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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Un très beau livre.

Pour le résumer, les mots de l'auteur à la fin du livre pour parler de son oeuvre expriment parfaitement et magnifiquement ce que j'ai ressenti :
"Une lignée de femmes inscrite dans l'histoire de la Tchéquoslovaquie de sa création jusqu'aux années 1980. Chacune d'elle doit assumer son destin, toutes espèrent vivre loin de la politique et du tumulte de l'Histoire. Mais le monde les attrape, les rattrape, et leurs vies en sont ébranlées. Pourtant, si tragique que cela ait pu être, rien n'est irrémédiable, même dans les moments les plus sombres.
C'est une histoire de mères, de grand-mères, de filles et de petites-filles, d'amour et de non-dits qu'elles voudraient protecteurs ; une histoire de racines et d'identité, de famille et de bâtardise fatalement transmises de génération en génération. de cette différence, ces femmes feront une distinction."

J'ajouterais : Une histoire de broderie. de paysannes. de la couleur rouge, celle du sang et celle de l'étoile communiste. D'une vache qui s'appelle Vache. D'âmes cristallines. de jeunesse pleine d'espoir, et de désillusions. D'un pays rongé par le communisme. de libertés perdues, espérées, et réinventées.

La plume de l'auteur est très belle. C'est d'autant plus impressionnant qu'elle n'écrit pas dans sa langue maternelle, mais en français, car elle "ne pouvait exprimer qu'en français ce qui reste indicible dans [sa] langue maternelle".
C'est peut-être néanmoins pour cela que certains passages ont manqué de clarté pour moi, j'ai senti comme un léger décalage entre ce que je comprenais et ce que l'auteur cherchait à exprimer, et du coup un léger manque de fluidité dans la lecture. Cela m'a surtout gênée pendant la première partie du livre, celle avec Magdalena (le livre est divisé en 3 parties, pour chacune des trois héroïnes). C'est cette partie qui m'a le moins plu, je ne parvenais pas à franchir cette distance entre moi et cette jeune femme, à m'identifier à elle et à "vivre" le récit.
Ce ressenti s'est complètement démenti dans les deux parties suivantes, où je me suis énormément attachée aux deux nouvelles narratrices. Est-ce en raison de leur plus jeune âge, qui donnait une écriture plus naïve et franche ? Je ne sais pas, mais ces parties ont comme coulé de source en moi, je les ai dévorées et je me suis souvent émerveillée de la tournure des phrases et de la poésie des réflexions que se faisaient ces héroïnes.
Il y reste une part de mystère, de passages où on n'est pas sûr d'avoir tout saisi, mais c'est pour mieux s'éclairer à la fin, dans un final haut en couleurs.

Que dire d'autre ? C'est une belle manière de découvrir la campagne tchèque, et l'histoire de ce pays vue par ses citoyens ruraux, ceux qui ne sont pas les plus versés dans la politique, qui ne comprennent pas toujours les tenants et aboutissants de tous ce qui se passe à l'échelle nationale et internationale, mais pour lesquels les conséquences de ces événements qui les dépassent sont bien réels. Comme eux, on peut manquer d'une vision claire sur les événements historiques qui les bousculent (surtout si, comme moi, vous avez de grosses lacunes en histoire d'Europe de l'Est), mais je vais de ce pas combler ces lacunes avec quelques recherches, et c'est beau aussi de voir tout ce tumulte de l'Histoire avec des yeux neufs, candides et voilés.

