Rythmes

Qu'y-a-t-il de plus profondément humain que la poésie ?
Andrée CHEDID, au crépuscule de sa vie, sentant que la mort n'est plus si lointaine, nous fait partage de toute la puissance de son art et le déploie sans fioriture.
Esprit tout en éveil, qui sans cesse s'interroge, vibrant d'intelligence, ouvert à tous les vents, ouvert, tout simplement, au souffle de la poésie.
Âme majuscule ou, peut-être, juste, âme grandeur nature, telle qu'elle est en nous tous mais que nous négligeons souvent.
Pas Andrée CHEDID.
Portée par ses « Rythmes », lancée dans la course éperdue de la vie, justement parce qu'elle est une course perdue d'avance et d'autant plus précieuse. Car quel sens aurait la vie, sans la mort ?
Au long de ce chemin, quand il s'emplit de poésie, rien n'est anodin, pas une once d'insignifiance.
Telle une sculptrice, elle travaille la matière des mots pour exister, intensément, devant nous.
Car elle a le goût des mots. Les mots dans tout leur dénuement mais les mots dans toute leur gloire.
Tout sauf un être transparent, assurément. Un être humain dans toute son épaisseur, dans toutes ses dimensions, une Grande personne. Qui n'aura cependant jamais cessé de jouer. Avec les mots.
Pour dire l'âme. Pour penser la vie. Avec ce talent merveilleux d'extraire la vérité, par poignées, chaque jour, dans ces mots.
Jamais résignée, toujours combattante et vibrante, elle « braconne dans les gisements du coeur », elle s'émerveille devant les saisons, comme quand elle parle, joliment, de « l'élan des fleurs ».
Elle célèbre la vie, cet « intervalle convoité », cet « éphémère perpétué », que les générations suivantes prolongeront au-delà de notre temps (« D'autres et d'autres jeunesses / S'aventuraient déjà / En leurs corps flamboyants »).
C'est fou comme un si petit livre peut avoir d'épaisseur, de substance.
Poésie d'une grande liberté, ne s'adressant pas seulement à l'oreille, se voulant d'abord signifiante.
Une poésie pleine et entière par une femme pleine et entière, ne niant ni plaisirs, ni souffrances.
Pleine et entière. Prenant tout de la vie. Allant jusqu'à l'extra vie ou jusqu'à l'intra vie, je ne sais plus dire. Des mots qui enclenchent mes mots en liberté, sans peur et sans reproche, un peu comme chez Duras.
Une vie vibrante, une vie pensante, surtout pas traversée avec inattention, une vie qui interpelle, une vie captivante (« Ainsi nous captive / La Vie / Si Prodigieuse / Si Illusoire »), une vie qui ne laisse pas indifférent, une vie sacrée qui mérite d'être honorée, sentie dans toutes ses dimensions, de l'amour à la souffrance, de l'éphémère au temps qui passe, avec la conscience de la fin prochaine (« Sans me hâter / Je m'acclimate / A l'immanence / de la nuit »).
Dans tous les cas, la vie, ça ne s'esquive pas !
Bien sûr, ça fuit entre les doigts. Mais raison de plus pour s'y jeter, pour ne pas refuser l'obstacle, pour apprendre, s'éprendre, perdre, retrouver et pouvoir dire, tout à la fin : j'avais vécu !
Voilà la leçon d'Andrée CHEDID, voilà l'essence de ses mots. Celle que j'y ai trouvée en tout cas.
Le sens qui, peut-être, viendra, à mesure du ressentir. Littéralement l'intelligence du coeur.
La poésie, dérisoire mais immense. La poésie glorieuse.
Simplement.
Profondément.
Humaine.
(Merci à « Sabine59 » de m'avoir conseillé ce très beau recueil)

Dix milles façons de dire je t'aime rapportées dans un recueil de poésie des plus doux.
Un plume tendre et enivrante, qui puise sa source dans la beauté même.
C'est moderne ; le rythme de ces poèmes...Un son tendre et poignant, jouant sur les mots et les phrases, les sonorités et la ponctuation.
Dix mille battements de coeur par minute tant c'est émouvant.
Les rythmes de la vie, de l'amour et de la poésie... Intitulés "Rythmes"...Quoi de plus séduisant que la parfaite sobriété ?

Andrée Chedid est une femme de lettres et poétesse française d'origine syro-libanaise. Elle a reçu le Prix Goncourt de la nouvelle en 1979 pour le corps et le temps et le Prix Goncourt de la poésie en 2002. Rythmes est son dernier recueil de poèmes qu'elle a écrit à plus de 80 ans. Dans ce recueil, sa poésie est simple, limpide, assez solaire et très facile d'approche. Les thèmes sont à la fois plaisants et forts. C'est un recueil que je conseillerais au débutant en poésie.