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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Bad girl sous-titré Classes de littérature. Nancy Huston serait-elle devenue enseignante ? Pas tout à fait, quoique, des leçons de vie valent bien tous les enseignements théoriques et franchement qui n'aimerait pas communiquer avec ce qu'il fut à l'aube de son existence, riche de ses expériences vécues. Une formidable transmission !

C'est le cadeau que s'offre l'auteur sexagénaire en s'adressant directement à son double, Dorrit, le foetus non désiré en cours d'élaboration dans le ventre de sa mère qu'elle a été, et en choisissant de le tutoyer. Par cette mise à distance d'elle-même, le récit est beaucoup plus franc qu'une autobiographie classique, le style direct, sans artifices est souvent protecteur, mais ne sombre fort heureusement jamais dans le règlement de compte. On peut même parfois avoir l'impression qu'elle s'adresse directement à nous, astucieux procédé vraiment.

Cette partition autobiographique en mode intra-utérin, comme l'annonce la quatrième de couverture, est donc une manière originale de regrouper et de transmettre des fragments de sa vie qui ont tous en commun d'avoir façonné son besoin viscéral de raconter des histoires, ses motivations d'écrivain et elles sont nombreuses.
Pour ne donner qu'un exemple, elle a été abandonnée par sa mère à l'âge de six ans, contrainte de communiquer avec elle par lettres. Elle a pris ainsi très jeune l'habitude de la communication écrite précise, pour combler un manque, une absence, la prédisposant à devenir une femme de lettres, dans tous les sens du terme.

Tenter coûte que coûte d'analyser, de comprendre, mais jamais de juger : tel est bien le propos de ce récit très personnel, à la construction inhabituelle, que j'ai particulièrement apprécié et lu d'une seule traite - mais il est tout à fait possible de grappiller des courts passages, le livre étant très aéré et segmenté pour ce type de flânerie.
Évidemment, j'ai déjà apprécié quelques uns de ses romans et cette autobiographie est un éclairage privilégié sur ses thèmes de prédilection, comme la filiation, les traumatismes et leurs effets, la destinée, mais aussi la musique omniprésente. Peut-être a-t-il moins d'intérêt pour qui découvre cet écrivain, mais ce n'est pas sûr.
Passionnant !
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Les écrits de Nancy Huston, quels qu'ils soient, provoquent toujours en moi une forte émotion, soit positive soit négative. Je suis loin d'être toujours d'accord avec ce qu'elle affirme - c'est surtout ce point qui me dérange, ces assertions, qui ne sont après tout que ses propres convictions, mais que je n'arrive pas toujours à accepter comme telles-. Mais ses propos ont justement ce mérite de provoquer la réflexion, et c'est ce que j'apprécie quand je la lis.
Le féminisme et tout ce que cela comporte, la place de la femme dans la société, la famille, le couple, la relation mère-enfant, la séduction, l'apparence, le corps, l'inceste, le viol, tous ces sujets sont au coeur de ses livres.
Ici encore, dans Bad Girl, elle pose un regard introspectif sur elle-même en tant qu'embryon déjà marqué par ce qui l'entoure, par la lignée familiale également. Elle revient également sur son enfance et cette relation compliquée qu'elle a entretenue avec une mère absente.
Tous ces événements ont été pour elle des "classes de littérature", des sources d'inspiration mais aussi de réflexion sur l'écriture.
Ce sont plus les arguments "traumatisants" de sa relation avec sa mère, du moins certains, qui ne m'ont pas convaincue, la petite fille pétrifiée par sa mère qui lui demande d'arrêter de gigoter alors qu'elles font une sieste ensemble, la douleur physique lorsqu'elle la coiffe... mais peut-être ces souvenirs n'ont pas pu être effacés, remplacés par d'autres parce que sa mère est partie si vite.
Enfin, ce que j'ai apprécié dans cet essai, composé de textes antérieurs qu'elle reprend et abondamment relayés par les propos d'autres auteurs et artistes, c'est qu'elle remet en cause ses propres propos dans une volonté supérieure de compréhension.
Dans tous les cas, les textes de Nancy Huston, par leur maîtrise et leurs thèmes, sont à lire, car ils apportent indubitablement un regard neuf sur la femme et la famille.
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Dorrit, le personnage du livre, c'est l'auteur elle-même, à qui elle s'adresse en utilisant le « tu », comme dans beaucoup de ses livres.
C'est une introspection complète.
Elle revient souvent sur sa vie intra-utérine, sur sa naissance plus ou moins désirée.
Elle remonte à plusieurs générations de l'histoire de sa famille pour comprendre l'empreinte qu'elle a sur elle.
Elle ne se remettra jamais du traumatisme de l'abandon de sa mère, lui donnant la sensation d'être nulle puisque quittée. Elle se remettra mal aussi des incessants déménagements de son enfance, lui donnant l'impression de n'être de nulle part.
de tout cela, elle tente de s'en sortir par ses lectures, puis par ses écrits, sa seule manière de survivre. Et tous ses livres sont empreints de ces faits familiaux.
Celui-ci, c'est le roman de sa propre vie. Son autobiographie racontée à Dorrit, donc à elle-même. Elle analyse le rôle et la place de la femme et de la mère, dans la société.
Elle donne le sentiment de tourner en boucle depuis on enfance, de ne pas avoir trouvé d'issue, hormis dans la lecture et dans l''écriture.
Mais elle ne guérira jamais, preuve en est le titre « Bad Girl »
Comme toujours, l'intelligence transparaît dans l'écriture de Nancy Houston, et cette lecture n'en est que plus appréciable, nous éclairant davantage sur ses autres livres et nous poussant à une réflexion sur nous-même.
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Aimer lire donne souvent l'envie d'aller voir ce qui se cache derrière la plume, qui est l'auteur(e), pourquoi, comment écrit-il (elle), ce qui l'inspire pour ses écrits, regarde-t-elle autour d'elle ou s'inspire-t-elle de sa vie, de ses souvenirs, etc.... Je vais de temps en temps chercher des lectures (ou des podcasts) pour le découvrir et la manière dont Nancy Houston construit ce récit autobiographique est très original. Elle s'adresse au foetus en gestation qu'elle a été, de sa conception, la "mauvaise nouvelle", jusqu'au jour de sa naissance. Elle lui trace son chemin comme si elle voulait l'avertir, la mettre en garde : d'où elle vient généalogiquement, ce que sera sa relation avec ses parents et en particulier avec sa mère, Alison, qui va s'éloigner d'elle, on peut dire abandonner, alors qu'elle n'a que 6 ans, influençant largement ses écrits.

