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Danièle Valin (Traducteur)
EAN : 9782743603762
140 pages
Payot et Rivages (08/01/2006)
3.89/5   297 notes
Résumé :
Un été brusque de la jeunesse et l'on apprend le monde à toute vitesse. Sur une île de la Tyrrhénienne, au milieu des années cinquante de ce siècle, un pêcheur qui a connu la guerre et une jeune femme au nom difficile transmettent sans intention à un garçon la fièvre de répondre. Ce récit est une réponse, un me voici décisif comme un lieu de naissance.
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Critiques, Analyses et Avis (45) Voir plus Ajouter une critique
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L'île d'Ischia, au large de Naples, les années cinquante, dans l'immédiat après guerre. La mer, la plage, le soleil.

Un été chaud, magique, électrique.

Le narrateur a seize ans. Il est grave, sérieux, il fuit les adolescents de son âge, recherche la compagnie des plus grands, des adultes.

Un été sur l'eau, à l'écart, loin des autres, sur la barque de pêcheur de Nicolà, parfois avec son oncle,parfois avec Daniele, un copain plus âgé.

Un été à s'initier à la pêche, à l'âge d'homme, au silence partagé, aux gestes patients des marins.

Un été à découvrir le passé, à sentir le poids de l'Histoire: les Allemands sont vaincus, ils sont partis. Mais ils reviennent, en touristes décomplexés.
Les Américains sont venus, ils ont libéré Naples mais ils sont restés, ils l'ont colonisée, corrompue, humiliée.

Un été à s'ouvrir à la gravité d'un premier amour.

Car il y a une jeune fille, aussi sur cette île. Elle est belle, joyeuse et soudain sombre: elle est orpheline. Elle porte un nom étrange, Caia. Ou Haia, ou Hàiele.. Elle est juive. Elle a tout perdu. Mais une intonation, un geste, une phrase lui ramènent l'ombre de son père, tant aimé.

Parce qu'il a cette intonation, ce geste, cette phrase au bout des lèvres, au bout des doigts, au bout du coeur, le jeune narrateur accepte d'être le protecteur plutôt que le petit ami, le substitut paternel plutôt que l'amant.

Et parce qu'il découvre la colère impuissante devant la barbarie de l'histoire, il s'en fait le justicier inconnu. Et absurde.

Pour l'amour d'Hàiele, il fait exploser "un feu qui ne pouvait pas corriger le passé".

Un récit magnifique, solaire, inspiré. Un diamant brut, sans coquetterie stylistique, sans détour, sans trucage.

Un premier amour totalement original et qui résonne avec une simplicité et une sincérité absolues.
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Quelle poésie dans ces mots ! Monsieur de Luca sait faire vibrer ses mots pour les faire résonner chez le lecteur. Oui, un vibrato direct au coeur !
Et pourtant, on y parle de la vie simplement. de la vie mais à un tournant important, celui de la découverte de l'amour. Des mots effleurés, des sensations à fleur de peau, des caresses à peine perceptibles.

Années 50, sur une île au large de Naples, où la vie reprend après les années noires de la Seconde Guerre mondiale.
Notre narrateur, seize ans, passe ses journées de vacances à aider son oncle à la pêche. Un métier difficile, prenant, se lever aux aurores, tirer les filins… Mais un métier dont l'isolement permet de discuter de sujets tabous, comme celui de la guerre. Un sujet dont la famille ne veut plus parler. Alors notre jeune homme, avide de comprendre cette époque, questionne Nicola, qui par bribes lâchées dans le murmure de la mer, essaie de partager des images douloureuses.
Le soir, notre jeune homme accompagne dans ses sorties son cousin plus âgé. Il fait alors la connaissance de Caia, une jeune touriste juive d'origine roumaine. Il devine auprès d'elle, un secret enfoui. Il sait d'instinct qu'il doit la protéger. Il en tombe éperdument amoureux. Elle le regarde comme un père. A travers un mot, un geste, une relation étrange, une connivence venue du fond des âges, s'installe entre eux. Et lui soudain va ressentir la profonde nécessité de corriger le passé.

