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3,67

sur 571 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Voici l'un des fleurons du mouvement littéraire plutôt francophone d'après guerre qu'on nomme (un peu pompeusement) le Nouveau Roman. Indépendamment de toute notion d'appartenance à telle ou telle école romanesque, à son contexte de publication, toutes choses propres à nous emmener trop loin sur des chemins de traverse, je vais m'efforcer d'émettre un avis actuel et ciblé pour le lecteur d'aujourd'hui désireux de découvrir cette oeuvre.

La Modification est un petit roman que je qualifierais de lent, peu captivant mais extrêmement bien construit. Lent et peu captivant car il est presque une allégorie de la lenteur du temps qui passe et du travail de sape que ce temps peut créer.

Un voyage en train, tel qu'on peut se l'imaginer dans l'Europe des années 1950, déroulant sa lenteur et sa pénibilité. Un homme entre deux âges, vous en l'occurrence (c'est ici que siège LA grande trouvaille formelle de Michel Butor qui ne passe pas inaperçue), dans une situation bancale entre une épouse et une maîtresse, entre Paris et Rome, entre la raison grise et le grain de folie coloré, vous en qui va s'opérer une modification au cours de ce long et fastidieux voyage en train (je vous laisse découvrir laquelle).

C'est là toute la prouesse de Michel Butor, faire le portrait de l'oeuvre du temps, nécessairement lent et par touches. L'action, inexistante puisque vous êtes assis dans un train à compartiment ancienne école, est remplacée avec maestria par un étonnant voyage dans le temps : présent, futur, passé(s). Les amateurs de Mario Vargas Llosa apprécieront l'illustre instigateur du roman à plusieurs temps.

En résumé, j'admire donc la technique formelle de ce roman, réglée comme un aiguillage SNCF mais je ne peux toutefois pas dire que j'ai particulièrement palpité en lisant cette modification, mais, bien sûr, ce n'est là que mon avis auquel on pourrait apporter de nombreuses modifications, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Je me doute qu'au moment de sa publication, en 1957, le fait d'avoir un narrateur s'exprimant à la deuxième personne du singulier, qui raconte par cet intermédiaire inventif la vie et les pensées d'un homme qui prend le train à Paris pour se rendre à Rome afin d'y retrouver sa maîtresse, c'était quelque chose.

Mais à la lecture de la modification cette semaine, je persiste et signe : je ne suis vraiment pas une adepte du Nouveau Roman. Les tentatives de déconstructions narratives romanesques sont bien là, intéressantes, mais le style qui les met en scène m'ennuie au plus haut point, autant que la vie de cet homme qui prend conscience de son existence, justement durant son trajet en train, interminable. Il n'y a rien qui dépasse, qui ressort, qui interpelle... à mon grand regret. Tant pis.
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« La modification » offre au lecteur une aventure littéraire pour le moins particulière. Une histoire nous est contée, celle de Léon Delmont, 45 ans, qui voyage en train afin de rejoindre sa jeune maîtresse Cécile, en Italie. Marié à Henriette et père de quatre enfants, Léon vit à Paris. L’objectif de son voyage est d’annoncer à Cécile qu’il va enfin quitter son épouse et convaincre ensuite la jeune femme de venir vivre avec lui à Paris. Parti avec des certitudes, Léon va pourtant subir une modification lors de ce cheminement physique et psychologique.

Ce qui frappe évidemment dès la première ligne est le style narratif utilisé par Michel Butor : l’auteur utilise le « vous » plutôt qu’un « il » impersonnel et implique de ce fait le lecteur dans l’histoire de Léon qui devient la sienne. Les pensées, les réflexions et les décisions de Léon deviennent celles du lecteur. Au gré de son cheminement intellectuel, nous partageons avec le personnage toute une vision de la vie d’un homme : la naissance de l’amour, l’usure du quotidien, les doutes, l’espoir (illusoire ?) d’une nouvelle vie qui sera meilleure. Léon navigue dans le temps, entre ses souvenirs passés, le présent et les espoirs futurs. Avec lui, en se fondant en lui, nous réalisons une introspection qui bouleverse nos décisions premières.
Point d’action dans cette histoire qui se passe uniquement dans le compartiment du train - ce n'est pas le but - mais qui ravira surtout les adeptes du courant du Nouveau Roman.
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Il me semble important de découvrir avant toute chose que je ne suis pas un grand amateur du Nouveau Roman, qui me semble toujours aussi fade et aussi vain que ces adolescents et ces stars actuelles qui cherchent avant toute chose l'originalité, qui sautent sur tous les sentiers non encore battus juste pour le plaisir de ne pas être comme les autres, sans savoir où cela va les mener.
Peu des propositions, des "nouveautés" du Nouveau Roman m'ont séduit jusqu'aujourd'hui, mais j'avoue que l'idée de la Modification m'avait quelque peu rendu curieux, c'est pourquoi je l'ai emprunté en pensant le lire en un soir - c'est un petit ouvrage - pour m'initier à Michel Butor. Je mis presque une semaine, tant l'enthousiasme me manquait au fil de la lecture. Assez parlé de moi, entrons dans le roman.

