puis se tourna vers moi.

─ Il y a chez toi un énorme réservoir de colère accumulée, Dave. Je crois que je te plains.”
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…ce qui est légal n'a pas grand chose à voir avec une conduite vertueuse.
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