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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
DEVENIR UN MONUMENT, ÇA PREND DU TEMPS.

Tout ceux qui auront un jour tenu le roman que voici entre ses mains, Bug-Jargal, savent que celui-ci fut rédigé en une quinzaine de jours, suite à un pari et tandis qu'il n'avait encore que seize ans, par le futur monument vivant des lettres françaises de son temps, l'immense et incontournable Victor Hugo. Ce siècle avait dix-huit ans, déjà Hugo perçait sous Totor (sic!), mais il lui faudrait encore quelques années pour que le génie que nous connaissons aujourd'hui prenne tout son plein envol.

Qu'ajouter de Burg-Jargal qui n'ait déjà été résumé ici - les critiques de Nastasia-B et de Miriam donnent parfaitement le ton et je ne saurais trop vous conseiller de les lire-, sans faire trop de redites ? Entre roman épique et roman d'amour, critique de l'esclavagisme et récit d'aventure, ce roman conte l'histoire (une histoire imbriquée dans une autre, pour être exact), puisque le narrateur, le Capitaine Léopold d'Auvernay se confie à une assemblée de soldats à la veille d'une bataille révolutionnaire contre les anglais- nous sommes sous la terreur -, expliquant ainsi son goût pour le danger et la folie des armes. Ainsi, il va projeter son public quelques années en arrière, au mois d'août 1791, à la veille d'une importante révoltes d'esclaves dans une colonie encore française à l'époque : Saint-Domingue (l'actuelle Haïti).

A cet époque-là, le jeune d'Auvernay n'a encore que vingt ans. Neveu d'un très riche et brutal planteur de l'île, possédant pas moins de "huit cent nègres", le jeune homme est terriblement amoureux de sa cousine, Marie, à laquelle il est d'ailleurs promis. D'ailleurs, c'est ainsi qu'il justifie son peu d'activité à défendre ces malheureux, bien qu'il réprouve les méthodes souvent cruelles et parfaitement injustes de ce parent : par son obnubilation totale pour cette charmante jeune femme. Il apparaît cependant que la belle a un autre prétendant qui l'aime d'un amour impossible et caché, mais nous n'en saurons pas plus avant longtemps. du moins ,le conteur fait-il son possible pour ne rien en dire trop rapidement.

Hélas, malgré les mises en garde d'un magnifique esclave "congo" - c'est à dire né en Afrique - ayant sauvé Marie de la bouche acérée d'un crocodile, devenu l'ami du Capitaine et répondant au prénom de Pierrot, la belle sera emportée par la vague de révolte qui s'empare de l'île le jour même de son mariage. Ayant rejoint son casernement, d'Auvernay assistera même, totalement impuissant, à la destruction de la propriété de son oncle, au massacre de celui-ci et de sa nombreuse descendance ainsi qu'à l'enlèvement, par celui qui se proclamait son "frère", le fameux Pierrot, de sa jeune épouse et du plus jeune cadet de cette dernière. Bien entendu, Léopold se sent trahi, pourchasse le bel esclave, le voit disparaître corps et bien dans un fleuve, et fini par se faire lui-même attraper par l'un des chefs de cette rébellion, le terrible et sans pitié Biassou ; Victor Hugo n'aura d'ailleurs pas eu à chercher loin afin de dresser le portrait de ce chef de guerre, un "mulâtre" comme on disait alors - un "sang-mêlé" ainsi qu'ils se dénommaient eux-mêmes -, réputé pour sa cruauté à l'égard de ses prisonniers ou des colons que ses troupes attaquèrent. Hugo nous dresse le portrait impitoyable d'un homme sans aucun doute intelligent, rusé, madré lorsqu'il le faut, mais insidieux, malfaisant, tyrannique avec ses hommes, barbare avec ses ennemis. Celui-ci fait écho, dans une inversion presque parfaite, au fameux Bug-Jargal, dont on se doute très vite mais que l'on ne découvre réellement que très tardivement qu'il n'est autre que cet esclave rencontré dès premières pages, le bel et fort et digne Pierrot ; on apprend ainsi que tout révolté qu'il est, il ne tue jamais pour le plaisir, hésite à saccager les plantations, n'assassine jamais les civils innocents ou désarmés, etc.

