Saffie, jeune allemande, débarque à Paris en 1957. Très marquée par la guerre, elle est complètement fermée au monde et repliée sur elle-même. Elle s'installe chez le beau et riche Raphaël comme femme de ménage. Lui, subjugué par cette femme aussi belle qu'étrange, va en tomber amoureux fou au point de la demander en mariage au bout de trois semaines. A cela s'ajoute la venue d'un enfant non désiré de prime abord, Emil.
Commence alors un pénible travail de reconstruction qui va emprunter des chemins peu ordinaires, car Saffie va rencontrer l'homme de sa vie en la personne de Andràs, juif hongrois également émigré. Ce coup de foudre va déclencher une succession de faits qui vont mener vers des destins tragiques.
Nancy Huston prend grand plaisir, me semble-t-il, à mêler la vie de ces héros avec l'histoire complexe de la France de cette période, pays convalescent de la 2ème guerre mondiale et délibérément engagé dans la crise algérienne qui devient une guerre sans le dire… Elle montre comment le destin des nations influe sur le destin des hommes, même les plus humbles. Son propos est touchant à certains égards et interpelle le lecteur, d'autant que le parti-pris du narrateur fait parfois de lui son confident.
En définitive, ce roman est bon sans être à la hauteur de « Ligne de faille » ou «
Cantique des plaines,
instruments des ténèbres » qui ont tous deux reçu des prix bien mérités. Toutefois, si l'on aime
Nancy Huston, il serait dommage de faire l'impasse sur cet ouvrage.
« Rien ne presse. Ils baignent dans leur temps, ensemble. Andràs n'a pas d'horaire ; il peut travailler la nuit quand il le faut, et dormir le jour. Saffie, dès qu'elle traverse le pont des Arts, n'est plus Mme Lepage, l'épouse du grand flûtiste (rôle qu'elle endosse avec soumission et même une certaine grâce désormais, lors des concerts de gala et des dîners en ville avec Raphaël) ; elle entre, toute, dans l'univers de son amour »
MichelANgelo 2013