Il ne comprend pas qu’on l’applaudisse, le félicite. C’est simple comme la diphtérie. Il suffit d’observer et de marcher, de lever son cul du fauteuil en cuir de buffle. On connaît l’étonnement des mathématiciens à constater que tous, autour d’eux, ne savent pas résoudre ne serait-ce qu’une équation au troisième degré, cet étonnement sincère qu’on prend pour de l’orgueil quand il n’est que naïveté, l’étonnement de ces hommes que tous ne leur soient pas égaux, et que cela heurte les fondements de la République, quand on accepte plus volontiers que chacun ne peut courir le cent mètres en dix secondes (…).
Plutôt un pessimiste lucide, ce Sternberg, si ce n'est pas un pléonasme.
Avant que les Chinois qui se croient tout permis se permettent de donner des noms chinois à leurs villes, et jusqu’à leur capitale, n’importe quel pékin pouvait s’y retrouver sans ouvrir l’atlas. C’est donc à Guangzhou que débarque Yersin.
Écrire une Vie c’est jouer du violon sur une partition.
un homme essaie de mener son embarcation en solitaire et la mène plutôt bien. Derrière lui la mer efface son sillage.
Les Anglais supportent mal ces jeunes Français qui ne le sont même pas ou tout juste : un Suisse comme Yersin ou un Ukrainien comme Haffkine
La grandeur de la France retranchée dans ses villes d'eau
comme des curistes désœuvrés en peignoir blanc et sandalettes,
sous les lambris.
Il faut bien s'occuper.
p218
C'est encore l'idée saint-simonienne de la mise en valeur des richesses du globe. Un jour, il faudra bien inventer aussi le pneu, et le camion semi-remorque au-dessus, pour accélérer l'exploitation des bois. On est encore à cet époque où l'homme finit de se rendre maître et possesseur de la nature. Où la nature n'est pas encore une vieillarde fragile qu'il faut protéger, mais un redoutable ennemi qu'il faut vaincre. P83
Parce que au bout du compte, qu’on ait ou pas le vaccin antipesteux, on sait bien qu’on ne trouvera jamais le vaccin contre la mort des amis et que tout cela est un peu vain. On pourrait croire à une réussite exemplaire. Mais peut-être pas. Les cloisons de sa raison depuis l’enfance sont étanches à sa passion. Acier inoxydable. Jamais le cœur du réacteur ne franchira l’enceinte de confinement, sinon à la moindre fêlure ce serait la catastrophe, l’explosion, l’anéantissement, la dépression, la mélancolie ou pire encore, les foutaises de la littérature ou de la peinture, alors les lubies scientifiques, la pression telle sur la soupape que la pensée à jet sporadique dans son mouvement rotatif projette à tout va, invente dans tous les domaines. Et sans doute il s’en fout un peu Yersin, de son nom ou pas en haut de l’affiche.
Il souscrirait à l'individualisme de Baudelaire s'il l'avait lu, selon lequel il ne peut y avoir de progrès vrai que dans l'individu et par l'individu lui-même. Yessin est un homme seul. Il sait que rien de grand jamais ne s'est fait dans la multitude. Il déteste le groupe, dans lequel l'intelligence est inversement proportionnelle au nombre des membres qui le composent. Le génie est toujours seul.