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Critique de Lamifranz


Si vous êtes un amoureux de la langue française vous connaissez sans doute Claude Duneton (1935-2012). Cet occitan bon teint n'a jamais cessé de militer depuis les années 70 jusqu'à sa mort pour une langue française puisant ses racines dans le peuple et dans l'originalité et la richesse des langues régionales (« Parler croquant » – 1973). Son autre cheval de bataille est l'enseignement du français, selon lui trop inféodé à une tradition sclérosée, conformiste et soumise aux préjugés de classe (« Je suis comme une truie qui doute » – 1976, « A hurler le soir au fond des collèges » – 1984). On lui doit une (indispensable) anthologie des explications populaires avec leur origine (« La Puce à l'oreille » - 1978), quelques romans, quelques essais, et deux ouvrages historiques qui valent le détour : « Petit Louis dit VIV, l'enfance de Roi-Soleil » (1985) et « le Monument » (2004) où il fait revivre les victimes de la Première Guerre mondiale originaires de Lagleygeolles, son village natal (Corrèze) qui figurent sur le monument aux morts.
Comme l'indique le sous-titre, ce livre, entre roman et reconstitution historique, relate la naissance et la petite enfance de Louis XIV, destiné à devenir le plus grand roi français de l'Ancien-Régime. L'auteur a construit son oeuvre à partir des mémoires de Pierre de la Porte, porte-manteau ordinaire de la Reine, puis premier valet de Louis XIV enfant. Ce nom vous dit quelque chose ? Je pense bien, c'est un des personnages des « Trois Mousquetaires » et de « Vingt ans après ». C'est le parrain de Constance Bonacieux.
L'histoire commence bien avant la naissance du Petit Louis : ce n'est un secret pour personne, depuis vingt-trois ans que le roi et la reine sont mariés, pas un rejeton royal n'a montré le bout de son nez. Quand enfin, le 5 septembre 1638, celui-ci se décide enfin à paraître, on l'appelle Louis-Dieudonné. Forcément, c'est un don du ciel, (il a quand même mis un moment Dieu, pour donner un fils à la Maison de France !) le petit prince est en fait un gros poupon, qui ressemble bien plus à Gargantua qu'au petit Jésus. Il a déjà cet appétit féroce qu'il gardera tout au long de sa vie.
A partir de là, les mémoires de la Porte sont le fil conducteur d'une véritable épopée. Car ne croyez pas que le petit Louis soit élevé dans la soie et la pourpre avec des serviteurs pour le moindre de ses caprices, faut pas croire, c'est pas Versailles tous les jours. Entre son père (le roi Louis XIII) sujet à des colères terribles, sa mère plus espagnole que française, le cardinal Mazarin dont la générosité n'est pas la qualité dominante, les bruits de couloirs, les complots, les conspirations, les peurs nocturnes et diurnes, et quelques bons moments aussi avec les jeux et les chansons avec des mini-courtisans…
Claude Duneton, avec une plume magnifique qui allie la vivacité d'un Alexandre Dumas, l'érudition d'un Alain Decaux ou d'un Lucien Bély (l'auteur du « Dictionnaire Louis XIV »), et sa propre contribution avec un langage populaire où fleurent bon les expressions de terroir, nous entraîne dans un roman passionnant, sans temps mort, même si parfois les considérations historiques (nécessaires) alourdissent un peu la trame du récit, sans en altérer ni la profondeur, ni l'enthousiasme.
Le livre à lire pour qui veut approfondir cette période d'histoire, où l'on comprend mieux que certaines décisions de Louis XIV adulte ne venaient pas toutes d'un esprit dirigiste et dictatorial, mais étaient peut-être un écho lointain d'une enfance pas comme les autres…
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