Un très beau roman dans lequel un jeune homme ouvre son regard sur le monde des adultes, de la guerre, des cicatrices laissées par celle-ci. Un été pour changer de peau, faire sa mue, trouver des réponses. Une écriture brillante, élégante, poétique, onirique parfois.
Erri de Luca, un auteur majuscule.
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Erri de Luca figure dans mon Panthéon littéraire. Il m'enchante par la lumière de ses mots mais n'oublie jamais de me surprendre, de m'égarer, comme ici dans ce très court roman, Tu, mio, un titre qui ressemble presque davantage à une chanson d'Umberto Tozzi ou de Ricchi e Poveri...
Le cadre de ce récit d'ailleurs pourrait tout pareillement nous tromper. Tout se passe sur une île de la Tyrrhénienne, l'île d'Ischia, au large de Naples, avec ses bateaux de pêche, l'été, les vacances, les pieds nus, une guitare qui n'est jamais loin, l'insouciance, un endroit paisible, heureux, presque endormi, et en arrière-pays la fin de l'enfance, l'adolescence qui s'éveille sur le sable fin, les filles dont on rêve déjà, les premiers émois amoureux en pensant au reflet du soleil sur leur peau nacrée...
Je dois avouer que j'ai craint tout d'abord lire une bluette estivale...
Mais l'histoire se passe dans les années cinquante. L'écho de la seconde guerre mondiale résonne encore dans les mémoires, le fascisme aussi... Nous sommes dans l'Italie juste après la guerre, celle qui panse ses plaies, voudrait tourner la page, oublier, passer à autre chose... Brusquement une jeune fille sort de l'horizon avec son histoire, écorchée. Elle s'appelle Caia, elle est roumaine, elle est juive. le narrateur en tombe éperdument amoureux, tout comme son copain Daniele, presque comme un grand frère pour lui. Mais c'est un tout autre rendez-vous qui l'attend. Un saut dans le monde adulte, la surprise d'un battement de coeur qui se trouve pris dans la nasse des souvenirs douloureux qu'on croyait éteints. Il ne tardera pas à découvrir que Caia est orpheline.
Il y a tout d'abord cette amitié très forte avec Nicola, le pêcheur. J'ai beaucoup aimé ce personnage mutique, la patience des marins qui vient dans ses yeux, dans ses gestes. Il a connu la guerre, il s'en souvient comme si c'était hier. Son coeur est hanté par le remords d'avoir combattu dans le mauvais camp. D'ailleurs, c'était hier ou presque. Les plaies sont encore à vif, il ne suffit pas de grand-chose pour éveiller les blessures dans le désordre de la mémoire. La mémoire, c'est comme du sel qu'on jette sur les cicatrices...
C'est l'été. Entre les sorties de pêche et la fête le soir en bord de mer, les jours passent avec lenteur. Parfois au loin une chanson s'élève en sourdine dans l'air moite. Pour le narrateur, c'est l'été de ses seize ans. Brusquement, il est admis à entrer dans un autre monde, celui de s'approcher des jeunes filles, espérer un baiser et peut-être plus encore...
Le passé des personnages surgit parfois empli comme une vague, comme le sirocco que l'on voit s'éveiller et souffler brusquement venant du large, celui que l'on craint ; c'est un passé chargé d'échos et de douleur.
Caia aussi, derrière l'insolence de sa jeunesse, traîne derrière elle un passé qui la hante comme une ombre qui passe de temps en temps dans ses yeux, éteint un bref instant le soleil qui s'y penchait. Il y a le souvenir de son père qu'elle retrouve dans les yeux du narrateur et contre toute attente, c'est un tout autre amour qui naît entre ces deux-là... quelque chose de presque filial, un lien secret, invisible, comme une promesse, quelque chose qui protège du malheur.
Il y a dans ce récit initiatique, solaire, quelque chose qui tient d'une étrangeté presque onirique. L'écriture poétique d'Erri de Luca enrobe les gestes de ce garçon et de cette fille qui font l'apprentissage d'un amour pas comme les autres.
J'ai aimé ce récit d'un premier amour raconté avec beaucoup de délicatesse, comme une manière de dénoncer la barbarie humaine. Tendre et bouleversant à la fois.
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Un été brûlant. Une petite île au large de Naples. le soleil, la pêche, la plage. Un adolescent, plus tout à fait un enfant, pas encore un homme. Une fille, belle, mystérieuse, étrangère. Des sentiments forts, au-delà de l'amour de vacances. Et puis la guerre...

