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Citations sur Écrits intimes: Carnet, cahier, feuillets 1929-1938 (50)

Jourdain avait raison, il est bon de noter toutes ses pensées –
résultat: moins de dispersion – gain de précision. Je l’ai fait souvent d’ailleurs, mais pas longtemps – paresse.
Mon gros défaut – que de choses n’aurais-je pas faites ou
écrites sans ce vice qui comme la pesanteur me tire en arrière.
Ma vie jusqu’ici n’a-t-elle pas été en grande partie menée par lui.
Exemple: je serais certainement autre et plus disons
dépouillé si je devais gagner ma vie avec mes écrits au lieu de
me laisser aller dans un travail salarié comme dans un sommeil.
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9 août 1935

Le communisme ne résoudra rien. Admettons qu’il
triomphe et qu’il réussisse. Alors, tous les hommes mangeront
à leur faim et jouiront de quelque confort, c’est tout –
Là n’est pas le problème (pour moi). «Changer la vie»
ne veut pas dire changer le mode de répartition des richesses.
Après comme avant, la condition humaine reste la même:
toutes les souffrances qui guettent l’homme, indépendamment de celles qui sont afférentes à l’assouvissement de ses
besoins disons matériels (revoir ce terme) subsisteront – la mort,
l’amour, l’orgueil, la solitude, la vieillesse, ce goût que je suppose (peut-être à tort) en chaque homme de malheur (sang et
feuilles mortes, impuissance à être Dieu).
Le communisme ne pourrait donc résoudre qu’une
question accessoire du destin de l’homme et dont l’intérêt
n’est pas primordial. Je sais bien que beaucoup d’intellectuels
attendent aujourd’hui du communisme autre chose que des
résultats économiques, comme une ère nouvelle, une rénovation de l’homme. Je n’y crois pas. Il y aura peut-être une fraternité, plutôt une camaraderie d’ailleurs passagère (celle des
débuts de tout régime nouveau, camaraderie entre adeptes et
contre quelqu’un). Mais, à part cela, le destin de l’homme ne
sera pas changé.
Je n’y pensais pas tout à l’heure (en commençant ces
lignes) mais j’y pense maintenant: toutes les autres questions,
la question primordiale, la religion la (sic) résout – singulièrement le catholicisme.

Bien entendu, cette question (l’unique) n’intéresse pas
beaucoup d’hommes ; la plupart vivent uniquement sur le plan
des intérêts matériels – c’est pourquoi la politique les attire et,
notamment, le marxisme.
Pour moi, interrogé sur le communisme, je pourrais, je
devrais répondre: la question ne m’intéresse pas.
Pour moi, la question est d’ordre non économique, mais
métaphysique ou mystique (c’est tout un).
D’ailleurs, il ne peut y avoir de foi qu’au surnaturel
(échec d’Auguste Comte, de la f.m.).
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Rien, rien – je ne fais rien actuellement, je suis vide.
Dimanche grand jour je parlerai à mes parents pour mon
mariage.
Après le mariage, l’examen, alors seulement il me semble que
je pourrai vraiment être moi-même – grand – débarrassé des
souillures quotidiennes.
Fuir les camarades. Je perds mon temps bêtement et j’ai tant
à faire. L’examen. Et corriger mes choses, les préparer pour la
publication? Quand? plus tard – toujours plus tard.
Excuse. Vouloir!
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23.1.30
Tu ne fais rien ici – tu es plat. Je pense bien – tu n’es jamais
seul. Repousse une fois pour toutes ces camaraderies – ces fréquentations de bistrot. À quoi ça sert. Que tu as été bête ce
soir. Tu ne les aimes quand même pas ces camarades. Rien
ne t’attache à eux. Rien ne t’attire vers eux que ma peur de la
solitude. Que je prenne ma solitude sur moi. Je l’aime – que je
la porte. Que je devienne grand. Il faut être grand.
Tout me dégoûte, me détourne de moi-même, de la grandeur.
Ne pas toujours me voir un petit ridicule – croire que je suis
grand pour l’être
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Dans Rilke et dans F. Jammes, souvent le même accent d’humilité, de soumission, d’acceptation. Mais plus profond chez Rilke,
plus vrai – plus grand – plus triste.

Là aussi: Nord et Midi.

