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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Aujourd'hui je vais évoquer Paradise, Nevada roman choral de Dario Diofebi. Il s'agit de son premier roman, en partie inspiré de sa vie de joueur professionnel. Cette fresque se déroule en 2015 à Las Vegas dans le milieu du jeu et en particulier celui du poker.
En trois saisons l'auteur tisse une intrigue dont l'acmé est un incendie dans un casino. Ce moment est comme la chute d'un empire, la rédemption par les flammes avant la renaissance du stupre. Toute l'action principale est située au sein du Positano, un hôtel de luxe abritant restaurants et casinos avec plusieurs salles de jeu où les habitués ont leurs rituels. Dans ce microcosme se croisent sans vraiment se connaitre le richissime propriétaire des lieux, les employés subalternes, les croupiers, une journaliste en mal de scoop, les joueurs amateurs de passage et quelques professionnels qui passent leurs journées à miser des sommes ébouriffantes pour essayer de gagner un maximum d'argent. Paradise, Nevada est écrit par un joueur émérite de poker ce qui explique les passages cabalistiques où sont décrits les tours de table avec la codification employée par les joueurs. Les notes de bas de page ne suffisent pas toujours à tout comprendre mais malgré ce détail la lecture demeure agréable. Les mathématiques sont également convoquées dans ces pages rythmées à la gloire de ces pros qui mémorisent les cartes distribuées et évaluent les probabilités et les chances de succès afin d'orienter leurs décisions. L'univers du jeu est assez fascinant avec la tension perceptible dans chaque partie, la rivalité psychologique entre les joueurs et la discrétion absolue des croupiers et autres employés. Les protagonistes principaux sont jeunes et se prénomment Ray, Tommaso, Lindsay et Mary Ann ; les chapitres qui leur sont consacrés alternent et sont entrecoupés d'interludes qui permettent d'approfondir le portrait de la cité du jeu. Ils veulent réussir, changer de vie, gagner de l'argent, être célèbres, devenir américain malgré l'absence de visa. Vegas est le parfait écrin pour cultiver leurs rêves. Mais la réalité se révèle moins lumineuse et leurs propres doutes et leurs repères familiaux vacillant s'imbriquent avec leur quotidien. Durant ces quelques semaines au coeur du Nevada, cet État américain désertique et chaud, fortement dépendant de la santé de la ville lumière, ces jeunes s'installent et élaborent des projets. Les travailleurs de l'ombre de Vegas vivent au milieu du luxe sans eux-mêmes en bénéficier directement. Certains se réunissent dans un syndicat fantôme et fomentent un mouvement de révolte pour dénoncer leurs conditions de vie et obtenir des miettes plus généreuses. L'incendie est la malencontreuse conséquence de ce qui devait être un piratage informatique de menace vis-à-vis des dominants. La formule « ce qui se passe à Vegas reste à Vegas » est largement illustrée dans le roman.
Paradise, Nevada est le roman de Las Vegas, la ville (artificielle) est l'héroïne de l'intrigue avec tous ces personnages qui y passent, y vivent et aspirent à en devenir les rois. Ce roman est à l'instar de Bloody Miami de Tom Wolfe un pavé qui immerge avec talent dans une ville et ses méandres.
Voilà, je vous ai donc parlé de Paradise, Nevada de Dario Diofebi paru aux éditions Albin Michel.
Lien : http://culture-tout-azimut.o..
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Diofebi a gardé de sa carrière de joueur de poker un certain goût pour les paris risqués. Vous imaginez, vous, lire un pavé de plus de 600 pages sur le poker?! Moi non plus a priori, et j'ai ouvert ce premier roman plein d'audace avec beaucoup de scepticisme mais prête à relever le défi!
On embarque pour Vegas à la suite de quatre personnages dont les destins se croisent sur le Strip : Ray, l'as de la probabilité, prêt à se lancer dans la carrière de joueur de poker pro ; Mary Ann, ancienne reine de beauté devenue serveuse dans le prestigieux hôtel Positano ; Tom, l'Italien, roi de la chance, débarqué à Vegas après avoir gagné un tournoi de poker, et devenu immigré clandestin depuis l'expiration de son visa. Et puis il y a Lindsay, l'atout de l'histoire, aspirante écrivaine, qui rêve de créer un récit à la hauteur de la folie de la ville de tous les possibles.
Ce premier roman, écrit par un italien, émigré aux Etats-Unis pour faire une carrière de joueur de poker pro, et devenu professeur d'écriture créative à New-York, est largement autobiographique, mais l'extravagance de la narration, le foisonnement des thématiques, l'infinie multiplication des trajectoires croisées dans le roman en fait bien un pur produit de la ville de tous les excès. On y voit Vegas sous toutes les coutures, aussi clinquante et vulgaire sous la lumière crue des néons, que désabusée et triste au petit matin. Diofebi s'amuse à nous embarquer dans la fabrique de l'illusion, dans les combines des uns et les coups de poker des autres, là où le destin de chacun est suspendu au hasard, comme dans la vie en somme.

