Un coup de coeur pour ce roman qui traite avec délicatesse du thème du handicap, de la rencontre de l'altérité. Louis, le narrateur, âgé d'une petite vingtaine d'années, s'ennuie à la fac. Les événements de mai 68 "glissent" sur lui, il ne se reconnaît pas vraiment dans les revendications estudiantines et cherche encore sa voie. Son attention est attirée par une petite annonce : un couple cherche une personne susceptible de s'occuper de leur adolescent handicapé. Plus que l'activité elle-même, c'est le lieu qui attire Louis : Horville, la station balnéaire dans laquelle il a passé toutes ses vacances étant enfant.
Sa décision est rapidement prise ; après un entretien assez expéditif avec le père de Iannis, Louis fait ses valises et rejoint l'adolescent et sa mère, Héléna, auteur de romans érotiques.
Très rapidement finalement, le jeune homme va entrer en relation avec Iannis dont on devine, même si l'auteur ne mentionne jamais la pathologie, qu'il est autiste. Comme en miroir, les deux personnages vont se révéler l'un à l'autre, se découvrir, se laisser apprivoiser et construire une relation de confiance. Intuitif, Iannis semble percevoir combien ce retour à Horville est chargé d'affects et de culpabilité pour Louis. Il va l'aider, en silence, en lui permettant de sillonner les lieux de l'enfance, de se souvenir et de (se) réparer.
Tout au long du roman, que je n'ai pas quitté avant de l'avoir achevé, je me suis demandé qui était le plus singulier des deux... Iannis, dont les compétences sont plus importantes que soupçonnées, qui met superbement en acte les pulsions et angoisses les plus primaires ; Louis, enfermé dans des souvenirs d'une enfance heureuse mais tourmentée, en difficulté pour instaurer avec quiconque une relation - sauf avec un adolescent atteint lui-même d'un trouble de la relation ...
C'est pudique, sensible, intelligent - la relation mère-fils et son ambivalence est très bien décrite dans toute son intensité. La fin est une ode à la vie : j'ai vraiment beaucoup aimé ce roman. Je n'avais jusqu'ici rien lu de
Philippe Grimbert mais vu le film "
Un secret", dont l'histoire m'avait quelque peu chamboulée (c'est un euphémisme). du coup, je pense vraiment poursuivre la découverte de cet auteur.