Un autre personnage prendra de l'ampleur et de l'importance tout au long de l'ouvrage. C'est un homme contrefait, atteint de nanisme, laid qui, de bouffon de l'oncle, deviendra son bourreau de m^'m' qu'il sera une espèce de prêtre malfaisant proche de Biassou et fort utile à ce dernier pour circonvenir ses hommes dans la crainte des maléfices et autres bondieuseries délirantes de rites catholiques dévoyés qu'Hugo assimile au vaudou.

Tout aurait pu s'arranger, mais pour que le drame puisse prendre forme, il faut pourtant que Pierrot/Bug-Jargal meure, non sans avoir sauvé, à plusieurs reprises, la femme qu'il aime sans espoir de retour -Marie, donc - et l'homme qui en est l'époux mais aussi son frère juré, le Capitaine. D'ailleurs, et sans en dire plus ici, nul ni personne n'échappe à cette destinée tragique et c'est dans une sombre extase éminemment romantique à l'excès que s'achève le roman.

Il est bien évident que, selon nos connaissance historiques actuelles, selon nos goûts et modes en matière littéraire présentes, ce premier roman du grand génie peut passer pour assez faible. Et, objectivement, il l'est : des personnages très caricaturaux, bon jusqu'à la bêtise ou mauvais plus encore que le diable en personne. il y a aussi cette trame, cousue de fil blanc du début à la fin des histoires particulières (il va sans dire que le respect de la trame historique réelle, même avec ses imperfections liées aux méconnaissances de son temps, ne fait pas l'objet de cette remarque), où l'on devine avant même de l'avoir réellement croisé que Pierrot est l'amoureux mystérieux de Marie et est, par ailleurs, le fameux Bug-Jargal. Les soubresauts et revirements permanents du capitaine - un bien grand naïf et même parfois tellement candide qu'il en devient niais - sont aussi peu crédibles et deviennent, à force, un rien exaspérants. Ces aberrations, ces maladresses sont relativement sauvées par le portrait de Biassou ainsi que celui, terrible dans tous les sens du mot, du nain noir - une sorte d'anti-Quasimodo, du moins, pour le caractère -. Mais demeurent aussi les à priori raciste, que l'on sait de son temps, mais qui peuvent aujourd'hui choquer. Il y a les ambiguïté, liées tout autant à la personnalité du jeune Victor Hugo, qui fut du camp des "ultras" (NB : royalistes) et donc outrancièrement anti-révolutionnaire en ses vertes années ce qui nous donne des critiques féroces, parfois justifiées, de la politique menée par la France à l'égard de ses colonies, ayant bien du mal à se décider pour ou contre l'esclavage, tandis qu'étaient décrétés les droits de l'homme supposément universels, mais en réalité applicable aux seuls blancs. Dans le même temps, on sent que la seule idée de mettre un homme en esclavage, d'en avoir propriété comme d'une chose, hérisse tous les poils du jeune Hugo. Il n'en démordra d'ailleurs pas de sa longue vie.

Comme souvent, même le génie est victime des absurdités, des clichés, des stéréotypes et des lieux communs de son époque. Ne verra-t-on pas un Jules Ferry, bien des années plus tard, justifier la colonisation de la même manière, à savoir que nous, blancs d'occident, nous devons d'apporter nos lumières auprès des populations qui en sont le plus dépourvues, et bien souvent, les noirs d'Afrique ? Il est trop aisé de juger à l'aune des connaissances d'aujourd'hui... Surtout en des périodes où la reconnaissance décomplexée d'une certaine forme de racisme par un nombre toujours trop important de gens semble pouvoir porter le pire à la tête de l'état... Donner des leçons au passé est aussi ridicule que malséant lorsque le présent ne vaut guère mieux.

C'est tout de même un peu déçu - parce qu'on attend forcément beaucoup de la lecture d'un texte de Hugo - que l'on referme cette épopée historico-amicalo-amoureuse (ouf !), tout en ne cessant de se souvenir que le futur immense Génie National, tel qu'il fut parfois surnommé, avait alors l'âge où la plupart d'entre nous ne parvenons à bafouiller que quelques lignes maladroites sur des copies quadrillées, chez soi ou dans une salle d'étude. On aimerait pouvoir faire au moins aussi bien... Même après quelques années !
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Difficile de garder à l'esprit le fait que Victor Hugo n'avait que seize ans lorsqu'il rédigea "Bug-Jargal", un peu comme un défi, en seulement deux semaines. D'abord publié sous forme de feuilleton, les publications suivantes, corrigées et augmentées, prendront le format du roman.