Sceptique j'étais, convaincue je suis, du talent de l'écrivain Diofebi et de son audace. On lui pardonne même sa tendance à nous expliquer à coups de notes de bas de pages les arcanes du poker 🤯 parce que son roman si ambitieux, raconte avec une originalité folle l'envers du rêve américain et l'incroyable élan qui pousse chacun des personnages à parier sur leur propre vie.
Une très belle découverte de cette rentrée en somme!
Prêt.e.s à tout miser sur "Paradise, Nevada"?
Les jeux sont faits, rien ne va plus!
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Quatre personnages habitent le premier roman foisonnant de Dario Diofebi qui se déroule à Las Vegas. Il y a Ray, qui a préféré abandonner ses études pour devenir joueur de poker en ligne. Tommaso, dit Tom, en exil de son Italie natale et en situation irrégulière sur le sol américain. Mary Ann, ex-mannequin devenue serveuse et surtout dépressive. Et Lindsay qui se rêve un destin d'écrivain mais qui pour le moment s'occupe de son frère et rédige des articles pas très intéressants. Autour de ce quatuor gravite par ailleurs tout un monde : joueurs, famille, amis, collègues... qui constituent une galerie de caractères extrêmement riche.

Le prologue indique au lecteur qu'un drame est survenu en mai 2015 au Positano, hôtel-casino de luxe, situé donc à Las Vegas. Une bombe y a explosé, faisant d'innombrables dégâts et des victimes. L'auteur nous invite alors à remonter quelques mois en arrière pour comprendre quels mécanismes se sont mis en route pour conduire à cette catastrophe et dans quelle mesure chacun des protagonistes est mêlé à l'affaire.

Et c'est ce qu'il va faire durant 640 pages extrêmement denses. Ce roman est terriblement ambitieux, plein de passages formidables mais souffre quand même de quelques longueurs, notamment dans les interminables descriptions de certaines parties de poker. Evidemment, le roman se passe à Vegas, paradis du jeu, et l'auteur est lui-même un ancien joueur professionnel. On ne peut donc pas totalement lui reprocher de nous faire partager sa passion. Au pire, on sautera quelques pages pour se concentrer plutôt sur celles qui sont consacrées à la vie des quatre personnages principaux, leurs difficultés, leurs ambitions, leurs rêves.

Dans ces moments, le récit se fait satire sociale, analyse économique, histoire familiale... embrassant une multitude de sujets et donnant un éclairage qui semble assez juste sur cet endroit particulier de l'Amérique. Là où tout est faux et où le bluff est roi. Nous découvrons alors l'envers du décor, une réalité loin des paillettes. Et Dario Diofebi nous fait alors sentir tout ce paradoxe qui réside dans ce haut lieu du luxe à l'intérieur duquel se heurtent les classes sociales.

