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4,35

sur 919 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
De l'Histoire de l'Écosse, je ne connais que ce que j'en ai lu dans la fabuleuse trilogie de Nathalie Dougal, "La mèche de guerre des Mac Donald". J'ai replongé avec délice dans cette période tourmentée (oui, je sais, cela peut paraître paradoxal) en lisant "Un bûcher sous la neige". Cette pauvre jeune femme, Corrag, vit ses dernières heures dans un cachot. le révérend Charles Leslie se rend à ses côtés afin qu'elle lui en dise plus sur le massacre auquel elle a assisté : celui de Glencoe. Il a besoin de savoir si le commanditaire de cette tuerie est bien le roi Guillaume.

Mais pourquoi Corrag se retrouve-t-elle dans cette situation ? Sa seule faute est d'être "libre" dans ce monde résolument encadré, aux normes parfois douteuses mais que l'on ne conteste pas et, surtout, que l'on ne contourne pas. Comme si cela n'était pas suffisant, elle a le don de "double vue" comme elle le dit. Et avoir des visions à cette époque n'est guère apprécié... On la traite de tous les noms d'oiseaux, dont le fatal "sorcière". Fatal car comme vous le savez, les "procès" (si on peut appeler cela ainsi) étaient vite réglés...

J'ai vraiment apprécié ce livre à double voix (le récit de Corrag d'un côté et la correspondance du révérend de l'autre). Je me suis retrouvée catapultée dans cette Écosse sauvage du XVIIe siècle, dans ce clan des MacDonald, dans cette société où tous les coups étaient permis. L'écriture est belle, empreinte de poésie là où l'on aurait pu attendre un style plus incisif. Je vous le conseille. Et je termine en remerciant la personne qui me l'a offert. Elle se reconnaîtra. Merci, merci, merci !

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Un roman époustouflant ! Conte philosophique, roman historique, initiatique, il y a un peu de tout cela dans le récit de Corrag. Sorcière de mère en fille, c'est la seule hérédité qu'elle puisse revendiquer puisque sa génitrice Cora, a été pendue haut et court pour faits de sorcellerie. Cette étiquette lui colle à la peau, fait d'elle une paria, une hors-la-loi qui n'aura bien souvent d'autre issue que celle de fuir jusqu'au jour où elle va se retrouver dans une prison du clan Campbell, sale, pleine de vermine, avec aux pieds et aux mains de lourdes chaînes. le bûcher l'attend. Son crime : avoir aidé des membres du clan MacDonald à échapper au massacre perpétré par les soldats du roi Guillaume alors sur le trône d'Angleterre , un soir d'hiver de l'an 1692.
Le récit s'organise autour du récit tendu, échevelé de Corrag et des lettres du Révérend Charles Leslie venu en Ecosse pour recueillir son témoignage sur le massacre de Glencoe. Récit et lettres reposent sur des dialogues en décalé qui interpellent constamment le lecteur en l'obligeant à prendre la place de l'interlocuteur absent. Même habileté au niveau de l'effet miroir que créent toutes les remarques et les réflexions que se fait le Révérend concernant Corrag et qui vont l'amener progressivement à prendre une décision qui va à l'encontre de tous ses principes !
Mais c'est à la magie de l'écriture de Susan Fletcher qu'il faut rendre grâce avant tout. Elle a su combiner à merveille tous les détails réalistes découlant du contexte historique ; rudesse des moeurs, violences multiples liées aux querelles politico-religieux avec d'autres éléments liés à l'évocation des Highlands. Si le récit du Révérend fourmille de ces précisions qui ancrent l'histoire dans une Ecosse du XVIIème siècle où il ne faisait pas toujours bon vivre, les longs passages du récit de Corrag laissent à la place à des descriptions éminemment poétiques et suggestives. La langue très sensorielle de l'auteure donne à voir, à humer , à sentir les Highlands sous tous les cieux et au fil des saisons. Parfaite osmose enfin entre ces passages d'une grande densité poétique et ceux qui nous livrent, dans un langage enfantin, les ressentis, les émotions de Corrag et sa vision du monde.
J'ai cependant refermé ce roman sur un amer constat : toutes les époques ont leurs sorcières et la nôtre n'en manque pas hélas !
D'autres thématiques moins sombres aussi se dessinent en filigrane : la nécessité de témoigner, de prendre en main le cours de sa vie en repoussant le plus loin possible tous les déterminismes qui nous gouvernent.
Bref, un beau roman qui pour moi, sort des sentiers battus par sa richesse et sa complexité.
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Comment vous expliquer ces moments délicieux que j'ai passé dans cette lecture?
Il existe un pays très cher à mon coeur : l'Écosse. Et dans ce pays un lieu sauvage des plus beaux : Glencoe, ou plus précisément Glen of Coe, la vallée étroite de la rivière Coe
J'ai connu Glencoe dans les années 70. C'était alors un lieu désert, âpre, d'une beauté presque terrifiante. Un lieu chargé d'une histoire sanglante. Bref, un endroit qui remue.
J'y suis retourné à plusieurs reprises jusqu'à l'année dernière. Et j'y ai vu de plus en plus de monde. Suffisamment de monde pour tout gâcher.
L'excès d'humains a, chez moi, cet effet de rompre mon émerveillement.
Et là, Susan Fletcher, me replonge dans cette beauté et même au delà. A une époque où nul n'osait trop s'aventurer dans ce "ravin" austère. Elle m'a fait oublier les troupeaux de singes hurleurs et parfumés. Quel plaisir !

