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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ce fut une lecture éprouvante...
Le sujet même du livre justifie ce sentiment, ce bâtiment de pierre est une prison, et il y règne la terreur. Celle-ci est relatée par la narratrice parée des yeux d'un homme qui y est mort.
Mais elle me fut éprouvante également par le style d'Asli Erdogan. Bien qu'écrit en prose, le récit est porté par un grand souffle poétique et onirique, il m'a déstabilisé parfois, il m'a fallu souvent relire une phrase, revenir en arrière dans ma lecture, m'efforcer de ne pas lire trop vite, décider de le faire à voix haute pour être pleinement imprégné par son atmosphère.
J'ai donc mis du temps à terminer ce livre, pourtant bien court (107 pages seulement) et en fin de compte, je suis ravi de l'avoir lu.
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"Tu décideras de ce qui peut et ne peut pas être passé sous silence, ou liquideras les comptes qui peuvent l'être. Au fond de ton corps se lève un autre corps qui est tout tremblant, les murs de pierre tremblent avec lui, le monde tout entier est secoué de tremblements, les étoiles tremblent dans le ciel." p.26

Parce que tu es indéniablement poète. Toi, Asli Erdogan, tu as perçu cette vibration. Tes yeux sont des étoiles et se sont portés sur l'opprimé. Ton regard perçant a pu y déceler toute l'humanité.
A. comme Adam, le premier homme, l'Alpha. Pour t'être arrêtée à ses pieds, tu l'as été, toi aussi. Tu as été à ses côtés : c'est ainsi que tu l'as remplacé.

Pour ceux qui n'entendent pas, tu as écrit. Pour ceux qui ne voient pas, tu as chanté.
Et moi, tu m'as touché. Tu m'as jeté ce mot pour que je puisse m'accrocher
V I E

"A cet instant-là je tombai au milieu du V, du I et du E qui séparément , ne signifient rien." p.36
" A cet instant-là une étoile est ressuscitée. Et tu m'as laissé tes yeux pour que je puisse regarder la vie comme un miracle" p.42

J'ai entendu la trille stridente de ton chant, haut dans le ciel, elle a traversé les pierres, fissuré la chape en béton, armé forcément, de l'enceinte de confinement dans laquelle, ils t'ont déjà jetée. L'alarme a sonné, elle me tire du cocon douillet dans lequel je m'étais profondément endormi. Je me berçais d'illusions sur un monde en paix qui n'existe pas...

J'ai reconnu A., ici dans ma ville, assis à la porte de ma banque. "Le destin joue à un jeu sinistre en nous assignant une place à table, un status social, en nous plaçant d'un coté ou de l'autre des portes verrouillées, à l'ombre ou en pleine lumière. Car nous sommes tous semblables et nous sommes tous des victimes." P.31
C'est la première fois que je vois A. véritablement, d'habitude je me détourne et je m'enferme. Voilà l'homme qui vous exhorte à lire Asli Erdogan.

Parce que le temps nous est compté. Parce que j'ai entendu ton appel : "Si je pouvais, avec deux yeux, regarder le plafond bas du ciel qui protège le monde, si je pouvais entendre un battement d'ailes, si le vent pouvait souffler dans les coins sombres..." p.60
Oui, il est là l'effet papillon dont j'ai déjà parlé * : lire Asli Erdogan avant son procès ! Ah qui peut dire l'espérance si tout Babelio s'y met ? Si chacun ouvre ses ailes, si chacun siffle d'un petit souffle : alors un air frais, un vent nouveau ? Il faut si peu de chose...

"Un pipeau joue en vain les motifs entremêlés de tout ce qui existe, la mélodie de ce qui est et de ce qui n'est plus, de ce qui vit et de ce qui vivra un jour... Je l'ai entendue une fois, oui, c'est LA que je l'ai entendue pour la première fois, tout au long de la nuit elle s'adressait aux étoiles et à des mondes nouveaux, elle se parlait à elle-même. p.93"

Alors, parce que je la plains un peu et je l'envie beaucoup
Parce qu'elle m'envie peut-être un peu et qu'elle me plaint beaucoup
Alors, au moins la lire
Oui avant la mort, je la lirai encore

