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3,74

sur 465 notes
Après avoir vu et écouté Philippe Claudel à la Grande Librairie il y a quelques mois, je savais que je lirais ce roman un jour. J'avais déjà beaucoup apprécié Les âmes grises et le rapport de Brodeck il y a longtemps déjà.

J'ai retrouvé avec un immense plaisir sa plume riche, d'une finesse incroyable, sa façon de croquer ses personnages, saisir leur caractère, ses descriptions vivantes de la nature dans son style toujours aussi visuel. Quel régal !

Dans une contrée jamais nommée, un petit coin reculé de l'Empire, situé au-delà de la Frontière. Quelques centaines d'habitants vivent en paix dans ce village qui s'articule autour d'une église et d'une mosquée. Cette paisible bourgade va être secouée par le meurtre brutal du Curé.
Ce n'est pas un banal fait divers, un symbole religieux a été assassiné. Et c'est aussi l'étincelle qui va allumer la mèche du ressentiment, de la haine, de la jalousie.

C'est le Policier Nourio qui enquête; il a fort à faire, peu habitué aux crimes dans ce lieu à l'écart de tout, mais il jubile, convaincu que cette affaire va servir de tremplin à ses ambitions carriéristes.

Des forces, même pas obscures, sont à l'oeuvre pour que la vérité éclate, mais laquelle ? Celle des faits ou celle qui arrange leurs desseins ?

Le Policier, ambivalent et embourbé dans ses propres vices, sera-t-il le jouet de ces forces, le justicier avide de vérité ou l'enquêteur oeuvrant à son propre bénéfice ?

Philippe Claudel transforme petit à petit, avec délice, son récit policier en une fable ténébreuse, allégorie de la noirceur de l'âme humaine malléable et manipulable.

L'Empire, ses gouvernants, ses décideurs, vont instrumentaliser le meurtre du Curé pour monter la communauté chrétienne contre la communauté musulmane beaucoup plus petite mais tellement plus pratiquante et dynamique.

Rien de tel pour ressouder les chrétiens à leur Église, pour éviter l'effondrement d'un Empire aux traditions conservatrices que de trouver un bouc émissaire.

Philippe Claudel nous régale d'un conte vénéneux; sans se faire moralisateur, il nous invite à nous questionner sur la nature humaine, sans oublier de glisser dans son roman des épisodes savoureux, dont l'un a été particulièrement jubilatoire, et enfin, sans oublier de nous illuminer de quelques âmes dont le gris est heureusement absent.

Je terminerai en disant que la couverture éloquente est tout simplement magnifique !!!

Je recommande chaleureusement ce très beau roman.
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Beaucoup de passages glauques, sordides où l'auteur s'appesantit plus qu'il n'est nécessaire sur le priapisme du Commissaire Nourio.

Ce même Nourio qui prend son adjoint Baraj pour son boy et un sombre crétin. Mais à crétin , crétin et demi .... !

Ce qui se passe dans cette petite ville pourrait arriver n'importe où, hier comme aujourd'hui ; l'ambiance y est lugubre et exempte de morale.

Belle intensité dans la description des personnages.

La montée de violence, de haine, de vengeance contre la petite communauté musulmane m'a laissé un goût amer.
Le racisme et les problèmes de société ont été évoqués par l'auteur dans tout ce qu'il y a de plus répugnant.
Rien n'est beau dans cette humanité là, en dehors du muet à qui l'on fait subir un horrible sort, et, Baraj géant qui a un coeur d'or et ne trouve l'apaisement et l'amour qu'auprès de la nature, des chevaux et de ses deux grands chiens
ses Beaux. Baraj qui compose de courts poèmes dans sa tête et les perd aussi vite qu'il les trouve.
Et bien entendu la jeune et lumineuse Lémia à peine sortie de l'enfance.

Ecriture bien ciselée qui n'omet aucun détail.

La fin est lumineuse et contraste étrangement avec tout le reste du récit.

* Issu de la nuit et sans pensée
J'y reviendrai nageur ensommeillé
L'oubli sera mon eau
L'inconscience mon mouvement
Tout aura été
Rien ne sera plus
Crépuscule *

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En ouvrant cet ouvrage à la couverture assez mystérieuse et énigmatique, je ne m'attendais pas à découvrir un roman aussi sombre que captivant.