Il y a bien longtemps que je n'avais pas connu un amour de roman.
Qu'est-ce donc que ce truc là, vous demandez-vous ?
Cette chose à laquelle on pense sans cesse, que l'on retrouve avec plaisir et avec laquelle on fait corps.
Et bien c'est bien ça. Ce roman m'a fait ça !
Cela m'a rappelé beaucoup de lectures enfantines, adolescentes et beaucoup moins de lectures adultes. Une sensibilité qui s'émousse ? Je ne sais pas. Mais là j'ai retrouvé ce plaisir voluptueux, cette impatience à me glisser encore et encore entre ses pages. Un réel bonheur.

Et encore je ne vous ai pas conté le plus fou du truc. Un détail peut être pour beaucoup, mais pour moi.... imaginez
Nous sommes en 1692. Corrag, la jeune héroïne, après avoir remonté le Nord de l'Angleterre et une partie de l'Écosse sur le dos de sa jument, arrive à Glencoe et décide de s'installer à Coire Gabhail , le vallon secret. Et cet endroit est le sein du sein pour moi. Un vallon caché et protégé accessible qu'après une bonne grimpette à pied. J'y étais en juin dernier et là, je suis au paradis des lecteurs.
Et Corrag nous mène avec elle de glens en collines, de cascade en loch, elle gravit et aime les montagnes qu'on appelle les trois soeurs, que je trouve aussi tellement belles.
Corrag, être simple, vit en parfaite harmonie avec la nature. Elle a trouvé, dans ce Glen of Coe, sa patrie. Mieux, sa maison.

Mais ce n'est pas suffisant. Dans ce roman à tiroirs. Il y est certes question de nature, de beauté, mais aussi d'amour et d'histoire.
Car nous gravitons autour du massacre des MacDonald, le 13 Février 1692 par des soldats à la solde de l'Angleterre. Soldats comprenant dans leurs rangs des écossais du clan Campbell ayant prêté serment au roi illégitime d'Angleterre, Guillaume d'Orange, et accueillis chez ces même MacDonald qu'ils vont assassiner. Un massacre fomenté par un seigneur de Stair aux motivations bassement cupides.
Bref, un truc pas joli joli dont les humains sont friands.

Autres tiroirs : Il y a deux narrateurs :

Corrag, donc, jeune femme accusée, comme sa mère et sa grand-mère, de sorcellerie, condamnée au bûcher

Charles Leslie : révérend irlandais, jacobite, venu interroger la sorcière sur ce qu'elle a vu du massacre afin de prouver l'implication du roi usurpateur.