A la vie,
Avec tendresse

* cf. le silence même n'est plus à toi : Asli Erdogan
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J'ai découvert l'existence d'Asli Erdogan très récemment...Elle présentait sur France Inter, un matin de fin mars, la traduction et la parution en France de son premier livre : "L'homme coquillage". Il était impossible de ne pas se passionner pour cette voix de la littérature turque. D'une part parce que c'est une littérature que je connais mal et qui est peu présente dans nos rayons, mais je me trompe peut-être. D'autre part, car j'apprenais que cette militante avait été victime à plusieurs reprises de la chasse aux sorcières menée par le président de la République turque Recep Tayyp Erdogan et avait connu à plusieurs reprises, la prison et la torture...Prison et torture thèmes du roman "Le bâtiment de pierre".
Une lecture révoltante et difficile.
Révoltante, d'une part, car elle nous vivre, en un centaine de pages, les douleurs corporelles d'une détenue torturée au cinquième étage de ce bâtiment de pierre qu'est la prison, coups rapidement décrits, scènes de quelques pages difficiles ne constituant pas l'essentiel du roman, indispensables toutefois à la compréhension du reste. Pourquoi a t-elle été arrêtée, quand, que cherche t-on à savoir d'elle en l'interrogeant ?...on ne le saura pas. Mais est-ce si important ?
Difficile d'autre part, car Asli Erdogan nous fait plonger dans les angoisses et délires presque comateux de la personne torturée...Entre deux séances son esprit s'évade vers des cieux meilleurs ou plonge dans les abîmes des délires incompréhensibles des détenus inconscients dont quelques phrases de lucidité émergent...Un texte fait de phrases longues perturbées et troublantes. Rêves et cauchemars, déchéance physique du détenu qui attend les pas de ses gardiens dans le couloir, ou dont les esprits reviennent lentement.
"Quant à moi… Je me suis racontée, encore et encore, de façon partielle, incomplète, erronée. À tout propos, hors de propos. Dans un style dépouillé ou dans la langue de la tragédie… Terrorisée par le spectre de la mort, j'ai rassemblé quatre ou cinq mots au son creux rivés dans le silence, j'ai employé des mots qui se taisent plus qu'ils ne parlent."
Quelques heures de lecture, pour découvrir cette auteure, ce témoin de la Turquie moderne.
J'en reparlerai, c'est certain
Lien : https://mesbelleslectures.co..
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Comment extérioriser mon ressenti ? tant je suis partagée par la souffrance et les atrocités à l'intérieur de ce bâtiment de pierre et par la poésie de l'écriture.

Comment aimer un récit qui traite de tels sujets ? Alors que ce pays occulte les années 80 d'une certaine manière, il fallait un certain courage pour oser dévoiler . La poésie du style n'est elle pas un moyen d'adoucir les scènes et ressentis.

En conclusion, même si ce texte est dur tant par son contenu que par son style, il laisse des "traces" en moi.

A noter que ce titre a été lu en prévision d 'une rencontre avec l'auteure

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Challenge ABC 2017-2018
7/26

Récit croisé d'une femme et d'un homme, tous les 2 passés dans le terrible bâtiment de pierre. Ce bâtiment est à la fois la métaphore de la prison et de la torture (qui n'a rien de métaphorique) mais celle du silence qui entoure ces questions en Turquie : rien ne filtre du bâtiment. Ni les cris, ni le choeur des enfants de rues emprisonnés là.
Et un bout d'un moment, on ne sais plus trop qui de l'homme, qui de la femme raconte, d'autant que les deux partagent la même expérience indicible. Et que la femme semble pendre sur elle le fardeau, le souvenir, le secret de cet homme réduit à rien. Peut-être parce qu'elle seule peut le comprendre et continuer à faire vivre sa mémoire dans ce présent éternel que fait naître la torture. Mais elle ne trouve pas les mots, elle ne sait pas comment se faire entendre alors que personne ne veut l'écouter.
C'est un récit qui est au-delà de "J'aime-j'aime pas". Ce n'est pas réellement de la fiction, sans être totalement une autobiographie. C'est un objet littéraire, assez étrange, pas facile du tout à cerner. C'est aussi un cri pour réveiller les consciences.
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Eprouvante et onirique pourtant, deux extrêmes à mes yeux, réconciliés dans ce court récit qui m'a demandé deux tentatives au moins. Il a reçu de très belles critiques et mérite d'être dompté malgré sa rudesse et sa brutalité.
Un cerveau se met à nu pour guetter l'espoir, infime. Dérangeant est ce récit mais il existe et transmet et affecte longuement.
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