Une lecture que je recommande, et si le début ne vous convainc pas, n'ayez pas peur de persévérer...
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Les pères sont absents: Marie, la mère, travaille chez un médecin gynécologue dont elle aura Magdalena, elles vivent à Vienne dans un certain confort mais le médecin est juif et fuit Vienne avec sa famille (dont Marie ignorait l'existence) sans un adieu. Tchèques, elles quittent la ville pour retourner dans leur pays. Marie se marie avec Aloïs et aura une petite Rose, le beau-père envoie Magdalena dans une grande ferme, flanquée d'une biscuiterie. La jeune fille tombe amoureuse du fils du patron, passion partagée, semble-t-il mais L Histoire va s'en mêler encore: le patron et sa famille sont expulsés: trop riches! La réforme agraire s'impose et tout doit revenir à la coopérative. Josef ne saura même pas qu'il est père. le bébé n'a pas de nom puisque c'est au père de décider;elle deviendra Libuse; élevée par Marie, elle découvre tardivement que sa mère est Magdalena , cette dernière devant partir chercher du travail.On va la marier mais au frère de celui qu'elle commence à aimer: Franta.; elle épousera le boiteux lequel est violent tant avec Magdalena que Libuse. (qui avait été traitée de monstre à deux mères et bien sûr de bâtarde)
L'Histoire intervient encore: le bistro que tenait Marie est réquisitionné car elle a refusé sa carte du Parti (c'est la 2ème fois qu'on l'humilie: il y avait eu la réquisition de Vache, celle qu'elle avait acheté avec l'argent du docteur juif et que Magdalena traitait comme une amie: pour qu'elle ne soit pas embarquée, Marie L avait abattue)
.De nouveaux voisins sont arrivés avec deux fils Antonin et Petrik. A côté est arrivée une mystérieuse dame seule.
En 61, on apprend la construction du mur à Berlin.
Puis on passe en 68, Rose est enceinte de...Franta. Cela se passe mal et Marie (sage-femme sans titre mais beaucoup d'expérience) sauve la situation: bébé Olga est née mais Rose n'aura plus d'enfant.
Un jeune soldat soviétique est là, apparemment perdu: les russes ont envahi la Tchécoslovaquie. Libuse va faire l'amour avec lui mais le Boiteux surgit et la viole.
Petrik, le poète, allait devenir boucher ainsi en avait décidé le Parti; il se suicidera.
Liba après l'amour et le viol se rend chez Antonin qui, à son tour,lui fera l'amour et proposera de fuir ce pays envahi par les "camarades" russes La mort de son frère l'en dissuadera. Rose semble avoir couché avec le russe, elle aussi et veut fuir mais en Union soviétique avec le soldat russe.
Une dernière partie sera consacrée à Eva, fille de Liba; elle passe un examen d'entrée à l'école; on lui reproche d'utiliser sa main gauche (signe des temps mon mari et moi avons été des gauchers contrariés: c'était très mal vu d'utiliser la main gauche dans les années 50, en France!)
Elle est acceptée dans cette école moderne; la suite, ce sont les Etincelles, les Pionniers, , la jeunesse communiste et enfin le Parti mais Eva refusera dès les Pionniers...A quinze ans Eva va avoir des papiers, le livret rouge mais la ligne intitulée "nom du père" est vide.
"je m'en fous de porter le nom de jeune fille de ma mère, de ma grand-mère et de mon arrière grand-mère. J'en suis même fière"
Eva aura le mot de la fin grâce à sa cousine Olga et la mystérieuse Madame Gabriel qui leur a appris le français.
Je ne suis pas arrivée à mettre entre crochets, du coup tout y est ou presque.
J'ai beaucoup aimé l'histoire de ces quatre femmes (et non trois) toutes mères célibataires quand c'était très mal vu; Marie sait accoucher les femmes, élever une vache, cultiver des légumes et tenir un bistro et toutes sont d'excellentes brodeuses; elles traversent L Histoire avec courage.


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Immersion dans la littérature tchèque pour ma 200ième critique.

Il s'agit du premier roman de Lenka Horňáková-Civade, lauréat du prix Renaudot des lycéens en 2016. Giboulées de soleil traverse l'histoire de la Tchécoslovaquie sur plusieurs décennies. Trois narratrices nous font découvrir quatre générations de femmes qui ont la particularité d'être filles-mères de mères en filles.