Le temps d'un été pour faire d'un gamin un jeune homme. Un été particulier pendant lequel il ne partage plus les jeux de ses camarades. Il apprend la pêche et la vie auprès de Nicola, le taiseux, sur le bateau de son oncle. Il fréquente la bande de son cousin, des garçons et des filles plus âgés que lui qui cette année-là accueillent une nouvelle, Caia. Un prénom étrange pour une fille pleine de secrets, venue sur l'île pour s'étourdir de soleil et de baisers. L'adolescent taciturne sait bien qu'il n'a aucune chance de la conquérir et pourtant ils vont se chercher, se trouver, comme s'ils s'étaient toujours connus. Un geste, un regard et Caia retrouve dans ce garçon un être cher qu'elle a perdu. Il devient alors son protecteur, son vengeur. A travers elle, il perçoit les tourments de cette guerre qui vient de s'achever et que tous passent sous silence. Ses parents évoquent à mi-voix les bombardements sur Naples, Nicola parle de sa honte d'avoir combattu dans le mauvais camp. le garçon veut toujours en savoir plus. Qui sont les vainqueurs de cette guerre ? Les américains qui se comportent à Naples comme en territoire conquis ? Les allemands qui reviennent sur l'île, en touristes, lavés de tout péché ? Caia n'a pas les réponses mais elle lui fait entrevoir la souffrance de ceux qui ont tout perdu.
Erri de Luca nous livre ici l'histoire originale d'un amour de vacances pas comme les autres. Onirique, poétique, ce récit initiatique possède la sincérité de l'enfance, la magie du premier amour, la violence du passage à l'âge d'homme.
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Le temps d'un d'été sur une île, le temps d'un apprentissage, dans les années cinquante, dans cette Italie encore blessée. Le jeune garçon apprend l'Histoire entre les mots qui s'échappent des adultes et d'une jeune fille qui surgit comme une balafre sur cette île du soleil, du bonheur, des corps qui sentent le sel et la pêche, des pieds nus sans entraves.

Il entre dans le secret de sa vie, il comprend la blessure. Une blessure qui devient sienne ; Tu moi. Mieux que dans les livres, plus vraie, la guerre parvient jusqu'à lui, par l'expérience de ceux qui ont combattu malgré eux, qui ont été des marionnettes. Pour ces hommes, la guerre est comme une maladie de l'homme, elle passe et ensevelit. Ils ne font pas de politique. Leur vie est simple et saine, jusqu'à ce que cette guerre les prenne dans ses filets. Puis l'Histoire ravale ses larmes, la poussière revêt les corps. Il reste les regrets de ne pas avoir su contrer le mal, d'en avoir été complice, et l'envie d'enfouir au fond de soi sa honte…

Le garçon veut savoir, il veut des réponses. Il en aura certaines. Mais à chacun son expérience, à chacun ses réponses. « L'éveil de sentiments personnels ne venait que de l'expérience, pas de l'histoire. »

Une belle façon de raconter la guerre, presqu'en douceur, sans détails, mais avec des mots qui pénètrent, qui vont au fond des choses alors qu'ils ne semblent que les effleurer. Comme un tour de magie.


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Citations et extraits (79) Voir plus Ajouter une citation
[... ] Il n'est pas juste que nous la blâmions. » Daniele n'était pas d'accord. Pendant un été, il avait vu une belle jeune fille un peu capricieuse qui avait dansé et s'était laissé embrasser par beaucoup, alors qu'elle portait en elle une douleur et un énorme secret et qu'elle nes'en était ouverte que par hasard, à l'occasion d'une bagarre. « Elle aurait mieux fait de ne rien me dire. »
Vraiment, Daniele, vraiment aurait-il mieux valu que jusqu' au bout nous ne sachions pas qui nous avions eu l'occasion de rencontrer ? Nous savons reconnaître les poissons dans la mer, les étoiles dans le ciel et nous devons ignorer les personnes sur la terre ? « Non, je ne le pense pas, je lui en suis même reconnaissant. » En cela aussi Daniele était généreux et il savait rendre justice aux autres. « Je me suis senti plus grand grâce à elle, c'est un honneur qu'elle m'a fait. Pourtant, quelle drôle de fille, trop dure pour moi, habitué à cette belle île avec les bateaux de pêche, la guitare, les vacances. Et soudain, dans un endroit heureux et endormi, surgit la vie balafrée d'une personne qui semble comme nous. » « Oui, Daniele, elle semble comme nous et ne peut même pas nous raconter sa vie. »
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Dire «à vos ordres » lui répugnait, porter I'uniforme le rendait malade de honte et il le retirait en sachant qu'il risquait la prison militaire. Le 8 septembre fut le jour du soulagement. Pour lui, le fascisme avait été un épouvantail, goudronné de noir pour être le contraire du rouge. Jusqu'au malheur de la guerre, il s'était agi pour lui d'une vulgaire imi-mtation de l'histoire de Rome. Puis le fascisme avait fait la maudite erreur de se prendre au sérieux, de se croire guerrier.
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Nicola me dit dans sa langue rapide : " Io nun capisco manco o mare. Nun saccio pecché'o viento' e tempesta fa onda a mare, e polvere'n terra. Campo a mare da che' ? E sulamente mare, acqua e sale, ma è funno assai.

