S'attaquer à
Louis Ferdinand Céline comme sujet de bande dessinée, c'est franchement périlleux.
Dufaux et
Terpant nous proposent une biographie romancée axée sur la fin de sa vie, on découvre un Céline dans ses retranchements, amer et toujours acerbe, celui d'après guerre, un personnage sulfureux, infréquentable, mais toujours considéré comme un grand écrivain.
le style du récit s'inspire du style de l'auteur, avec des phrases dures, cinglantes, mais on sent ici un peu trop l'effet de style, une recherche à y placer les bonnes phrases, au dépend d'une fluidité dans la lecture, et le graphisme, avec des effets de sépia, paraît presque trop naturaliste, presque photographique, trop réaliste et donc trop neutre pour s'accorder au personnage, j'aurais imaginé quelque chose de plus expressionniste. Je n'ai pas accroché au rythme,
le style narratif nuit à la fluidité, j'ai eu du mal à m'accrocher.
Mais ce qui m'a gêné le plus, c'est qu'on sent trop la volonté de vouloir comprendre ou d'expliquer Céline dans ses tergiversations antisémites, or je ne me trouve pas à ma place en tant que lecteur pour juger l'homme, et c'est un peu ce que nous proposent les auteurs : voyez, il envoie chier les allemands, il n'aime pas les flics (très à la mode en ce moment), il aide Bonnie and Clyde (c'est pas eux, je sais), on y perçoit un romantisme rebelle dans le personnage, un côté tête brûlée anarchiste. J'admire sa prose et son cynisme dans ses premiers romans, ce n'est pas pour autant que je voudrais lui trouver des excuses pour son antisémitisme. Cette bande dessinée m'a mis mal à l'aise, le sujet était périlleux et les audaces ne me semblent pas judicieuses. Peut-être que je n'ai rien compris du point de vue des auteurs, mais si j'ai pu me tromper sur leurs intentions, c'est que ce n'était pas clair, et un tel sujet ne peut le permettre. Il faut le reconnaître, ce livre ne tente pas de juger, mais à la lecture, on ne peut s'empêcher de se situer dans la position du juré, c'est ce qui m'a dérangé. Céline comme héros d'une oeuvre de fiction, je pense sincèrement que ce n'est pas possible, et cette bande dessinée ne parvient pas vraiment à prouver le contraire.