Le flot sans cesse renouvelé des employés et des hommes d'affaires le contournait, comma la vague que divise un rocher.
La boutique était tenue par une très vieille femme qui arborait une moustache arborescente susceptible de rendre jaloux bien des adolescents.
Il n'avait pas fallu dix minutes pour que Georges, jeune homme qui voyait s'ouvrir devant lui une carrière prometteuse dans les affaires, jusque-là considéré par son oncle comme la prunelle de ses yeux et tenu pour l'héritier présomptif de sa fortune, ne tombe dans la triste condition de recrue supplémentaire dans l'immense cohorte de sans-emploi.
- Oui c'est affreux. Les journaux n'en ont pas parlé... mais la police sait que personne n'est entré dans la maison, ce soir-là.
- Vous voulez dire que ? ...
- Qu'il doit s'agir de l'un de nous. Mais qui ? La police l'ignore... et nous aussi. Nous ne savons pas. Nous restons à nous observer, à nous épier, à nous demander qui est le coupable. Oh ! Si ce pouvait être quelqu'un venu de l'extérieur... Mais je ne vois pas comment...
- Hello! James...
Il se détourna. Grace et les soeurs Sopworth le hélaient de l'autre côté de la rue.
- Voulez-vous m'excuser une seconde? demanda-t-il à lord Edward
- Nous allons au cinéma, dit Grace. Si le coeur vous en dit...
- Je suis désolé, répondit James, mais je m'en vais déjeuner avec lord Edward Campion. Vous voyez, c'est ce type, là, troussé comme l'as de pique. Il veut me présenter le rajah de Maraputna.
Et soulevant courtoisement son chapeau, il traversa pour rejoindre lord Edward.