Parcours d'Orphée...
Gil parle peu, et quand il le fait, on ne l'entend guère, tant il parle bas.
Et puis, un jour, en voiture avec un ami, sur le chemin des vacances, il se met à chanter sur une chanson diffusée par la radio. Et soudain, « le chant de
Gil était une énigme qui brillait devant eux. »
Gil de Andrade est apprenti pianiste. Il loue un « petit pavillon en octogone » à des retraités, afin de pouvoir travailler son piano. Son professeur,
Marguerite Meyer, le prépare pour le concours d'entrée au Conservatoire, à Paris. Jorge, son père, travaille à La Poste. Sa mère psychotique, Lucile, est hospitalisée à Belle-Ile, à Lausanne. Une vie comme il y en a d'autres, finalement.
Mais il y a sa voix, cette voix, qui une fois découverte, ne peut se recroqueviller sur elle-même ; et un talent, qui, une fois libéré, ne saurait se taire.
Le roman, composé de brefs chapitres, narre, par petites touches, le cheminement de cet Orphée à la rencontre de lui-même et d'un je-ne-sais-quoi qui chemine devant lui, vagabondant pas à pas jusqu'à la justification de son exergue (« qui de son chant apprivoisa les bêtes féroces ») ; mené par la voix qui se découpe sur un contre-jour tissé du hasard des rencontres et des signes, d'obstacles et des trébuchements de ce Phaéton aveuglant, des bruissements des saisons, des effleurements des choses et de la consistance incompréhensible des êtres...
Et la musique de
Célia Houdart se déploie, d'autant plus évocatrice que celle que sert
Gil se dissimule derrière des oeuvres et des noms imaginaires ; comme si ses effluves ne nous parvenaient que par un entrebâillement de porte et qu'on ait à tendre l'oreille pour en percevoir les élans et toutes les douceurs. Ainsi que les amertumes intrinsèquement mêlées.