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Fin d'une grande trilogie enfin publiée en France. Merci, encore, au éditions Au diable vauvert d'avoir ainsi mis à notre disposition Xenogenesis d'Octavia E. Butler, une oeuvre majeure. Et maintenant, l'avertissement habituel : si vous n'avez pas lu L'Aube et L'Initiation, les premiers tomes de cette série, allez à la rigueur lire la conclusion et découvrir que j'ai aimé Imago, mais ne lisez pas cette critique. D'abord, vous risquez de ne pas y comprendre grand-chose et en plus, vous allez peut-être gâcher votre futur possible plaisir de lecture en vous privant de la découverte d'informations grappillées dans les premiers volumes. Si vous êtes à jour, je vous attends un peu plus bas.

Comme nous l'avons vu dans les premières lignes consacrées à ce roman, Octavie E. Butler ne perd pas de temps. Elle plonge directement son lecteurice dans l'essentiel du texte : la métamorphose, qui sera le centre du roman. « J'entamai ma première métamorphose si discrètement que personne ne la remarqua. » On est de suite intrigué par le contenu. Pas totalement, car on a lu les tomes précédents, L'Aube et L'Initiation. Et l'on sait que les personnages, humains comme extraterrestres, subissent des mutations, volontaires ou non. Et que ces êtres qui ont sauvé une partie de l'humanité, quand ils grandissent, se métamorphosent au fur et à mesure de leur évolution, de leur passage à l'âge adulte.

Mais ici, comme chez Kafka, quelque chose ne va pas. Jodahs, dont nous suivons les pensées tout au long du récit, semble se diriger vers une forme qui lui était interdite. Car, il faut le rappeler, les métamorphoses sont encadrées, en quelque sorte, par les Ooloi. Ils gèrent tout le côté génétique avec une maîtrise exceptionnelle. Or, la métamorphose de Jodahs surprend. Nikanj, l'Ooloi de la famille, finit par comprendre que c'est dû à une négligence de sa part : il s'est relâché et son affection pour l'enfant qu'était Jodahs a créé ce rapprochement. Mais les conséquences peuvent être dramatiques. Les Oankali avaient déjà régulé les Humains afin d'éviter des mâles, au début, afin d'éviter qu'ils ne reproduisent le Conflit, cette tendance qui a conduit l'humanité à sa perte. Ils font la même chose pour les Ooloi : ces êtres sont extrêmement puissants, puisqu'ils peuvent jouer avec les gênes. Ils sont la mémoire des espèces rencontrées, car ils stockent dans une poche interne spéciale des échantillons de chaque plante, animal croisés. Ils peuvent également soigner, mais aussi blesser, voire tuer. On ne peut donc les laisser se promener seuls sans être absolument certains qu'ils sont stables et maîtres de leur corps et de leur pensée. Or, Jodahs va être le premier Ooloi façonné. S'il veut vivre librement, il va lui falloir convaincre tout le monde de son innocuité.

À la différence des deux romans précédents où l'autrice utilisait le pronom « elle » ou « il » pour les personnages centraux, dans Imago, elle a choisi le pronom « je ». Nous, lecteurices, sommes Jodahs. Nous ne découvrons le monde qu'à travers ses sens ; nous ne comprenons les autres qu'à travers ses pensées, ses sentiments. Et donc, nous sommes confrontés de l'intérieur à ses interrogations, ses inquiétudes. Ne serait-ce que son choix de sexe. Il (car il se mâle au début, mais je devrais dire « iel » car cela correspond mieux à ce flou quand au genre qui caractérise Jodahs), iel évolue selon les besoins de ceux qui l'entourent. Iel veut plaire aux humains qu'il convoite et donc, s'adapte à leurs désirs. Afin de les conquérir plus facilement et parce qu'il en ressent la nécessité.