Le roman est d'une très grande richesse historique et documentaire.
L'écriture très, comment dire, d'époque...
Suzan Fletcher a su reconstituer un langage imagé, puissamment évocateur de ce XVII ème siècle, à la fois pour l'homme d'église cultivé, réfléchi, amoureux qui l'interroge, et pour Corrag, la préjugée sorcière, plus rustique et proche des animaux, des plantes de l'eau, de la neige, du froid. Je trouve cela remarquable.

Il n'y a qu'une chose qui m'a gêné c'est l'absence d'un formalisme typographique, les tirets et les guillemets.
Ça peut paraître curieux mais une phrase dans laquelle se mêlent propos rapportés et mots prononcés sans distinctions autres que la mise en italique a quelque chose de déroutant et coupe systématiquement la fluidité du récit.

En voici un exemple :

Si je croisais l'auteur je lui dirais volontiers pensez à présenter vos dialogues pour faciliter la compréhension mais je ne croiserai jamais et je reste sur mon irritation, voyez-vous.

Déroutant, non ?
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Magnifique roman, tant par la plume, la construction du récit, les faits historiques, les descriptions et bien sûr le petit truc qui fait qu'on adhère totalement au livre et qu'on aimerait qu'il ne se finisse jamais.

Les faits se passent au XVII siècle en Ecosse, un massacre a eu lieu, les sorcières sont aussi pourchassées, brûlées, noyées, pendues... l'ignorance de l'homme mène à bien des horreurs.
notre petite sorcière, est pourtant pure, simple, en harmonie totale avec la nature, elle nous livrera sa vie au coeur de cette Ecosse, ce fut de réels moments de bonheur de partager cette vie en symbiose avec les éléments, la faune et la flore.
Mais d'un autre côté, il y les hommes avec leurs préjugés, leurs croyances, leurs peurs, et par peur, ils sont capables de tout et même de pire horreur.
L'homme convoite aussi toujours plus, pour un trône, pour une terre, quelques coups d'épée et l'affaire est faite...
Corrag, dit avec ses mots simples avec son amour et son respect de chaque être, cette évidence, que ce sont eux "les méchants" et non elle, pleine de bonté, de simplicité. Et puis le représentant de Dieu, le révérend qui rend visite à la petite sorcière, il l'écoute, chaque jour, et petit à petit, il commence à ôter les ornières, il voit et entend le coeur pur de Corrag, il a compris, il changera, et il deviendra aussi un homme au service de l'homme.
Très juste, bien équilibré entre les récits de Corrag, et les lettres du révérend , on est complètement emporté dans cette contrée sauvage à courir sur les crêtes, et tendre une pomme au cerf qui a faim (ceux qui liront ou ont lu le livre comprendront)

très beau récit, très belle plume, certes qui pourrait décourager certains, car il faut être patient pour connaitre la fin. Corrag a besoin de dérouler son histoire fait par fait, elle doit dire pour que le révérend retransmettre cette vérité.
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Prendre le temps de lire ce roman et le savourer dans toute sa splendeur d'écriture, c'est aussi comme l'a écrit l'auteure, c'est "prendre plaisir aux minuscules signes de vie que la plupart d'entre nous ne perçoivent pas, étant trop pressés : une abeille dans une corolle, le son qu'un poisson produit avec sa bouche. Et je sais que tu es toi aussi sensible à de telles délicates choses."
Eh bien c'est ce que j'ai fait avec ce chef-d'oeuvre, je me suis tellement sentie proche de cette atmosphère écossaise que j'ai eu l'impression de faire un retour dans une vie antérieure.
J'ai beaucoup aimé toutes ces descriptions de la nature, cette vie de vagabonde chez notre personnage, pauvre petite sorcière ô combien honnie, bafouée et condamnée au bûcher et voir un peuple dominé par sa religion et ses croyances au XVIIe siècle en pleine période de chasse aux sorcières.
J'ai aussi savouré toutes ces présentations botaniques pour chaque début de chapitre nous donnant les propriétés d'une plante ou bien d'une fleur, c'est un pur plaisir personnel pour lequel je suis en pâmoison.
Sans oublier toutes les sensations exprimées dans leur moindre petit détail, c'est absolument fabuleux.
Ce livre est magnifique.
Et oui, ma critique est purement subjective mais je saurai la relire et la conserver dans ma bibliothèque personnelle sur babelio.
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Le XVIIème siècle semble décidément avoir été celui de la chasse aux sorcières un peu partout en Europe.
Sur fond de politique religieuse, on pendait, massacrait, brûlait ceux qui ne prêtaient pas allégeance au pouvoir en place ou celles qui vivaient en marge de la société, couraient les montagnes et utilisaient les simples comme remèdes.

