J'aime pas le Young Adult. Vous savez ? Ces bouquins dans lesquels une jeune fille banale devient le dernier espoir d'un peuple opprimé par les exactions de l'Empire / la Guilde / le Parlement / le Consulat (mettre un nom qui claque pour montrer que c'est les méchants) en trouvant le temps entre 2 explosions, 4 sidekicks morts et la perte / trahison de ses parents de repousser les avances d'au moins 2 beaux gosses bien sous tous rapports dont au moins l'un d'eux cache un lourd secret…
Bref, tout ça pour dire que j'aime pas le YA, ses codes usés jusqu'à la corde, l'incapacité des auteurs à s'affranchir de ces formules éculées, et leur capacité à prendre leurs jeunes lecteurices pour des débile finis.
"Oui mais ça c'est parce que t'as pas lu Hunger Games !"
Bon. Je me dis que je suis un homme de défis, et il est inconcevable pour moi de me laisser intimider par une future séance de torture, aussi, je décide de tenter le coup.
Me voici donc avec entre les mains celui qui doit sauver le genre, son sauveur, son élu, le célèbre, que dis-je ? le légendaire Hunger Games, de
Suzanne Collins !
Alors pour ceux qui vivraient dans une grotte depuis 15 ans, Hunger Games, c'est quoi ? C'est l'histoire de Katniss (une jeune fille, donc…), qui vit dans le District Douze (une faction... hmmm…) sous le joug d'un Capitole (un gouvernement de méchants très méchants) qui n'a rien trouvé de mieux que de faire s'entretuer chaque année 24 gamins issus des douze districts. Ouais, un sous-Battle Royale pour jeunes lectrices en mal de sensations, quoi… Et c'est ça, la référence du YA ? C'est ce pitch-là, le meilleur du meilleur avec mention ?!?
Ben ouais... c'est bien ça...
Et après une lecture sans aucun a priori (vraiment pas mon genre, les a priori...), je dois dire que je peux manger mon chapeau ! Sans sauce !
Alors ouais, le pitch est d'un classicisme déprimant, mais… ça fonctionne étonnamment bien !
Ouais, Katniss est le cliché de l'héroïne "normale mais un peu spéciale quand-même", petite gringalette qui ne compte que sur son instinct de survie, sa cervelle, et sa capacité à shooter une galinette cendrée à 300 mètres de la main gauche avec un vent défavorable.
Ouais, on sent venir le triangle amoureux entre Katniss, le "copain mais rien de plus promis" Gale et Peeta le fils de boulanger (et il sait faire du pain, Peeta… voilà voilà…) qui lui a été mis dans les pattes pour l'accompagner à la mort et qu'elle ne peut pas encadrer mais quand même un peu…
Ouais, les méchants sont très très méchants, les gentils sont trop gentils choupinou et à la fin ils gagnent, et ouais ça manque un peu de nuance (encore que, ça se discute...)
Mais… ça marche !
Parce qu'on a là un portrait de jeune fille joliment dessiné, sans trop ni trop peu, avec une histoire lourde mais sans pathos, avec des états d'âme, des échecs (mais pas trop, faut pas déconner non plus), bref, un portrait de jeune fille imparfaite mais bien quand même et qui essaie de faire de son mieux.
Parce que le brin de romance sert l'histoire (et je dis ça sans écrire sous la menace), en permet le développement avec une certaine subtilité, et ne prend finalement pas un poids aussi démesuré qu'insupportable, parce que oui, les romances passionnées d'amour au premier regard quand le monde crame et que ta priorité devrait être de trouver à bouffer, c'est insupportable (coucou, la 5e vague, je te vois !)
Parce que certes l'histoire est prévisible et conserve un arrière-goût de Battle Royale à la sauce sweet barbecue US, mais c'est suffisamment bien fait et avec un background suffisamment bien construit pour que l'oeuvre se distingue de son illustre prédécesseur japonais et se forge son identité propre.
Parce que le rythme est excellent, stimulant sans cesse son lecteur pour l'engager à lire la suite.
Parce que les rôles secondaires, et notamment celui de son mentor Haymitch, sorte de tonton alcoolo-misogyne plus sensible qu'il n'y parait, sont assez marquants, bien intégrés, et savent apporter la touche d'émotion, d'humanité, et de normalité au travers de leur relation touchante avec Katniss.
Fait suffisamment rare pour le souligner, notons également que l'adaptation ciné est finalement très respectueuse de l'oeuvre, et plutôt bien fichue. Ça nous changera des Je suis une légende ou World War Z… (je ne parlerai pas de la 5e vague : le film est naze, mais reconnaissons-lui le mérite d'avoir respecté le niveau de base du bouquin : naze).
Bref, j'aime pas le Young Adult, mais Hunger Games, j'aime bien !
Hunger Games est fait pour toi si… tu aimes les dystopies violentes mais pas trop, les héroïnes normales mais pas trop et les livres originaux mais pas trop… et si tu veux savoir qui c'est le patron !
J'ai aimé :
- Moins con que ses petits frères et soeurs
- Super rythme
- Parvient à se détacher de son modèle Battle Royale pour se forger sa propre identité
- Bonus : très bonne adaptation, avec un Woody Harrelson parfait dans la peau de Haymitch et malgré
Jennifer Lawrence
J'ai moins aimé :
- Peu surprenant
- Plutôt pour un public jeune