Macadam est le recueil de onze nouvelles choisies parmi les meilleures de
Jean Paul Didierlaurent écrites entre 1997 et 2012 avant le succès (mérité) du Liseur du 6h27.
On retrouve dans ces nouvelles la verve, l'originalité, le côté doux et amer, la poésie et l'humour caustique si caractéristique de cet auteur.
Ces nouvelles ont en commun de mettre à chaque fois en avant un personnage d'apparence ordinaire comme par exemple le métier qu'il occupe, souvent d'ailleurs un métier en uniforme : un prêtre, un fossoyeur, une dame pipi (petit clin d'oeil au fameux Liseur), un musicien de fanfare… mais qui révèle au fur et à mesure de la nouvelle un aspect original voire paradoxal de ce qu'il parait ou ce qu'il devrait être. Pas la peine d'en dire davantage, cela tuerait d'emblée le suspense… car c'est bien d'une forme de suspense dont il s'agit ici et en cela l'auteur respecte tout à fait les codes de la nouvelle.
Il aime à décrire les comportements, fait monter le suspense et puis vient le grain de sable, le détail qui tue (pas seulement au sens figuré d'ailleurs…) qui amène à un enchainement de conséquences qui peuvent se révéler drôles, tendres ou graves. Car en effet chaque nouvelle ne joue pas exclusivement sur les variations de l'humour, elles peuvent aussi être d'une juste tendresse («
macadam », « le jardin des étoiles ») ou se révéler morbides ou malsaines (« Brume », « Rose Sparadrap »).
Je pense que ce que veut montrer l'auteur à travers ces dérapages, ces failles et ces petits détails qui chamboulent le cours de l'histoire, c'est en réalité l'humanité et la profondeur de l'homme à l'image de certains personnages qui peuvent être à la fois tendres et violents.
En tout cas, on sent chez l'auteur une réelle empathie pour les personnages qu'il dépeint et même s'il montre un penchant pour la satire à l'image des institutions dont il se moque (la religion notamment), il reste dans la juste mesure. Les personnages, par exemple, assument complétement leurs métiers qui pourraient passer comme des sous-métiers pour certains. La dame pipi qui nettoie les toilettes dans une arène (« Sanctuaire ») a la même importance que le toréro acclamé par le public.
Côté style, on retrouve également bien la signature de JP Didierlaurent : mise en attente du point de rupture que l'on sent poindre, le jeu de métaphores, et puis des citations qui pourraient à elles seules faire l'objet d'un recueil : « j'ai beaucoup plus appris sur l'âme humaine en restant assise derrière ma table et ma soucoupe que dans n'importe quelle encyclopédie. »