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Citations sur Crime et Châtiment (595)

Si, par exemple, on me disait jusqu’à présent : ‘‘aime ton prochain’’ et que moi je l’aimais, qu’est-ce que cela donnait ? […] cela donnait que je déchirais mon manteau en deux, je partageais avec mon prochain, et nous restions tous les deux à courir à moitié nus, comme le dit le proverbe russe : ‘‘à courir deux lièvres à la fois, on n’en attrape aucun.’’ La science, elle, nous dit : aime-toi d’abord toi-même, avant les autres, car tout au monde est basé sur l’intérêt individuel. Si tu t’aimes toi-même, tu arrangeras tes affaires comme il faut, et ton manteau restera intact. Quant à la vérité économique, elle ajoute que plus la société compte d’affaires individuelles bien arrangées et, pour ainsi dire, de manteaux intacts, plus ses bases sont solides et mieux s’établiront les affaires communes. Ainsi donc, en acquérant uniquement et exclusivement pour soi, par là même, j’acquiers, pour ainsi dire, pour tout le monde, et je fais en sorte que mon prochain reçoive un peu plus qu’un manteau déchiré et, cela, non plus par la charité d’un particulier, d’un individu, mais par suite au succès général.
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Soudain, il entendit des pas dans la chambre de la vieille. Il s'arrêta et se figea, comme un cadavre. Mais il n'y avait pas de bruit, c'était, sans doute, une hallucination. Soudain, on entendit clairement un cri léger, ou c'était comme si quelqu'un avait, sans bruit, d'un coup, poussé un gémissement et s'était tu. Et, de nouveau, un silence de mort, une minute ou deux. Il restait accroupi devant la malle et attendait, osant à peine respirer, mais, soudain, il bondit, saisit la hache et se précipita hors de la chambre.

Au milieu de l'autre pièce, il découvrit Lizavéta, un grand sac à la main; elle regardait, pétrifiée, sa s?ur assassinée, elle était blanche comme un linge et comme incapable de crier. En le voyant se précipiter, elle se mit à trembler comme une feuille, de tout petits frissons, et des convulsions lui secouèrent tout le visage; elle leva légèrement le bras, voulut ouvrir la bouche, mais, malgré tout, ne poussa aucun cri et, lentement, toujours de face vers lui, se mit à reculer devant lui vers un angle, en le regardant fixement, de tous ses yeux, mais toujours sans crier, comme si elle manquait d'air dans les poumons pour être capable de crier. Il se précipita sur elle avec sa hache; elle, ses lèvres firent une moue si pitoyable, comme les tout petits enfants quand ils commencent à avoir peur de quelque chose, qu'ils fixent des yeux l'objet qui leur fait peur et qu'ils veulent crier. Et, cette malheureuse Lizavéta, elle était tellement simple, tellement écrasée, à tout jamais terrorisée, qu'elle ne leva même pas la main pour se protéger le visage, même si c'était là, à cet instant, le geste le plus naturel et le plus indispensable, parce que la hache était levée tout droit devant son visage. Elle souleva tout juste, mais à peine, à peine, le bras gauche, beaucoup trop peu pour se protéger le visage, et, lentement, elle le tendit vers lui, en avant, comme pour l'écarter, lui. Le coup lui arriva directement sur le crâne, avec le tranchant de la lame, et lui fendit tout de suite la partie supérieure du front, presque jusqu'au sommet. Elle s'effondra net. Raskolnikov s'affola complètement, saisit son sac, le jeta à nouveau et courut dans l'entrée.
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Il ne fallait plus perdre un seul instant. Il sortit complètement la hache, la brandit à deux mains, en n'ayant presque pas conscience de lui-même, et, presque sans effort, presque machinalement, il laissa retomber le marteau de la hache sur le crâne. C'était comme s'il n'y mettait aucune force. Mais à peine avait-il baissé la hache que les forces naquirent au fond de lui.