Du fond de son cachot, menotée de fers et assistant impuissante à l'édification du bûcher qui la consumera, Corrag, enfant de l'hiver et des montagnes, parle des Highlands à Charles Leslie, pasteur irlandais.
Elle lui raconte la nature si belle qu'elle se suffit à elle-même, le regard des hommes qu'elle fuit sous les injures et la violence, mais aussi l'amour et l'amitié partagés dans le clan maudit des Mc Donald.
Pauvre Corrag si fragile et pourtant si forte, condamnée et pourtant tellement vivante.
Corrag au coeur pur, à l'âme généreuse et sensible, aux pieds agiles, toi qui cours de vallées en collines à la fois craintive et avide de tendresse, ton esprit habitera à jamais ces contrées qui ont été ton refuge.

Un roman attachant, émouvant, qui nous entraîne au coeur d'une nature sauvage et étincellante à la suite d'une jeune femme farouchement elle-même.
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Ecosse, terre de légendes et de mystères…

Cette terre t'avait adoptée, toi, la fille du vent et de l'hiver. L'immensité de ses contrées, ses collines sauvages et ses landes tapissées de bruyère, l'obscurité de ses entrailles rocheuses vieilles comme le monde et l'éclatante lumière des soleils d'été se noyant dans les lochs le soir venu, la rudesse de son climat et la douceur de ses eaux bouillonnantes abreuvant le fond des glens bienveillants où tu avais appris à revivre…

Tu aimais la richesse de sa tourbe noire, la caresse de ses vents sur ta joue, le reflet des gouttes de pluie s'accrochant à la toile d'araignée après l'averse, le souffle chaud et humide du cerf se repaissant de quelques herbes fraîches dans le creux de ta main…

Tu avais appris de Cora le savoir pour apprivoiser les plantes et leurs vertus. La potentille rampante, la patte-de-loup, la bourse-à-pasteur, le botryche lunaire, la consoude, la pivoine… Elles n'avaient plus de secrets pour toi et te permettaient de glaner quelques semences, un oeuf ou un ruban pour tes cheveux lorsque ta route croisait paysan ou voyageur en souffrance avec une rage de dent ou une mauvaise toux que tes plantes apaisaient.

Oui cette terre t'avait adoptée, elle se mariait avec ta solitude, tes cheveux de fougère mouillée, ta force tranquille et ta fragilité réunies, ta sensibilité et ta perpétuelle recherche de lumière… Cette lumière, tu la trouvais dans l'envol des cigognes noires, dans l'odeur de la menthe fraîche, dans la courbe d'une coquille d'escargot accroché à tes cheveux, dans le clapotis de l'eau vive sur les rochers… Tu avais appris des Highlands l'humilité et le silence, tu avais appris à te fondre dans cette nouvelle vie…

Mais les Terres hautes, en cette année 1691, offraient peu de répit pour celles que l'on avait jugées sur de simples mauvais présages. Pour des yeux trop bleus, pour une chevelure de feu, pour un chat noir qui leur tenait compagnie ou pour une épaule déboitée, elles étaient sorcières ou le devenaient par simple filiation… Cora t'avait enfantée en solitaire, t'avait juré de fuir et de ne jamais aimer…