Cependant, un point m'a gêné : les humains rencontrés ne semblent pas choisis pour leurs qualités, mais pour le simple fait qu'ils sont humains et que les Oankali en ont besoin. Un peu comme des animaux de compagnie, certes aimés, chéris, mais interchangeables. Quand Aaor, l'adelphe de Jodahs, en manque de compagnie humaine sent la présence d'individus près de lui, il n'hésite pas une seconde, ne cherche pas à les examiner. Il fonce et les prend sous sa coupe. Toutes ces relations entre Humains et Oankali sont assez éloignées de notre idée de l'amour. C'est davantage une question de besoin épaulé par des substances chimiques sécrétées par les Ooloi, qui leur permettent de se rendre attirants pour les hommes et les femmes désirés. Même si, parfois, l'autrice explique que cette « drogue » libère en fait les individus de leurs blocages, les désinhibent, cela ressemble quand même trop à des viols. Dérangeant, je le disais. Et vivifiant, car cela interroge fortement sur les relations entre personnes, dont certaines avec ascendant sur les autres. La force de cette autrice qui appuie là où ça gratte et nous oblige à nous interroger.

Imago achève en beauté la trilogie. Ce roman, le plus court des trois, se montre pourtant d'une grande densité dans les questions et les réponses qu'il apporte. Et tout cela dans un récit qui ne connaît pratiquement aucun temps mort et immerge ses lecteurices du début à la fin dans une quête identitaire passionnante. Lire Xenogenesis est une expérience déstabilisante et nécessaire.


Lien : https://lenocherdeslivres.wo..
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J'aime énormément l'écriture d'Octavia Butler ainsi que la richesse de son imagination. J'avais hâte de lire la conclusion de cette fascinante histoire. J'ai donc été un peu surprise/déçue de refermer ce troisième tome avec le sentiment d'être passée à côté.

Il m'arrive de décrocher quand je dois interrompre ma lecture plusieurs jours (j'ai été souffrante). Mais je dois avouer que j'ai toujours eu un peu de mal à visualiser les personnages qui ne sont pas humains (surtout les Oolois). Cela s'est avéré impossible pour Jodahs figure centrale du roman.

L'histoire se concentre sur ses transformations, ses besoins et son obsession de trouver deux humains pour s'accoupler. J'ai de loin préféré celle d'Akin dans le tome précédent.

En conclusion, lecture mitigée mais je lirai probablement d'autres livres de l'auteure comme "Liens de sang".





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En 1989, Octavia Butler met un point final à sa trilogie Xenogenesis avec son ultime volume : Imago. Après L'Aube et L'Initiation, l'autrice américaine replonge dans son étrange univers où le premier contact tourne au jeu de domination entre Humains et Oankalis.
Dans le précédent volume, nous avions pu suivre Akin, un hybride des deux races, et ainsi poser notre regard sur ce qu'il restait des derniers humains refusant le troc génétique proposé par les extra-terrestres.
Ces opposants, loin d'être aussi mauvais qu'on aurait pu le croire de prime abord, arrivent finalement à faire valoir leur point de vue en passant suffisamment de temps avec Akin qui se retrouve lui-même à plaider leur cause en faveur d'une nouvelle société humaine capable de se reproduire et de se gouverner. Mais pour la Terre, c'est déjà trop tard et c'est sur Mars que la nouvelle humanité tentera sa chance.
Quelques années plus tard, Octavia Butler imagine une dernière aventure dans les coins les plus reculés de notre planète en sursis…

