Lorsqu’ils s’exprimaient dans leur langue maternelle, ils chuchotaient. Ça aussi, ça intriguait la petite Luisa, autant que l’eau chaude qui coulait à la demande ! Comme s’ils avaient honte d’être des immigrés espagnols. Elle comprit bien plus tard que ce n’était pas de la honte, mais du respect pour le pays d’accueil qui leur offrait la possibilité de vivre décemment.
Quand on est enfant, il y a certaines choses qui nous marquent. Pour Louise ce fut de découvrir un robinet qui crachait de l’eau sans qu’on ait une citerne comme réserve. Et, comble de la magie, ce fameux robinet délivrait aussi de l’eau chaude ! Régulièrement, Louise jouait à ouvrir et fermer ce robinet magique, comme pour vérifier qu’elle ne rêvait pas.
C’était des gens simples, de ceux qui se réjouissent des petits bonheurs de la vie. Leur cercle d’amis était restreint. D’ailleurs, peu de gens avaient fait le déplacement jusqu’au cimetière, mais c’était sans importance ; c’était très bien ainsi. L’enterrement d’André ressemblait à la vie qu’il avait eue : calme et discrète.
Les tests pour détecter les problèmes de dégénérescence neurologique ressemblent à un concours d’entrée en classe de maternelle, c’est effrayant !
La modernisation n’avait pas servi à soulager le labeur des hommes, car en retour, on leur demandait d’accélérer encore et toujours les cadences. Si les ouvriers n’étaient pas d’accord, ce n’était pas un problème, la porte de sortie de l’usine leur était grande ouverte.
Lorsque les souvenirs ne frapperont plus à notre porte, que restera-t-il de cette vie passée ?Lorsque la nuit deviendra notre seule compagne, serons-nous condamnés à l’absence et au vide ?Lorsque les visages se feront transparents, garderons-nous une image à chérir ?Lorsque notre propre reflet s’estompera, qu’y aura-t-il à sauver, sinon le néant ?