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Citations sur Kérozène (143)

J'aime la nuit. Pas parce que l'obscurité dissimule le contour des choses et qu'elle dilue les âmes, abolissant les frontières entre l'être et le néant, ou tous ces trucs pseudo-poétiques à la con. J'aime la nuit. Point. C'est comme ça.
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15 personnages et presque autant de portraits, qui se croisent dans une station service.
Ils ont tous en commun la violence de leur vie, subie ou provoquée et leurs névroses.

Un livre hilarant car totalement allumé, facile à lire grâce à des chapitres courts, une prose simple et des mots justes.
J'ai découvert cette autrice avec ce roman et je pense que je vais continuer avec elle !
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Mauricio ferma les yeux et dansa longtemps. Ça dura plusieurs joints, plusieurs chansons. Toutes les douleurs le traversaient mais il se sentait utile. Il ne voulait pas que ça s'arrête. Une fois vidées de leurs souffrances, les âmes s'en allaient, apaisées. La truie regardait Mauricio danser. Il savait qu'elle l'aimait, et il l'aima en retour.
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Elle, elle n'avait rien demandé. Rien. Bordel.
Le jour de sa conception, il avait dû y avoir une erreur dans la marche de l'univers. Quelque part dans la mécanique cosmique parfaitement huilée un rouage avait eu un petit raté. Une éjaculation intempestive, un spermatozoïde trop résistant, une molécule contraceptive défaillante et la voilà, Julianne, l'erreur.
Parfois elle se dit que c'est sans doute à cause de cette défaillance, par effet papillon, que le monde va si mal.
[...]
Ça a commencé il y a trente-huit ans, le bug de sa conception a provoqué d'autres bugs, qui en ont généré à leur tour de manière exponentielle, ça s'est emballé jusqu'à cette nuit, jusqu'à maintenant.
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23 h 12. Une station-service le long de l’autoroute, une nuit d’été. Si on compte le cheval mais qu’on exclut le cadavre, quatorze personnes sont présentes à cette heure précise.
 
Quelqu’un crie : « Madame ! » Une vieille enjambe le garde-fou et murmure pour elle-même : « Désolée, chaton. » La femme qui a crié s’appelle Julianne. Alertés, les autres lèvent la tête. Alika, assise sur un banc juste à côté d’elle. Victoire, une jeune femme au crâne rasé en train de faire le plein d’un petit SUV. Short court, jambes longues, combat shoes. Plus loin, sur le parking, Joseph, l’air d’un bon gars, grand, les épaules voûtées dans une chemise trempée de sueur. La seule qui n’a pas l’attention attirée vers la vieille c’est Gigi, trop occupée à vomir sur les pneus de sa 911. À quelques mètres d’elle, Juliette s’allume une clope, sous un panneau de sécurité routière. Elle tient la caisse de la station-service, avec Sébastien.
Juliette a remarqué la vieille quand elle est arrivée, une vingtaine de minutes plus tôt. Elle était seule. Après avoir fureté entre les rayonnages, elle s’est approchée du comptoir.
« Vous avez du gin ?
— Ah non, on ne vend pas d’alcool.
— Mais vous avez de la bière ? »

(Incipit)
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Il n'existe pas de luxe plus grand que celui de choisir le jour de sa mort. La dernière bouche qu'on embrasse, le dernier regard qu'on échange. Les bras qui nous serrent au moment de partir.
(P. 207)
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Elle pense à sa vie, à ce qui l'a conditionnée. Sans aucun doute sa grossesse, il y a quatre-vingts ans de ça... Elle essaie de se rappeler. Est-ce que les souvenirs peuvent survivre autant d'années? Ou finissent-ils par se réduire au récit qu'on s'en fait?
Monica ne sait plus trop. Elle se souvient qu'un gars de son village l'a violée, ça oui. À l'époque on n'appelait pas ça comme ça, on n'en parlait pas.
Elle rentrait de la kermesse et un garçon qu'elle connaissait, avec qui elle était allée à l'école, l'avait « attrapée » derrière le mur du cimetière. Elle n'en avait pas parlé parce qu'elle savait ce que les gens auraient dit. Que les garçons sont comme ça, que ce n'est pas bien méchant et qu'elle n'avait qu'à pas traîner dehors si tard.
[…]
C'est là qu'elle était tombée sur l'autre, André. Elle s'était débattue, il avait frappé, elle avait compris qu'il valait mieux le laisser faire. Elle avait eu terriblement mal, ça avait saigné, il y avait eu des odeurs qu'elle ne connaissait pas, celle de la bouche d'André, celle de l'alcool, et puis après celle de son sexe et des liquides qui en sortaient.
Elle était rentrée chez elle, s'était lavée, couchée, avait beaucoup pleuré, puis le lendemain était arrivé, et puis le jour d'après, elle n'avait rien dit et elle avait pensé que c'était fini.
Ce n'est que deux mois plus tard qu'elle s'était aperçue qu'elle était enceinte. Elle avait bien été obligé d’en parler à sa mère, qu’il avait rapporté à son père.[…] Il avait eu un rire triste et résigné. Il ne pouvait rien de plus pour sa fille. Le jeune André était le fils du directeur de l'usine dans laquelle il travaillait. Il n'avait pas d'autre choix que de se taire et serrer les dents. « Faire passer » ce bébé et oublier tout ça.
(P. 198)
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La télé était à Julianne ce que le feu de camp devait être aux hommes primitifs. Elle éloignait les ténèbres, réchauffait son corps et la protégeait des prédateurs. Lorsqu'elle l'éteignait, l'obscurité et la solitude la frappaient. Un uppercut dans le bas du ventre qui distillait sa petite dose de déprime quotidienne. Pour adoucir le choc, elle baissait d'abord rogressivement le volume.
(P. 174)
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Et pourtant... Alika se demande quel est ce monde tordu qui lui impose un choix aussi merdeux. Ça n'est pas une surprise, les signes qui démontrent la faillite de l'aventure humaine ne manquent pas. S'il existe un dieu là-haut qui a contracté un emprunt pour lancer son entreprise de civilisation humaine, Alika se dit que la situation qu'elle est en train de vivre est exactement le genre de cas qui devrait le pousser à déposer le bilan. Mais elle n'est même plus en colère. Elle est triste et fatiguée. Et elle se dit que c'est mauvais signe. Si la colère disparaît, elle se demande ce qui la fera encore tenir debout.
(P. 66)
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Enfin, elle doit admettre qu'ils n'ont jamais été brutaux avec elle. Et elle sait qu'elle a de la chance. Pour entendre régulièrement les témoignages de certaines de ses collègues qu'elle retrouve le dimanche dans le parc qui jouxte la maison de ses employeurs, elle est consciente d'être plutôt bien tombée. Les coups et les viols sont fréquents.
« Ne tombez pas enceinte. Vous subirez un test de grossesse tous les six mois. »
Son amie Rose est tombée enceinte de son patron il y a quelques semaines. Alika lui a conseillé d'aller à l'ambassade, de demander de l'aide. Mais Rose a préféré se jeter sous un train.
«Ne vous précipitez jamais à l'ambassade des Philippines, sauf si votre vie est en danger.»
(P. 65)
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