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3,4

sur 72 notes
°°° Rentrée littéraire 2020 #23 °°°

Les premières pages m'ont happée d'emblée tant j'ai été sous le charme de l'écriture superbe de Paul Greveillac, à la fois classique par sa structure et ses procédés, que moderne par son travail sur la ponctuation et le rythme. L'auteur prend tout son temps pour installer minutieusement son récit, cadre et personnages, ce qui immerge aisément le lecteur dans la Budapest de la fin du XIXème siècle.

Ce roman ample et riche retrace le destin de Lajos Ligeti, jeune juif viennois, apprenti architecte, débarquant à Budapest chez un vieil oncle misérable, plein de rêves, d'ambition et d'audace, lui qui a osé fuir le confort de la pharmacie familiale pour imposer ses projets architecturaux visionnaires, sans contact ni argent. Assez rapidement, on pense fort à Balzac ou Maupassant dans la façon remarquable qu'à l'auteur de raconter le destin de ce jeune ambitieux avec force de détails, de reconstitutions urbaines ou de descriptions physiques et morales aiguisées. Espoirs, ascension, gloire, déchéance, on devine assez vite le schéma classique que suivra son personnage.

Malgré ces grandes qualités, j'ai cependant été moins enthousiasmée par la deuxième partie du livre, lorsque Lajos Ligeti a fait sa place dans un cabinet d'architecte en vue, comme si les chapitres perdaient en richesse romanesque une fois les présentations faites. Peut-être que les longues descriptions architecturales ainsi que les enjeux autour des concours urbanistes m'ont un peu assoupie, même si les personnages sont au prise avec des sentiments forts de jalousie, rivalité et orgueil. Je me suis ennuyée. Peut-être également que j'aurais aimé que l'arrière-plan historique passionnant d'un empire austro-hongrois sur la fin, avec son pluralisme ethnique et la montée de l'antisémitisme soit plus approfondi.

Il m'a manqué assurément de vibrer, l'émotion n'a jamais vraiment jailli lors de cette lecture, ou trop peu, par exemple lorsque est évoqué l'oncle serrurier chez qui Lajos vivra les premières années : sa tristesse, son fatalisme, son amour intérieur pour son neveu en font un superbe personnage, à la père Goriot.

Il n'empêche que ce roman parle juste et intelligent lorsqu'il explore la question de l'art comme représentation de la société, mettant en avant l'opposition frontale et douloureuse entre le temps long de transformation d'une société hongroise marquée par l'inertie et l'instantanéité de la pensée fulgurante de l'artiste impatient, ici l'architecte, qui doit accepter d'être d'abord un sujet avant de devenir un acteur. Cette tension fondamentale et quasi philosophique transparait de façon limpide sous la plume de Paul Greveillac.