Après Lilith et Akin, nous changeons encore de point de vue avec l'arrivée de Jodahs qui fait lui aussi partie de la grande famille déjà présente dans les volumes précédents mais qui a pourtant une particularité bien à lui qui le rend unique.
En effet, les enfants hybrides nés d'humains subissent une métamorphose en deux étapes pour arriver à l'âge adulte et où leurs corps changent parfois radicalement. Jodahs est à l'aube de ce bouleversement mais il prend vite conscience qu'il ne sera ni mâle ni femelle… il sera Ooloi !
L'Ooloi, comme nous le savons maintenant depuis les débuts de la saga Xenogenesis, sont un troisième sexe dans la race Oankali qui joue un rôle clé et extrêmement particulier car ce sont eux qui servent de trait d'union pour les « trouples » formés par les géniteurs de cette étrange race extra-terrestre. Ce sont également eux qui manipulent le mieux les gènes et remanient les corps à leur portée. Un Ooloi n'est donc pas un Oankali comme les autres. Et c'est justement la toute première fois qu'un hybride né d'humain comme Jodahs se destine à devenir Ooloi !
Le risque semble énorme tant les pulsions humaines et la Contradiction qui les a anéanti tantôt pourraient causer d'énormes dommages à tout ce que les Oankalis ont construit jusque maintenant. C'est pour cette raison qu'on pense d'abord envoyer Jodahs en orbite dans le vaisseau-mère vivant des extra-terrestres mais sa famille refuse et choisit l'exil dans les profondeurs de la jungle terrienne.
Comment Jodahs va-t-il pouvoir devenir adulte et contrôler ses nouvelles capacités hors du commun dans de telles circonstances ?
Survie en milieu hostile au programme de ce dernier chapitre de la trilogie Xenogenesis mais aussi, et surtout, une vraie immersion dans la tête d'u personnage complètement étranger au genre humain qui regarde le monde d'une façon radicalement différente. Jodahs goûte et transforme ce qu'il touche, regardant ce qu'il reste des opposants désormais acculés dans les coins les plus reculés de la planète pour survivre selon leurs voeux.

Avant tout, et davantage encore que les deux précédents, Imago est un roman sur la transformation physique et la modification corporel.
C'est un passage à l'âge adulte unique en son genre que présente Octavia Butler, trifouillant la chair de ses extraterrestres plus répugnants et attirants que jamais. On sent encore parfaitement toute l'ambivalence qui peut habiter les êtres humains qui les côtoient, d'un côté terrifié par ces tentacules grouillants et cette tendance tenace du tactile qui les habite, de l'autre fasciné par le discours profondément intelligent et bienveillant qui en émane. Nous suivrons ici les transformations de Jodahs avec une grande minutie, presque paralysé d'effroi et de curiosité, surtout lorsqu'il exprime ses nécessités de besoins physiques avec les humains, ces étranges créatures si délicieusement addictives.
On retrouve de nouveau l'originalité dans la description du mode de vie et des règles qui régissent l'espèce Oankali, ainsi que l'imagination formidable de l'américaine pour en faire une race à part avec ses coutumes et ses familles qui semblent s'étendre à l'infinie et où l'inceste n'existe pas.
La frontière du dérangeant est vite franchi à nouveau et plonge dans les derniers niveaux de l'ambiguïté au fur et à mesure que Jodahs découvre ses capacités nouvelles…et qu'il se trouve de nouveaux partenaires humains.

