Eden, presque 16 ans, a déjà connu plusieurs vies. Abandonnée par sa mère à sa naissance, elle a connu quatre familles et vécu dans deux états américains. Si la vie ne l'a pas gâtée, c'est pire depuis deux ans. Abandonnée par sa dernière famille en date suite à un drame, elle se retrouve une nouvelle fois dans un centre d'accueil, L'Amarrage, sans plus aucun espoir de voir un jour une famille aimante l'accueillir. Petit réconfort, elle s'est fait un ami à L'Amarrage, Clyde, qui l'aide à supporter son quotidien. Jusqu'au jour où Clyde, lui aussi, l'abandonne en fuguant. Cette fois-ci, Eden veut son autonomie. Mais son éducateur s'y oppose, ne la sentant pas prête à vivre seule, et lui propose de s'inscrire une dernière fois dans une agence d'adoption. A contre-coeur, Eden accepte.
C'est avec beaucoup de curiosité que je me suis lancée dans la lecture de «
Eden, fille de personne » de
Marie Colot car je ne connaissais pas du tout le système du « rehoming » en vigueur dans certains états américains. le « rehoming » ou réadoption permet à des familles d'adopter des enfants puis de s'en séparer quelques mois plus tard si quelque chose ne leur convient pas. L'enfant retourne alors sur le marché de la réadoption pour être à nouveau adopté par une autre famille, moyennant le plus souvent une transaction financière. Clairement, ces enfants sont vendus comme des produits low cost et doivent se plier aux méthodes de marketing utilisées par les agences ou associations : défilés, catalogue avec photos… Bref, sans même imaginer toutes les dérives possibles, c'est immonde mais cela existe.
Le personnage d'Eden nous dresse donc le portrait d'une jeune fille pleine de rage, de colère, de tristesse. Traumatisée par un drame qu'elle a vécu dans sa dernière famille, elle s'est construite une carapace qui ne laisse filtrer aucune de ses faiblesses. Pour tenir le coup, elle s'est inventée depuis toute petite des familles imaginaires où Michel
Obama et Léonardo di Caprio forment les parents idéaux. La jeune fille a beau aller au lycée, avoir un job, être entourée d'éducateurs, elle n'en est pas moins seule, sans famille. Alors l'affection qu'elle donne et reçoit, c'est avant tout auprès des animaux abandonnés. Chiens ou chats , c'est auprès d'eux qu'elle se sent le plus comprise. Autour d'elle vont graviter d'autres personnages, touchants et réalistes, qui l'aideront à reprendre espoir en la vie et à surmonter ses traumatismes. Mais le chemin n'est pas facile.
Sans aucun pathos,
Marie Colot, dans un style fluide, nous dévoile donc ce système assez méconnu et effarant du « rehoming » aux Etats-Unis.
Un très bon roman de littérature ado qui se dévore d'une traite.