Lu dans le cadre des Explorateurs de la rentrée 2020 Lecteurs.com
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La frustration de l'architecte.
Ancien traumatisé du rapporteur, perforateur en série de papier millimétré, lanceur de compas repenti, j'ai néanmoins accepté de lire ce roman de bâtisseur pour une masse critique. Merci à Babelio pour cette thérapie.
Des plans plein la tête, crac du croquis, Lajos Ligeti, jeune édificateur viennois, s'installe à Budapest à la fin du 19 ème siècle pour donner corps à ses visions monumentales. Passer du coup de crayon au coup de truelle.
La ville est en chantier, son apprentissage, aussi. Il intègre un cabinet dirigé par deux personnages qui rejoignent ici la fiction après avoir fréquenté la réalité. Il s'agit de l'architecte célèbre Ödon Lechner, génie à l'origine du style national hongrois qui associa l'Art Nouveau à des techniques Magyares et de son associé, Gyula Partos, autre pionnier du style « Sécession Hongroise » de l'époque. C'était le paragraphe Wikipédia, trousse de l'architecte de ces mots dont les seules constructions notables furent d'éphémères cabanes buissonnières dans ses jeunes années. Créateur incompris.
Trop indépendant pour s'encombrer de pygmalions, Lajos Ligeti découvre que la réussite ne passe pas uniquement par la planche à dessin. Il doit apprendre à louvoyer, séduire des promoteurs, convaincre les donneurs d'ordre, pactiser avec des financiers. La concurrence est féroce, les déconvenues sont la règle, les projets qui se concrétisent l'exception.
Lajos Ligeti va connaître le succès et l'échec, l'amour et la solitude, la reconnaissance et la déchéance, dans une Europe qui prépare le pire. Son obsession de bâtisseur le rend aveugle au frimas de sa vie et de l'histoire. Un comble pour un visionnaire.
Paul Greveillac dresse un portrait très intéressant de cette époque de transition faite d'imagination et d'audace. Il va mettre sur la route de son héros le compositeur Bartok et le peintre Schiele, dans des rencontres trop fugaces, mais aussi des escrocs, des industriels et des inventeurs. La grande guerre signera hélas la fin des géniales fantaisies de l'Art Nouveau.
La prose de l'auteur est très soignée, d'une rare élégance mais je n'ai hélas pas réussi à m'attacher au personnage, à ressentir pour lui une quelconque empathie. Difficile de se laisser subjuguer par un roman quand le sort du héros indiffère. Impossible de le plaindre quand le mauvais sort s'acharne. J'ai ressenti plus d'émotions pour les autres personnages, moins présents mais plus carnés.
Obnubilé par son travail, le héros souffre d'une carence d'humanité. Il délaisse une épouse qui fut sa muse, se préoccupe peu de son enfant, s'éloigne de ses parents, néglige l'amitié et les avis de son associé et maître d'oeuvre. Lajos n'est porté que par son oeuvre et la trace qu'il souhaite laisser au monde. Seules ses frustrations et son ambition portent son sang à ébullition.
J'ai donc vécu ce roman comme un tableau doté d'un joli cadre et de beaux paysages mais dont le personnage central aurait été peint sans visage. Une nature un peu trop morte pour moi.
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En 1896, le jeune Autrichien Lajos Ligeti, passionné d'architecture, quitte la majestueuse Vienne pour la bouillonnante Budapest, alors en pleine fièvre bâtisseuse. Apprenti au sein d'un grand cabinet d'architectes, il découvre les réalités du métier : la difficulté de séduire commanditaires et maîtres d'oeuvre, les rivalités et les manoeuvres déloyales des concurrents, la nécessité de louvoyer et de pactiser avec les puissants … Il lui faudra des trésors de détermination pour percer et imposer son style, au cours d'une carrière qui lui fera connaître grandeur et décadence.


Classique et soigné, le récit ressuscite de façon vivante et crédible l'atmosphère optimiste et insouciante de la Belle Epoque, ces quatre décennies de paix qui ont favorisé la croissance économique et d'extraordinaires progrès techniques. Vienne, alors considérée comme l'une des plus splendides capitales d'Europe, affirme son prestige au travers d'une architecture devenue reine des arts, réinventée dans de nouveaux développements décoratifs en rupture avec l'académisme. Budapest, la seconde capitale dédaignée de l'Empire austro-hongrois, ville en profonde transformation, cherche à renforcer son identité nationale, et trouve également dans l'Art Nouveau un symbole de son affirmation et de son émancipation.


Dans cet âge d'or où se multiplient les grands chantiers publics, de nombreux architectes autrichiens et hongrois acquièrent une renommée internationale. Au milieu de ces personnages réels, l'auteur a imaginé l'apprentissage d'un jeune homme passionné et idéaliste, qui va tout sacrifier à son art. Et c'est presque dommage, tant la restitution soignée du cadre historique et le récit aux allures de biographie appelaient à la résurrection d'un de ces hommes aujourd'hui presque oubliés, plutôt qu'à l'invention romanesque d'un héros au final bien moins crédible et consistant que le riche univers pour lui si précisément recréé. Lajos Ligeti, peint dans son unique obsession professionnelle, manque globalement d'âme et d'émotions pour réellement s'incarner et convaincre.


