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Citations sur Le Mur invisible (232)

Je crois que le temps est immobile et que je me meus en lui parfois lentement, parfois à une vitesse foudroyante.
Depuis que Lynx est mort, je ressens cela très nettement. Je suis assise à ma table et le temps s'arrête. Je ne puis le voir ni le sentir ni l'entendre, pourtant il m'entoure de tous côtés. Son immobilité et son silence sont effrayants. Je me dresse d'un bond, je sors de la maison en courant et cherche à lui échapper. Je m'occupe, les choses prennent le devant et j'oublie le temps. Et puis brusquement, il est à nouveau autour de moi. Je suis devant la maison en train de regarder les corneilles, et le voilà encore, immatériel et immobile, nous maintenant ferme, les prés, les corneilles et moi. Je serai obligée de m'habituer à lui, à son indifférence, à son omniprésence. Il s'étend à l'infini comme une toile d'araignée géante. Des milliards de petits cocons sont pris dans ses fils, un lézard couché au soleil, une maison en flammes, un soldat mourant, tout ce qui est mort et tout ce qui vit. Le temps est grand et il y a toujours place en lui pour de nouveaux cocons. Un filet gris et sans pitié dans lequel chaque seconde de ma vie est accrochée. Peut-être me paraît-il si terrible parce qu'il conserve tout et ne laisse rien vraiment finir.
Mais si le temps n'existe que dans ma tête, et si je suis le dernier être humain, il finira avec moi. Cette pensée me rend joyeuse. Il est peut-être en mon pouvoir de tuer le temps.
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Aimer et prendre soin d'un être est une tâche très pénible et beaucoup plus difficile que tuer ou détruire.
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Mais si le temps n'existe que dans ma tête, et si je suis le dernier être humain, il finira avec moi. Cette pensée me rend joyeuse. Il est peut-être en mon pouvoir de tuer le temps.
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Et puis, très vite, c'était le matin. La première lumière tombait sur mon visage et au loin dans la forêt un oiseau criait.
Réveillée, je courais sur mes orteils nus, en courte chemise de nuit à la rencontre du jour qui se levait.
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Les orties continueront à pousser, même si je les arrache cent fois, et elles me survivront. Elles ont tellement plus de temps que moi.
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Après cette balade, je sentis que mes pieds me faisaient mal. J'enlevai mes chaussures et mes bas, et je vis que j'avais attrapé des ampoules en marchant. Cette douleur venait à point pour m'aider à chasser les pensées inutiles. Après avoir pris un bain de pieds et enduits mes talons et mes orteils de pommade, je décidai d'installer le chalet qui me paressait plus confortable.
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Mieux valait ne plus penser aux hommes. Le grand jeu du soleil, de la lune et des étoiles, lui, semblait avoir réussi ; il est vrai qu'il n'avait pas été inventé par les hommes.
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Il n’existe pas de sentiment plus raisonnable que l’amour, qui rend la vie plus supportable à celui qui aime et à celui qui est aimé.
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Mais, si violente qu'ait pu être la tempête, le lendemain le ciel était clair et le brouillard ne persistait qu'au-dessus de la vallée. C'était comme si les prairies de l'alpage flottaient sur les nuages, un bateau vert, brillant et humide voguant sur l'écume blanche d'un océan agité. Puis les vagues s'apaisaient lentement et les crimes fraîches et mouillées des pins en émergeaient.
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Aujourd’hui cinq novembre je commence mon récit. Je noterai tout, aussi exactement que possible. Pourtant je ne sais même pas si aujourd’hui est bien le cinq novembre. Au cours de l’hiver dernier quelques jours m’ont échappé. Je ne pourrais pas dire non plus quel jour de la semaine c’est. Mais je pense que cela n’a pas beaucoup d’importance. Je n’ai à ma disposition que quelques rares indications, car il ne m’était jamais venu à l’esprit d’écrire ce récit et il est à craindre que dans mon souvenir bien des choses ne se présentent autrement que je les ai vécues.
Ce défaut est sans doute inséparable de tout récit. Je n’écris pas pour le seul plaisir d’écrire. M’obliger à écrire me semble le seul moyen de ne pas perdre la raison. Je n’ai personne ici qui puisse réfléchir à ma place ou prendre soin de moi. Je suis seule et je dois essayer de survivre aux longs et sombres mois d’hiver. Il est peu probable que ces lignes soient un jour découvertes. Pour l’instant je ne sais pas si je le souhaite. Je le saurai peut-être quand j’aurai fini d’écrire ce récit.
J’ai entrepris cette tâche pour m’empêcher de fixer yeux grands ouverts le crépuscule et d’avoir peur. Car j’ai peur. La peur de tous côtés monte vers moi et il ne faut pas attendre qu’elle m’atteigne et me terrasse. J’écrirai jusqu’à ce que la nuit tombe et jusqu’à ce que ce travail dont je n’ai pas l’habitude me rende somnolente, la tête vide. Ce n’est pas le matin que je crains, mais les longs après-midi ténébreux.

(Incipit)
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