J'étais très impatient de lire ce premier tome de la série Ténébreuse, enfin disons plutôt le « Livre premier ».
Le titre est simple mais prometteur, j'affectionne particulièrement le genre (médiéval fantastique) et les auteurs, Mallié et Hubert, qui sont pour moi des références en la matière ; j'étais donc bien impatient…
Pour situer,
Vincent Mallié est le dessinateur qui a travaillé en collaboration avec
Régis Loisel et
Jean-Blaise Djian sur le Grand Mort (une série de 8 tomes située à la frontière du réel, une sorte de passerelle entre le monde des fées et le nôtre) et puis avec
Serge le Tendre sur La Quête de l'Oiseau du Temps. En 2010, il reçu le Grand Prix du festival Des Planches et des Vaches pour l'ensemble de son oeuvre…
Quant à Hubert, il est – il était plutôt – le scénariste de la prodigieuse série des Ogres-Dieux en 4 tomes, tous plus fantastiques et plus gouleyants les uns que les autres, qu'il avait signé en collaboration avec Christian Gatignol. Il était également l'auteur du non moins remarquable
Peau d'Homme qu'il réalisât avec Zanzim. Coloriste à ses débuts, il fut remarqué par son style raffiné et son goût pour l'histoire, le fantastique et la marginalité. Cela faisait de lui un auteur bien à part et très apprécié. Décédé le 12 février 2020, il reçu en 2015 le prix
Jacques-Lob pour l'ensemble de son oeuvre… C'est dire.
L'album, quant à lui, est beau, épais, sa couverture soyeuse, presque une peau de pêche… Je l'ouvre et il craque doucement, les pages sont bien coupées, il fleure bon de cette fragrance suave et piquante qui émane du papier et des encres. Hum… un régal en perspective…
Au début, le prologue permet de faire connaissance avec notre antihéros qui s'avère être un sacré numéro ; il s'appelle Arzhur, c'est un jeune chevalier du genre grand, rouquin, trentenaire, au nez busqué et aux cheveux réunis en catogan, banni de son clan, honni des siens, et qui erre désormais de village en village accompagné de Youenn, son compagnon d'infortune. Un soir d'orage, alors qu'il sortait ivre d'une taverne - ce qui semble lui arriver à peu près tous les soirs - cinq mercenaires guidés par un seigneur quelque peu rancunier le passe à tabac et le laisse battu comme plâtre, dégoulinant de pluie et de sang.
En pleine déroute et isolé, notre chevalier est accosté par trois étranges vieilles femmes qui lui proposent un nouvel engagement lui promettant de retrouver gloire et honneur ; dans un sombre château, une jeune fille de sang royal est maintenue prisonnière…
Mais Islen, c'est son nom, porte un lourd héritage familial ; exilée d'elle-même dans un ancien château abandonné loin des regards et de ce monde afin de ne pas risquer de sombrer dans la folie ou la magie noire, elle s'est persuadé de devoir expier les crimes commis par ses parents ; ce qui ne peut se faire.
Et puis l'on sait que les monstres ne sont ni ceux que l'on croit, ni ceux qui en ont l'apparence, et que les pires… les pires, sont bien ceux qui sont enfouis dans les tréfonds de certaines âmes damnées.
Nos deux jeunes gens vont-ils accéder à la rédemption au terme de leur chevauchée fantastique ?
Le dessin est noir, plein d'énergie et de fougue, et plein de féérie. J'aurais toutefois apprécié que le scénario prenne davantage son temps à la description des situations et que le texte enjolive cette romance et y ajoute du mystère.
Je remercie l'opération Masse Critique ainsi que les éditions DUPUIS pour m'avoir proposé à la critique cette bande dessinée... carrément hors des sentiers battus.