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Citations sur La part du feu (27)

C’est pour cette raison que je me suis décidée à téléphoner à mon ex-mari, Christophe, et que je l'ai l'invité à prendre un café place de la Sorbonne. Bien que je sois, comme chaque fois, un peu embarrassée à l'idée de le revoir.

Notre divorce demeure une énigme à nos propres yeux, puisque notre entente a été excellente durant les douze années de notre mariage. Simplement, je m'étais mise à souffrir d'une fatigue intérieure de plus en plus écrasante, une dépression inexpliquée qui rendait difficile jusqu'à la coexistence avec mon mari.

Notre incapacité à avoir des enfants y a peut-être eu sa part ; mais ni lui ni moi n'avions jamais cherché à savoir d'où venait le problème, préférant différer sans cesse un projet d'adoption devenu de plus en plus hypothétique. J’ai fini par demander la séparation et Christophe en a été affecté. Mais il m’a avoué après coup en avoir éprouvé, aussi, du soulagement, ce que je peux comprendre.

En attendant, je porte encore son nom, ce qui est, dirons-nous, notre façon de rester liés.
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- Laurence... écoute-moi. Tout ce que tu sais de cette époque, tu l'as lu dans des bouquins écrits par des gens qui ont la nostalgie de leur jeunesse. À les entendre, ils étaient tous des héros, icônes de la liberté et patati et patata.

Tu parles... La moitié de ces gens-là étaient des imposteurs, l'autre des cinglés ou des délinquants. Des enfants de bonne famille trop gâtés qui piquaient leur petite crise révolutionnaire. Certains n’étaient là que pour faire le coup de poing. Ils étaient fascinés par la violence.

Zorgen était le gourou dont ils avaient besoin, et ils se seraient fichus dans la Seine avec des cailloux dans les poches s'il le leur avait demandé.
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Pour le moment, je ne voyais qu'un gâchis, celui des illusions d'une jeunesse, leur jeunesse à tous. Certains avaient voulu la liberté, mais avaient retourné l'aiguillon de leurs batailles contre eux. D'autres croyaient aux vertus de la violence, et la violence les avait plaqués au sol.
(p. 201)
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- Vous avez lu le manifeste de Guillermo Zorgen ?

- Oui, à la BnF.

- Ça vous aura donné une idée. Un mélange de prose échevelée à la Lautréamont et de la langue de bois, que dis-je, la langue de béton des pires gazettes maoïstes. Ajoutez-y des fragments de marxisme et des appels au meurtre exaltés, une pincée de métaphores christiques, et vous obtenez le style inimitable de Guillermo Zorgen. De la bouillie pour les chats.
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Il faut dire que ma mère n’a pas ce qu'il est convenu d'appeler un caractère facile. Elle est entière, angoissée, prompte à la colère. Sa violence pouvait, et peut encore, exploser en geysers pour une mauvaise note, une fourchette tombée à terre ou une paire de chaussures mal rangée. Ce qui ne l'a jamais empêchée d'être présente, et parfois affectueuse. Jacques, mon père, est tout l'inverse : peu démonstratif, une eau qui dort. Je lui sais cependant gré d'avoir toujours été là pour intervenir lorsque des mots tranchants, trop grands pour mon âge, commençaient à rebondir autour de la table.

Entre ces deux-là, mon enfance n'avait été ni heureuse ni malheureuse. Mais elle avait été longue.
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Puisque j'ignore pour combien de temps je suis ici, j’ai demandé à passer mes certificats de licence de lettres. La gauche, en nos formes que l’on dit extrèmes, ne fait que peu de cas de la littérature, et elle a tort : c'est aussi dans sa faculté créatrice que l’on puise les ressources nécessaires à penser le remaniement profond d'une structure collective ; ce que l'on appelle, en d'autres termes, révolution.
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Et elle s'est dirigée vers les ascenseurs. Je savais que j'avais tort mais je n’ai rien fait pour la retenir, tant j'étais furieux.

Une phrase d'Ovide, de ces exemples puisés dans les chrestomathies que j'apprenais à mes élèves au lycée, m'est revenue à l'esprit : Video meliora proboque, détériora sequor, je vois le meilleur et je l'approuve, mais je poursuis le pire.

Je venais une fois de plus de m'en administrer la preuve.
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Je pourrais dire que ces souvenirs appartiennent à ma jeunesse, mais ces mots n’ont pas de sens. Ce pan de ma vie n’a pas vieilli, ne s’est pas décoloré. Il m’a été arraché à vif, ce qui est bien différent. Mon coeur a pris de l’âge, mon corps est malade, mais ce temps-là palpite encore en eux. Il pourrait même saigner, parce que la blessure est toujours là, et qu’elle me brûle quand j’y pense.
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- Ma pauvre, en 68, j'avais quatorze ans! Ma mère me bouclait quasiment dans la pharmacie pour être certaine que je n'irais pas dépaver Paris. Mon Père pensait que la guerre civile était proche. Il stockait des antibiotiques dans la cave. je n'ai vu les évènements de mai que sur l'écran de la télé familiale.
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En même temps, les témoignages d' "établis" et de quelques historiens m'aident à comprendre que le discours du MLC [Mouvement pour la Lutte Clandestine] n'est pas une hystérie : passé un certain stade de mépris de la vie humaine, la guerre devient une réponse comme une autre à qui tente de vous broyer. Et comme broyeuse, les usines Citroën des quais de Javel semblaient avoir été un modèle dans le genre.
(p.148)
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