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sur 56 notes
Il y a trois ans de cela, je recevais un petit bouquin d'une centaine de pages tout au plus, d'un auteur totalement inconnu, Jérémie Guez. Édité chez LA TENGO , ce premier roman fut une véritable claque et mon gros et unique coup de coeur de l'année 2011. Comment imaginer qu'un gamin d'à peine 23 ans, sorti de nul part , puisse écrire un roman aussi fort , aussi percutant et noir , aussi magistralement désespéré que "Paris la Nuit" ?

Alors que l'image d'Abraham le braqueur malheureux, venait parfois hanter les ruelles sombres de mon imaginaire, que les dialogues raisonnaient encore sur les murs de ma mémoire, arrivait un an plus tard son second roman "Balancé dans les cordes".

La sensation devenue certitude d'un immense talent, d'une plume trempée à l'acide et d'un style incisif, mis au service de losers magnifiques à la vie écorchée. Des condamnés à la chute mais qui jusqu'au bout gardent dans leur yeux une infime lueur qui ne veut obstinément pas s'éteindre et les raccroche au genre humain.cellule

Et cet étonnement toujours présent, grandissant. Incroyable auteur, si jeune et capable de donner à ses romans une profondeur, un relief, une intensité émotionnelle que seuls des bourlingueurs de la vie ou les auteurs ayant poli leur art à la meule du temps sont en principe capables de produire.

Cette année, Jérémie Guez nous livre son troisième roman, ultime opus qui s'inscrit dans cette trilogie qui lui aura donné en quelques mois une notoriété méritée et ses premières récompenses littéraires ( Prix Plume Libre pour « Paris la nuit », prix SNCF du polar, prix Sang d'Encre pour « Balancé dans les cordes ». Deux premiers romans en cours d'adaptation cinématographique.).

» du vide plein les yeux» vient s'inscrire dans la lignée de ses deux prédécesseurs. Après l'histoire d' Abraham, et de Tony, voici celle d'Idir.

A trente balais, Idir sort de taule. Six mois à l'ombre, pour la première fois. Pour avoir eu le tort d'aliéner un temps sa liberté à l'amitié qui le liait à un pote, en fracassant pour lui le portrait d'un type, fils d'un magnat de la presse. Six mois. C'est bien assez pour vous changer un homme et jeter sur la famille la tâche indélébile de la honte.

Car à l'inverse des personnages des précédents romans de Jérémie Guez, Idir lui n'est pas issu du monde des petites gens besogneuses, des quartiers difficiles baignés dans la détresse sociale. Son père a beau être un kabyle issu d'une famille pauvre, il a réussi à s'intégrer en France, à devenir médecin et donner à sa famille un statut sociale que beaucoup lui envie. Aussi, l'écart de conduite du fils passe mal .

Parce qu'il faut bien remplir sa vie, Idir s'improvise détective privé, sans carte, sans flingue et sans local. Parce qu'il n'est pas un voyou non plus, il rends des services à droite à gauche, des filatures pour homme jaloux ou pour femmes suspicieuses, quelques intimidations parfois mais rien de bien méchant. Plus de sang sur les mains. le statut social de sa famille lui permets de se mettre au service des milieux aisés.

Pourtant, en acceptant de rechercher le frère disparu de celui-là même qui l'avait envoyé en prison, tout en tentant de remettre la main sur la voiture volée d'Eric, le père de son ancien pote, Idir va se retrouver embarqué dans des histoires qui ne manqueront pas de l'entraîner sur des chemins qu'il s'était bien gardé de vouloir emprunter. Une nouvelle fois, le personnage de Jérémie Guez va perdre rapidement le contrôle de son propre destin.

Ce troisième roman vient confirmer, si on en doutait encore, tout le talent de son auteur. Jérémie GUEZ est un auteur de roman noir comme on aimerait en lire plus souvent. Ses personnages sont bouleversants, et la noirceur de sa plume les rend d'autant plus lumineux.

L'écriture de Jérémie semble murir avec ses personnages, elle s'affine et se patine pour nous offrir des dialogues plus riches et plus imprégnant. Idir est plus mature qu'Abraham et Tony, les personnages principaux des deux précédents romans. Loin d'être un désespéré prêt à tout pour consommer sa vie comme un rail de coke, Idir aime à garder le contrôle , même si celui ci finira bien par lui échapper.

