Ivy Wilde, tome 1 : Quand fainéantise rime avec magie

- Qu'est-ce que tu veux ?
Pas d'hésitation au bout du fil.
- Karaoké.
- Espèce de monstre.
Je pouvais presque l'entendre sourire comme un imbécile.
- Au moins deux heures. Au moins trois chansons pour toi. Et l'une d'entre elles doit être un duo avec moi.
- Y a forcément une autre option. Mes économies ? Mon premier-né ? N'importe quoi ?
- C'est mon dernier mot.
Foutu Igbal.
- Pas de rap.
Je suis congénitalement incapable de parler aussi vite.
- ОК.
- Et pas Sonny et Cher pour le duo.
- D'accord.

[…] nous en avons probablement fait suffisamment pour aujourd'hui.
- Super.
J’avais hate de rentrer à la maison. Je me fichais que mes draps soient encore mouillés : j'aurais dormi à peu près n'importe où.
- Prenez une douche rapide, puis nous pourrons aller à la bibliothèque, dit Winter.
Je me figeai.
- Je vous demande pardon ?
- Pourquoi ? Qu'est-ce que vous avez encore fait ?
Je le foudroyai du regard.
- Vous m'avez très bien comprise. Pourquoi est-ce qu'on a besoin d'aller à la bibliothèque ?
Un éclair de sincère surprise traversa ses yeux.
- Pour étudier, bien sûr.
Après une seconde, il sembla comprendre où je voulais en venir, et ralentit son débit de parole comme s'il était en train de parler avec quelqu'un de très limité intellectuellement :
- C'est à la bibliothèque qu'on garde les livres. Les livres permettent d'acquérir des connaissances. Si vous lisez des livres, vous pouvez apprendre des choses.
Il souleva un sourcil et poursuivit :
- Vous savez lire, pas vrai ?
Je secouai la tête.
- Nan. Pas un mot. Du coup, pas la peine d'aller voir les livres.
Winter ne m'accorda même pas un sourire.
- Hmmm. Dans ce cas, il nous faudra passer plus de temps que prévu à la bibliothèque. Nous commencerons par la phonétique.
Salopard.

Et troisièmement, il porte une cravate à rayures jaunes. Ne fait jamais confiance aux gens qui portent du jaune.

En plus, ajoutai-je, il porte des mocassins. Crois-moi, il ne faut jamais faire confiance à un typique enfile ses chaussures sans avoir besoin de les ouvrir.

Apparemment, une femme qui conduit un taxi, c'est surprenant. Je sais pas pourquoi. C'est pas comme si conduire demandait des compétences particulières interdites au genre féminin. Les boules ballantes ne rendent pas la tâche plus facile, que ce soit pour tenir le volant ou trouver mon chemin dans une petite ville comme Oxford. Non, mes seins ne sont pas un frein à ma conduite. Et, oui, je sais me garer. J'avais déjà entendu toutes les blagues sur le sujet, et elles n'étaient jamais drôles. Les hommes peuvent être sorciers et les femmes conductrices. Première nouvelle, hein ?

Le problème, avec la magie, c'est que c'est un art ancien basé sur un savoir ancestral, et que ça n'a rien à voir avec la technologie. Il ne vaut mieux pas mélanger le mysticisme et les avancés du vingt-et-unième siècle, vous voyez ? Et quand la fusion est inévitable, elle se solde généralement par des explosions, des morts violentes et de très probables tornades de dards empoisonnés et d'éclats de verre sanguinolents, tout ça.

Il avait peut-être un balai coincé dans le cul, mais ça ne voulait pas dire que je ne pouvais pas apprécier l'harmonie visuelle dudit derrière.

Et l'échec, c'est très bien. Les gens qui n'échouent jamais ne sont pas conscients de leur propres faiblesses.

- Si tu essaies de me dire que je suis une gamine, merci beaucoup. Les adultes n'aiment soi-disant pas faire ce genre de choses parce qu'ils ont peur qu'on les jugent. Ou alors, ils sont tellement absorbés par leurs propres problèmes qu'ils ne savent plus penser à quoi que ce soit d'autre qu'a leur petit nombril.

- Tu es bien trop têtue pour être Cendrillon, dit-il. Et tu t'en sors mille fois mieux qu'elle, niveau bagarre. Aucune marâtre n'arriverait à faire de toi une petite servante.