La première partie est consacrée à Magdalena. On découvre l'histoire de cette jeune fille dans le contexte de l'après-guerre à la fin des années 1940. Magdalena est employée à la Biscuiterie du moulin où elle effectue des travaux de ferme. Elle s'occupe des vaches, animaux qu'elle affectionne particulièrement. Un jour, Josef le fils de ses patrons revient dans la famille et ne la laisse pas insensible. Josef étudie à Vienne, de l'autre côté de la frontière. Magdalena garde une nostalgie de cette ville où elle a grandi. Son récit relate également l'histoire de sa mère Marie. À la ferme, Magdalena travaille avec Jan, un jeune homme qui fréquente les réunions communistes, très enthousiaste à l'idée de créer une société nouvelle.

La seconde partie est narrée par la fille de Magdalena. Libuse est née en février 1948, période mouvementée marquée par le coup de Prague qui aboutit à l'instauration d'un régime communiste en Tchécoslovaquie. La société se transforme, des coopératives sont mises en place, la gestion des biens et des terres est transformée. Adolescente, Libuse est très attachée à sa grand-mère qu'elle appelle "Maman Marie". Les années passent et l'histoire dramatique de Libuse se dresse sous nos yeux.

La troisième partie est racontée par Eva, la fille de Libuse, née en 1969, peu de temps après l'invasion de la Tchécoslovaquie par le pacte de Varsovie (en août 1968). L'histoire va jusqu'aux années 1980.

L'écriture est fluide, j'ai beaucoup aimé ce roman. Je n'ai eu aucun mal à passer d'une narratrice à l'autre, chacune étant attachante à sa manière. J'ai également apprécié le fait que les narratrices s'expriment à des âges différents. L'histoire de ces femmes se déroule à la campagne avec en toile de fond les grands événements historiques qui ont marqué le pays. J'ai trouvé le chapitre de Libuse très poétique avec le parallèle entre les broderies et les souvenirs. Je serais ravie de découvrir d'autres romans de cette auteure.
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"Giboulées de soleil" de Lenka Hornakova-Civade (320p)
Ed. Folio

Bonjour les fous de lectures....

Voici le premier roman d'une auteure de la République Tchèque.

Nous suivons le destin de trois femmes tchèques, trois bâtardes de mère en fille.
Elle n'ont pas connu leurs pères et cette différence va devenir leur force.

Jolie saga que celle de Magdalena, Libuse et Eva qui balaye 50 années de l'Histoire de l'ex Tchécoslovaquie.
Ces trois femmes au destin commun, ces trois bâtardes, se distinguent par leur personnalité et leur volonté de vivre, survivre à la "malédiction".
Ce qui était une différence va devenir une particularité (nuance!).
Elles assumeront cette absence de père sans jamais faillir malgré les préjugés des villageois et de l'époque.
Jamais elle ne faibliront, avançant fières et droites, assumant leurs choix et ne vivant que pour "les suivantes".
Hors de question de se laisser dicter une conduite... " Ne jamais baisser la tête"

Dans ce livre, l'auteure ne fait pas la part belle aux pères, décrits comme lâches, absents, violents ou violeurs.
Sont mises à l'honneur, les femmes et leur volonté, leur ténacité.

Nous suivons également l'évolution historique de la Tchécoslovaquie.
Apparue lors de la dissolution de l'Empire Austro-Hongrois, elle subira le nazisme et le communisme.
Elle n'y résistera pas et se disloquera 80 années plus tard.

Le style est agréable et la lecture vivante et fluide
Bon moment de lecture sur l'héritage et les transmissions.
Une belle histoire d'amour mère-fille.

Je le recommande vivement

Ce roman a reçu le prix Renaudot des lycéens 2016.
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Un très beau livre transcrivant la vie de trois femmes sur trois générations liées par leurs liens de sang mais aussi par la méconnaissance de leur paternel. Ce livre m'a fait voyager en actuelle République Tchèque à différentes époques, de l'après-guerre aux années 80. J'ai énormément apprécié la plume de l'auteure qui m'a permis de me projeter dans les personnages, vivant presque avec elles. Une de mes plus belles lectures! Je le recommande grandement.
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La Feuille Volante n° 1098
GIBOULÉES DE SOLEIL – Lenka HORŇÁKOVÁ-CIVADE – Alma Éditeur.