Seize ans et déjà quel talent ! J'ai beaucoup lu Hugo mais il m'épate à chaque fois. Déjà, avec "Han d'Islande", autre oeuvre de jeunesse, il m'en avait mis plein la vue et l'imagination. Rebelote ici avec ce récit de la révolte des esclaves pendant la Révolution Française. Ne croyez pas pour autant que l'auteur livre un essai, non, il s'agit bien de romanesque et d'aventures, de fidélité en amour comme en amitié, tous ces thèmes qui, bien développés autour de personnages fouillés, garantissent presque à coup sûr le succès d'une narration.

La forme narrative elle-même est très originale avec un narrateur qui raconte son histoire à ses camarades officiers, l'idée première de Hugo ayant été que chacun au mess raconte à son tour un récit propre à en faire un roman ; projet auquel il renoncera pourtant assez vite et "Bug-Jargal" sera finalement le premier et le dernier maillon d'une série qui aurait pu être passionnante.

Pamphlétaire dans l'âme, Hugo livre ici une réflexion aiguisée et précoce sur la condition des Noirs, sur l'esclavage, sur la ségrégation raciale et sur la discrimination sociale. Un avant-goût pimenté de ce que seront entre autres "Claude Gueux", "Le dernier jour d'un condamné", "L'homme qui rit" et bien sûr, son chef-d'oeuvre, "Les Misérables".


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Challenge MULTI-DEFIS 2020
Challenge SOLIDAIRE 2020
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C'est un livre d'une haute puissance littéraire et d'une grande puissance d'évocation, que notre Bug-Jargal.
Contant avec force la révolte des esclaves à Saint-Domingue, notre jeune Victor nous offre ici un petit court texte qui vaut bien de plus gros romans.
Bien sûr, ce n'est qu'une petite oeuvrette de jeunesse ; bien entendu, il n'y a pas là de véritable vision de l'histoire ; mais, face à la puissance évocatrice de ce roman, comment ne pas céder ? Et face à la puissance littéraire de cet écrit, comment ne pas être émerveillé ?
Bien sûr, l'histoire n'est pas une grande épopée, c'est plutôt le genre "petite histoire dans la grande histoire". Mais c'est un joli texte quand même.
Un Hugo qui n'est pas aussi ambitieux que seront d'autres livres de Hugo, mais qui tout de même a du mérite.
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Le capitaine Léopold d'Auverney se bat farouchement et désespérément dans tous les combats. À croire qu'il veut aller au-devant de la mort. À la demande de ses camarades, il raconte un soir son histoire, comment il a perdu la femme qu'il aimait, mais aussi un ami inattendu en la personne d'un esclave noble et fier. Tout cela s'est déroulé à Saint-Domingue où la longue opposition entre Blancs et Noirs a fini par éclater dans un sanglant affrontement. « Il existait seulement entre les blancs et les mulâtres libres assez de haine pour que ce volcan si longtemps comprimé bouleversât toute la colonie au moment où il se déchirerait. » (p. 27) Léopold, pour sauver sa fiancée, est prêt à se livrer aux esclaves révoltés, notamment à l'infâme Biassou, mulâtre perfide. Mais c'est compter sans Bug-Jargal, fils de roi, homme de principe et frère de coeur du capitaine. « Tu es protégé par un homme que tu hais, il plaide pour ta vie, et tu veux sa mort. » (p. 172)

Je n'en dis pas davantage pour ne pas gâcher la fabuleuse tension dramatique de ce texte. Comme toujours avec Hugo, les sentiments sont puissants et plus un homme est noble et valeureux, plus son ennemi sera odieux et cruel. le manichéisme est évident et l'opposition blanc/noir ne se réduit pas à la couleur de peau. Victor Hugo a écrit ce roman à 16 ans, en 15 jours. Voilà voilà… Pour l'apprenti plumitif que je suis, c'est une leçon d'humilité et une très belle lecture.
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Bug-Jargal est le premier roman écrit par Victor Hugo à l'âge de 16 ans. Ecrit en deux semaines suite à un pari, il ne s'agit évidemment pas d'un chef-d'oeuvre. Pourtant, malgré quelques petites imperfections bien compréhensibles, il laisse déjà présager le grand écrivain à venir.
Dans ce roman, le jeune Hugo fait preuve d'une grande maturité pour situer son histoire et ses personnages en pleine révolte des esclaves de Saint-Domingue en 1791. Il est intéressant aussi de découvrir l'intérêt naissant du jeune Hugo pour la condition des plus « misérables » en sachant que ce sera le thème de prédilection de toute son oeuvre.
Un roman parfait pour faire découvrir aux plus jeunes le grand Victor Hugo.
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Pas grand' chose à ajouter à l'excellente critique de Nastasia-B..