Le roman est par ailleurs servi par un style très fluide et l'ensemble n'est pas sans rappeler quelques spécialistes américains du roman fleuve tels que Jonathan Franzen ou Richard Russo. Un premier roman prometteur, en espérant que l'univers du poker ne devienne pas un thème récurrent !
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Paradise, c'est le vrai nom de la bourgade qui abrite le fameux strip et ses casinos mais que tout le monde résume à l'appellation Las Vegas pour ne pas entrer dans les subtilités cadastrales. L'endroit où tout est possible. On en connait les lumières, les excès, les décors extravagants, les nuits blanches et les tapis verts ; ce roman nous emmène dans les coulisses, au plus près des acteurs qui permettent à ce gigantesque barnum de scintiller et de diffuser son ivresse en continu. C'est assez mouvementé, l'auteur bâtit un roman plein de vie où se croisent des personnages auxquels il est facile de s'attacher. On lui pardonne le classique défaut du débutant si passionné par son sujet qu'il a tendance à charger un peu la barque du contenu (pour ceux qui ne jouent pas et ont oublié leurs cours de probabilités) car pour le reste, c'est du costaud.

Dans les pas de Ray, joueur de poker en ligne qui vient tenter sa chance en live, de Tom, un jeune italien dont le visa touristique a expiré mais qui ne compte pas repartir avant d'avoir fait fortune, de Mary-Ann, ancien mannequin désormais serveuse et de Lindsay, issue d'une famille mormone, journaliste qui rêve de tout quitter pour devenir écrivain à San Francisco, le lecteur est invité à découvrir les événements qui ont mené à l'explosion d'une bombe au Positano, l'un des plus luxueux hôtels casinos de Vegas. Dont bien sûr je ne dirai rien ici. Grâce à eux, à leurs parcours, l'auteur utilise ce terrain de jeu qui cristallise tous les enjeux micro et macro de la société actuelle : enjeux sociaux, économiques et intimes lorsqu'il s'agit de trouver un sens à sa vie. Il y est question d'image, d'isolement au sein de communautés factices, de chance (ou pas), de droits sociaux, d'émancipation et de la façon dont chacun cherche son bonheur. On y côtoie le quotidien des joueurs qui en ont fait une profession et de ceux qui dans l'ombre s'échinent à faire marcher l'usine à rêves pour quelques dollars et bien peu de considération (terrifiants passages sur les dates de péremption des serveuses trop "âgées").