" Je ne comprends même pas la mer. Je ne sais pas pourquoi le bateau flotte, pourquoi le vent de tempête soulève des vagues dans la mer et de la poussière sur terre. Je vis au bord de la mer depuis ma naissance et je ne la comprends pas. Et pourtant qu'est-elle-donc ? Elle n'est que mer, eau et sel, mais elle est profonde, très profonde.
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On obtient de la mer ce qu'elle nous offre, non pas ce que nous voulons. Nos filets, nos palangres, nos nasses sont une question. La réponse ne dépend pas de nous , les pêcheurs. Ceux qui vont là-dessous chercher la réponse avec leurs mains se croient plus forts que la mer. Seule la surface nous revient, ce qui est en-dessous lui appartient, c'est sa vie. Nous frappons à sa porte, à fleur d'eau, nous ne devons pas entrer chez elle en maîtres.
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Sur cette île j'avais appris la liberté face à la vie close de la ville, pauvre liberté d'un corps enfin à l'air libre. Vous avez planté l'amour dans ma chair, vous me lancez dans le monde comme une balle perdue. L'amour renferme aussi la colère, le déclic qui fait se lever de sa chaise, comme tu me l'as montré. Tu m'as appelé hors de moi-même, Haia. Ce qui n'était possible que par toi, par toi qui te nommes vie.
Le vent emportait les mots avec lui, je ne sais si elle les entendait, si elle voulait les entendre. Elle me prit par le bras qui ne portait pas sa valise, le serra contre elle. Nous marchâmes lentement avec le vent qui venait de la mer. Mon corps maigre ne suffisait pas à l'abriter. Tu n'as vraiment rien mis dans cette valise. Elle s'arrêta un moment, puis avec un écho de métal, un fil d'argent dans la gorge, elle finit par dire : Je pense que nous sommes très courageux de ne pas pleurer.
Toi, qui avais déjà versé d'avance jusqu'à la plus petite goutte, moi, j'attendais un feu au bout de la nuit de ton départ. Même le sirocco qui rougissait nos yeux ne pouvait rien tirer de nous.
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Vidéo de Erri De Luca
Rencontre animée par Olivia Gesbert
De la bibliothèque paternelle à l'ombre de laquelle il a grandi jusqu'aux chantiers où il a été ouvrier, Erri de Luca a noué avec la lecture, puis avec l'écriture un rapport particulier pour bâtir une oeuvre double, celle d'une fiction romanesque aux forts accents autobiographiques et celle d'une réflexion sur l'Écriture. Depuis trente ans, c'est une oeuvre foisonnante et protéiforme qu'il bâtit, caractérisée par un style limpide, poétique, épuré. Ponctués de pensées, de métaphores, d'aphorismes, ses récits endossent souvent la forme d'une fable, d'une parabole empreinte d'une touche de merveilleux, dans une langue unique. Pour cette édition Quarto, ont été retenus une dizaine de textes publiés auxquels s'adjoignent cinq textes inédits, qui portent en eux la puissance de l'écriture d'Erri de Luca dans des genres littéraires variés, sa réflexion sur l'appartenance et l'identité, le poids du passé et l'importance de l'histoire, sur la fragilité et l'importance des relations humaines.
« Nous apprenons des alphabets et nous ne savons pas lire les arbres. Les chênes sont des romans, les pins des grammaires, les vignes sont des psaumes, les plantes grimpantes des proverbes, les sapins sont des plaidoiries, les cyprès des accusations, le romarin est une chanson, le laurier une prophétie. » Trois chevaux, Erri de Luca
À lire – Erri de Luca, Itinéraires, Gallimard, coll. « Quarto », 2023.
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