- Vous avez toujours été comme ça ?
- Comme quoi ?
- Un cinglé. Avec une machine à explorer le temps.
- Ah non. Il m'a fallu des éternités avant d'avoir la machine à explorer le temps."
p. 311
Vous me demandez si je peux me pardonner?
Je peux me pardonner bien des choses. L'endroit où je l'ai laissé. Ce que j'ai fait. Mais je ne me pardonnerai pas l'année où j'ai haï ma fille, où j'ai cru qu'elle s'était enfuie, peut-être à la ville.
Voilà. Considérez-vous comme alertés. Il y a tant de petits déclencheurs à travers le monde qu'on est en train d'activer dans les ténèbres alors que j'écris ces mots. Ce livre-ci est étiqueté comme il faut. Il ne nous reste plus maintenant qu'à nous inquiéter de tous les autres livres, et bien sûr, de la vie, qui est énorme et compliquée et ne vous donnera jamais de mise en garde avant de vous faire du mal.
Je me promène à travers ta vie et je reste immobile au bord de la mienne.
("Terminaisons féminines")
Et voici ce que nous apprenons sur nous-mêmes, en ces instants où le déclencheur s'active : le passé n'est pas mort. Il est des choses qui nous attendent, patiemment, dans les corridors obscurs de notre vie. Nous pensons les avoir distancées, bannies de nos pensées, laisser se dessécher, se ratatiner et partir au vent ; mais nous nous trompons. Elles nous attendaient dans le noir, en s'exerçant, en répétant leurs coups les plus cruels, leurs crochets à l'estomac, secs, durs, insensibles, tuant le temps jusqu'à ce que nous repassions par là.
Les monstres de nos placards et de nos têtes sont toujours tapis dans l'ombre, comme le moisi sous les lames de parquet et derrière la tapisserie, et il y a tant de ténèbres, une profusion inépuisable. L'univers a d'amples provisions de nuit.
La mort attend dans notre avenir à tous
Trop souvent les gens ne voient pas ce qui ne bouge pas. Les yeux voient, mais ne voient pas, ils ne tiennent pas compte.
("Terminaisons féminines")
- Tu partirais en courant ? Tu me quitterais ?
- Je marcherai. Et je ne quitterai pas. Je partirai vers. [...]
("Le retour du mince duc blanc")
Une brise traversa le jardin des fleurs mortes et à l'esprit du Duc vint l'image de fantômes parfumés.
("Le retour du mince duc blanc")
J'oublie des choses, et ça m'effraie.
Je perds les mots, mais pas les concepts. J'espère bien que je ne les perds pas. Sinon, je n'en ai pas conscience. Si je perds des concepts, comment m'en rendre compte ?
Ce qui est drôle, parce que j'ai toujours eu une excellent mémoire. Tout était là. Parfois, ma mémoire était tellement bonne qu'il me semblait même me rappeler des choses que je ne savais pas encore. Me souvenir par anticipation...
("L'homme qui a oublié Ray Bradbury")