"Toi, c'est toi, Dorrit. Celle qui écrit. Toi à tous les âges, et même avant d'avoir un âge, avant d'écrire, avant d'être un soi. Celle qui écrit et donc aussi, parfois, on espère, celui/celle qui lit.  Un personnage. (p11)"

Bad girl, good girl, bad mother, good mother..... A l'image de l'illustration de couverture faite par Guy Oberson, le Peintre compagnon de Nancy Houston, c'est un portrait d'une femme marquée à jamais par l'abandon de sa mère qu'elle porte en elle comme une marque indélébile.

Famille, écriture, société, pays, langues mais également féminisme, une vie de femme dans un récit très personnel, à la fois profond et pudique, écrit à l'aube de sa soixantaine, à l'heure des bilans qu'elle peut regarder et évoquer avec parfois regrets :

"Hélas, tandis qu'on élevait les filles à la fois comme filles et garçons, on continuait à élever les garçons comme des garçons. (p132)"

ou ironie :

"Tu supporteras des hommes de toutes sortes, y compris la pire : d'épais malotrus qui blablatent, salivent, balivernent et t'envahissent de leurs paroles, tu les supporteras parce que, tout en souriant et en hochant la tête, tu enregistres leur comportement certaine de prendre un jour ta revanche en les transformant comme des marionnettes, toi qui décideras quand ils doivent l'ouvrir et la fermer. (p207)"

mais avec en fond un mystère jamais résolu ni compris :

"Cela n'arrive jamais qu'une mère quitte son enfant. C'est donc que l'enfant en question doit être nulle. Oui, tu mérites tout le malheur qui t'arrive, bad girl, même si tu ne sais pas pourquoi. (p251)"

Avec des courts chapitres, à la manière de pensées ou d'une sorte de journal intime, elle laisse monter en elle tout ce que lui inspire le regard sur sa vie, faisant le corollaire entre ses pensées, sa famille, son enfance et comment elles ont influencé non seulement la femme mais également l'écrivaine qu'elle est devenue, creusant et cherchant à trouver des réponses à travers ses romans.