L'auteur y a mis beaucoup de lui-même (le personnage de Tom a un parcours similaire au sien), on sent sa fascination pour l'endroit, l'histoire de Vegas, mais il parvient à sublimer ce point de départ pour donner à son roman une dimension politique et sociétale intense. Sans jamais oublier de divertir son lecteur. J'ai pris beaucoup de plaisir à m'immerger dans ce Paradise dont je n'avais jusqu'à présent exploré que les façades accessibles aux touristes de quelques heures. Décidément les primo-romanciers dénichés dans la collection Terres d'Amérique valent le détour. Après la révélation Michael Christie (Lorsque le dernier arbre), Dario Diofebi prend joliment le relais. Curieuse de voir ce qu'il écrira dans les années à venir.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Bienvenue à Las Vegas, ville mythique, vendant du rêve à ses milliers de joueurs venus du monde entier. Bienvenue dans ses hôtels, ses casinos. Bienvenue à tous ceux qui sont venus ici, et à ceux qui y sont restés. Parmi eux, nous avons Mary Ann, mannequin qui a craqué et qui est venue prendre un nouveau départ ici, loin de tout ce qui a constitué sa vie jusqu'à présent, loin aussi de l'image qu'elle renvoyait à travers les publicités dans lesquelles elle apparaissait, ou encore la quantité de photos qu'elle postait sur les réseaux sociaux, comme toutes les jeunes femmes de son âge. Nous rencontrons aussi Ray, aussi jeune qu'elle mais qui lui aussi repart à zéro, lui qui a frôlé ce que je nommerai le « burn out » à force de jouer au poker en ligne, et qui tente ici de jouer au poker « en live ». Peut-être croisera-t-il Tommaso – c'est facile à écrire, mais Tommaso est arrivé aux Etats-Unis grâce à un formidable coup de poker. Il est persuadé que sa vie est désormais ici et pense qu'il pourra rester, malgré tout. Lindsay, elle, n'est pas du tout intéressée par le poker. Elle est journaliste, mais elle rêve de mieux, de devenir écrivain, notamment. Son petit frère, le seul à être véritablement dans la confidence, le seul à comprendre ses désirs, est son premier lecteur, et son premier conseiller.
Je pourrai partir dans une analyse un peu banale, très technique, à savoir que le récit alterne les différents points de vue de chacun de ces quatre protagonistes, et qu'il est basé sur des retours en arrière, qui nous font découvrir l'avant-explosion, mais aussi le passé de ces quatre protagonistes et de certains de leurs proches. Nous découvrons les fils ténus qui lient certains d'entre eux à d'autres, comme si, finalement, le monde de Las Vegas n'était pas aussi grand qu'il voulait l'être. le tout n'est peut-être pas de se croiser mais de voir véritablement l'autre, d'écouter l'autre, même ce qui ne fait pas plaisir à entendre, même ce que l'on ne soupçonnait pas. Ce n'est pas forcément plus facile pour Lindsay et son frère, même si leur proximité facilite peut-être un peu les choses.
L'explosion agit comme un révélateur, de ce qu'est Las Vegas, de ce que sont ceux qui y vivent, ce qui y passent. Se remettre en cause, ouvrir les yeux, redonner du sens à ce que l'on fait, voir réellement ceux qui les entourent. Beaucoup de bouleversements pour cette ville foisonnante et fragile aussi.
Un premier roman à découvrir.
Lien : https://deslivresetsharon.wo..
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Derrière ces personnages désabusés, tous gravitant autour du coeur névralgique de ce roman choral, un hôtel-casino lumineux mais glauque, se cachent les blessures de l'Amérique – l'exploitation salariale, l'addiction, la nouvelle génération incomprise, l'immigration, sujets épicés ici de l'odeur sale des billets froissés (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2023/08/31/paradise-nevada-dario-diofebi/)

Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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Vegas ! le paradis des flambeurs, un monde de luxe et d'ambition, de rêves et de désillusions.
Le Positano Luxury Resort & Casino a été construit en 1999 par le millardaire al Wiles. Réplique d'un village amalfitain, il est le souvenir d'une maîtresse enfuie.
Ce premier mai 2015, une bombe posée dans le salon Scarlatti signe la fin d'un monde pour tous ceux qui s'y sont retrouvés un an plus tôt.
Ray Jackson, fils de libraires californiens, a quitté de brillantes études pour se lancer dans une carrière de joueur de poker en ligne à Toronto. Surdoué en mathématiques, il vient pourtant de connaître sa première défaite. Contre un ordinateur ! Avec l'interdiction en 2011 du poker en ligne, Ray veut absolument renouer avec la victoire à Vegas.
Mary-Ann rêve d'être actrice mais elle se perd dans une éphémère et décevante carrière de mannequin sur les réseaux sociaux. Sa tante la pistonne pour un poste de serveuse dans le complexe de Wiles. Jeune et jolie, elle a le profil de l'emploi, contrairement à sa tante qui sera bientôt licenciée en raison de son âge.
Tom habite le quartier de Rebibbia à Rome. Son frère l'entraîne dans une partie de poker où le jeune homme chanceux gagne un voyage et un séjour à Vegas. Là, entraîné par Trevor, il décide de rester en devenant un immigré en situation illégale.
Lindsay, est issue d'une famille mormone. A vingt-huit ans, elle vit avec son frère, un geek ralenti par la maladie de Guillain-Barré. Depuis un reportage repris par CNN, elle cherche le scoop qui lancera sa carrière de journaliste.
Chacun de ces quatre personnages est en rupture avec le passé, en quête d'un avenir radieux. Nous allons les suivre dans cet enfer doré de Vegas avec leurs illusions, leurs luttes, leurs espoirs jusqu'au croisement de leur destin en ce jour du premier mai 2015.
Né en Italie, Dario Diofebi porte un regard extérieur sur l'Amérique. En se plaçant à Vegas coeur battant du poker qu'il connaît bien, il est au centre du pouvoir de l'argent et des désillusions d'une jeunesse en quête de sens.
La construction de ce roman est remarquable, ambitieuse mais plutôt maîtrisée. Il faut prendre le temps de connaître chacun des personnages, de comprendre leur passé pour profiter ensuite du potentiel du récit et du dénouement. Même si parfois, je me serais bien passée de traîner sur des chemins de traverse ( notamment dans l'Ouest avec Orson et Lindsay).
L'auteur entrecroise les parcours des quatre personnages principaux balayant ainsi les problèmes de confiance en soi, d'immigration, de classes sociales, de piratage informatique, de féminisme, de la création littéraire, du leadership dans les universités américaines. Les personnages secondaires finissent de balayer le microcosme diversifié de Vegas. Et finalement, dans ce monde où chacun n'a d'yeux que pour ses petites histoires, la connexion réelle à l'autre n'est-elle pas la solution? L'avenir n'est peut-être pas dans le changement mais dans la défense de ce que l'on aime.