Au bémol près de son personnage central un peu trop monolithique pour être à la hauteur du reste du roman, Art Nouveau restitue, avec force détails fascinants, un moment particulier de l'Histoire qui permit, en Europe Centrale bien plus qu'ailleurs, le bref fleurissement d'un art moderne et réformateur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Quel bonheur de visiter Budapest, sur les pas de Lajos et Katarzyna Ligeti, et de remonter le temps jusqu'à ces années charnières 1894-1913, où les progrès techniques ouvrent aux architectes de nouvelles perspectives.
Louis Vicat invente, dès 1818 en France, le ciment artificiel que l'anglais Joseph Aspdin brevette en 1824 avec son « ciment Portland ». D'abord employé dans des ouvrages d'art, ce matériau prend progressivement ses lettres de noblesse et l'architecte Anatole de Baudot conçoit l'église Saint Jean de Montmartre (1894-1904).
Budapest est alors le vaste chantier d'une capitale qui rivalise avec Vienne et louche vers Londres et Paris. L'architecte Ödön Lechner se donne pour objectif de créer un style national hongrois et de bousculer le clacissisme d'Ignác Alpár. En Europe Auguste Perret et Le Corbusier posent leurs premières fondations.
Dans ce tourbillon culturel, social et politique, Bella Bartok compose à Budapest et Adolf Hitler vend ses premiers tableaux à Vienne.
Les automobiles prennent la route, les avions décollent, les usines poussent et croissent, des industriels bâtissent des phalanstères inspirés des théories de Fourier ainsi à Guise, Jean-Baptiste Godin bâtit un familistère à proximité de son usine de poêles.
C'est dans ce décor que Paul Greveillac crée Lajos Ligeti, architecte ambitieux, d'origine ashkénaze, qui part conquérir Budapest, via un détour à Paris pour élever une église, et dessine l'ambitieux projet Europa, pour loger les salariés d'un constructeur automobile.
Rédigé d'une plume élégante et enseignante, ce roman débute comme un conte de fées, mais s'embourbe dans le chantier Europa et les ornières creusées par des concurrents ou des collègues jaloux, voire rivaux, et Lajos se noie progressivement mais inexorablement.
Mais il est vrai que, le mieux étant l'ennemi du bien, un architecte qui ne respecte pas les délais et dérive dans les budgets, ne peut durablement être respecté par ses prospects ou clients.
Lorsque Lajos est mis sur la touche par son associé, qui a les pieds sur terre a défaut d'avoir le moindre talent artistique, il se révèle incapable de rebondir et dérive sur le plan familial et professionnel.
L'auteur semble ne pas croire en son héros qu'il laisse se noyer dans l'alcool et la dépression et l'intrigue fluctuant entre fiction et réalité égare le lecteur dans un univers de bric et de broc.
D'où une certaine déception en ce qui me concerne bien que j'aie apprécié le tableau de l'empire austro-hongrois riche d'une multitude de nations aux rêves hétérogènes et aimé cette esquisse d'un « Art nouveau ».