La vieille, comme toujours, était tête nue. Ses cheveux rares, clairs et grisonnants, grassement enduits à l'huile, comme à son habitude, étaient tressés en une petite natte en queue de rat, et tenus par un débris de peigne en corne qui se dressait sur sa nuque. Le coup tomba juste sur le haut du crâne, ce qui était dû aussi à sa petite taille. Elle poussa un cri, mais très faible, et, soudain, s'affaissa sur le sol, même si elle eut encore le temps de lever les deux bras vers la tête. Dans une main, elle continuait de tenir son «gage». Alors, Raskolnikov frappa une deuxième fois, de toutes ses forces, toujours avec le marteau de la hache, et toujours sur le haut du crâne. Le sang jaillit, comme d'un verre renversé, et le corps tomba net. Raskolnikov fit un pas en arrière et se pencha tout de suite vers son visage: elle était déjà morte. Ses yeux étaient écarquillés, comme s'ils voulaient sauter à l'extérieur, tandis que le front et tout le visage étaient ridés et déformés par une convulsion.
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Mais le cœur ne cessait pas. Au contraire, comme par un fait exprès, il battait fort, plus fort, toujours plus fort… Il ne supporta plus, tendit lentement la main vers la clochette et il sonna. Trente secondes plus tard, il sonna à nouveau, plus fermement. Pas de réponse. Sonner pour rien ne servait pas à grand-chose, et puis, ce n’était pas naturel. La vieille, évidemment, était chez elle, mais elle était méfiante et seule. Il connaissait un peu ses habitudes… Il colla encore une fois son oreille sur la porte. Ses sensations étaient-elles si fines (ce qui, en général, était dur à imaginer), ou bien, réellement, entendait-on si bien, soudain, il distingua comme le froissement prudent d’une main devant la serrure, et comme le froufrou d’une robe juste derrière la porte. Quelqu’un, sans vouloir être remarqué, se tenait juste derrière la serrure, et, exactement comme lui, ici, à l’extérieur, ce quelqu’un écoutait, caché à l’intérieur, et, semblait-il, lui aussi, avait l’oreille collée à la porte…
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une question l’avait préoccupé : pourquoi presque tous les crimes étaient-ils découverts et révélés aussi facilement et pourquoi tous les criminels laissaient-ils des traces si évidentes ? Il en était arrivé à de multiples et curieuses conclusions, et, à son avis, la raison essentielle tenait au criminel lui-même : c’est le criminel lui-même, et presque tous les criminels, qui, au moment du crime, se voient soumis à une sorte de chute de la volonté et d’affaiblissement qui sont remplacés, au contraire, par une sorte de phénoménale frivolité enfantine et, ce, au moment précis où la raison et la prudence sont le plus indispensables.
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Tous les grands hommes ont été heureux (leurs peines étaient un bonheur, leurs souffrances étaient un bonheur), ils devaient être heureux. Un grand homme ne peut pas être malheureux. Et qu'on les crucifie, cela ne signifie rien...
Ai-je tué la vieille ? Je me suis tué, pas la vieille. Là, d'un coup, je me suis frappé pour toujours...

Notes et brouillons
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voilà deux cents ans que nous sommes déshabitués de toute action… Des idées fermentent, du reste, dit-il à Piotr Pètrovitch, il y a même une volonté du bien, quoiqu’elle soit enfantine ; on trouve aussi de l’honnêteté malgré l’afflux d’une nuée d’escrocs, mais de l’initiative, il n’y en a pas ! Ça ne court pas les rues.
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Il y a trois jours, dans une auberge, il y eut aussi une histoire : un autre écrivain avait dîné et ne voulait pas payer : « Pour cela j’écrirai un article satirique sur vous dans la gazette », avait-il dit au tenancier. Une autre fois, sur un bateau, un plumitif avait gratifié des plus gros mots la respectable famille d’un conseiller civil (sa femme et sa fille). Il n’y a pas longtemps encore un autre a été botté et jeté hors d’une pâtisserie. Voilà comment ils sont, les hommes de lettres, les littérateurs, les va-nu-pieds… ouais ! Attends que j’arrive moi-même chez toi… gare à toi alors ! Tu entends ? Va-t-en.
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Il se précipita sur elle avec sa hache ; elle, ses lèvres firent une moue si pitoyable, comme tous les petits enfants quand ils commencent à avoir peur de quelque chose, qu'ils fixent des yeux l'objet qui leur fait peur et qu'ils veulent crier. Et, cette malheureuse Lizavéta, elle était tellement simple, tellement écrasée, à tout jamais terrorisée, qu'elle ne leva même pas la main pour se protéger le visage, même si c'était là, à cet instant, le geste le plus naturel et le plus indispensable, parce que la hache était levée tout droit devant son visage.
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Qu'est-ce que tu en penses, est-ce que des milliers de bonnes actions ne pourraient pas effacer un seul petit crime de rien du tout ? Pour une seule vie - des milliers de vie sauvées de la pourriture et de la décomposition. Une mort, et cent vies en retour - mais c'est de l'arithmétique ! Et qu'est-ce qu'elle peut valoir, sur la balance commune, la vie de cette petite vieille phtisique, stupide, haineuse ? Pas plus que la vie d'un pou, d'un cancrelat, et, même ça, elle ne le vaut pas, parce que la petite vieille, elle est nuisible.
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