«
La pluie, avant qu'elle tombe »,
Jonathan Coe (Gallimard, 240p)
Un auteur très connu que je n'avais jamais lu, un beau titre énigmatique, une quatrième de couverture assez alléchante. Et au final, pas vraiment le coup de foudre, et même assez loin de là.
Angleterre, de nos jours. Rosamond vient de mourir à un âge vénérable, mais elle a laissé une série de cassettes audio, enregistrées juste avant sa mort, à destination d'une mystérieuse Imogen, jeune femme aveugle qu'elle a bien connue enfant, et dont elle n'a plus de nouvelles depuis des années. Elle s'appuie sur une description d'une vingtaine de photos qui jalonnent sa propre vie, ses amours, ses déceptions et ses blessures, avant d'en venir à ce qui la lie si fortement à Imogen.
Une voix d'outre-tombe avec, pour les trois femmes (sa nièce et les deux filles de celle-ci) qui découvrent ces enregistrements un accent, une couleur, une émotion propres, pourquoi pas, ça change un peu (à peine) du journal intime ou du paquet de lettres exhumés post mortem. Mais je n'ai guère été emballé par les choix d'écriture de Coe. L'oralité de la parole enregistrée conduit la narratrice dans son adresse à Imogen (et donc dans celle de
Jonathan Coe au lecteur) à nombre de formules un peu lassantes et répétitives du genre « laisse-moi le temps de le regarder plus attentivement, que je puisse te le décrire ». Et puis il y a cette manière, là aussi assez lourde, d'annoncer la fin sans la dire, de faire durer artificiellement un suspense (à coup de formules répétées « je vais te dire quelque chose de dramatique, mais pas maintenant »). Comme si l'auteur avait voulu me tirer à l'aveugle vers une fin qu'il connait et que je n'avais pas eu envie de me laisser mener ainsi par le bout du nez.
Si une étape de la chute du roman (celle de la fin de Rosamond) est assez rapidement claire, les deux autres (qui est vraiment Imogen pour Rosamond, et surtout qu'est-elle devenue ?), plus surprenantes, se déploient dans un climat de mélo plus que chargé. J'ai certes ressenti quelques émotions en découvrant les drames que vivent les personnages féminins de ce roman, leurs amours contrariées par le poids d'un carcan social (Rosamond est homosexuelle, pas facile dans une Angleterre de la fin du XXème siècle), ou leurs vies gâchées par les blessures profondes de l'enfance ; mais il est assez facile de faire pleurer Margot, et j'ai trouvé que Coe tire un peu trop sur cette ficelle.
Ce n'est pas un mauvais roman, je suis allé au bout sans peine, mais je l'ai trouvé « facile », il ne m'a offert aucune réelle bonne surprise, que ce soit au niveau du style ou des choix narratifs. Pas de quoi donc mettre un autre bouquin de
Jonathan Coe en bonne place dans ma Pile A Lire.