PS : je préfère nettement Phrase d'armes
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Merci à l'opération Masse critique de Babelio et aux éditions Gallimard pour m'avoir fait découvrir ce roman de Paul Greveillac.
***
Dans Maîtres et esclaves, Paul Greveillac nous présentait la condition des artistes peintres dans la Chine de Mao. Dans Art nouveau, il va nous proposer de suivre la carrière d'un jeune architecte, Lajos Ligeti, dans l'Autriche-Hongrie d'avant la Première Guerre mondiale. En 1896, le jeune homme quitte la pharmacie familiale de Vienne pour s'installer à Budapest, récente deuxième capitale de l'Empire, où tout est à construire. Il s'installe chez son ours d'oncle qu'il ne connaît pas, Jakob Lakatos, serrurier de son état, et où il est accueilli sans enthousiasme. Après quelques années dans un cabinet prestigieux où on reconnaît son talent, mais où il joue les utilités, Lajos rencontre un maître d'oeuvre ambitieux et malin avec lequel il s'associe. Sa carrière démarre vraiment. Il connaîtra succès et échecs ainsi que joies et déceptions dans ce curieux empire qui réunit tant de populations diverses que, n'importe où ailleurs que dans votre coin de pays, vous êtres un étranger. N'empêche, nombre des difficultés de Ligeti ainsi que la condescendance (au mieux…) affichée par ses collègues ne sont assurément pas étrangères au fait qu'il est juif.
***
J'ai les mêmes admirations et les mêmes réserves pour ce roman que pour celui que j'ai déjà cité. le cadre de vie, l'époque, la rare générosité, les intenses rivalités et les vraies mesquineries entre les bureaux d'architectes sont parfaitement rendus. Les enjeux de cet Art nouveau, le refus de certaines outrances, l'invention de nouveaux styles ou l'utilisation de matériaux modernes (l'aventure du béton armé !), promesses d'avenir, se révèlent passionnants. En revanche, je n'ai pas réussi à connaître les différents personnages. Leur psychologie m'échappe et ils me restent par conséquent étrangers. le choix des différents points de vue du narrateur est peut-être en partie la cause de mon détachement. Ainsi, au début du roman, le narrateur nous donne à voir par les yeux d'un personnage très secondaire, le cocher, alors que, tout de suite après, le personnage principal est décrit par un narrateur omniscient, ce qui crée une certaine distance. le procédé sera repris plusieurs fois. de plus, j'avoue ne pas être enthousiasmée par le style de Paul Greveillac. Je suis même plutôt agacée par la recherche du mot rare, de la comparaison la plus surprenante possible, de la tournure de phrase alambiquée. Je ne relèverai qu'un exemple parce que la quantité de petits signets posés au fil de ma lecture me décourage à l'avance : « En ligne de fuite se devinait un bureau dont la porte était entrouverte. de la porte aveuglait par instants, en fonction du mouvement des branches, dehors, qui oblitéraient plus ou moins les rayons du soleil, une plaque dorée » (p. 54). Bref, bien que convaincue de la qualité de ses romans, je passe en grande partie à côté de cet auteur...
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Il venait d'arriver de Vienne. Il était bien mis. Comme un bourgeois de là-bas. Un complet sombre. Un pardessus au bras. La tête nue. Taille moyenne. Glabre. Cheveux noirs, portés courts. Sourcils épais, yeux noirs, profonds, perçants et mathématiques ; ils semblaient voir partout les structures qui soutiennent le monde physique… il avait pour tout bagage une grosse malle.

Nous sommes à la fin du XIX siècle. le jeune Lajos Ligeti décide de tenter sa chance à Budapest avec une seule ambition : bâtir. Bâtir Budapest. L'Empire. Et, puis plus tard l'Europe.
Pendant un an, ses parents lui ont promis de lui faire parvenir de Vienne de quoi subsister. Adieu l'insouciance, la légèreté. Faire sa place soi-même n'est pas évident. Mais Lajos Ligeti a envie de réussir et surtout un grand talent qui pourra lui servir beaucoup.
Etranger et juif dans un monde où la concurrence est rude, il travaillera dur pour mettre en route ses projets. Réussira-t-il à réaliser son rêve ?

J'ai beaucoup aimé ce roman. L'auteur réussit à nous faire revivre les émotions du personnage tout au long de son parcours. Les dialogues sont rares dans ce roman, mais le personnage a beaucoup de choses à nous faire découvrir. L'écriture avec les descriptions qui ne sont jamais ennuyantes, nous fait entrer avec aisance dans le monde de l'architecture. C'est vraiment passionnant.
Je remercie la masse critique privilégiée pour la confiance ainsi que les éditions Gallimard pour l'envoi du livre.

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Le roman débute en 1896, par l'arrivée d'un jeune apprenti architecte, Lajos Ligeti, à Budapest. Sa famille a vécu dans cette ville, son oncle y demeure toujours, mais ses parents ont préféré rejoindre Vienne, la capitale impériale. Lajos ne voit pas son destin dans la pharmacie familiale, il préfère saisir l'opportunité d'intégrer le cabinet d'un grand architecte, Ödön Lechner. Il faut dire qu'en cette fin de siècle, Budapest bâtit frénétiquement, des opportunités apparaissent, une nouvelle esthétique émerge. Mais la concurrence est rude dans le milieu de l'architecture, le talent ne suffit pas forcément, d'énormes sommes sont en jeu, et tous les coups sont permis pour faire carrière. Lajos va connaître toutes les étapes professionnelles dans ce milieu, les débuts besogneux d'un débutant, en passant par les premiers succès, des coups de chances, une rapide ascension, mais aussi des difficultés, des coups tordus. En parallèle, il va rencontrer l'amour, se marier, fonder une famille, tout cela dans l'Empire austro-hongrois finissant, dans lequel on sent monter les nationalismes, où les Juifs comme Lajos sont en butte à diverses formes de discriminations voire d'agressions.