Lien : https://surlaroutedejostein...
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Qu'une grande partie du Strip de Las Vegas, la ville du péché, regroupant nombre de grands casinos, se trouve sur le territoire de la ville Paradise, Nevada, ne manque pas de sel. C'est bien américain d'imaginer une ville de lumière sortir du désert à cet endroit.

Dario Diofebi possède une main de vainqueur dans ce poker menteur qui sert de trame à son imposant premier roman.

Las Vegas est une expérience unique, explosion de lumières et de bruits, les cinq sens surstimulés à chaque seconde. Mais c'est d'une autre explosion dont parle ce livre, bien réelle, à peine évoquée d'un mot dans le court prologue.

Le reste n'est qu'histoire(s), celles de plusieurs personnages immergés dans les travées de Sin City la ville qui est bien le personnage principal, et qui seront acteurs d'une manière ou d'une autre de cette détonation et du souffle qu'elle produira. Rendez-vous 640 pages plus tard pour comprendre l'allumage de la mèche.

Plusieurs destins vont s'entrecroiser. Ray, ancienne star du poker en ligne (jeu interdit aux USA, qui l'a forcé à émigrer au Canada), venu se refaire en face à face. Mary Ann, mal dans sa peau, tente de trouver un sens à sa vie, et se retrouve serveuse dans le Strip, pas le meilleur endroit pour se reconstruire. Tommaso, l'italien renfermé, devenu clandestin après l'expiration de son visa touristique. Et enfin Lindsay, journaliste débutante, apprentie écrivaine, et mormone, qui cherche à lancer sa carrière.

Le roman du primo-romancier italo-américain vivant entre Rome et Brooklyn, est dans la veine des grands romans d'outre-Atlantique, à la Tom Wolfe. A cheval entre l'hyperréalisme et la fiction, ciblant les travers d'une société angoissée et malade. Sa sensibilité européenne, se sert de Vegas comme l'incubateur de son analyse sociétale, usant des personnages comme moteurs à l'explosion.

Un récit particulièrement touffu, très documenté. Une sorte de Zola du XXIème siècle, et un plongeon dans le sable, la sueur et le stupre d'une ville complètement folle.

Dario Diofebi n'a pas choisi ce thème et ces protagonistes par hasard. Il y a mis beaucoup de lui, assurément. Ancien joueur de poker professionnel (comprendre : passer ses journées à miser des sommes importantes, dormir un peu et rejouer encore et encore), cette expérience lui a servi à construire le personnage de Ray. Et revendiquant ses origines italiennes et ses valeurs européennes, à travers Tommaso.

Paradise, Nevada est l'endroit où le rêve américain prend toute sa dimension, où on peut se construire une renommée aussi vite qu'on peut chuter en enfer.