Pour ce dernier volet, Octavia Butler pousse jusqu'au bout le malaise qui enveloppe le lecteur depuis le tout début.
Véritable jonglage amoral autour du concept de domination, la trilogie Xenogenesis est à la fois effroyable et brillante dès lors qu'il s'agit de montrer l'emprise et la cohabitation des races.
Ce qui dérange profondément à la lecture d'Imago, c'est qu'on observe de l'intérieur cette avidité impossible à réfréner pour le contact humain et la relation physique, mais que ceux-ci ne sont jamais clairs.
En effet, les Oolois (et donc Jodahs) modifient les réactions/perceptions de leurs partenaires par des phéromones et autres substances biochimiques douteuses.
Dès lors, difficile de croire que les réactions humaines et leurs envies soudaines de s'accoupler avec des êtres aussi répugnants physiquement soit tout à fait naturelles. On pourrait rapidement crier à l'horreur… mais c'est sans compter sur la bienveillance de tous les instants des Oankalis qui, non content d'avoir sauver la race humaine, se prennent à vouloir la perfectionner, soignent les malades et les difformes, donnent du plaisir à volonté autour d'eux et prônent un pacifisme total.
Les extra-terrestres ne sont pas là pour détruire la civilisation terrienne mais pour la rendre meilleure.
Et si vous n'êtes pas d'accord, le choix est simple : l'exil ou la stérilité.
Si l'on peut logiquement être déçu que ce dernier volume ne nous emmène pas sur Mars et qu'il stagne sur une planète Terre régénérée comme dans le volume précédent, on note qu'Octavia Butler pousse encore plus loin son questionnement sur l'assimilation. Où s'arrête la bienveillance du colon et où commence l'invasion et l'esclavage qui ne dit pas son nom ?
L'envoi vers Mars des humains qui ne veulent pas adhérer à ce nouveau mode de pensée fait écho au renvoi des esclaves noirs américains vers le Liberia, acheté en son temps de façon bienveillante par l'American Colonization Society, pour permettre aux « pauvres esclaves noirs » de rejoindre leur terre natale… Bienveillance quand tu nous tiens !
Le malaise se poursuit donc jusqu'à la dernière page et jamais le lecteur ne sera certain des véritables sentiments des humains qui passent beaucoup trop rapidement de la haine à la camaraderie… voire plus si affinités !
Octavia Butler démontre une nouvelle fois que les grands principes s'écroulent dans le brouillard du réel et que les rapports entre dominants et dominés sont bien plus inextricables qu'on ne voudrait le croire…

Malgré la redites, ce dernier volume de la trilogie Xenogenesis est un bonheur de réflexions philosophiques et de body-horror light, le tout dans une atmosphère étrange qui file une furieuse envie de s'enfuir en quatrième vitesse au lecteur. Assez loin en tout cas de ces bienveillants mais particulièrement envahissants extra-terrestres atteints d'un sacré syndrome du sauveur.
Une conclusion qui laisse des traces.
Lien : https://justaword.fr/imago-d..
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En une mobilisation quasi-totale des motifs de la science-fiction, une formidable fresque politique et philosophique du métissage et de l'impérialisme « bienveillant » – et de ce que s'y joue de nos préjugés.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2024/05/06/note-de-lecture-la-trilogie-xenogenesis-octavia-butler/

Pas de note de lecture proprement dite pour « L'Aube », « L'Initiation » et « Imago », les trois ouvrages composant ensemble la trilogie Xenogenesis d'Octavia Butler, publiés en 1987-1989 et traduits chez Au Diable Vauvert par Jessica Shapiro en 2022-2024 (comblant ainsi enfin un manque essentiel dans l'exposition de l'oeuvre de la grande autrice afro-américaine dans notre pays) : ils font en effet l'objet d'un petit article de ma part dans le Monde des Livres daté du vendredi 3 mai 2024 (à lire ici). Comme j'en ai pris l'habitude en pareil cas, ce billet de blog est donc davantage à prendre comme une sorte de note de bas de page de l'article lui-même (et l'occasion de quelques citations des textes, bien sûr).

⏰ Il aura fallu quasiment trente-cinq ans pour que cette série pourtant fondamentale d'une autrice qui ne l'est pas moins soit enfin traduite en français. Saluons donc ici le travail opiniâtre des éditions Au Diable Vauvert qui, depuis qu'elles s'affairent autour de l'oeuvre d'Octavia Butler, avec la publication en 2003 de « La parabole du semeur » (1993), sont bien en voie de mettre fin à des décennies d'un ahurissant mélange de silence et de n'importe quoi éditorial (ouvrages parus dans un joyeux désordre, traductions incomplètes ou fautives, omissions de certains tomes au sein de cycles en plusieurs volumes, etc.) qui avait longtemps caractérisé leurs prédécesseurs.