Ce roman est partagé en trois livres, consacrés à trois femmes, Magdalena, Libuše, et Eva, qui se transmettent de mère en fille l'art de la broderie mais surtout le fait d'être nées de père inconnu, que leur géniteur soit un fils de patron, un soldat ou un ivrogne violent. Elles sont toutes des enfants de l'amour mais surtout des bâtardes et se transmettent cet absence de père comme une charge, une interrogation, un peu comme si un destin briseur de rêves la leur imposait. Elles l'acceptent comme une fatalité mais avec détermination cependant et chacune d'elles souhaitent ardemment que son enfant puisse exercer son choix et qu'on ne lui impose pas celui des autres. Pourtant tout commence avec Marie, la mère de Magdalena, à Vienne où elle était l'assistante et la maîtresse d'un gynécologue juif qui l'abandonne alors qu'il fuit avec sa famille face aux premières menaces nazies. Marie s'était réfugiée à la campagne avec sa fille, comme serveuse dans une auberge et accoucheuse à l'occasion. Puis naît Magdalena qui rêvait d'épouser josef mais doit se contenter d'un boiteux violent dont aucune femme ne veut parce qu'une bâtarde ne peut pas choisir. Libuše rêvait de Paris comme d'une destination lointaine et inaccessible. Eva enfin, très originale et exubérante, pertinente et impertinente, curieuse de tout et avide de liberté. C'est grâce à elle que les mensonges, les secrets et les non-dits de cette famille éclatent enfin. C'est avec elle aussi que s'interrompt cette malédiction.
Ces quatre femmes auront bien sûr des frères et des soeurs, seront mariées, mais pas avec le père de leur première fille. Ce mariage arrangé fera d'elles des victimes et le bonheur sera absent de cette union mais elles garderont le secret d'un amour impossible. La broderie, legs commun, sera pour elles une forme de liberté, d'évasion, de voyages impossibles, surtout pour Libuše. Leurs vies personnelles d'errance croiseront la grande histoire, celle de la Tchécoslovaquie bousculée par les événements politiques depuis l'empire austro-hongrois jusqu'à l'instauration et la fin du communisme, dont l'utopie, les mensonges et les erreurs sont omniprésents dans ce roman, en passant par l'occupation nazie. Seule Eva, l'arrière petite-fille de Marie connaîtra Paris, symbole de lumière et de liberté, réalisant ainsi le rêve de toute cette lignée de femmes. Parmi ces quatre récits, celui consacré à Eva est le plus pétillant, le plus ensoleillé. Dans « l'autoportrait » qui suit ce roman, l'auteure confie qu'il y a un peu d'elle-même dans ce livre et il est difficile de ne pas voir son empreinte dans le personnage de cette dernière jeune fille.
C'est donc un roman personnel et émouvant, chargé de symboles aussi, celui de ces femmes fortes, déterminées mais pas résignées, dans une société marquée par la violence, la compromission et l'hypocrisie. L'auteure s'attache son lecteur par son style poétique, spontané, parfois puéril mais toujours fluide et agréable à lire. Elle est de nationalité tchèque mais a écrit ce premier roman directement en français ce qui est sa manière de se l'approprier pour exprimer, selon elle, plus facilement son message et la subtilité des sentiments. Ce n'est pas si fréquent qu'un auteur exerce ce choix, j'y vois un hommage à la France où elle vit et à notre belle langue au point qu'elle considère que le texte ainsi écrit est l'édition originale de référence qu'elle traduit elle-même en tchèque.
© Hervé GAUTIER – Décembre 2016. [http://hervegautier.e-monsite.com ]
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Écrite en français par une romancière tchèque (chapeau !), la saga de ces remarquables femmes s'inscrit fort judicieusement dans les cinquante années de l'histoire de la Tchécoslovaquie qu'elles traversent. Ce fond historique, si important dans la destinée des « bâtardes », est subtilement et clairement évoqué, ni trop, ni trop peu, et toujours rapporté au contexte du roman. Quant aux femmes, elles sont toutes magnifiques et magnifiées par l'écriture. Je trouve qu'elles se ressemblent dans leur volonté de vivre et de survivre malgré tout, malgré la « malédiction » qui les frappe toutes. Mais chacune d'elle est aussi singulière, et l'auteure a su déjouer le piège qui en aurait fait de l'une le clone des autres. Chaque femme est l'héroïne de son propre roman. Chacune a sa vie, sa personnalité, ses rêves, ses lubies, son parler. Les lieux, les évènements, les autres personnages, les relations, les interactions entre eux sont autant de réussites. L'intrigue est toujours là, les événements toujours tapis dans les pages à venir ; il y a une forme de suspense qui donne envie. le style est vivant, travaillé sans être trop recherché, trop apprêté. On y manie aussi parfois l'humour et la dérision. Au fond, rien n'est irrémédiablement tragique, même les plus sombres moments. C'est un texte, malgré les embûches de la vie, délibérément optimiste, à la gloire de la Femme bâtarde, une différence qui, grâce à l'auteure, devient une… « distinction » ! Enfin, les dialogues sont très réussis. Bref, c'est, de mon point de vue, un magnifique roman qui, je l'espère, connaîtra un succès mérité. Je suis épaté par le maniement de notre langue dans ses plus intimes nuances.
Lien : http://www.auteur-roman-nouv..
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C'est la 100ème chronique de la catégorie "Mes lectures" sur le blog, ça se fête non ? Et en beauté s'il vous plaît, avec un coup de coeur ! Encore un 1er roman qui fait partie de la sélection des 68 premières fois.

