Comme si : c'est le mot des savants ; c'est celui des enfants et celui des poètes, aussi. Tout se passe comme si ce monde dans lequel nous vivons était à la fois le même et un autre, contenu dans la boîte obscure où, comprimées, se tiennent toutes les virtualités de la vie de sorte que chaque chose et son contraire y sont côte à côte à leur place.
"Attraper un chat noir dans l'obscurité de la nuit est, dit-on, la chose la plus difficile qui soit. Surtout s'il n'y en a pas. Je veux dire : surtout s'il n'y a pas de chat".
Quand arrive le plus grand malheur, on reste les yeux secs.
Quelques cartons de livres, encore. Car, si grande soit-elle, la bibliothèque ne pouvait les recevoir tous sur ses rayons. Et parce qu'une superstition idiote, un respect imbécile pour le caractère prétendument sacré de la chose imprimée vous interdit de les jeter et que vous ne voyez pas vraiment à qui vous pourriez les donner.
Un chat de Schrödinger pourtant. Là et pas là à la fois. Se formant dans le vide pour se dissoudre aussitôt en lui. Identique à tous ceux de sa race et pourtant d'avantage séparé de ses semblables que si un continent tout entier l'en tenait éloigné. Chacun évoluant dans un monde à lui. Transportant avec lui une bulle invisible d'être pur vaste comme un univers.
Le plus grand des mystères se tient dans le plus petit des replis du réel. Là règnent d'autres lois que celles que nous connaissons. Là s'étend un domaine de poussières où il n'est plus inconcevable qu'une chose soit et son contraire.
- C'est une légende chinoise, ça ?
- Bien sûr, je viens de l'inventer.
Où?
Nulle part.
Comme une grand étendue de vague au milieu du vide, une nappe de néant épaisse et qui noie tout dans sa nuit, l'espace, le temps, déroulant son tapis de torpeur, si vaste qu'on en imaginerait presque les quatre coins accrochés aux extrémités impensables desquelles peut être l'univers pend quelque part comme un rideau de rien, tombant de sa tringle et qui flotte sans fin.
Elle disparue, le monde avait perdu son centre. Un trou au ventre. Une sorte de plaie dans la poitrine. Par laquelle on ne voyait que du vide. Et dans l’espace qu’avait laissé son absence : le spectacle stupéfiant du jour comme jamais il n’a été vu et sur lequel, parce que dans l’abrutissement du chagrin, il ne nous restait rien d’autre à faire, nous gardions les yeux ouverts. Regardant, hébétés, la beauté toute bête des choses. La révolution du soleil dans le ciel. L’infusion lente de la lune et des étoiles dans le noir. Et puis la vie qui, sans plus rien avoir de sensé à nous dire, dépêchait cependant vers nous ses signes semblables. Comme si, elle partie, un grand appel d’air avait tout soufflé, balayant au loin les apparences fausses de l’existence, et qu’un vent salubre avait poussé vers nous ces myriades de phénomènes minuscules dont nous étions devenus, faute de mieux, les observateurs extasiés .
[...] aimer vraiment, c’est aimer pour rien.