🧑‍🧑‍🧒‍🧒 Cette trilogie est fondamentale pour saisir la puissance heuristique du métissage et de l'hybridation, au sens génétique cher à la science-fiction d'abord, mais encore davantage au sens philosophique et historique qui fait pousser de si nets cris d'orfraie à tous les tenants des « chocs des civilisations » et autres lectures à sens unique de l'Histoire – et de ce qu'on peut en déduire. Cet aspect étant celui que je souligne le plus dans l'article du Monde des Livres sus-cité, je ne l'évoquerai pas davantage ici.

🫥 Octavia Butler est sans aucun doute l'une des inspiratrices voire des « fondatrices » (si le mot avait vraiment un sens en la matière) de ce mouvement littéraire et extra-littéraire que l'on appelle aujourd'hui l'afrofuturisme. Toutefois, si des textes tels que « Liens de sang » (1979) ou « Novice » (2005), ou naturellement ceux des deux « Paraboles », celle du « Semeur » (1993) et celle des « Talents » (1998), reflètent très directement le pas de côté afro-américain qui peut être introduit pour notre plus grand bénéfice collectif dans notre compréhension de ce qui se joue aujourd'hui entre passé et futur, la trilogie « Xenogenesis » – comme, d'une autre manière, celle du « Patternist » (1976-1984) qui la précédait en écriture – est plus indirecte dans ce domaine, projetant la métaphore de la domination esclavagiste à un haut degré philosophique d'universalité englobante, et d'une puissance à mon sens accrue, si elle est sans doute moins immédiatement spectaculaire.

🇺🇳 Si la trilogie « Xenogenesis » mobilise de manière intense les ressources de la psychologie humaine individuelle et collective (au long cours : l'étagement réalisé en la matière par les trois volumes est tout à fait spectaculaire), tout particulièrement lorsqu'elle est confrontée rationnellement comme irrationnellement à la notion même d'humanité, ainsi que celles de la philosophie (avec une étonnante touche spinoziste d'intellection de la nécessité qui se fait jour à plusieurs reprises dans l'évolution de la relation entre survivants humains et « envahisseurs-sauveteurs » oankali), c'est certainement dans son approche en profondeur de l'impérialisme bienveillant qu'elle exprime toute sa puissante saveur. On pourra ainsi la lire avec vif intérêt en parallèle et/ou en comparaison du cycle de l'Élévation de David Brin, du cycle de la Culture de Iain M. Banks et du cycle « Canopus dans Argo : Archives » de Doris Lessing, par exemple.

👽 La trilogie « Xenogenesis » est sans doute l'une des oeuvres de science-fiction qui mobilise de la manière la plus exhaustive l'ensemble ou presque des motifs « traditionnels » de la science-fiction pour composer – c'est bien de circonstance – un rarissime melting pot : space opera, post-apocalyptique, transmissions dynastiques, premier contact extra-terrestre, guerre entre communautés, exploration du système solaire,… Excusez du peu ! Elle illustre ainsi avec éclat – comme tant d'autres oeuvres majeures (songez ne serait-ce qu'au « Cycle du Nouveau Soleil » de Gene Wolfe , au « Orbitor » de Mircea Cǎrtǎrescu – et peut-être plus encore à son « Solénoïde » -, à l'« Abattoir 5 » de Kurt Vonnegut ou à l'ensemble du post-exotisme d'Antoine Volodine et de ses hétéronymes) la vanité fréquente des micro-classifications en genres, sous-genres et sous-sous-genres à l'intérieur du vaste ensemble des littératures de l'imaginaire (ce qui n'enlève rien, notons-le, aux précieuses qualités d'un ouvrage tel que le « Guide des genres et sous-genres de l'imaginaire » d'Apophis, un peu paradoxalement).
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Après L'Aube et L'Initiation, voici la fin de la trilogie Xenogenis d'Octavia E.Butler. Comme pour l'épisode précédent, si vous n'avez pas encore lu les deux premiers tomes, faites immédiatement demi-tour et revenez une fois que vous aurez achevé votre lecture.


