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Citations sur Rocher de Brighton (34)

La femme recula. Un regard de fureur passager s'accrocha, discordant, au milieu des guirlandes.
"Entêtée, dit-elle. Si j'étais votre mère... une bonne fessée."
Le visage osseux et résolu lui renvoya son regard; toute la lutte qui divise le monde était là; des cuirassés appareillèrent pour le combat, des escadrilles de bombardement prirent le vol, entre les yeux fixes et la bouche obstinée. C'était comme la carte d'une campagne marquée de petits drapeaux.
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"_ Je vous répète, Mrs. Arnold que cette affaire est close.
_ Elle est loin de l'être. Nous nous reverrons."
De la porte, elle regarda une fois encore derrière son bureau l'homme vieillissant et le menaça de son impitoyable vitalité.
"_ Ou peut-être qu'on se reverra même pas ! Je suis de taille à diriger ça à ma façon. Je n'ai pas besoin de votre police...J'ai mes amis."
Ses amis... Il y en avait un peu partout sous la lumière fluide de Brighton. Ils suivaient docilement leurs femmes dans les poissonneries, ils portaient les seaux des enfants sur la plage, ils rôdaient autour des bars en attendant l'heure de l'ouverture sur la jetée. Pour deux sous, ils regardaient par la fente d'un Kinérama : "une nuit d'amour." Elle n'aurait qu'à faire appel à l'un deux, car Ida Arnold était du bon bord. Elle était gaie, elle était bien portante, elle était capable de prendre une petite cuite avec les meilleurs d'entre eux. Elle aimait s'amuser, sa grosse poitrine proclamait franchement le long de l'Old Steyne, sa charnelle générosité, mais l'on avait qu'à regarder Ida pour savoir qu'on pouvait compter sur elle. Ce n'est pas elle qui irait raconter des histoires à votre femme, elle ne vous rappellerait pas, le lendemain matin, les choses que vous préférez oublier, elle était honnête, elle était bienveillante, elle appartenait à la grande classe moyenne respectueuse des lois.
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- Je sais une chose que vous ne savez pas. Je sais la différence entre ce qui est juste et ce qui est injuste. On ne vous a pas appris ça à l'école?
Rose ne répondit pas ; la femme avait tout à fait raison ; les deux mots ne signifiaient rien pour elle. Leur saveur était effacée par celle de mots plus forts ; le Bien et le Mal.
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"_ Vous croyez qu'il est amoureux de vous ? dit la femme. Il ne l'est pas.
_ Il m'a épousé.
_ Et pourquoi ? Parce qu'on ne peut pas obliger la femme mariée à témoigner. Vous n'êtes qu'un témoin comme l'était cet homme. Il vous tuerait sans hésitation s'il pensait que vous le mettez en danger."
Le dos appuyé au lit, Rose la regardait venir.
"_ On peut changer, dit-elle.
_ Oh! mais non, mais non. Regardez-moi. Je n'ai jamais changé. C'est comme ces bâtons de Rocher : mordez les tout du long, vous lirez toujours Brighton. C'est la nature humaine."
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"_ Vous n'pouvez rien faire sans not' consentement dit l'homme.
_ Je n'y tiens pas à ce point-là.
_ Disons quinze guinées.
_ Vous connaissez mon offre."
Il regarda avec horreur la pièce qui l'entourait; personne ne pourrait dire qu'il n'avait pas eu raison de fuir loin de tout cela, de commettre n'importe quel crime...Quand cet homme ouvrait la bouche, il entendait parler son père; cette silhouette, dans le coin, c'était sa mère; il marchandait sa soeur et ne ressentait aucun désir...Il se tourna vers Rose : "Je m'en vais", et il sentit passer en lui un très léger mouvement de pitié envers la vertu qui ne peut commettre de meurtre pour s'évader. On a dit que les saints possédaient - quelle est l'expression? - "des vertus héroïques", patience héroïque, endurance héroïque, mais il ne voyait rien d'héroïque dans le visage osseux, les yeux saillants, la pâleur angoissée, pendant ce marchandage des deux hommes, où elle voyait toute sa vie se confondre avec le débat financier.
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"_ C'est mieux que de rentrer à la maison, dit Rose.
_ C'est où, ta maison ?
_ Nelson Place, vous connaissez ?
_ Oh! j'ai vu ça en passant" dit-il, l'air détaché, mais il aurait pu en dessiner le plan sur l'herbe, aussi exactement qu'un arpenteur : au coin, la petite salle de théâtre de l'Armée du Salut, toute grillagée et fortifiée; un peu plus loin, sa propre maison de Paradise Piece; les bâtisses qui semblaient avoir subi un bombardement intensif, avec leurs gouttières suspendues dans le vide et leurs fenêtres sans vitre; un vieux lit de fer qui rouillait dans un jardinet; au premier plan, le terrain vague plein de décombres, où l'on avait démoli des maisons dans l'intention d'y mettre des appartements modèles qui n'avaient jamais été construits. Ils étaient étendus côte à côte, eux et leur géographie semblable et le mépris du gamin se mêla d'un peu de haine. Il croyait pourtant s'être évadé et voilà que la maison de son enfance revenait, qu'elle était à son côté, pleine d'exigences.
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"Qu'est-ce que tu bois ?" demanda le Gamin.
Elle ne savait même pas le nom d'une boisson. A Nelson Place, d'où elle était sortie comme une taupe d'un trou pour trouver le grand jour du restaurant Snow, et de Palace Pier, elle n'avait jamais connu de garçon assez riche pour lui offrir quelque chose à boire. Elle aurait bien dit "bière" mais elle n'avait pas encore eu l'occasion de découvrir si elle aimait ou non la bière. Une glace à deux sous achetée à un marchand ambulant était la somme totale de ses connaissances en fait de plaisirs luxueux.
"Qu'est-ce que tu aimes ? Je ne sais pas ce que tu aimes, moi.
_ Une glace, dit-elle, déçue, mais elle ne pouvait plus le faire attendre.
_ Quelle sorte de glace ?
_ Juste une glace ordinaire" dit-elle.
Dans toutes ses années passées au bas quartier, le marchand ambulant ne lui avait jamais offert de choix.
"Vanille ?" dit le garçon.
Elle fit "oui" de la tête. Elle supposait que c'était cela qu'elle avait toujours mangé et elle ne se trompait pas. C'était seulement la taille au-dessus.
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p 168
Après tout, s'il s'est tué, c'est son affaire.
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Des fleurs, pensa Ida avec mépris, ce n’est pas la vie. La vie, c’est le soleil sur le montant de cuivre du lit, le porto d’origine, le bond que fait votre coeur quand l’outsider sur lequel vous avez misé passe le poteau et que les couleurs montent. La vie, c’était la bouche du pauvre Fred écrasée sur la sienne dans le taxi, vibrant en même temps que le moteur tout au long de l’esplanade.
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Il ne pouvait plus désormais accuser son père... c'est à ça qu'on en arrive... On se trouve entraîné, et puis, pensa-t-il, l'habitude vous en vient, on s'abandonne par faiblesse. On ne peut même pas faire de reproches à la fille. C'est la vie qui vous attaque... il y a les quelques secondes aveugles où l'on pense que c'est magnifique...
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