Qu'est ce qui gêne dans le style de Butor ? Si l'idée originale est plutôt plaisante - le narrateur raconte le roman à la seconde personne du pluriel, un "vous" qui donne plus que jamais l'impression d'être le héros du roman, certaines caractéristiques du discours de l'auteur vont contre ce parti pris et gênent la lecture : l'esthétique très nouveau roman, avec une intrigue totalement décousue - l'action est censée se dérouler en vingt heures dans un train mais se nourrit de souvenirs et prospectives diverses -, des phrases de vingt kilomètres de long sur lesquelles Proust se serait essoufflé, gonflée de descriptions sans fin que seuls des habitués de Paris et de Rome pourront apprécier, et un personnage qui échappe tout à fait au "vous" par lequel on s'y réfère, puisqu'il a un nom, un âge, que ses sensations et ses pensées ne sauraient adhérer à la plupart des lecteurs et qu'il semble être plus un étranger peu recommandable, peu appréciable, qu'autre chose. Dieu que cette phrase était longue elle aussi.

Cette densité syntaxique et culturelle, aussi lourde à digérer que l'intrigue condensée dans ces vingt heures de trains pluvieuses est mise "au service" d'une histoire d'adultère qui ne choque personne, n'engage personne et finit par se désagréger sans qu'aucun des personnages n'ait réellement eu un rôle à jouer, n'ait réellement agi. La lourdeur du personnage, ses sensations émoussées par l'âge, c'est aussi pour moi la lourdeur de ce roman, de ce style que j'ai peu apprécié alors que j'ai longtemps goûté celui de Proust et me suis rompu à celui de Duras, et qui ne donne pas envie d'essayer l'Emploi du Temps, autre ouvrage clef de l'oeuvre de Butor. Pour finir sur une meilleure note, il me faut avouer que, tout de même, même si cela m'a paru ennuyant, faire un roman sur le voyage d'un homme seul dans un train et axer toute l'action de la pièce sur ses pensées et sa réflexion au propos de son adultère, faire de cette histoire l'un des fers de lance du Nouveau Roman, cela force un certain respect.
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N°1866– Avril 2024.

La modification – Michel Butor – Les Éditions de Minuit.
Prix Renaudot1957.

Je poursuis ma redécouverte du « Nouveau Roman ».
Même si vous n'avez connu que le TGV, imaginez ce qu'étaient les trains dans les années 50, lents, bercés par le claquement régulier et entêtant des boggies, rythmés par les sonneries plaintives des différents passages à niveaux.... Mettez-vous à la place de cet homme, la cinquantaine, parisien, père de famille qui prend le train pour Rome comme il le fait souvent. Vous n'aurez pas de mal puisqu'il s'agit de vous comme l'a décidé l'auteur qui vous fait, à l'occasion, endosser l'identité de Léon Delmont. C'est le parti pris de ce roman. Officiellement c'est un voyage professionnel mais en réalité vous allez rejoindre Cécile, votre maîtresse romaine qui ne s'y attend pas et lui annoncer que vous allez vivre ensemble à Paris, que vous avez tout organisé pour elle, que vous allez quitter votre femme, votre vie bourgeoise et déprimante. Et puis son image, son corps, sa jeunesse se confondent avec Rome, cette ville éternelle que vous aimez tant et Paris est aussi la cité de l'amour. Ce sera pour vous une nouvelle jeunesse ! Démon de midi, peur de vieillir... Peut-être ?
Le voyage s'étire le long des gares et vous décrivez mollement les passagers de ce compartiment et vous imaginez les retrouvailles romaines tout en explorant vos souvenirs, votre rencontre avec Cécile, vos amours, vos projets même si les images de votre mariage avec Henriette, votre femme, reviennent elles aussi. le train est depuis son invention un lieu privilégié dans la vie de chacun et donc dans la vôtre. Ici le long trajet vous invite à la rencontre d'inconnus à qui votre imagination ou votre ennui vous invitent à prêter un morceau de vie mais surtout vous force, malgré vous, à réfléchir sur votre vie passée, sur cette démarche que vous voulez définitive en vous posant des questions intimes. Vous êtes donc quelqu'un d'un peu perdu qui s'interroge, comme obnubilé par cet avertissement en italien qu'on voyait à l'époque dans les compartiments « e pericoloso sporgersi »(il est dangereux de se pencher au dehors) et c'est pourtant ce que vous vous apprêtez à faire. Pourtant la logique, la peur de l'avenir ou le découragement , le renoncement s'imposent avec la perte de vos illusions… En outre, je ne suis pas sûr que le livre que vous allez écrire pour compenser ce vide servira à quelque chose.
C'est un roman lent, sans action avec, vers la fin des phrases démesurées qui traduisent peut-être votre désarroi mais ne facilitent pas la lecture. J'ai assez voyagé en train dans ma jeunesse, y compris en 3° classe, pour apprécier le décor. Sur le principe de transformer le lecteur en personnage principal, je ne suis pas contre, même si cela m'a toujours paru artificiel . Certes l'univers du roman s'inspire de toute façon de la réalité et nous sommes, un jour ou l'autre, susceptibles de connaître de telles circonstances. Alors pourquoi pas puisque c'est aussi une tentative d'évolution de cet art. J'avoue que, dans ma scolarité déjà bien lointaine, j'ai été mal sensibilisé à ce « nouveau roman » par un professeur trop classique et donc imperméable à la nouveauté. Bien des années après je relis ces textes mais je dois dire que je n'en suis pas davantage convaincu, non par l'analyse des sentiments qui me paraît pertinente mais par le parti-pris d'écriture. Je suis peut-être passé à côté de quelque chose ?