L'histoire se passe en Tchécoslovaquie. Magdalena est une jeune femme, elle est employée avec Jan dans une ferme. Sa mère, Marie, découvre très vite la grossesse de sa fille. Elle est gynécologue et sait très bien repérer les signes avant-coureurs chez une femme. Magdalena n'est pas mariée, nous sommes dans les 1940. Elle décide de garder l'enfant. Il est le fruit d'une nuit d'amour avec le fils du patron, Josef, étudiant à Vienne. Ça sera un bâtard, comme elle !

Je ne vous en dit pas plus sur ce roman particulièrement dense sinon que :

Ce roman est dédié aux femmes, à une lignée de femmes dont les vies sont chahutées par les hommes.

Depuis Marie, en passant par Magdalena, Libuse et Eva, ce sont 4 générations de femmes qui sont embrassées par ces « Giboulées de soleil », et pas n'importe quelles femmes… des femmes qui ont de la personnalité, des femmes qui revendiquent la liberté.


Je voudrais que ma fille puisse aussi faire son choix, qu'on ne lui impose pas celui des autres. P. 118

La liberté de mettre au monde un enfant de père inconnu aussi ! Elles le font au nom de l'amour. La relation, aussi fugace soit-elle, mérite le respect. Quand certains y voient une malédiction, elles l'affichent comme une certaine identité familiale et en sont fières. Chapeau !

Ce roman, c'est l'Histoire d'une nation, celle de la Tchécoslovaquie depuis sa création jusque dans les années 1980. Il y a l'annexion nazie et la répartition des territoires, il y a la montée du communisme avec le transfert des propriétés, la création des coopératives, et enfin l'hégémonie soviétique.

Ce roman parle de la mémoire, des souvenirs, du poids des secrets, des non-dits.


Je voudrais pouvoir raconter à ma fille une belle histoire d'amour, aussi courte qu'elle ait été. Parce que c'est ça que je vais faire, parler à ma fille, tout lui dire, lui conter ma nuit, décrire son père, le nommer. Il faut qu'elle sache. Ce sont les blancs dans nos vies qui nous font souffrir, je le sais. P. 91/92


Et pour que la mémoire se perpétue, il faut des passeurs, des personnes qui acceptent de jouer le rôle de relais :


Si la dame ne nous avait pas parlé de lui, il serait totalement mort, et il serait mort le jour de sa mort à elle, définitivement, irrémédiablement. Pour la première fois, j'ai ressenti physiquement le poids de la mémoire. P. 267/268


Ce roman parle du pouvoir des rêves. Ces femmes avaient une vie difficile mais elles avaient aussi cette capacité à s'en émanciper pour s'offrir d'autres horizons…


Rêver transforme une femme de presque soixante ans avec un derrière et un foulard sur la tête en une jeune femme belle, les yeux pleins d'étoiles qui s'illuminent plus fort que celles accrochées dans le ciel d'une nuit sans lune. P. 136/137


Ce roman fait enfin la part belle à l'art.