Alors que dans cette bourgade reculée de l'Empire le temps semble s'être arrêté depuis l'arrivée de l'hiver, le corps du curé est retrouvé sans vie dans une des rues du village... C'est alors que Nourio, un policier venu il y peu de la capitale va y voir l'occasion de briller en résolvant cette enquête. Pourtant, l'agent de police était loin de se douter que le meurtre de l'homme d'église serait une mèche qui mettrait en feu et en sang toute la communauté...

J'ai vraiment adoré la plume incisive mais tellement réaliste de Philippe Claudel que je découvre au travers de "Crépuscule". D'une enquête policière, nous nous plongeons finalement dans un formidable roman social à l'ambiance pesante que j'ai trouvé très intéressant.

Je ne peux que vous conseiller de vous plonger dans cette histoire car celle-ci reste d'actualité alors que plus de deux siècles ont passé et qu'elle montre sans filtre la noirceur des hommes... Merci les Editions Stock et Netgalley France pour ce bon moment de lecture...
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Ma première rencontre avec Philippe Claudel et clairement, elle est ratée.

J'ai essayé mais vraiment, le roman me tombait des mains toutes les dix pages alors j'ai abandonné vers la 200ème page parce que hein….quand ça ne veut pas, c'est vraiment trop laborieux et puis, il y en a tellement d'autres que je veux lire sans avoir beaucoup de temps.

Roman historique qui se déroule dans une petite ville imaginaire aux frontières d'un empire. Il démarre avec le meurtre du curé de la cité et nous voilà partis dans une enquête avec l'inspecteur local envahi en permanence de pensées libidineuses. Un triste personnage qui ne pense qu'à sauter sur son épouse voire à violer une jeune adolescente….

C'est simple : j'ai détesté les personnages, celui de l'inspecteur tout particulièrement, l'histoire ne m'a pas passionnée, et le style ne m'a pas convaincue.

Je n'ai jamais aperçu ce que l'auteur voulait raconter et pourquoi il avait choisi des personnages aussi peu aimables. Je vois que certains amis babeliotes ont adoré, ce qui est un parfait mystère pour moi. En ce qui me concerne, je passe à autre chose.
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Une fable ? Un conte métaphorique ? Une allégorie ?
Les avis divergent, les experts s'écharpent, moi je lis.
Et ce que je lis est fort, ce que je lis est noir, ce que je lis m'impressionne.

Nous sommes (peut-être) au début du siècle dernier, quelque part à l'Est, aux confins d'un vague empire d'Europe centrale (l'empire Austro-hongrois ?), non loin de la frontière. Plus loin c'est l'inconnu, les terres brumeuses d'un autre royaume (l'empire Ottoman ?). C'est là, dans une bourgade reculée de cette étrange contrée que se noue le drame : un soir le Curé est assassiné. Horreur et consternation, effroi immédiat au sein de la petite communauté plutôt miséreuse et jusqu'alors sans histoires, parmi ces "êtres d'habitudes, d'ordinaire et de coutumes, pas très doués pour l'exceptionnel".

L'affaire est confiée au Policier Nourio, petit homme mauvais venu d'ailleurs, gonflé de vices et d'ambition, et prétendument plus perspicace que le reste de la population ("qu'on s'imagine prosaïquement une canalisation de diamètre plus grand que la moyenne, mais obstruée de matières sales, plus ou moins compactes, et qui empêchent l'écoulement normal d'une eau claire, et on aura une image exacte du fonctionnement de la pensée de Nourio").
À ses côtés se trouve l'Adjoint Baraj, un brave homme que tous considèrent comme un peu limité, un bon gros géant placide et d'allure maladroite, gentil poète qui s'ignore (Philippe Claudel, toujours si fin quand il s'agit de peindre un personnage, dit de lui qu'il est "une grande chose toute bonne, sans malice, incapable de mauvaises pensées et de mauvaises actions", un "animal à face d'homme ingrat voyant naître en lui des bribes de poèmes merveilleux, dont il ne savait même pas qu'ils étaient des poèmes, et qu'il ne parvenait pas plus à retenir qu'une jarre percée ne peut garder le vin qu'elle contient, fût-il le vin le plus précieux du monde.")

