je m'installe dans ce point de l'espace que j'occupe, dans le moment précis de la durée. Je n'admets point qu'il ne soit point crucial. J'étends mes bras de toute leur longueur. Je dis : voici le sud, le nord... Je suis effet ; je serai cause. Cause déterminante ! Une occasion qui ne se représentera jamais plus. Je suis ; mais je veux trouver raison d'être. Je veux savoir pour quoi je vis.
il est bien peu de monstres qui méritent la peur que nous en avons.
Monstres enfantés par la peur - peur de la nuit et peur de la clarté ; peur de la mort et peur de la vie ; peur des autres et peur de soi.
je me repens [...] d'avoir préféré l'imaginaire au réel.
je me sentais moins curieux de moi que d'autrui, ou plutôt : le désir charnel travaillait sourdement vers une confusion charmante, et me précipitait hors de moi.
La peur de trébucher cramponne notre esprit à la rampe de la logique. Il y a la logique et il y a ce qui échappe à la logique. (L’illogisme m’irrite, mais l’excès de logique m’exténue.) Il y a ceux qui raisonnent et il y a ceux qui laissent les autres avoir raison. (Mon cœur, si ma raison lui donne tort de battre, c’est à lui que je donne raison.) Il y a ceux qui se passent de vivre et ceux qui se passent d’avoir raison. C’est au défaut de la logique que je prends conscience de moi. Ô ma plus chère et ma plus riante pensée ! qu’ai-je affaire de chercher plus longtemps à légitimer ta naissance ?
Camarade, n’accepte pas la vie telle que te la proposent les hommes. Ne cesse point de te persuader qu’elle pourrait être plus belle, la vie ; la tienne et celle des autres hommes ; non point une autre, future qui nous consolerait de celle-ci et qui nous aiderait à accepter sa misère. N’accepte pas. Du jour où tu commenceras à comprendre que le responsable de presque tous les maux de la vie, ce n’est pas Dieu, ce sont les hommes, tu ne prendras plus ton parti de ces maux.
Ne sacrifie pas aux idoles.
Ne te contente pas de contempler ; observe.
Mais la mort est atroce à qui n'a pas rempli sa vie. À celui-ci la religion n'a que trop beau jeu pour lui dire : — Ne t'en fais pas. C'est de l'autre côté que ça commence, et tu seras récompensé. C'est dès « ici-bas » qu'il faut vivre.
Ce n'est pas seulement le monde qu'il s'agit de changer ; mais l'homme.
Il m'a depuis longtemps paru que la joie était plus rare, plus difficile et plus belle que la tristesse. Et quand j'eus fait cette découverte, la plus importante sans doute qui se puisse faire durant cette vie, la joie devient pour moi non seulement (ce qu'elle était) un besoin naturel — mais bien encore une obligation morale. Il me parut que le meilleur et plus sûr moyen de répandre autour de soi le bonheur était d'en donner soi-même l'image, et je résolus d'être heureux.