Il y a celui de la broderie qui y est abordé avec raffinement. Encore une affaire de femmes et tellement haute en couleurs !

Et il y la littérature. Il y a cette référence à l'oeuvre d'Alexandre DUMAS « La Dame aux camélias », et puis, la bibliothèque de Madame Gabriela, un petit coin de paradis dans lequel chacun voudrait pouvoir s'y faire une place !


Les deux pièces que la dame occupait débordaient de livres, si bien que pour nous asseoir il fallait libérer les deux chaises en construisant de nouvelles piles de livres sous la fenêtre, après avoir poussé de nombreuses autres pour faire de la place. P. 265


Je peux vous assurer également que ce roman est le fruit d'une plume remarquable. Il l'est d'autant plus qu'il est écrit en français par une écrivaine d'origine tchèque. Une magnifique prouesse quand on voit la qualité de la prose. Elle justifie ainsi sa démarche : « Je ne pouvais exprimer qu'en français ce qui reste indicible dans ma langue maternelle. » Et elle le fait avec talent, chaque mot est posé, ce qui donne au propos une très grande profondeur.

Si j'avais conservé ce livre, je crois qu'il aurait fait partie de ces livres hérissons, de ceux qui regorgent de marque-pages comme autant de citations que je voudrais garder en mémoire. Il est truffé de petites perles sur les femmes, le bonheur, la normalité…

A bien y regarder, la lecture de ce roman a été pour moi un moment de grâce comme Lenka HORNAKOVA-CIVADE les décrit si bien :


Les moments de grâce sont de cette nature, furtifs, insaisissables. Il faut avoir foi en eux, et en leur existence, si brève qu'elle laisse une trace amère dans tout le corps. Cette sensation, cette nostalgie est bien la preuve de leur existence. P. 15


Giboulées de soleil de Lenka HORNAKOVA-CIVADE
C'est un coup de coeur quoi ! Je suis déjà nostalgique de devoir le laisser repartir…
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J'ai beaucoup aimé cette fresque familiale : ces histoires successives de trois femmes, qui toutes ont rêvées d'une vie meilleures, mais qui ont du composer leur vie avec les "circonstances" historiques du pays dans lequel elles vivent, et avec les conséquences de leurs amours.
J'ai beaucoup aimé le style aussi, c'est doux, c'est fluide, poétique parfois. Je me suis laissée bercée par ces pages, j'étais en Moravie dans ce petit village, juste à côté de la frontière Autrichienne.
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Une fois de plus, Alma éditeur nous offre un superbe roman écrit en français par une auteure tchèque.

Ce roman est découpé en trois parties racontant la vie de trois femmes : Magdalena, Libuše et Eva. Qu'ont-elles en commun ces trois femmes ? Elle sont, tout d'abord, les trois générations d'une même famille : Magdalena est la mère de Libuše et Libuše la mère d'Eva. Elles sont aussi toutes les trois « bâtardes ». Enfin, elles vivent toutes les grands bouleversements de la Tchécoslovaquie, de l'installation à la chute du communisme. C'est d'ailleurs ce qui fait aussi la force de ce roman : narrer les petites histoires dans la grande Histoire. Ces trois femmes sont ainsi les témoins à la fois des bouleversements politiques mais aussi sociaux. Elles sont féministes à leur façon, bravant le regard des autres, fières d'elles-même et avançant, progressant malgré ce monde en plein chaos. Marie, la mère de Magdalena symbolise bien cette force de caractère et elle transmet à ces descendantes cette volonté de garder la tête haute.

C'est véritablement un très beau roman sur la transmission, la filiation, les origines mais aussi une histoire de la Tchécoslovaquie de 1946 à 1991.

Je vous le conseille très vivement !!!!
Lien : http://www.leslecturesdumout..
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