Tu t'appelais Corrag…

Tu souhaitais seulement pouvoir suivre paisiblement ton chemin, continuer à voir les beautés négligées du Monde, vivre de terre sauvage et d'air libre. Tu aimais la neige, tu aimais le vent, tu aimais les pluies d'été et, plus que tout, tu voulais trouver l'amour…

Mais, par une nuit glacée, tu étais née sorcière. Tu étais la femme aux mille noms, la gueuse, la créature du diable, la guérisseuse, la putain, la Sassenach, l'anglaise… L'insoumise, sans religion et sans roi auquel porter allégeance…

Et du fond de ce cachot obscur où, pour quelques jours, tu gis encore, c'est ton histoire que tu conteras avec la voix du coeur, celle de tes quatre vies, celle qui mène à la lumière… Sur le bûcher, dès la fonte des dernières neiges, tu seras brûlée vive…

***

Ce roman est une pure merveille, lumineux et contemplatif !

Un roman qui ouvre le coeur sur les beautés simples et cachées du monde et sur la nature qui nous entoure, avec les terres sauvages et mystérieuses d'Ecosse en toile de fond où les clans d'Highlanders, en cette fin de XVIIe siècle, doivent choisir leur camp entre catholicisme et protestantisme, entre jacobites et orangistes, entre le souverain déchu Jacques II et le nouveau roi proclamé Guillaume d'Orange… Un roman qui s'en va crescendo, où cette confession faite jour après jour par Corrag à un homme d'église irlandais venu l'écouter dans sa cellule la conduira du statut de sorcière bonne à pendre à celui d'ange lumineux…

Un roman assurément destiné à tous les amateurs de Rob Roy et de Braveheart, d'histoire, des paysages d'Ecosse, de nature sauvage ou tout simplement à toutes les âmes sensibles aux petits moments de bonheur éphémère qui nous entourent.
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Il y a des romans que je regrette d'avoir commencé parce que quand vient le moment de les refermer, je me sens si triste, si seule, si vide que c'en est insupportable. Des romans qui vous font ressentir tant de choses que se lancer dans une autre lecture, dans un autre voyage vous semble impossible, fade et douloureux à la fois. Cela n'arrive pas souvent mais cela arrive tout de même et je suis tellement heureuse de pouvoir, parfois, ressentir ça, une telle déflagration!..
La dernière fois, c'était avec le somptueux "Betty" de Tiffany McDaniel. Aujourd'hui, c'est avec "Un Bûcher sous la Neige".
Et me voilà, à l'aube d'un mois d'août caniculaire, rêvant de neige et de tempête, des Highlands, de grand vent et du parfum des tourbières.

Bien sûr que le roman de Susan Fletcher avait tout pour me plaire: l'Ecosse, le XVII°siècle, un contexte historique violent et passionnant, une accusation de sorcellerie, un fond sans doute féministe mais parfois, ça ne prend pas, malgré la perfection de la recette et la beauté des paysages.
Là, ça a pris, ça m'a pris. le roman m'a happée, capturée, renversée, bousculée. Il m'a piégée et je m'y suis noyée. Parce qu'il est beau, sublime même et parce qu'il est bien plus que que ce qu'en dit sa quatrième de couverture.

En ce temps-là, à la fin du XVII°siècle, l'Ecosse et les îles britanniques de manière plus globale sont déchirées par une crise politique violente qui oppose les partisans de Guillaume d'Orange, monarque nouvellement intronisé et d'obédience protestante et ceux de Jacques II, catholique issue de la lignée Stuart qui prend sa source glorieuse en Ecosse. Comme toujours, le sang et les larmes accompagnent le conflit qui fauche des vies comme d'autres fauchent les blés en été et L Histoire gardera en mémoire de cette page noire la massacre de Glencoe, où des soldats orangistes massacrèrent sans pitié tout un clan des Highlands qui leur avait pourtant offert l'hospitalité. Oui mais la politique... Et il paraît que les ordres sont les ordres...
En ce temps-là, aussi, on brûlait des sorcières. Il arrivait parfois qu'on les noie, voire qu'on les massacre sans autre forme de procès. Ce n'était que des sorcières après tout, un détail...

