Les Eaux troubles du mojito et autres belles raisons d'habiter sur terre

Ils ont failli en faire leur métier, ils auraient pu, ils ont manqué d'un peu de chance, de singularité dans le talent, de pouvoir travailler. C'est étrange. La salle des pas perdus flotte autrement. Si l'on écoute plus longtemps, on voit ce que l'on ne voyait pas, les vitraux préservés dans les tons bruns, en haut du mur : Rouen, le Havre, Dieppe, Deauville.
On voit tout le plaisir du pianiste à l'aise devant son clavier, jouant pour des spectateurs infidèles_ mais quand même arrêtés par l'élan du trafic, et ces secondes dérobées sont belles.

Le vrai bonheur serait de se souvenir du présent.

Jules Renard, Journal, 9 octobre 1891.

‪Nager toutes les transgressions, se perdre, s'abîmer, chercher infiniment,descendre. Alors montera le plaisir.‬

On fête la convivialité de se retrouver en terrasse, de parler sans restriction. Prendre un cocktail, c'est chaud. Il y a souvent des couleurs d'îles, des rouges tropicaux, des saveurs de noix de coco, un petit côté soleil Club Med à boire au deuxième degré, en se moquant de sa propre soif, d'une gourmandise enfantine que le rhum va créoliser.

Parfois cette douloureuse injustice d'entendre des voix qui nous étaient presque indifférentes, et l’impossibilité de redonner musique à celles que nous aimions le plus.

"Souvenons-nous du présent. Vivons dans le présent. Avec le sentiment que c'est presque impossible."

Avoir cela en soi. Entendre cela au fond de soi parfois, quand on marche à flanc de colline, sur un petit chemin à peine tracé . Sentir un mélange profond de joie et de tristesse, avoir la chair de poule . Se dire que la terre est habitée .

C'était beau un dimanche, oui.....Attendre , reculer demain . Attendre que les joies dispersées laissent la place à l'idée du bonheur, qui donne le frisson . Juste la nuit qui vient enfiler un pull . Etre si fort ensemble, quand les autres s'éloignent , et qu'on se protége en carré

"Au bout de quelque temps, les noms ne sont plus des noms de personnes, de pays, de fleuves, mais seulement des atmosphères."

Souvenons nous du présent. Vivons dans le présent. Avec le sentiment que c'est presque impossible.