Le roman dresse un tableau somptueux et passionnant des milieux de l'architecture et de la ville de Budapest en train de se bâtir. J'ai pris grand plaisir, en parallèle à ma lecture, d'aller voir certains bâtiments dont il est question dans le roman sur Internet, les découvrir, tout en suivant les péripéties de leur construction. Cet étrange métier d'architecte, en partie artiste, en partie entrepreneur, en partie commercial, est à mon sens très bien rendu, dans ses contradictions, ses difficultés, ses beautés. le tableau d'une époque de transitions, de changements rapides, un monde bouillonnant, plein de passions, de luttes, où tout semble possible, est parfaitement rendu. L'auteur suggère également que tout cela ne va pas durer, qu'une époque moins exaltante et plus dangereuse se profile. Après quelques pages de flottement, sans doute nécessaires pour m'y habituer, j'ai aussi été séduite par l'écriture de Paul Greveillac, très subtile et élégante, un peu au second degré, prenant une sorte de distance avec le récit, forcément (re) construit, imaginé, de cette épopée moderne du surgissement des bâtiments.

J'avoue avoir été un peu moins intéressée par les personnages en tant que tels, dont j'ai eu la sensation qu'ils étaient surtout là pour illustrer les évolutions de la ville et de la société, montrer comment se passaient les choses dans les milieux de l'architecture, quels étaient les questionnements et enjeux de la modernité en marche. Moins gênant pour les personnages secondaires, dont certains étaient d'ailleurs très bien caractérisés, c'est surtout aux personnages de Lajos, et de Katarzyna, sa femme, que j'ai eu le plus de mal à m'attacher. J'avais parfois de la difficulté à percevoir leur évolution et leur motivations profondes, et cela a, par moments, mis une certaine distance entre moi et ma lecture.

C'était ma première lecture de Paul Greveillac, et je remercie Babelio et les Êditions Gallimard de m'avoir permis cette découverte à l'occasion de l'opération Masse Critique. J'ai maintenant très envie de lire le roman qu'il a consacré à Alfred Schnittke.
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Après avoir lu Maîtres et esclaves  de Paul Greveillac, j'ai plongé à nouveau dans son écriture en lisant son dernier roman Art Nouveau.
 A deux ans d'intervalle j'ai retrouvé  la finesse classique de l'écriture,  la précision clinique des phrases. Quel plaisir qu'une écriture qui enchasse des mots peu employés de la langue française et qui magnifie les conjugaisons.
J'ai retrouvé aussi  ce manque de flamme que j'avais déjà ressenti dans Maîtres et esclaves.
Paul Greveillac a le don pour trouver des sujets très originaux.
Ici, il construit son roman autour de l'architecture et de l'Art Nouveau.
Pour nous entraîner avec lui, il convie Lajos Ligeti personnage fictif, architecte de profession.
Celui-ci quitte Vienne en 1896 pour Budapest où il pense s'installer afin de devenir un architecte reconnu.
Nous allons suivre son évolution jusqu'aux prémices de la première guerre mondiale dans cette empire austro hongrois s'étendant sur toute l'Europe Centrale.
La leçon d'histoire et d'architecture est passionnante. Par le luxe de détails, mise en valeur par l'écriture, nous nous immergeons dans la Budapest de la fin du 19ème siècle. Nous parcourons les rues pavées, les grandes avenues, les cabinets d'architectes , nous participons au foisonnement  culturel, à la naissance d'un Art Nouveau sur la MittelEuropa. Nous voyagerons de Budapest, à Vienne ou à Prague.
Nous assisterons à l'expansion des cabinets d'architecture, à leurs rivalités. L'architecture du béton va poindre.