Entre envoûtement et horreur, l'auteur décrit Las Vegas comme un microcosme de notre société actuelle, celle du paraître et de la satisfaction immédiate des désirs primaires. Un univers gangrené par la corruption et les ambitions personnelles, où les nouveaux dieux sont des joueurs invétérés.

Le roman est à l'image de ce milieu, fascinant et aussi parfois un peu irritant. Heureusement, bien davantage positivement, avec ce qui se révèle une lecture particulièrement prenante.

Certains passages, peu nombreux, donnent l'impression que l'auteur a voulu étaler sa science (du poker), au risque de se montrer un peu condescendant envers ceux qui n'y connaissent rien ou ne s'intéressant pas à ce jeu. Mais c'est bien le seul défaut que j'ai pu trouver à ce roman foisonnant, addictif, limite hypnotisant.

C'est vraiment une lecture du monde, à travers les strass et les paillettes, les lumières éblouissantes. Mais aussi ce qu'il se passe derrière le rideau, celui accessible qu'à quelques personnes, ambiance plus feutrée, mais où les parieurs jouent leurs vies à chaque seconde.

A l'image du personnage socle qu'est Ray, le genre matheux, surdoué mais un brin inadapté émotionnel et social, qui ne voit (au début) le salut que par la rigueur décisionnelle qui ne doit jamais être altérée par les émotions. Il voit à travers les équations.

Un autre match se joue ici, celui de la nouvelle aire du Big Data contre l'instinctif. de quoi renverser la table des principes ancestraux qui régissent la ville.

C'est bien un livre-monde que Diofebi a réussi à créer, et des destins qu'il prend le temps de dessiner. Pour qu'on entre en empathie, y compris quand ces caractères vont à l'encontre de nos valeurs. Avec un art consommé du suspense. Des personnages manipulés à travers cette machination qui va engendrer le chaos. Mais le chaos n'est qu'un principe méconnu de l'ordre, c'est bien connu.

C'est là tout le talent d'un bon écrivain. Parce que derrière tous les excès pointe une vraie humanité. Quand à savoir ce qu'il en restera à la fin, à vous de vous laisser prendre par ce pavé. Et penchez-vous au passage sur le concept du « dilemme du prisonnier ».

A Las Vegas, chaque cm² bruisse de monde, et derrière se cachent les vrais piliers de ce Grand Jeu. Mais aussi les invisibles, les inaudibles, qui ont leur mot à dire.

Dario Diofebi dresse un tableau réaliste, acerbe, affiné et affûté du capitalisme à travers cette étonnante vision de Vegas. Entre théorie des jeux et dynamique de groupe, il décrit avec force un univers où se meuvent des personnages attachants par leurs failles, dérangeants aussi.

Paradise, Nevada, destination finale, même dans la ville du péché la lutte des classes peut secouer les fondations. Voilà un premier roman vraiment explosif !
Lien : https://gruznamur.com/2023/0..
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Dario Diofebi, nous plonge dans l'envers du décor de Vegas, un véritable parc d'attraction pour adultes consentants, à travers différents personnages, des joueurs de poker experts ou amateurs, en passant par les serveuses, les immigrés, les journalistes, et même les résidents ou encore les touristes tout un monde qui pullulent avec parfois plus d'espoir en poche que de dollars. 

En commençant par un final explosif et intriguant, il revient sur ce qui a conduit le Positano au désastre, et nous aide à comprendre comment il en est arrivé là. 

Un roman très représentatif de tout ce que l'on peut voir à Vegas, du plus clinquant au plus désespérant, un condensé de folie, de richesse et de gaspillage, où les paillettes cessent finalement de briller dès que le jour se lève, que le voile tombe et que les rêves s'évanouissent une fois les feux des projecteurs éteint. 

Un premier roman ambitieux, assez bluffant même si certaines parties de poker restent du domaine de l'incompréhensible pour moi pauvre novice, mais qui m'a permis de me replonger dans mes souvenirs de voyage, à l'époque où je commençais déjà à trouver aberrant toute cette démesure en plein désert mais tellement représentative de l'Amérique capable du meilleur comme du pire. 