Voilà donc les deux hommes chargés d'élucider le meutre. Difficile de concevoir binôme plus mal assorti !
Bien vite le lecteur se prend d'affection pour l'Adjoint, à mesure que croît son aversion pour les manigances et les perversions de son supérieur. Englué dans ses turpitudes et soumis à d'incontrolable pulsions sexuelles (dont certaines ont, c'est vrai, de quoi donner la nausée), le Policier perd rapidement de vue son enquête, qui se retrouve bientôt reléguée au second plan ("La mort brutale du Curé lui apparut soudain un événement dérisoire. Car ce qui comptait désormais était ce que certaines forces à l'oeuvre avait décidé d'en faire.")
L'intérêt du roman n'est pas là, mais bien dans la description acide du petit microcosme social mis en ébullition par le triste fait divers, et de l'effroyable climat de suspicion qui s'installe au village jusqu'à la désignation des boucs émissaires .
Comme dans le Rapport de Brodeck, on assiste ici à un basculement brutal de l'harmonie au chaos et à la fracturation d'une collectivité fragilisée par la défiance et la peur de l'autre, mais aussi par les manipulations d'un pouvoir central obscur et corrompu. Tous les moyens sont bons pour préserver le lustre et la cohésion de l'Empire, y compris les vengeances aveugles et les condamnations arbitraires.

Tout ici est question d'ambiance, d'atmosphère (crépusculaire, évidemment !) et si j'entends les réserves émises par certains lecteurs quant à la lenteur de l'intrigue ou à la lubricité excessive et malsaine du Policier, j'ai préféré retenir la grande qualité d'écriture, la finesse des descriptions et la puissance des images invoquées par l'auteur. J'ai aussi succombé immédiatement aux charmes des seuls personnages lumineux (l'Adjoint Baraj, la jeune Lemia), les rares que Claudel a voulu sauver des ténèbres ambiantes, âmes simples surnageant dans le cloaque des esprits malades, cruels et vicieux.
L'effet de contraste entre ces deux personnages et le reste des villageois est saisissant !
Les notables du bourg, souvent identifiés par leurs fonctions (le Maire, le Conservateur des Archives, le Receveur, le Rapporteur de l'Administration) comme c'est l'usage dans ce genre récit allégorique, figurent d'ailleurs parmi les plus funestes individus. Avec eux l'auteur s'en donne à coeur joie, et si l'art de la caricature est incontestablement un art délicat, j'ai trouvé que Claudel s'en sortait là particulièrement bien.

Pas grand chose à jeter pour moi, donc, dans ce roman sombre sur la folie des hommes, leurs travers et les égoïsmes qui les poussent parfois à réécrire L Histoire.Un texte aussi noir que beau, dont l'un des enseignements pourrait être le suivant, emprunté au sinistre Policier (dernière citation, c'est promis !) :
"L'âme humaine est plus complexe que vous ne le pensez. Mon métier m'a fait connaître depuis que je l'exerce les faces les plus sombres de notre nature, et même chez les êtres qu'on croit les plus doux et les plus droits, il existe des arrière-salles dans leur crâne pourtant bien ordonné où se cachent les plus ignobles démangeaisons. Il suffit de peu de choses, une faiblesse passagère, le hasard, un mot, pour que s'ouvrent les serrures qui gardent ces lieux infâmes et que se libèrent des énergies dont on ne peut soupçonner la violence."
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Dans un pays imaginaire quelque part en Europe centrale, dont on ne saura pas grand-chose, sinon qu'il y a un croissant sur sa bannière et qu'on appelle l'Empire à cent têtes et sent corps, un crime vient d'être commis : deux jeunes enfants ont retrouvé le curé du village assassiné, une blessure à la tête par une pierre à côté de son église.

Sont affectés à l'enquête (c'est très relatif) Nourio alias le Policier qui brille par son arrivisme et son adjoint Baraj, homme simple mais au grand coeur, sous la surveillance du Maire et d'autres édiles préoccupés essentiellement par leur statut social.

Evidemment, il faut trouver un coupable et qui est le suspect le plus plausible : l'Imam et la petite communauté musulmane…

Ce fut une lecture laborieuse, proche du pensum, car le roman dégouline de scènes, de fantasmes érotiques émanant du Policier : obsédé sexuel qui ne pense qu'à copuler, même si sa femme, enceinte régulièrement grâce à ses oeuvres, ne semble pas consentante mais on atteint le paroxysme du dégoût avec la description de ses fantasmes pédophiles à l'égard de Lémia la petite fille qui a découvert le corps avec son frère. On a même droit aux détails anatomiques !

