Citations sur Essais de réponse (23)
Je suis un lecteur très exigeant car le principe qui guide ma lecture est que c'est l'histoire qui doit me faire oublier mon poids, jusqu'à mon souffle et ma respiration, jusqu'aux bruits tout autour. Si je m'aperçois que c'est moi qui porte, ce livre tombe sur mes pieds.
Cette ville* qui fut Europe est la tienne. Moi, j'ai été un passant, un chauffeur de camion qui a vidé son chargement un peu ici, un peu ailleurs. Je suis d'un Sud qui n'existe plus et dans l'Orient de Mostar j'ai vu l'enfance des guerres, l'angoisse de piétiner les vieux et d'offenser les mères. Si tu es capable de ne pas haïr, le siècle prochain débutera par toi, (...)
* Mostar
Celui qui se trouve dans un espace exigu, dans une vie barrée, des années sans une clé en poche, n'est pas encore perdu s'il a une pièce étreinte par les livres. Moi je l'ai eu dans une maison sombre où l'été les étagères suaient une fine poussière, une farine de pages.
Pour celui qui est aux abois, il y a le ciel ou bien les livres. Dans les deux cas sa solitude est envahie et apaisée par les voix les plus belles du monde
L'époque qui ne reconnait pas l'hospitalité, qui est horrifiée à la vue d'un vagabond est froide. Je suis nostalgique de cette ferveur qui était tout le contraire de ça : qui conservait son étonnement devant l'immensité et le miraculeux et qui invitait l'étranger à partager la nourriture du jour.
Et puis, écrire une histoire est un geste qui accomplit la moitié du travail ; l’autre moitié revient à cette personne qui prend cette histoire, la lit, l’emporte avec elle, la met près d’elle, dans la rue, au meilleur moment --- le temps sauvé de la journée --- et la fait passer dans son intimité.
Les questions sont la ronde d'un manège, elles attendent les clients enfants pour un tour sur le cheval à bascule, la petite voiture ou la fusée. Les questions sont plus belles que les réponses, elles durent plus longtemps, elles tournent encore et me donnent toujours envie de faire un autre tour, de donner une deuxième réponse. Mais elles s'en vont toujours, les belles questions, elles ne se laissent plus rattraper.
Pour moi, écrire c'est entrouvrir un passage, en espérant que quelqu'un, en le parcourant, le rende achevé.
Robert Walser passa ses vingt dernières années à écouter des voix. Il eut la présomption, devenue persécution, de croire qu'elles s'adressaient à lui. Il n'écrivit plus rien pour ne pas les interrompre, rare courtoisie dans la défaite. Et pourtant, un écrivain doit écouter des voix, celui qui ne les entend pas est éteint.
Et puis, écrire une histoire est un geste qui accomplit la moitié du travail; l'autre moitié revient à cette personne qui prend cette histoire, la lit, l'emporte avec elle, la met près d'elle, dans la rue, au meilleur moment - le temps sauvé de la journée- et la fait passer dans son intimité.
Des neiges de l'Olympe nous avons délogé les dieux, sur l'Aiguille du midi, aiguille méridienne, on arrive en téléphérique, mais nous restons des puces de géants qu'une secousse suffit à balayer.