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Roman que j'ai trouvé peu agréable puisque j'ai du le lire dans le cadre du cours de français lorsque j'étais au lycée. J'avais peu de clés pour comprendre et peu d'appétence pour ce type d'écriture.
Ceci dit, c'est évidemment un texte remarquable, il y a peu de textes qui décrivent aussi bien un monologue intérieur qui va amener à prendre une décision radicale.
L'homme contemporain a peu d'occasion de se retrouver face à lui même et, plus aujourd'hui qu'il y a 50 ans, a les moyens d'éviter de se confronter à soi. C'est une confrontation remarquable traitée avec brio. J'aimerais lire la même histoire, orchestrée autour d'une retraite ou d'un moment d"introspection guidée. C'est peut être une démarche à réinventer. Que changerions nous? Changerions nous?
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Roman étonnant, époustouflant par son système de narration, faisant partie du mouvement littéraire du Nouveau Roman : le lecteur suit les pensées d'un homme, qui fait le trajet en train de Paris à Rome afin d'y rejoindre son amante. le lecteur suit donc ses nombreuses réflexions, ses souvenirs, ses doutes...
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Tout commence d'une manière on ne peut plus commune : Léon Delmont, représentant d'une entreprise italienne de machines à écrire, Scabelli, entreprend, par le train Paris-Rome, un voyage vers la ville éternelle où il compte rencontrer Cécile, son amante, connue à Rome. Elle l'émerveille en lui faisant découvrir les arcanes de cette prestigieuse Cité .Il compte quitter Henriette, épouse légitime, dont la vie commune encore partagée ne lui inspire plus guère qu'ennui et lassitude de moins en moins dissimulée.
La trame serait on ne peut plus commune si des traits profondément originaux de ce roman ne venaient le différencier aux yeux du lecteur : il est écrit à la deuxième personne du pluriel, ce qui imprime aux différentes descriptions une distance constante vis-à-vis du roman. Ce mode de récit pourrait provoquer une identification aux personnages décrits, à leurs aspirations, à l'évolution de leurs sentiments respectifs nourris les uns envers les autres .Il n'en est rien , et nous sommes les témoins, grâce à ce subterfuge , des descriptions les plus détaillées, les plus fouillées des pensées constituant en fait l'ensemble de la vie intérieure des participants à cette intrigue .C'est parfois le ton d'une plaidoirie d'avocat qui est adopté : « Ce voyage devrait être une libération, un rajeunissement, un grand nettoyage du corps et de votre tête ;ne devriez-vous pas en ressentir déjà l'exaltation ? Quelle est cette lassitude qui vous tient, vous diriez presque ce malaise ? »
A d'autres moments du récit, c'est l'anticipation de la situation des protagonistes qui est souvent utilisée, comme pour permettre au lecteur une meilleure intériorisation de la structure de leurs réflexions les plus essentielles : « Maintenant, Cécile allait venir à Paris et vous demeureriez ensemble, de cela vous étiez, vous êtes bien certain, (…) mais de la triomphante joie de Cécile qui vous avait tant taquiné sur votre bourgeoise hypocrisie. »
L'auteur prête également par l'intermédiaire de notre amant voyageur, une vie imaginaire à ses compagnons de compartiment, tous et toutes affublés d'un statut social, d'une vie et de projets dérivés de l'imaginaire de Léon Delmont.
Il est fait appel dans le roman aux divers paysages , monuments et quartiers des villes de Rome et de Paris , pour mettre à nu les raisons profondes de Léon et de Cécile de choisir comme théâtre définitif de leur passion la ville de Rome .L'histoire antique et la mythologie viennent à la rescousse pour alimenter les scrupules , les interrogations de Léon Delmont .Ces dernières l'emportent , il doute du bien-fondé de ce voyage , censé à l'origine représenter un seconde chance pour lui : « Il faudrait donc( ….) que vous puissiez jouir de l'apparence de ce bonheur qui, lui, vous échappe, goûter quand même à un fragment de cette vie que vous imaginiez si prochaine et qui s'éloigne de plus en plus dans l'illusoire et l'impossible. »
Est-ce vraiment un voyage qui est décrit là ? On peut y voir la tentative, parfaitement aboutie, de recenser et de hiérarchiser tous les flux de pensées qui composent la vie intérieure des individus. L'écriture du roman est élégante ; les phrases, par leur longueur, nous rendent complices des tourments et joies composant cette intrigue. Elles prennent leur temps, celui de la dissection, de la radiographie des passions humaines.

