Mon intérêt pour
Spartacus a été éveillé par la série du même nom, dont je ne parlerai pas ici puisque ce n'est pas le lieu.
Spartacus, d'
Howard Fast, aux éditions J'ai lu, est un livre à la couverture rouge que j'ai récupéré chez mes parents. Vieux livre donc, qui a trôné pendant des dizaines d'années, bien visible, sur les étagères du petit couloir après le bureau et qui a donc longtemps côtoyé poussière et humidité. Son état en témoigne maintenant par son odeur – cette odeur si caractéristique de certains vieux papiers – et par une rigidité bruyante des pages.
Vous vous dites peut-être que je brode sur la forme pour retarder le moment de parler du fond. Mais j'y viens.
Howard Fast a nommé son livre
Spartacus mais il le met très peu en scène. On lit surtout les dialogues ou les réflexions de romains qui ont croisé
Spartacus, de près ou de loin. L'action étant le plus souvent indirecte, le rythme est lent et inégal. J'ai l'impression que c'est parce que j'étais restée imprégnée des images de la série que j'ai lu ce livre avec plaisir.
Par contre,
Howard Fast propose une vision politique et sociétale intéressante et très à propos encore aujourd'hui.
« - […] Tu comprends, nous vivons en république. Cela signifie qu'il existe un grand nombre de gens qui n'ont rien et une poignée d'autres qui ont beaucoup. Et ceux qui possèdent beaucoup doivent être défendus et protégés par ceux qui n'ont rien. […]
- […] Mais tu oublies simplement la question-clef : les hommes sont-ils vraiment tous semblables ? C'est par là que pèche ton petit discours. Tu considères comme acquis que tous les hommes se ressemblent comme les pois dans une cosse. Je ne suis pas de cet avis. Il existe une élite, un groupe d'hommes supérieurs. Peu importe si ce sont les dieux ou les circonstances qui les ont faits ainsi. Mais ce sont des hommes capables de gouverner, aussi gouvernent-ils. Et comme les autres ne sont que du bétail, ils se conduisent comme du bétail. Tu comprends, tu présentes une thèse ; la difficulté est de la justifier. Tu proposes un tableau de la société, mais si la vérité était aussi illogique que cette image, tout l'édifice s'écroulerait en un jour. Ce que tu n'expliques pas, c'est ce qui maintient en place cet absurde assemblage.
- […] Tu m'as demandé ce que c'est qu'un politicien. Eh bien, c'est le ciment de cet édifice insensé. […] Nous rationnalisons l'irrationnel. Nous persuadons les gens que le suprême but de la vie c'est de mourir pour les riches. Nous persuadons les riches de sacrifier une partie de leur fortune pour en sauver le reste. Nous sommes des magiciens. Nous créons une illusion, et cette illusion est solide. Nous disons aux gens : vous êtes le pouvoir. Vos voix donnent à Rome sa force et sa gloire. Vous êtes le seul peuple libre au monde. Il n'est rien de plus précieux que votre liberté, rien de plus admirable que votre civilisation. Et c'est vous qui contrôlez tout cela ; vous êtes le pouvoir. Alors ils votent pour nos candidats. Ils pleurent quand nous sommes battus. Ils partagent notre allégresse quand nous triomphons. Et ils se sentent fiers et supérieurs parce qu'ils ne sont pas des esclaves. […] Ils ne sont que de la vile tourbe, mais chaque fois qu'ils voient un esclave, leur moi se gonfle et ils se sentent tout pleins d'orgueil et de puissance. Ils savent qu'ils sont citoyens romains et que le monde entier les envie. Et c'est cela mon talent, Cicero. Ne minimise jamais l'importance de la politique. »
Je suis contente d'avoir lu ce livre, que la série m'a donné envie de découvrir et qui m'a lui-même donné envie de revoir la série…
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