Sinon, on retrouve l'univers froid, les tempêtes, la neige, les habits un peu folkloriques parfois, les « âmes grises » comme les aime l'auteur… L'écriture est belle, il y a des réflexions intéressantes…

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Stock qui m'ont permis de découvrir ce roman et son auteur

#Crépuscule #NetGalleyFrance !
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Par honnêteté intellectuelle, comme à chaque fois que j'ai abandonné un livre, je ne le note pas, ce serait injuste.
J'ai beaucoup aimé le début.
La suite beaucoup moins.
Je l'ai trouvée âpre, dur, malsain, de ce malsain poisseux qui vous entache l'âme.
Je l'ai déjà dit, je n'aime pas la violence, le brutal, et je l'ai bien vu arriver Claudel, avec ses gros sabots, et puis je l'ai feuilleté.
Des hordes de sauvages avinés et idiots, une petite fille pure mettant le feu au derrière du Policier. Il la fantasme, et je ne serai pas étonnée qu'elle soit violée à un moment où à un autre....Par lui ou un comparse. Parce que c'est bien difficile hein de détourner ses fantasmes et son envie d'une toute petite adolescente à peine formée. Pulsions de malheur...
Oui, j'ai senti le rustre, le brutal, la grossièreté, l'odeur nauséabonde du malpropre. Dans les corps et dans les têtes.
Je ne vais pas en faire des tonnes, je m'arrêterais là, mais je ne comprends toujours pas ce besoin de tout salir, de se précipiter dans la fange, l'immonde, l'horreur.
Mais il y en a un qu'on chérit ; c'est l'Adjoint, colosse aux pieds d'argile, poète à ses heures. Oui le gentil, trop gentil, va être à tous les coups victime ou bouc émissaire, c'est certain.
Donc tortures et tout le toutim.
À part cela, bonne lecture à tous.
On va encore parler d'un chef-d'oeuvre....
Beurk.


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Impression surprenante que d'avoir pénétré une toile de Jerome Bosch, "faiseur de diables et peintre du destin des hommes".

Trognes froissées, faces lippues, corps voûtés , vrillés, rompus; nez comme des groins gorgés de mauvais alcool, haleines fétides ; peaux fuligineuses à force de crasse, de mille forfanteries : regards bas, vicieux, sournois; sexes obscènes, rapaces, rendus à leurs instincts de vautours en une armée de mercenaires avides de cruauté.

Quel souffle ! Quelle écriture qui compose une oeuvre entre onirisme et réalisme, qui dit de façon abjecte et sublime la triste condition humaine.
Il nous faut revenir un siècle en arrière, le temps d'un hiver féroce, dans une contrée que l'on devine slave ou balkanique, régie par un Empire jamais nommé dont les " mille oreilles" sont le fer de lance d'un totalitarisme que l'on devine aveugle.
Dans une petite bourgade cohabitent depuis toujours une large communauté chrétienne et une cinquantaine de familles musulmanes.
Un jour de neige opaque et dense, le sang coule. C'est celui du curé.
L'affaire secoue la ville et remonte jusqu'à T., la grande cité, où les supérieurs de Nourio, le Policier, s'agitent en conciliabules aussi secrets que perfides.
Nourio est un petit homme d'âme et de corps, aussi féru de lui-même qu'imbu de son pauvre pouvoir, lequel est tristement malmené par une libidineuse volonté qui domine toute son existence. Il est épaulé dans ses missions par Baraj, grand escogriffe placide et mutique dont ses chiens sont son amour secret.
L'Empire s'est ému, mais va bientôt se réjouir de cette mort sacerdotale.
Philippe Claudel interroge les vérités : l'efficience, et l'autre, la vraie, ainsi que leur impact respectif sur les foules.
Quand l'une peut gouverner, l'autre se voit renvoyer au titre de fariboles que griots ou rhapsodes distilleront au fil des ans.
La vérité efficiente, elle, peut gouverner. Elle est le glaive de l'Empire qui peut ainsi se débarrasser de ses rebuts d'un revers de main rhétorique.
Ainsi naissent les boucs émissaires, les bannis, les différents, les exilés, ces autres qui dérangent et grippent les rouages politiques.
Superbe livre.
Superbe réflexion oh combien d'actualité.
Superbe prose.
Que d'émotions à traverser pour parvenir à ne garder que les rares images d'âmes pures. Celle d'une Madone, d'un géant, de deux juments et de deux chiens fauves.
Un immense merci à @paroles dont le billet m'a donné l'envie de cette lecture.
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Dans une petite ville aux frontières d'un Empire d'Europe centrale, dans des temps incertains.