Écartelé entre un univers social qu'il ne veut pas faire sien mais sur lequel il s'appuie pour avancer, et un encrage avec le monde de ses potes, celui de la rue, il ne cherche pas à survivre mais davantage à trouver sa place. Et si l'amour n'est pas absent de ce dernier roman, il est se fait animal comme une soif éperdue de vivre.

Encore une fois on ne peut être qu'impressionné par tant de talent. » du vide plein les yeux » vient donc clore cette magnifique trilogie qui restera sans aucun doute fondatrice de l'oeuvre à venir de Jérémie Guez.

Maintenant que Jérémie est allé au bout de ce projet qu'il a muri et porté pendant plusieurs années, il est grand temps pour lui de se mettre « en danger » en allant explorer de nouveaux horizons, de nouvelle terre et qu'il nous propose demain, un roman différent C'est tout le mal que je lui souhaite, tant j'espère qu'une nouvelle fois il parviendra à me surprendre comme il l'a fait jusqu'ici.
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Avec du vide plein les yeuxJérémie Guez poursuit son exploration de la petite truanderie parisienne. Après l'Abraham de Paris la nuit et le Tony de Balancé dans les cordes, Guez nous entraîne dans les pas d'Idir, la trentaine, qui, après une peine de prison pour agression, vivote en jouant les détectives au noir. Contacté par le fils de bonne famille qui l'a envoyé en taule quelques années plus tôt pour retrouver la trace de son jeune frère, Idir se trouve engagé dans une sale affaire où, tiraillé entre sa fidélité à ses amis et celle due à ses clients, entre quête de vérité et quête d'un sens à sa vie, il risque de laisser quelques plumes.

S'il est indéniable que l'on se situe là dans la lignée des deux précédents romans de Jérémie Guez dont on reconnait le réalisme cru de l'écriture, le sens des dialogues – qui s'affine d'ailleurs – et les personnages à la recherche de la rupture, le personnage d'Idir se détache par bien des aspects des deux protagonistes de Paris la nuit et Balancé dans les cordes.
Plus mûr, issu d'un milieu social différent – son père qui tient son rôle à coeur est médecin – Idir n'est pas une jeune tête brûlée désespérée et sans espoir de voir changer sa vie de misère. Plus réfléchi, mieux épaulé, Idir n'en demeure pas moins un personnage tragique cherchant à s'extraire de sa condition. À ceci prêt que si Abraham et Tony pouvaient essayer de s'élever socialement, par le braquage pour l'un, par la boxe pour l'autre, Idir, lui, cherche avant tout à trouver sa place entre deux mondes dans lesquels il apparaît comme un intrus ou même, à ses propres yeux en tout cas, comme une sorte d'imposteur. Coincé dans cet entre deux inconfortable, acculé même par l'affaire qu'il traite, il use de son libre arbitre pour toujours repousser un peu plus les limites et tester autant les siennes que celles de ses amis – et leur fidélité du même coup – dans une course après la vérité qui prend de plus en plus l'apparence d'une spirale mortifère.

Une fois encore l'idée de départ est simple, sans grande originalité ; Jérémie Guez à la manière d'un musicien, se saisi d'une gamme et développe un morceau autour de cet archétype avec fougue et détermination. Cela donne une histoire rude peuplée de personnages qui le sont tout autant. Au milieu de tout cela, Idir aura l'occasion de pleurer et de se pisser dessus sans pour autant devenir pathétique. Il ne fait que dévoiler une humanité d'autant plus lumineuse qu'il se trouve entouré, du côté de ses riches clients comme de celui de ses sombres amis, de personnages plus monolithiques et effrayants : corrupteurs froids d'un bord, machines à tuer, dealers ou voleurs d'un autre qui ont tous en commun le cynisme et le détachement face au mal. Tout cela mené tambour battant dans une alternance de scènes de violence ou d'action extrêmement efficaces et de moments d'introspection évitant habilement de sombrer dans le mélo. Bref, Jérémie Guez confirme s'il en était besoin tout le bien que l'on pensait déjà de lui et démontre une fois de plus son talent de conteur et sa capacité à utiliser les codes du roman noir pour leur donner une tonalité unique.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Jérémie Guez ne perd pas de temps, à 25 ans il a déjà trois publications à son actif et le prix SNCF du polar 2013 dans sa besace.