C'est une mise à plat lucide, jalonnée des influences littéraires et musicales qui l'ont accompagnée mais on ressent  tout le long, la blessure mal cicatrisée de l'absence maternelle. Elle dresse son arbre généalogique aux multiples origines, classes sociales et parfois même avec quelques branches pas toujours très solides psychologiquement et cette introspection lui permet de mettre à jour ses choix de sujets littéraires entre autres.

Je n'ai lu de Nancy Huston que Lignes de failles, un roman que je n'avais pas apprécié dans un premier temps (je ne sais plus pourquoi)  mais qu'une relecture quelques années plus tard m'avait enchantée et la découverte de cette Classe de littérature permet de comprendre à quel point, à travers ses écrits, elle met d'elle-même, de son passé, de ses sujets centraux qu'elle explore, encore et encore, afin de mieux comprendre la Dorrit qu'elle fut et qu'elle est encore aujourd'hui.

Nancy Houston écrit sur elle et elle parle d'elle à la manière d'un personnage de roman, se cachant derrière celui-ci afin de garder une distance nécessaire, mais avec malgré tout une tendre intimité vers l'embryon qu'elle fut, cet oeuf qui grandit dans le vente de sa mère, ce seul moment où elle l'avait tout à elle.

"(...) la deuxième personne sera toujours celle que tu préfères, étant donné qu'il n'y a pas assez de place dans le monde pour je, et que il et elle mettraient trop de distance entre toi et tes personnages bien-aimés, tu veux leur parler tout le temps, comme s'ils étaient dans la pièce avec toi, c'est pourquoi, livre après livre, tu diras you, you, you et tu, tu, tu, et il en ira de même, Dorrit, pour ce livre-ci, où ta ville elle-même sera transformée en lettre, et toi, veux veux pas, drôle de petit chamois vaillant devenu dame vieillissante, en femme de lettres (p254)"

J'ai beaucoup aimé l'originalité de la construction, l'analyse de ses influences, le ton à la fois empreint de bienveillance et de compassion pour elle, un moyen d'analyser et comprendre l'enfant, la femme et l'écrivaine même si la partie concernant le passé de ses ancêtres m'a perdue à certains moments dans une écriture très douce, paisible et comme sur la voie de l'acceptation.
Lien : https://mumudanslebocage.wor..
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* C'est l'histoire de "Dorrit", autobiographie intra-utérine d'un foetus non désiré et son devenir.
Nancy Huston en a fait le roman de sa vie.

Elle raconte à travers ces "9 mois" tous les conflits familiaux et le rôle primordial de l'hérédité.

Elle qui avait un arrière grand-père fou à lier, un grand-père pasteur, une tante missionnaire, une grand-mère féministe, une belle-mère allemande, un père brillant mais dépressif.

Déménagements constants, parents absents bien souvent et piano omniprésent.

Son seul salut pour survivre sera la création littéraire.

Elle aborde énormément de sujets mais principalement les manques, les traumatismes de l'enfance.

Elle y parle de la place de la femme, des femmes dans la société.

Livre très intime où elle se livre sans tabous.

Elle cite ses mentors qui l'ont accompagnée dans son oeuvre.

Percutant et très intéressant.

