Le Journal de Mickey avait eu son Phantom, le 1er justicier masqué de la bd, Pif Gadget, journal vedette des années 1970, aura le sien à la fin de cette même décennie. Et ce sera... une jeune femme ! Avec Masquerouge, le journal des éditions Vaillant, concurrent assez différent pour le moins, des Bayard et autre Fleurus, enfourche le cheval de l'injustice et des inégalités. le héros né de la plume de
Cothias et des crayons de Juilliard est un Robin des Bois décalé : une jeune femme sous Richelieu. Comme Jeanne d'Arc levée pour bouter l'Anglois, Ariane de Troïl prend l'habit et le masque rouge pour lutter contre les privilèges et ceux qui en usent et en abusent à l'encontre d'un peuple de France que Henri IV a fait rêver et les guerres de religion, dévasté.
C'est vif, rapide, enlevé - après les 12 planches du 1er épisode contenu dans cet album, le format de chacun tombe à 10 planches - et on ne s'ennuie pas. On apprécie déjà le dessin pur de Juilliard, sa façon de jouer sur l'épaisseur de son trait, toujours fluide, pour les effets de distance. Ses décors somptueux sous tous les climats, des nuits enneigées aux midis sous un soleil de plomb. Les dialogues de
Cothias font mouche, y compris et surtout lors des duels à l'épée. Certaines situations - la représentation de Masquerouge au théâtre sur des tréteaux, la fausse exécution... - se retrouveront, mieux traitées et plus développées dans Les 7 Vies de l'Epervier. Où les personnages bien sûr seront aussi plus riches et plus fouillés. Maintenant, ne boudons pas notre plaisir : d'où qu'elle vienne, l'invention de ce Zorro femelle au 17ème siècle a été un bonheur pour la bd. On admet qu'à ce stade, Germain soit une sorte de Bernardo semblant ignorer ce que fait Ariane de ses habits rouges. Que le prévôt soit une sorte de Sergent Garcia et le peuple une masse encore un peu informe. L'Epervier prenait déjà son envol.