"Un bûcher sous la neige"; c'est la rencontre de ces deux histoires, le mariage du sang et du feu et c'est un magnifique hymne à la nature et à liberté, le genre de roman qui blesse autant qu'il émerveille. le tranchant des lames ou des pierres qui écorchent les pieds nus et la lumière des étoiles.

Vous la voyez, là, pelotonnée dans un coin de sa misérable cellule? Ses yeux immenses et sa chevelure brune étoilée de toiles d'araignées? Elle est toute petite, fragile et menue comme une elfe… Bien sûr, sa figure, ses bras et sa robe sont crasseux mais pas autant que sa cellule… Bien sûr, elle sent mauvais, mais pas autant que l'air vicié de sa prison… Bien sûr, son corps est meurtri, bleui et ses blessures ont laissé des croutes sur sa peau pâle…
Elle semble si petite, si fragile, vous ne trouvez pas?
"Elle" c'est Corrag et, dans sa geôle putride, elle attend la mort. Accusée de sorcellerie et dans le noir, elle entend chaque jour traîner les bois qui serviront à dresser son bûcher. Oh, elle n'y montera pas tout de suite. L'hiver n'est pas terminée, la neige tombe encore. Les feux ne prennent pas bien en hiver… Mais bientôt, le dégel et le printemps. Quelle ironie, mourir quand renaît la nature...
Mais peut-être que sa solitude la tuera avant... Sa petite vie, comme elle dit, a été pétrie de solitude, mais avant, elle avait sa jument, ses chèvres, l'eau des sources et les arbres, les fleurs et le vent pour se sentir moins seule... Là, elle n'a plus rien. Si, peut-être... Il y a ce révérend, Charles Leslie qui lui rend visite chaque jour et qui accepte de l'écouter raconter son histoire.
Ce dernier vient d'Irlande. C'est un jacobite convaincu qui vient enquêter sur le massacre de Glencoe qui vient de défrayer la chronique. On lui a dit que la sorcière était là la nuit de la tragédie, qu'elle est le seul témoin, alors l'homme de dieu fait fi de ses préventions contre la sorcière pour l'écouter. C'est alors la voix de source de Corrag qui s'élève et qui raconte: sa grand-mère torturée puis exécutée parce que convaincue de sorcellerie, son enfance en Angleterre auprès d'une mère libre, fantasque mais aimante, les plantes pour soigner, guérir et soulager, la petite maison près de l'eau et les écailles argentées des poissons sur le toit..
Et puis la haine, la fuite éperdue à travers la lande, les bossmen, l'arrivée en Ecosse.
L'amour d'une jument qui réchauffe, le chant des pierres et de l'eau. La peur, les soldats qui ne sont que soudards, le manteau de la nuit qui protège, l'ineffable beauté des clairs de lune, la mousse et les ombres des bois.
Le clan, les chèvres, l'amour, l'espoir, la grâce des oiseaux et des cris des enfants. La noblesse de l'hiver, sa beauté froide et le blancheur immaculée des premières neiges, quand à l'intérieur flambent des feux de joie.
La politique, la traîtrise, la peur, les coups, les coeurs qui se brisent, la douleur physique.
Face au révérend incrédule, c'est la voix de Corrag qui s'élève, enfin. La voix de la sorcière, de la putain, du diable et qu'on écoute enfin. Sans fard, avec une poésie incroyable, une sensibilité à fleur de peau et des images tantôt âpres et tantôt cristallines, tantôt cruelles et tantôt pétries de grâce, la jeune femme nous livre son récit et avec lui celui de toutes les sorcières. C'est doux-amer et sans haine. Un chant de liberté, un hymne à la nature qui rend toute leur beauté aux ailes des papillons et à la fraîcheur des galets qui transforme le roman historique -très, très réussi au demeurant- en véritable récit initiatique. C'est à la fois doux et puissant, douloureux et galvanisant... Il y a longtemps qu'une héroïne ne m'avait pas touché à ce point et elle prend sur elle toute l'incroyable lumière de ce roman dont les personnages secondaires ne sont pourtant pas en reste quoique esquissés un peu légèrement pour certains.
La narration qui alterne la voix de Corrag et les lettres du révérend à son épouse est intelligente, bien menée et elle ménage un suspense prenant, tendu qui contribue aussi à l'envoutement opéré par "Un Bûcher sous la Neige", comme un sort dont on ne voudrait pas être délivré, comme la beauté des Highlands qu'on ne peut pas oublié après les avoir vus.