« Tout meurt, on le sait.
Les êtres, les choses, les villes, les empires.
La fin est notre lendemain. »

Le curé est retrouvé assassiné.
L'enquête revient à Nourio, le Policier dévoré d'ambition qui tient là non seulement de quoi se désennuyer mais aussi de quoi faire remarquer en haut lieu, son intelligence hors du commun, ses compétences exceptionnelles, croit-il…
Il est secondé dans sa tâche par Baraj, l'Adjoint, doux géant qui trouve du réconfort aux moqueries des gens dans la compagnie des animaux.

En fait, d'enquête, il n'y en a pas. le Policier priapique se contente pour satisfaire ses fantasmes, d'interroger, encore, et encore, et encore, Lémia, la fille du Sabotier qui a découvert le corps. Porté par sa vanité, Nourio se laisse entrainer dans les manigances des autorités locales qui vont régler les tensions nées du meurtre à leur manière.

Si j'ai eu bien du mal à entrer dans ce récit dont l'ambiance hivernale est glauque au possible, dont les obsessions du Policer d'érection en érection sont examinées, exposées, d'une façon pénible voire carrément malaisante quand son désir se porte sur la tout juste nubile Lémia, j'ai fini grâce à la tension croissante, à des incises placées astucieusement à me laisser embarquer par l'envie d'en savoir plus, de connaître l'issue, que l'on devine fatale, de cette histoire. Les personnages de Nourio et de Baraj sont particulièrement bien construits, fouillés et forment un équilibre. La bienveillance de l'un permet de supporter l'abjection de l'autre.
En outre, en filigrane, on devine la réflexion sur le récit historique que chaque nation façonne, fût-ce au détriment de la vérité.

Une fable noire sur le coeur noir des Hommes.
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Difficile de conseiller un livre aussi éprouvant et pourtant, c'est ce que je vais tenter de faire en quelques lignes, parce qu'un bon roman, c'est un roman qui provoque des émotions, même si ces émotions sont douloureuses. Et là, autant dire d'emblée que tout est noir et que le lecteur va souffrir.
Mais moi, suis-je cruelle ? j'ai adoré.
J'ai aimé la noirceur de ce récit. Les personnages sont glaçants, Philippe Claudel dissèque avec minutie les mécanismes de leur cerveau retors.
Les lieux sont angoissants, recouverts de neiges, enveloppés d'un brouillard qui étouffe les gestes et les crimes.
D'ailleurs, lorsque le curé est retrouvé assassiné, le crâne fracassé, personne n'a rien vu, personne n'a rien entendu.
Le policier Nourio et son adjoint, Baraj, géant débonnaire, mènent l'enquête sous la pression de l'Administration impériale.
Avant le drame, les chrétiens et la petite communauté musulmane riche d'une cinquantaine d'âmes vivaient en bonne entente, mais désormais l'imam craint que l'assassinat ne réveille de mauvais démons dans cette «Province perdue» où «tout est rugueux et primaire».
Les notables s'agitent, chacun épie son voisin tandis que le policier Nourio a bien du mal à faire taire ses démons face à une fillette d'à peine treize ans.
C'est un livre superbement bien écrit avec des phrases qui frappent et qui interrogent. C'est un livre puissant car même après l'avoir refermé, le malaise demeure.

J'ai lu ce roman en deux jours. « Crépuscule » est pour moi un livre majeur dans l'oeuvre de Philippe Claudel au même titre que « Les âmes grises » ou « le rapport de Brodeck ».

Merci à NetGallet et aux Editions Stock pour ce voyage en enfer.
#Crépuscule #NetGalleyFrance !

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