Même vécu et même ressenti en ce qui me concerne : la relecture de Bug-Jargal montre les coutures maladroites d'un roman de jeunesse assez mal ficelé, mais le sujet, rare pour l'époque est exaltant, - et les personnages manichéens, le dépaysement du lieu, quelques beaux monstres comme Hugo aimait en créer, la brièveté, rare elle aussi, chez cet auteur prolixe , tout devrait inciter le lecteur adolescent à dévorer ce livre inspiré par des faits et des personnages réels.
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L'histoire débute dans un campement militaire. Un sergent entre dans la tente où ses collègues sont rassemblés. Il s'est blessé en partant à la rescousse de Rask le chien de son capitaine. Idée stupide, semble-t-il, jusqu'à ce que le capitaine d'Auverney entreprenne de raconter l'histoire de ce chien et de son précédent maître, Bug-Jargal autrement nommé Pierrot. Cette anecdote militaire est le prétexte pour entrer dans la narration d'un fait historique majeur : la révolte des esclaves de Saint-Domingue en 1791. Avec Bug-Jargal, Victor Hugo signe son premier roman, il a alors 16 ans, et l'oeuvre est impressionnante de détails sur la vie dans les colonies françaises et d'idéaux revendiqués. Je découvre, à travers les yeux du jeune capitaine d'Auverney, une partie de la vie de l'esclave Pierrot à Saint-Domingue, prince en son pays, amoureux transi d'une certaine Marie, promise justement au fameux capitaine. Sur fond de révolution, le récit alterne entre tirades romantiques – plutôt naïves – et mésaventures caricaturales dans le camp insurgé des plus ou moins « bons sauvages ».

Pour être tout à fait sincère, les personnages de Marie et de son capitaine ne m'ont pas véritablement emballés, leurs amours adolescentes sont peu crédibles (et reflètent peut-être l'âge de l'auteur). Cela dit, à 16 ans tout juste, le grand Victor Hugo pointe déjà le bout de sa plume : le personnage de Bug-Jargal, par les valeurs qu'il défend et la sagesse dont il fait preuve, est digne des Gwynplaine et autre Quasimodo. Rebut de la société, malchanceux à l'extrême, il incarne le courage, le sens du sacrifice et l'honnêteté des plus grands. En se positionnant dès son plus jeune âge contre les pratiques esclavagistes de son époque, l'auteur fait montre d'une conscience politique extrêmement précoce qui n'en est alors qu'à ses prémices.

Ce roman précède de quelques années à peine la rédaction de Han d'Islande que j'ai lu il y a quelques mois. L'intrigue de ce dernier se déroule sur fond de révolte de mineurs en Norvège. Il vient en ce sens prolonger Bug-Jargal et annonce un des fils rouges de l'oeuvre entière de Victor Hugo : la condition sociale des plus miséreux.
Lien : http://synchroniciteetserend..
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Bug-Jargal est un roman écrit à 16 ans par Victor Hugo.
On y reconnaît les prémices de la défense des minorités, des opprimés où l'humanité est présent chez les plus faibles et la quete de pouvoir de puissance chez les plus forts.
On y voit la culture de ce jeune garçon qui est capable de décrire des contrées lointaines comme ici, Haïti. Et d'aller à contre courant en prenant la défense des esclaves, dans la bouche de son héros n'est jamais utilisé le terme de nègre et c'est appréciable et en corrélation avec la personnalité de celui-ci.
On regrettera le manque de poésie que l'on retrouve plus tard dans ses oeuvres et un peu trop de romanesque.

Lecture appréciée et qui peut permettre d'aborder Hugo pour ce qui craigne un gros pavé.
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On a toujours l'image de Victor Hugo dans sa vieillesse, on imagine moins l'adolescent qui déclara "je veux être Chateaubriand ou rien" à 14 ans ou qui, en 1818, paria avec ses camarades qu'il écrirait un roman en 15 jours. C'est Bug-Jargal, ce premier roman de Victor Hugo paru d'abord en 1819 puis remanié en 1826.