Dario Diofebi joue un véritable coup de poker, risquant de laisser au tapis quelques lecteurs mais qui n'a jamais pris de risque à Vegas ? 

Et puis c'est ça l'Amérique, grandeur et décadence, richesse et pauvreté, tout un savant mélange qui représente bien notre société d'aujourd'hui, quoi qu'on en dise. 

Paradise, Nevada vous fait vivre une expérience hors norme, tout comme Vegas vous le proposera pour ceux et celles qui se laisseront tenter par ce paradis artificiel qui possède encore quelques secrets bien gardés, pas toujours très catholiques. 


Ville du péché un jour, ville du péché toujours. 

À vous de voir, moi j'ai adoré.

Chronique complète sur mon blog :
➡➡ https://madosedencre.over-blog.com/2023/08/paradise-nevada.html
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RV off. Je relance de 150. Flop D8 6 arc-en-ciel. Je suis avec 100. Tournant à 10. Je relance à 500. La rivière est un valet. Alors, se coucher ou bluffer ? Me voilà à une table de poker où s'échangent des jetons à plus de 1 000 dollars. Plutôt insolite, n'est-ce pas ?

Las Vegas, ses casinos, ses machines à sous et ses tromperies de tous ordres. Sa faune, faite de touristes un peu nazes, de spots - ces clients que l'on flaire moins doués et qui vous renfloueront peut-être-, de gros poissons prêts à perdre des fortunes pour se tirer de l'ennui, de regs - des pros du poker capables de jouer des dizaines d'heures de suite et de tirer de substantiels revenus de cette activité.

Et puis son personnel. Les charmantes jeunes femmes qui vous servent vos consommations gratuites, les croupiers, les barmen. Tout l'envers du décor.
Pendant plus de 600 pages, Fario Diofebi se sert de ce cadre pour nous livrer une analyse psychologique, sociologique des Etats-Unis de 2015. Avec un sens du détail parfois très drôle, il croque autant de personnages que nécessaire à son projet. Mary Anne, ancienne mannequin, dépressive et égocentrée. Karen, sa tante, qui la fera rentrer au Positano, un hôtel-casino de luxe, réplique exacte du petit village amalfitain où son propriétaire a vécu de belles amours. Tommaso, un Romain dont l'estime de soi frise avec le néant, petit joueur, gagnant improbable d'un voyage à Las Vegas, clandestin depuis que son visa a expiré. Ray, fils de libraires, ancien joueur de poker en ligne, fulgurant dans ses analyses, bien décidé à ne laisser aucune émotion infléchir la courbe de ses réussites au jeu. Lindsay et son frère Orton, Mormons tous les deux. Elle est journaliste, il serait thésard s'il envoyait sa candidature à l'université. En attendant, il écrit sur le désert et elle réalise des aspics vegan en hommage à sa grand-mère.
Toute une galerie de portraits donc et une histoire qui commence et finira par une explosion. Entre les deux, c'est drôle, bien conçu, brillant. le service presse vous vendra ce livre comme un « roman noir » « au sens du suspens assumé », mouais… faudrait pas exagérer non plus. L'intrigue n'est pas des plus nourries et le suspens n'est pas haletant. Mais ça se tient et il existe effectivement une raison romanesque de rassembler tous ces personnages au même endroit.

C'est aussi que, n'ayant, malgré mon entrée en matière en forme de bluff, aucune appétence pour le poker, je n'ai pas ressenti ce frisson qu'auront peut-être d'autres lecteurs joueurs. Les descriptions des décors en carton-pâte, des cocktails servis n'ont pas ravivé chez moi le souvenir de moments particuliers. le regard torve de qui actionne machinalement le bandit manchot, comme halluciné, un peu plus. Vaguement. Des touristes chenus, en T-shirt et banane sur bedaine, sur la côte normande. Bref, rien d'exaltant.

J'ai apprécié en revanche le style, l'ampleur de l'ambition aussi. La finesse des caractères. Une esthétique de l'absurde au sens philosophique du terme. Bref, c'est intelligent, brillant (et un peu long).
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