J'ai attendu quelques jours pour écrire mon avis sur Frère d'âme de David Diop, mais je me dépêche de le faire parce que j'ai peur d'en perdre la musique… Il me semble en effet que c'est bien de cela qu'il s'agit : de musique.
Alfa Ndiaye, le narrateur, est un de ces Africains, tirailleurs sénégalais disait-on quel que soit leur pays d'origine, ceux qui sont venus en France pour « faire » la guerre, la Grande, celle de 14-18. Il combat vaillamment, et avec lui combat aussi son « plus que frère », Mademba Diop jusqu'à ce que ce dernier tombe, éventré, le « dedans dehors ». Alfa Ndiaye ne l'a pas achevé bien que Mademba le lui ait demandé plusieurs fois. « Par la vérité de Dieu », il l'a regardé mourir, et la colère est montée en lui. La rage, plutôt que la colère. Une rage qui, à chaque assaut, le pousse à revenir dans la tranchée après tous les autres, avec un trophée… Au début on le fête, on l'acclame, et très vite on a peur, peur de sa rage et de ce dont il est capable.
J'ai trouvé ce livre remarquable tant par ce qu'il raconte que par la langue que
David Diop utilise. Certaines expressions viennent scander le récit comme autant de leitmotive (je parle bien de musique) que j'ai fini par attendre et par chercher. J'ai cependant été beaucoup plus touchée par la première partie, les 95 premières pages, que par la suite. Si la langue reste aussi belle, le propos m'a moins convaincue. Ce roman donne envie de lire à haute voix : c'est un texte à entendre autant qu'à lire, je crois.
Challenge multi-défis 2019