Moins abouti que ses oeuvres les plus célèbres, Bug-Jargal est un livre à part entière.

Bug-Jargal raconte la révolte des esclaves à Saint Domingue en Août 1791. J'ai eu envie de lire la vraie histoire. Victor Hugo s'est très bien documenté : le héros Bug-Jargal est sans doute imaginaire, mais les autres chefs de l'insurrection, Biassou, Boukmann ont bien existé. Les cérémonies étranges, les messes burlesques de l'Obi correspondent au culte vaudou qui a réellement été célébré au début du soulèvement. Coïncidence amusante : en juin 1794, une expédition commandée par Victor Hugues, libérera les esclaves- la proximité des patronymes m'a fait sourire.

Bug-Jargal, qui a donné son titre à l'oeuvre a une personnalité exceptionnelle, son aura, son autorité digne d'un fils de roi africain qu'il est. le capitaine d'Auverney, le narrateur rivalise de chevalerie et de noblesse. L'art de Victor Hugo est de ne pas avoir construit une oeuvre manichéiste avec tous les bons dans un camp, les méchants dans l'autre. Les personnages sont complexes. L'histoire d'amour - un peu mièvre - pour la parfaite Marie se complique dans la rivalité des deux héros qui s'estiment et s'appellent même frères. Les "méchants" se répartissent dans les deux camps aussi bien dans celui des colons blancs que chez les insurgés, la sauvagerie et les massacres sont dénoncés. Dénoncée l'horreur de l'esclavage. Raillée, l'hypocrisie de certains "négrophiles", confrontés au soulèvement, retrouvent les intérêts des planteurs. Moquées aussi, les pratiques militaires qui veulent asseoir l'autorité des officiers sur une prétendue "connaissance du latin". Dénoncés aussi les massacres de la Terreur


Cette oeuvre de jeunesse anticipe certains des thèmes hugoliens.

Dans le personnage du bouffon Habibrah, je crois deviner l'Homme qui rit. Encore un personnage complexe:

"Crois-tu donc que pour être mulâtre, nain et difforme, je ne sois pas homme? Ah ! j'ai une âme, et une âme plus profonde et plus forte que celle dont je vais délivrer ton corps de jeune fille! J'ai été donné à ton oncle comme un sapajou...."

Il a campé ces personnages forts et complexes dans la nature exubérantes des îles Caraïbes

Souvent même ses eaux étaient cachées par des guirlandes de lianes, qui, s'accrochent aux branches des érables à fleurs rouges semés parmi les buissons, mariaient leurs jets d'une rive à l'autre, et, se croisant de mille manières, formaient sur le fleuve de larges tentes de verdures

La grotte dans laquelle est réfugiée Marie me fait penser à la celle de Gilliatt des Travailleurs de la mer

Au dessus de cette salle souterraine, la voûte formait une sorte de dôme tapissé de lierre d'une couleur jaunâtre. Cette voûte était traversée presque dans toute sa largeur par une crevasse à travers laquelle le jour pénétrait, et dont le bord était couronné d'arbustes verts, dorés en ce moment des rayons du soleil. ....

J'ai été un peu agacée des scènes où Léopold d'Auverney était prisonnier aux mains de Biassou, j'ai trouvé le grotesque trop outré, un peu condescendant. mais peut être était-ce vraiment comme cela? Ces uniformes déguenillé, ce latin de cuisine, ces drapeaux dépareillés.



Le souffle n'est pas encore celui des chefs d'oeuvres les plus célèbres mais c'est celui de la révolte des esclaves, de la Révolution, avec toutes ses contradictions.


Lien : http://miriampanigel.blog.le..
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Victor Hugo a écrit le livre Bug-Jargal à 16 ans après une gageure avec ses amis. Je dois avouer que c'est un livre qui ne démontre en rien l'âge de l'auteur. Il traite avec une grande maturité de la révolte des esclaves d'Haïti. En plus, il réussi à créé un monde ou les bons et les mauvais sont des deux côtés. Comme quoi tout n'est pas toujours tout noir ou tout blanc.

tout n'est pas parfait. L'écriture n'est pas toujours au point mais on ne peut pas blamer un jeune homme de 16 ans pour cela, surtout en sachant ce qu'est devenu par après ce jeune écrivain. Ça reste un très bon roman sur un sujet qui est trop souvent oublié par les auteurs français.
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