Citations sur Transparence (198)
Le président était issu d'une aristocratie de technocrates qui gouvernait le pays depuis que la constitution de la Ve République avait fait du président un monarque républicain.
Considérant que l’homme n’est fait que de matière destinée à se décomposer progressivement, cette pourriture gâchant au final tout ce qu’il y a de beau dans l’individu, en particulier sa pensée, sa sensibilité, son émotivité, son intelligence supérieure, nous avons considéré que toutes ces qualités aussi imparfaites fussent-elles méritaient d’être logées dans une enveloppe plus noble. Nous sommes passés de la chair au minéral et nous avons pris le parti que cette enveloppe durable soit l’exacte reproduction de la personne qui a vécu. Aujourd’hui voyez-vous, il est possible de reconstituer l’extérieur d’un être et ses fonctionnalités essentielles à l’identique tout comme sa psychologie et son âme sur la base des milliards de données collectées sur lui. Nous savons tout de chaque être humain raisonnablement connecté. Nous sommes capables de reconstituer son cerveau...
(...) on ne lui avait certainement jamais jusqu'ici présenté le mandat de Trump comme la période de l'apogée de la gloutonnerie et de l'asservissement des individus à leur industrie. L'Amérique, pour la première fois de son histoire, avait accepté d'être elle-même, résolument, sans effort d'apparence, de dissimulation, dominatrice, péremptoire et méprisante.
(p. 125)
Toi et moi, nous avons échoué sur ce qui est essentiel pour un être humain, la transmission. Dieu, pas toi, l’autre, Dieu seul sait où est notre fils, s’il est encore vivant ou pas, mais dans tous les cas, il nous a fuis. Éterniser deux êtres qui ont échoué le passage à la génération suivante, c’est ça que tu voudrais ? Ça n’a aucun sens, aucun.
Parce que la révolution digitale c'est le savoir, le savoir éperdu mais pas la compréhension. A quoi sert - il d'en savoir mille puissance mille fois plus que l'homme préhistorique si aucune pensée, aucun esprit critique n'est relié à la connaissance, si la connaissance de soi transite par un algorithme pour finir par vous normaliser, faire de vous un standard?
Le caractère, les qualités morales s’élaborent rarement indépendamment du contexte affectif des premières années, c’est d’ailleurs le propre de l’homme, cette fragilité de l’individu durant son apprentissage, quand il est aux mains des adultes, parents et autres, quand il est confronté au désenchantement provoqué par la révélation de leur faiblesse et de leur immaturité.
Car cette société, à aucun moment nous ne l’avons conçue comme un outil de la pensée, de la pensée critique en particulier neutralisée par l’injonction permanente à la connexion, à la production de données, une injonction de consommer et donc de produire indéfiniment mais à partir de ressources limitées, et quand il n’a plus été possible de produire des objets réels nous sommes passés au virtuel. Or il était déjà trop tard pour notre environnement.
« Le flot des emmerdés », comme le nommait Beckett, promenait sa frénétique vacuité de lieu en lieu, ne sachant trop ce qu’il recherchait ni ce qu’il fuyait.
Comme nombre de geeks, [il] avait découvert la sexualité par la pornographie accessible à tout âge et à tout moment sur internet. Les acteurs pornos ne s'embrassent jamais, raison pour laquelle il ne posait jamais ses lèvres sur les miennes. Il ne se déshabillait jamais devant moi non plus, de même qu'il était incapable de me faire face pendant l'amour. (...) Ses pannes sexuelles n'étaient pas rares et je les expliquais par le fait que sa sexualité était totalement conditionnée par ses fantasmes, que la réalité brutalisait ses codes psychologiques. Le toucher, l'odeur, la parole ne participaient pas de sa construction érotique.
(p. 79-80)
La révolution numérique a conduit à peu de dictatures, mais elle a vu éclore des démocraties autoritaires élues par des internautes manipulés sans conscience de l’être. (p. 56)