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Citations sur Eldorado (405)

Il quittait tout. Sans savoir lui-même s'il reviendrait un jour ou pas. Alors Angelo recommanda son ami au ciel en se disant que les hommes n'étaient décidément beaux que des décisions qu'ils prennent.
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Il se demanda, un temps, où aller. Il voulait une solitude pleine et reposante. Il prit alors la direction du petit cimetière de Lampedusa. La fatigue de sa propre existence lui collait à la peau. Il la sentait peser sur son dos avec la moiteur d'un soir d'été. Il était vide et plein de silence.
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Aucune frontière n'est facile à franchir. Il faut forcément abandonner quelque chose derrière soi. Nous avons cru pouvoir passer sans la moindre difficulté, mais il faut s'arracher la peau pour quitter son pays. Et qu'il n'y ait ni fils barbelés ni posté frontière n'y change rien [...]. Aucune frontière ne vous laisse passer sereinement. Elles blessent toutes.
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Les premiers immigrants de Lampedusa furent ensevelis dans le cimetière municipal – au milieu des caveaux des vieilles familles de souche. Ces corps brisés par les vagues et déchirés par les rochers étaient accueillis de façon posthume sur la vieille terre d’Europe.
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Combien d’hommes étaient en train de mourir ainsi cette nuit, sans cri, sans témoin, avec leur seule peur pour escorte ? Il contemplait la mer tout autour de lui et il aurait aimé hurler. De toute sa force. Hurler pour que les mourants l’entendent au loin. Simplement cela. Qu’ils sachent que des hommes étaient là qui ne les trouveraient jamais ou qui arriveraient trop tard mais qui étaient partis à leur recherche. Qu’ils sachent qu’ils n’avaient pas été oubliés. Alors il demanda à Matteo de faire retentir la sirène en continu. Pour que les flots soient remplis de ce bruit. Les barques étaient peut-être là, à quelques centaines de mètres, et ils ne le sauraient jamais. Les corps noyés passaient peut-être à l’instant même sous la coque de la frégate. Le son long et continu de la sirène était comme un dernier salut. Pour dire qu’ils avaient tout fait pour les trouver et pour s’excuser de n’y être pas parvenus.
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En ce jour, encore, la mer avait donné. Il serait peut-être un temps où elle refuserait d'ouvrir son ventre aux pêcheurs. Où les poissons seraient retrouvés morts dans les filets, ou maigres, ou avariés. Le cataclysme n'est jamais loin. L'homme a tant fauté qu'aucune punition n'est à exclure. La mer, un jour, les affamerait peut-être. Tant qu'elle offrait, il fallait honorer ses présents.
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Nous laisserons ce nom ici, accroché aux branches des arbres comme un vêtement d'enfant abandonné que personne ne vient réclamer. Là où nous irons nous ne serons rien. Des pauvres. Sans histoire. Sans argent.
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Nous n'osons plus. Nous espérons. Nous rêvons que ceux qui nous entourent devinent nos désirs, que ce ne soit même pas la peine de les exprimer. Nous nous taisons. Par pudeur. Par crainte. Par habitude. Ou nous demandons mille choses que nous ne voulons pas mais qu'il nous faut, de façon urgente et vaine, pour remplir je ne sais quel vide. Combien de fois as-tu vraiment demandé à quelqu'un ce que tu voulais ?
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Au bout de quelques instants, il remarqua qu'un jeune homme était là, en face de lui, qui l'observait avec insistance. D'abord, il baissa les yeux, pensant que l'autre finirait par partir, mais il continuait à sentir son regard peser sur lui. Alors il le contempla à son tour. C'était un jeune homme au visage maigre qui avait l'air timide. Il se tenait bien droit et n'avait pas détourné les yeux depuis qu'il était arrivé. Que voulait-il ? Qu'avait-il vu en lui qui l'arrêtait ainsi?
D'un coup, le jeune homme s'approcha. Il était mal habillé. Il s'arrêta à quelques mètres, le salua de la tête avec politesse puis s'accroupit pour être à la même hauteur que lui et lui demanda :
-Masambolo ?
Le commandant fut stupéfait. Il comprenait ce que voulait dire mais ne savait que répondre. Massambolo. Il se souvenait du récit qu'il avait entendu la veille. C'était bien ce même nom, celui du dieu des émigrés qui lance à travers le continent des ombres pour veiller sur les peuples en souffrance. Que lui voulait ce jeune homme ? Plus il cherchait en son esprit, plus il lui semblait impossible de répondre quoi que ce soit...
[...]
-Masambolo?
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Je me suis trompé. Aucune frontière n'est facile à franchir. Il faut forcément abandonner quelque chose derrière soi. Nous avons cru pouvoir passer sans sentir la moindre difficulté, mais il faut s'arracher la peau pour quitter son pays. Et qu'il n'y ait ni fils barbelés ni poste frontière n'y change rien. J'ai laissé mon frère derrière moi, comme une chaussure que l'on perd dans la course. Aucune frontière ne vous laisse passer sereinement. Elles blessent toutes.
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