Ce roman n'est pas simplement une dystopie, mais bien une dystopie féministe et engagée politiquement, inspirée de
Monique Wittig et d'auteurs comme
Paul B. Preciado. Une ville close qui a rasé une colonie de femmes libres, qui (sur)vivaient entre elles, basée sur la sororité, l'autonomie, l'amour, la liberté. de cette colonie ont réchappé quelques femmes, qui vivent de nouveau parmi les Autres, ces gens qui travaillent pour l'Etat totalitaire, qui ne remette rien en question. La difficulté d'exister parmi ces personnes quand on a connu autre chose, quand le discours officiel n'a rien à voir avec la réalité du monde.
On alterne les points de vue de ces femmes et de Raphaël, un homme qui n'est pas comme les autres non plus. On découvre la vie cachée, nocturne, secrète de toutes ces personnes qui veulent autre chose, qui veulent brûler pour reconstruire, qui veulent être. On découvre le passé, les secrets, les sentiments de ces femmes, au moment de basculement.
Au-delà des thématiques d'une grande actualité, sur la politique, l'identité, le genre, les relations humaines, la société, c'est surtout un magnifique roman.
Wendy Delorme écrit avec une plume sublime, c'est beau à lire, ça percute, ça touche, ça reste dans la tête et dans le coeur. Et parce qu'un plaisir n'arrive jamais seul, au-delà de l'écriture merveilleuse, c'est d'une grande érudition. L'autrice mélange à son intrigue des références à des penseurs et penseuses très pertinent.e.s, on sent qu'elle est enseignante-chercheuse en plus d'être écrivaine. Engagée dans plusieurs collectifs féministes, elle réussit ce tour de force d'être érudite et poétique à la fois.
Ce n'est jamais lourd, ça ne fait pas étalage de connaissance mais c'est tout de même soutenu par des philosophies profondes, j'adore ce mélange qui fait réfléchir tout en touchant en plein coeur.