Ça y est ? Vous êtes à jour ? Bien. Imago se situe environ cinquante ans après la fin de L'Initiation et comme dans le précédent livre, nous suivons ici la destinée d'un autre enfant de Lilith, Jodahs, le premier ooloï façonné, c'est-à-dire le premier hybride humain/extra-terrestre du troisième genre propre aux êtres venus d'ailleurs. Avant lui, ce qu'il reste de l'Humanité, rendue stérile pour éliminer ses tendances « hiérarchiques » autodestructrices n'a que deux choix : s'hybrider avec les extra-terrestres et fonder de nouvelles familles ou s'exiler sur Mars dans une colonie strictement humaine – et fertile, mais sur une planète en cours de terraformation. Pourtant une fois de plus, Octavia E. Butler nous raconte une intrigue au ras du sol, quelque part dans les tropiques et à l'échelle de quelques individus. Et qui plus est, elle nous le raconte uniquement du point de vue de Jodahs. Celui-ci quitte l'enfance et apprend à devenir adulte en se débattant, comme son frère Akin avant lui, entre ses parts humaines et extra-terrestres, mais également avec son rôle d'ooloï. Troisième genre, ni mâle ni femelle, mais également le syncrétisme des deux, l'ooloï est à la fois le guérisseur, l'ingénieur en chef des modifications des membres de la famille et le catalyseur du foyer. Mémoire génétique vivante à la fois du passé des extra-terrestres et de celui de la planète Terre où il est né, mais également adolescent tiraillé par les pulsions de la puberté, l'envie d'indépendance et un besoin d'intégration forcené, Jodahs va être l'agent de liaison idéal. Il va réparer les failles au sein de ses propres familles (celle dont il est issu et celle qu'il va construire) et pour offrir une nouvelle voie d'intégration aux façonnés et à la population terrienne dans son ensemble.
Conclusion de la trilogie, Imago est le plus court des trois romans. Et pourtant c'est également l'un des plus denses et une fin amplement satisfaisante à cette exploration. C'est celui qui a le protagoniste le plus éloigné de l'humanité telle que nous la connaissons, mais également par rapport à son frère Akin, celui dont les tourments et les solutions sont les plus « humaines ». Et une fois de plus, Octavia E. Butler va surprendre par son invention et la façon dont elle explique les capacités particulières des ooloïs… Si vous souhaitez découvrir Octavia E. Butler et ses thématiques, tout en vous plongeant dans une pure histoire de science-fiction à l'ancienne, cette saga, Xenogenesis, est l'endroit parfait pour commencer.
Lien : https://www.outrelivres.fr/i..
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𝙃𝙖𝙙 𝙄 𝙚𝙫𝙚𝙧 𝙬𝙖𝙣𝙩𝙚𝙙 𝙩𝙤 𝙗𝙚 𝙢𝙖𝙡𝙚? 𝙄 𝙟𝙪𝙨𝙩 𝙖𝙨𝙨𝙪𝙢𝙚𝙙 𝙄 𝙬𝙖𝙨 𝙢𝙖𝙡𝙚, 𝙖𝙣𝙙 𝙬𝙤𝙪𝙡𝙙 𝙝𝙖𝙫𝙚 𝙣𝙤 𝙘𝙝𝙤𝙞𝙘𝙚 𝙞𝙣 𝙩𝙝𝙚 𝙢𝙖𝙩𝙩𝙚𝙧.

J'ai encore pris énormément de plaisir à lire ce tome même si je suis un peu triste de quitter cet univers.

Dans ce tome, nous découvrons la naissance du premier hybride humain-Oankali ooloi, c'est à dire le premier à n'être ni mâle, ni femelle. Je m'attendais donc à ce que la thématique du genre soit d'autant plus développée dans ce tome et ça n'a finalement pas tant été le cas, en tout cas pas autant que ce que j'imaginais (un peu déçu par ça en vrai).