Je ne comprends pas qu’on traite les cahiers de M. L. Brigge
de morbides. Il faut être bien superficiel. Mais c’est la vie cela,
la vraie vie, la vie profonde. Cette peur, cette angoisse, cette
inquiétude, ce mystère.
Brigge dans ta solitude si pleine, je suis avec toi – et je suis ton
frère!
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11.1.29
Écrit hier un poème: «Mon Dieu, si plus tard», au bain, et
aujourd’hui un autre – intitulé pour le moment: Gloire / Comme
j’allais par les chemins en dehors de la ville…
Chose étrange et qui m’arrive souvent: le premier vers est né en
moi hier soir. Je ne savais d’où, pourquoi, ce qu’il voulait dire.
Mais j’avais le sentiment qu’il était inutile de chercher, que la
suite viendrait. Et ce matin, en effet, les autres vers, «Ils sont
venus avec leurs yeux sales etc.», m’ont été donnés. D’abord,
leur relation avec celui d’hier ne m’est pas apparue. Seulement
après quelques instants. Mais les deux derniers vers sont-ils
bien utiles ? Est-il besoin de donner au poème ce sens précis ?
La vision ne se réduit-elle pas alors à une image, une allégorie? Chose rare: je suis assez satisfait de ces 2 derniers
poèmes, pour le moment. Ne sont-ils pas un peu trop faciles, surtout celui d’hier ? «Moi, clown» était autrement difficile… et
peut-être moins bonne récompense. Ô, si je pouvais toujours
écrire comme ces jours derniers ! Quel bonheur: toujours en
pleine inspiration. Comme les autres choses sont odieuses à
côté de cela: écrire un poème… sous la dictée.
Ils diront ce qu’ils voudront de mon vers, de ma poésie. Je
chante ce qui me plaît, comme il me plaît. Ou plutôt comme il
faut. À eux de comprendre! Non à moi de me soumettre à leurs
règles.
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Si le livre de A. de Noailles est si pauvre ou plutôt s’il donne
une telle impression de platitude, cela est dû en partie au vers
régulier.

Il est possible que tout le monde revienne au vers régulier. Moi
non. Ils y reviennent parce qu’il est le plus facile, par faiblesse.
Je le déteste: son ronron monotone, son remplissage.
Les sentiers sont tous rabattus.
Et que le vers libre est plus riche! On m’accusera de prosaïsme.
Et que m’importe.
Ce qu’il faut c’est donner la sensation vécue, être aussi simple
et vrai que possible. Et le vers régulier artificiel ne le permet
pas. Il est parfait peut-être quand il s’agit d’exposer, de discourir (chez Lamartine, Musset par exemple: on ne le sent pas).
Il ne vaut pas quand il s’agit de révéler.
Il nous entraîne dans une sphère factice.
Et pourquoi cette prononciation artificielle, forcée, ces blancs ?
Il ne convient plus à notre sensibilité enrichie.
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La solitude! Oui, il faut travailler dans la solitude. La gloire tue,
peut-être. Mais, est-ce que la gloire détruit la solitude? Je ne
crois pas. De la naissance à la mort on est seul, et en nous plusieurs hommes sont seuls – et ne se comprennent pas, et ne se
pénètrent pas.
Et cependant, je crois que la gloire est nuisible.
Et pourtant je la désire!
Oui – et j’en ai peur, et je la repousse.
J’hésite à publier.
Préférant à tout ma solitude rêveuse et pensive.
Solitude absolue, rêve! …
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J’ai fini «L’Honneur de souffrir » de A. de Noailles. Quelle pauvreté! Je ne comprends pas cette presque gloire qu’on lui a
faite – Il est vrai que tout cela est d’un ordre qui ne m’intéresse
pas. Mais si elle était poète elle m’y intéresserait. Me communiquerait ces états d’âme. Or, je devine parfois ce que c’est,
mais à peine. Et pourtant, j’y ai mis de la bonne volonté. Mais
les mots sont vides, pas de courant. Rien n’anime les phrases.
Tout, sauf la poésie. Que de chevilles, de remplissage. Et que
d’adjectifs, parfois 8 en 4 vers et qui ne disent rien, rien.
Qu’est-ce que la gloire? puisqu’elle la connaît presque, et
qu’elle ne la mérite pas ?
Peut-être ses premiers livres sont-ils mieux ! Elle sait mieux parler de la volupté.
Et un tas d’autres choses encore demanderaient à être notées.
Allons-y à bâtons rompus.
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Rimbaud, pendant cinquante ans, tu as été le maître, l’inspirateur. On s’est réclamé de toi.
Maintenant, c’est fini. Ce sera moi maintenant. Et je viens.
Et un autre viendra aussi plus tard qui me chassera et me remplacera. C’est la loi. Ami, il ne faut pas m’en vouloir.
J’apporte une nouvelle poésie: je te sers mieux qu’en t’imitant.
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