Lien : http://bretstephan.over-blog..
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Je ne connaissais pas Butor avant de lire ce roman. Ce dernier est plutôt pas mal, j'ai en effet passé un bon moment, même si le roman tire parfois un peu trop en longueur.
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Votre vie ennuyeuse avec Henriette vous asphyxie et vous décidez de quitter Paris. Vous montez dans un train pour rejoindre votre amante, Cécile qui réside à Rome. Vous souhaitez l'emmener avec vous à Paris pour pouvoir vivre votre amour librement. Peu à peu la modification s'opère en vous et autour de vous.

Voici comment on pourrait résumer facilement l'intrigue, simple et où comme toute bonne oeuvre du nouveau roman se reconnaît, les pensées autour de l'histoire sont plus importantes. Et c'est le cas, les digressions de Léon Delmont sur le déterminisme de sa propre vie dans la dernière partie du roman sont très intéressantes et apportent beaucoup.

Le lecteur est peu accompagné. Nous avons un début in media res qui nous plonge dans les pensées du narrateur, duquel nous ne recevrons que peu de descriptions et dont lesquelles, une fois données seront rebutantes (pour moi bien sûr). On retrouve un personnage bien bourgeois qui pense par exemple que son compagnon de compartiment est forcément plus heureux que lui car il est plus pauvre et qu'il a choisi son métier. Il se plaint plusieurs fois du fait qu'il ne voyage pas en première classe et que ça bouleverse ses habitudes… Il n'a que peu de force de caractère et ne voit pas la vérité en face (même si c'est le propos du roman !). C'est mon manque de sympathie pour ce personnage qui est cause de ma mauvaise lecture.

L'élément le plus évident et que l'on ne peut pas laisser de côté, c'est la narration à la seconde personne du pluriel. VOUS. C'est assez déstabilisant les premières pages mais on s'y fait très vite. En général, l'originalité et la liberté du style me plaisent beaucoup. Si j'en parle dans un second temps, c'est que le vouvoiement vous force à vous identifier au personnage et que si vous ne l'appréciez pas, comme dans mon cas, ça peut être assez violent et dans le cas contraire il s'agit d'un coup réussi.

Laissons maintenant Léon Delmont de côté pour nous intéresser au côté surréaliste du roman qui m'a beaucoup plu et même surprise car je ne m'y attendais pas du tout, ayant lu cette oeuvre dans un contexte scolaire, pour découvrir un peu plus le nouveau roman. Je m'imaginais un peu les deux courants aux antipodes. On a souvent les flâneries dans Paris et dans Rome, le hasard de leurs rencontres avec le passage du cinéma, le personnage de Cécile qui devient un symbole de Rome, le contrôleur de train qui devient Janus, le rêve, la lune, les illusions. Après m'être informée, j'ai appris que Michel BUTOR appréciait beaucoup le surréalisme et que ces premiers poèmes en étaient touchés. Je pense que je m'y pencherais dessus plus tard !
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