J'ai été emballé par ses deux premiers livres et il en est de même pour le dernier en date, du vide plein les yeux. le lecteur ne sera pas dépaysé par ce roman, l'auteur nous offre un texte dans la continuité de son oeuvre.

Le personnage d'Idir a de nombreux points communs avec Tony et Abe (les héros des précédents volumes) : il a des relations compliquées avec sa famille, tendance à se mettre dans des situations difficiles, et les amis qui l'entourent lui sont fidèles. Il y a aussi des différences : Idir est fils de médecin et a eu une enfance plus facile que Tony et Abe.

Au niveau du style c'est toujours aussi noir, l'écriture est cinglante et réaliste. On notera la présence plus importante de dialogues, ces derniers étant composés de répliques concises et directes. Un vrai régal.

En bref, une trilogie excellente qui a vu éclore un grand talent. Maintenant, reste à voir si Jérémie Guez transformera l'essai en nous surprenant lors de son prochain livre qui, je l'espère, saura garder la patte de l'auteur tout en innovant dans le type d'histoire
Lien : http://dubruitdanslesoreille..
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Idir vit à Paris. Il a fait 6 mois de prison pour coups et blessures et depuis il se tient tranquille. Ni ange ni démon, il fréquente des malfrats mais ne se frotte pas à leur business. Son truc c'est plutôt d'enquêter pour les bourges : filatures, disparitions, retrouver des voitures volées...Il nage entre deux eaux, fréquente les deux milieux: la rue (ses copains d'enfance et de tôle) et les richards (qu'il a connus étudiant).
Oscar, qui étudiait avec lui, vient lui demander de retrouver son frère disparu depuis deux mois. Il paie bien. Idir accepte. Évidemment, Oscar ne lui a pas tout dit...

J'ai retrouvé dans ce 3ème volet (du triptyque) les mêmes qualités que dans les précédents avec en prime une intrigue un peu plus élaborée. On sent que l'auteur maîtrise de mieux en mieux sa technique d'écriture.

Les personnages sont toujours aussi profonds et attachants. Imparfaits. Pas à leur place dans un monde trop dur pour leur bonne nature.

Idir, le narrateur, est un type normal, un mec bien, honnête mais avec quelques fragilités. Ses fêlures proviennent de sa famille, avec qui il est en froid, de sa double-culture qu'on pourrait appeler sa double-éducation. Il a grandi dans un quartier populaire, traîné dans la rue, fréquenté des types qui ont mal tourné alors que lui, toujours serré de près par un père qui voulait le meilleur pour lui, qui a veillé à ce qu'il reste dans le droit chemin, a fait des études et fini par côtoyer des jeunes gens de bonne famille. C'est grâce à ça qu'il s'en est sorti (qu'il aurait dû s'en sortir un peu mieux).

Il est à l'aise et socialement intégré dans les deux milieux, il sait jouer sur les deux tableaux et s'en sert pour son boulot de détective amateur. Mais à force d'osciller entre les deux mondes, il a du mal à trouver sa place, à savoir qui il est vraiment et ce qu'il veut faire de sa vie.

Parce qu'il est humain et qu'il porte en lui la culture de la violence, parfois il dérape et va trop loin.
En quelques secondes tout bascule. Quand on s'y attend le moins (lui aussi est surpris de ses réactions d'ailleurs).
Le rythme du récit change tout le temps. On passe du calme à la tempête, de l'enquête classique aux courses poursuites, de la tension à l'action.
Certaines scènes sont très violentes, leur réalisme troublant. Et chaque mot sonne juste.
C'est aussi une chose que j'aime chez Guez, son style épuré. Précision et concision. En deux phrases, tout est dit.


Ce 3ème roman confirme le talent d'un tout jeune auteur dont on n'a pas fini d'entendre parler dans le monde du polar.
Je suis fan.

Lien : http://lesgridouillis.over-b..
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