"Quest-ce qui nous permet de continuer ?
C'est le son qui va et qui vient,
Comme l'eau parmi les pierres..."
(Göran Tunströme)
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Ce que j'aime chez Nancy Huston, c'est d'abord et surtout son approche psychanalytique de l'écriture mais aussi son regard pénétrant et son élégance naturelle qui me la rendent fort sympathique.
Evidemment, cela ne suffit pas pour faire un bon livre.
"Bad girl" c'est Dorrit et Dorrit c'est Nancy Huston alors qu'elle n'est qu'un embryon dans le ventre de sa mère Alison. Dans ce récit, elle adopte une fois de plus un procédé narratif inédit en s'adressant à ce foetus qu'est Dorrit, pour lui raconter ses débuts dans la vie intra-utérine puis dans la vie de petite fille.
Ces débuts sont difficiles puisque le bébé n'est pas vraiment désiré par ses jeunes parents nettement immatures et déjà responsables d'un petit garçon.
En très courts chapitres parsemés d'incantations, l'auteure livre des fragments de vie, des réflexions éparses, des souvenirs familiaux, tous ces éléments qui vont constituer les bases de sa personnalité, expliquer son éveil à la lecture, à la musique, favoriser le développement précoce de son imaginaire, faisant d'elle une future "femme de Lettres".
Si vous êtres familiarisé avec les romans de Nancy Huston, "ce livre est fondamental dans la trajectoire littéraire de la romancière. Au plus près du territoire de l'intime, il offre un nouvel éclairage sur son oeuvre"... opinion que je partage totalement avec l'éditeur et qui m'incite à relire "lignes de faille" et "professeurs de désespoir".
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Avec « Bad girl », Nancy Huston nous livre une autobiographie aussi originale que passionnante, qui sait éviter les pièges de la complaisance et de l'auto-apitoiement. C'est un récit tout à la fois léger et grave, sincère et bouleversant, qui nous permet un accès privilégié à la compréhension de son oeuvre. Au-delà de son histoire personnelle et singulière, c'est aussi une évocation poignante et pleine de justesse de ces blessures d'enfance, silencieuses et secrètes, dont on ne guérit pas, de ces traumatismes invisibles qui nous (dé)construisent, et qui seront pour elle « classes de littérature », les pierres angulaires de son oeuvre à venir.
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Nancy HUSTON fait une introspection au plus profond d'elle-même pour essayer de combler une fissure qui la poursuit depuis qu'elle est née. Elle invente un personnage, « Dorrit », qui n'est autre que le foetus qu'elle a été et à qui elle essaie d'expliquer pourquoi elle est devenue ce qu'elle est.
La cause de cette fissure est due au fait que ses parents, notamment sa mère, ne voulait pas d'elle. Lorsque sa mère divorcera, elle pensera que c'est à cause d'elle, que sa mère l'a abandonné.
Elle recherche, au travers de la vie de ses grands-parents paternels et maternelles et de ses parents, les causes de cette fissure, elle doutera toujours et portera cette blessure tout au long de sa vie. D'ailleurs, le titre du livre en dit long.
Plein de questions, de remise en question qui font réfléchir à ce que nous sommes.
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Dans ce roman autobiographique, Nancy Huston s'adresse à elle-même quand elle était encore dans le ventre de sa mère, Alison. Elle prénomme le futur bébé Dorrit, et lui dit « tu » lui précisant son avenir.
Tour à tour, elle revient, plutôt dans le désordre, sur ses jeunes années puis sa relation avec sa mère ainsi que sa relation avec son père. Un bref retour en arrière fait état de la vie des quatre grands-patents et de leur ascension sociale qui ne laisse pas présager des difficultés d'intégration dans la société qu'auront les parents de Dorrit, les deux parents sont obligés de cumuler divers emplois mal payés pour subvenir à leurs besoins et ceux des 3 enfants.
De déménagements en changement de rythmes, c'est l'occasion pour Nancy Huston de démontrer que chaque petit fait qui lui est arrivé a été une « leçon de littérature » pour la romancière qu'elle est devenue ensuite. le manque de tendresse pendant sa jeunesse (elle est la deuxième d'une fratrie avec un grand frère et une petite soeur), le divorce des parents quand elle a six ans, les études, des enfants d'un second mariage du père, tout cela la nourrit et la fait grandir.
Cette absence de repères et d'amour pendant son enfance la fera s'exiler en France et quitter le Canada.
Les chapitres sont très courts mais ils vont toujours à l'essentiel.
À mi-chemin entre l'autobiographie et l'essai familial « bad girl » est un livre qui m'a enchantée.
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J'ai vraiment beaucoup aimé cette oeuvre autobiographique tout à fait atypique.
Le style de Nancy Huston est toujours aussi brut et pourtant terriblement poétique et prenant.
Le principe de cette autobiographie, l'auteure s'écrit à elle-même en tant que foetus en train de grandir dans le ventre maternel.
Les "chapitres" sont extrêmement courts et incisifs, alternant tranches de vie de manière assez chronologique et croissance de la petite Dorrit dans le ventre maternel.
Les réflexions de l'auteure sur la vie, la famille, les relations interpersonnelles, le statut de femme dans le carcan de la société, le rôle de la religion, les familles recomposées. Certains passage sont très cyniques et donne un ton très mordant l'ensemble.
Une vie complexe avant même qu'elle ait commencée, une vie semée de difficultés et quelques moments de grâce. Une lecture assez complexe et particulière car il faut s'adapter et adhérer au style très particulier de l'auteure tout en musicalité, mais personnellement je suis conquise.
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