Lajos Ligeti  peu à peu prend possession de cette ville, manoeuvre pour ouvrir son cabinet d'architecture.
Deux personnages vont l'aider,  le soutenir , l'aimer.
D'abord, l'Oncle Jakob Karpati , vivant dans une masure en  périphérie de Budapest. Un homme de bonté,  juif de tout son être et serrurier de son état.
Puis Katarzyna Liski, sa muse qui deviendra sa femme.
Deux personnages pour lesquels va notre empathie.... à l'inverse de celle que nous éprouvons pour Lajos Ligeti au fur et à mesure que défile sa vie.
Et cette impression de renversement, nous la retrouvons dans le roman. Autant la première partie du roman nous enchante par cette découverte de Budapest et des arcanes de l'architecture, autant la deuxième est plus fastidieuse, manquant de souffle, un peu comme Lajos Ligeti devenant un personnage sans âme vivant dans une époque qu'il a du mal à incarner et à saisir.

Il me reste de cette lecture un plaisir certain pour le style et l'écriture de Paul Greveillac. Il est agréable de se perdre dans une écriture faite d'un riche vocabulaire et d'une audace de conjugaison.
De même pour l'Art Nouveau. Une belle découverte que ce foisonnement entre Autriche et Hongrie
Par contre le personnage de Lajos Ligeti s'estompera petit à petit de  ma mémoire tout comme la situation politique de l'empire austro hongrois entre 1896 et 1914. Celle-ci  ayant été traitée superficiellement me semble-t-il.







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Un  voyage livresque à Budapest m'a tenté et la réflexion sur l'Architecture m'intéresse! Il y a tout juste un an, à la Cité de l'Architecture,  j'ai visité l'Exposition Otto Wagner


Le héros du roman, Lajos Ligeti,  jeune architecte viennois, arrive à Budapest lors de l'inauguration du métro par François Joseph. Il entre comme apprenti au cabinet d'architecte d' Ödön Lechner, le célèbre bâtisseur de l'Institut de Géologie, de la Caisse d'Epargne de la Poste de Budapest, du Musée d'Art décoratif et de nombreux édifices Art Nouveau en Hongrie. Il rencontre tous ceux qui comptent dans le mouvement de la Sécession hongroise. Je me suis promenée avec grand plaisir dans le Budapest du Millenium. Le fonctionnement d'un cabinet d'architecte est raconté: dessin des plans, choix du matériel, début de l'architecture en béton, mais aussi intrigues pour obtenir les commandes...L'auteur décrit en détail les bâtiments construits ainsi que les maquettes de ceux qui ne seront pas retenus. 

La seconde partie du roman intitulée  le Chevalier raconte les succès du cabinet de Ligeti et de son associé Barnabas Kocsis, conducteur de travaux. Quand les commandes de prestige viennent à manquer Ligeti dessine des pierres tombales ou des immeubles de rapport. Ce dernier est même décoré et fonde une famille. 

La chute viendra d'un projet pharaonique, un complexe industriel près de Prague. Jalousies et intrigues, nationalisme des tchèques dans l'Empire Austro-Hongrois qui va se déchirer - la Cacanie - Ligeti est juif, cela n'arrange rien. J'ai moins aimé cette partie qui fait la part belle aux tractations avec moins d'éléments concrets décrits. On visite à Vienne les réalisations d'Otto Wagner. On croise Egon Schiele, furtivement Belà Bartok

Il ne s'agit toutefois pas d'un traité d'architecture, mais bien d'une fiction. Ligeti emprunte beaucoup à son maître Ödön Lechner (qui lui, est bien réel). Il y a aussi une histoire d'amour, un destin tragique. le style un peu trop recherché de Greveillac m'a parfois agacée : on ne pend pas ses vêtements à une patère, on les append.

Une lecture qui m'a donné envie de revenir à mes photos de Hongrie, et à mes carnets Mitteleuropa.
Lien : https://netsdevoyages.car.blog
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D'une écriture ciselée et poétique, Paul Greveillac dépeint l'Europe de la fin du XIXème siècle dont L Histoire se déroule en filigrane, bâtie par les péripéties de Lajos Ligeti, architecte de son état qui a pour ambition de "construire le continent". Des mots de l'auteur naissent des façades, percent des toits, éclosent des motifs - plus assurée que jamais, sa plume emporte ailleurs (plus d'infos : https://pamolico.wordpress.com/2020/08/19/art-nouveau-paul-greveillac/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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