Il est vrai que les ooloi sont communément acceptés, et même célébrés, dans la culture Oankali, mais Jodahs étant le premier hybride ooloi, sa naissance éveille forcément une certaine méfiance puisqu'on a peur qu'il soit « imparfait » et surtout instable (notamment à cause de sa part d'humanité).

Découvrir la manière dont Jodahs va appréhender ces différents changements est passionnante : d'abord les changements internes quand iel comprend qu'iel n'est pas mâle malgré ce qu'iel a pensé les 29 premières années de sa vie, puis les changements physiques lors de ses deux métamorphoses. On a d'ailleurs une partie intéressante où on voit l'expression de son genre (mais pas seulement) fluctuer en fonction de qui l'entoure et de leurs « désirs ».

Mais pour moi, on a un vrai virement dans l'histoire lorsque Jodahs rencontre Tomás et Jesusa qui vont immédiatement appeler tout son être. A la fois j'ai trouvé leur relation très touchante mais elle m'a aussi gêné pour une raison simple. Pour la première fois, j'ai eu l'impression dans ce tome que les Oankalis pouvaient s'attacher à n'importe quel humain, que l'individualité des uns et des autres n'a finalement aucune importance dans le « couple » Oankali (à ce stade on est plutôt sur du trouple ou du quintouple mais passons).

Mis à part ça, on aborde encore pas mal de thématiques très intéressantes dans ce tome, comme la solitude et le désespoir (très bien exploités dans ce tome), ou la fragilité de l'ego masculin.

Cette trilogie, qui encore une fois ne pourra pas plaire à tout le monde tant elle est particulière, aura vraiment été une superbe découverte. L'écriture est très efficace et les thématiques passionnantes. J'ai vraiment du mal à imaginer comment cette série a pu être perçue à l'époque de sa sortie tant Octavia Butler était en avance sur son temps dans ses idées. Hâte de découvrir le reste de sa bibliographie !
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Et voilà, troisième et dernier tome de Xenogenesis terminé. Je craignais d'être déçue tant Lilith, à laquelle je m'étais attachée, passe au second plan. Mais non. Johdas, premier oankali "façonné" s'avère fascinant, touchant dans son effort démesuré pour concilier les deux cultures et trouver et défendre sa propre identité. Pionnier, premier, de sa réussite dépend le devenir de tous ceux qui vont le suivre.
J'ai été un peu déçue par la conclusion du livre. Parce qu'on reste en permanence en compagnie de Johdas, parce que l'on traverse toute l'histoire avec son regard et son ressenti, les humains abordés sont réduits à leur plus simple expression. Dénués de libre arbitre, séduits par des phéromones, et hop, le tour est joué.
Sans doute est-ce volontaire de la part de l'auteur. Nous faire toucher du doigt ce rapport de domination où le dominant se présente en sauveur et séducteur. Plus lisible, la question aussi du métissage, de l'appartenance à deux cultures, et de sa propre identité à s'approprier.
Bref, un récit qui, derrière son aspect de science-fiction pose des questions morales, philosophiques et éthiques sans autre réponse que celle que chacun peut y apporter, dans le secret de son âme et conscience.
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J'en aurai voulu plus mais c'est une conclusion qui me satisfait pour une série qui m'a portée sans s'essouffler.

J'aurai vraiment été challengée avec ces trois volumes et plus particulièrement les deux derniers qui développent plus frontalement des sujets tabous et dérangeants. Je n'ai pas toujours été dans mes petits souliers et c'était pour mon plus grand plaisir puisque Octavia E. Butler a le talent de faire passer les questionnement difficiles avec souplesse et doigté.

J'ai conscience que c'est une série qui divise et divisera par certaines de ses thématiques mais je recommande chaudement.

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