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La magie des mots, des phrases ont été sublimés par la traduction de Suzanne V. Mayoux.
Cette histoire racontée par Corrag, du fond de sa geôle, au Révérend Charles Leslie m'a littéralement envoûtée.
Les Higlands enneigés où la nature est magnifique et omniprésente à chaque page a été un enchantement.
Quelle lecture ! Quel plaisir !
Histoire bouleversante et tellement magnifiée qu'il n'y a pas de mots suffisamment élogieux pour dire mon ressenti.
Un baume de lumière et de grâce pour le coeur et l'âme.
Un inattendu et véritable coup de coeur.
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J'ai commencé ma lecture d'Un Bûcher sous la neige dubitative et avec des à priori négatifs, car je n'avais pas été particulièrement séduite par le style de l'auteure, Susan Fletcher, dans son autre roman, Les Reflets d'Argent. Les premières pages ont confirmé mes craintes, car je ne savais pas ce qui allait m'attendre lors de ma lecture. Quelle erreur ! Une fois entrée dans l'histoire, j'ai été totalement envoûtée par ma lecture à un tel point que j'ai refermé le livre avec tristesse et regret !

Un Bûcher sous la neige nous plonge en Ecosse, au 17ème siècle, aux côtés de Corrag, jeune fille accusée de sorcellerie, qui reçoit la visite en prison d'un ecclésiastique, Charles Leslie, venu l'interroger sur le récent massacre du clan MacDonald à Glencoe. L'Ecosse est alors le siège d'une « guerre » féroce entre deux clans, d'un côté les soutiens du Roi Guillaume installé sur le trône et de l'autre, les jacobites, souhaitant le retour d'un Stuart sur le trône. Outre l'aspect politique de l'époque, ce sont les us et coutumes du 17ème siècle qui nous sont contés par Corrag et en particulier le sort réservé aux femmes jugées « sorcières » parce qu'elles sont libres, indépendantes et intelligentes. Corrag évoque ses quatre vies, périodes de sa vie synonymes de changements, mais elle décrit avec tendresse, justesse et simplicité son Amour pour sa maman, Cora ; pour la Nature et les cadeaux qu'elle nous offre au quotidien ; pour l'Hiver, sa saison ; pour sa jument ; pour Alasdair, écossais aux cheveux roux et aux yeux bleus qui sera son grand amour ; pour la Liberté ; pour les autres à travers ses dons de guérisseuse et pour tant d'autres choses encore…

J'ai énormément apprécié Corrag, sa vision de la vie et des hommes, son mode de vie, son caractère. C'est une héroïne forte et courageuse, en dépit de son physique enfantin. Malgré les nombreuses épreuves qu'elle a endurées, Corrag est restée fidèle à elle-même, optimiste, aimante. Je me suis fortement identifiée à elle et ai ressenti beaucoup d'empathie à son égard. J'ai également été touchée par sa maman, Cora ; Charles et sa femme Jane ; le clan MacDonald avec une préférence pour Alasdair, le ténébreux et vaillant écossais. Les passages en Ecosse restent mes préférés, pour la brillante description des paysages sauvages mais ô combien sublimes des Highlands, pour les relations se nouant entre les protagonistes et tout particulièrement le lien fort unissant Corrag à Alasdair qui a fait battre mon coeur…

Susan Fletcher a su me transmettre toutes les émotions ressenties par Corrag et Charles, jusqu'au final magnifique, émouvant, ouvert mais plein d'espoir et de sagesse.

Une de mes plus belles lectures de l'année 2021, assurément !

A lire !
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