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Je viens de passer un agréable moment avec ce roman aux allures très populaires du XIXe S, d'autant plus que l'auteur nous fait découvrir le monde ouvrier avec des femmes brodeuses. Elles sont vulgaires et vives. Leur avenir pour elles, c'est l'instant qu'elles vivent, et elles s'y donnent à cœur joie. Seul le mot vivre compte pour elle, quant à se demander comment, peu importe, pourvu qu'on vive. Mais il y en a aussi des filles qui veulent changer les choses, retourner les situations. C'est ce que se dira l'une des sœurs Vatard, Désirée. Elle est atypique, dévouée dans ses principes, observatrice, elle est tout autant attachante, naïve, et perspicace, elle laisse des sentiments l'envahir, grandir en elle, la posséder et enfin elle laissera sa raison prendre le dessus...
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«- J'ai deux filles; il y en a une qui ne veut épouser légitimement personne, et elle est encore plus insupportable que l'autre qui voudrait se marier et qui ne le peut pas. C'est vraiment décourageant, je ne sais pas quoi faire! »
Au-delà de l'intrigue plutôt simple qu'implique, pour le père Vatard, le fait d'avoir deux filles à caser, l'aînée Céline qui enchaîne les amants et la cadette, Désirée, amourachée d'Auguste, un ouvrier oeuvrant comme elles à l'atelier Débonnaire, c'est à une étude de moeurs parisiennes que nous convie Joris-Karl Huysmans en cette fin du XIXe siècle.
Rien n'échappe à l'oeil avisé de l'auteur qui décrit sans concession l'univers du prolétariat : les guinguettes qu'il fréquente, les femmes qu'il séduit, la nourriture et les boissons qu'il ingurgite et les ragots et dialogues pimentés d'un vocabulaire depuis longtemps disparu (je dis merci à l'éditeur qui a judicieusement inséré un lexique en fin de volume).
Je me suis encore régalée et n'en ai pas encore terminé avec Huysmans, m'apprêtant à lire la biographie qu'a écrite sur lui Patrice Locmant. Et il y a encore quelques-uns de ses romans qui m'attendent…

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Paradigme presque systématique du Naturalisme, Les Soeurs Vatard est couronné de succès en 1879 mais les temps ont changé.

Huysmans nous raconte les déboires amoureux de deux grisettes, Céline et Désirée, employées dans un atelier de brochure. Autant la première, ainée de la fratrie, est dévergondée, autant sa puînée veille à rester sage jusqu'à son mariage. Céline multiplie les liaisons, avec une préférence pour les mâles experts en bricole et torgnoles, cependant que la prude Désirée flirte gentiment avec le fade Auguste (à qui on conseille de ne pas "rester dans la salle d'attente puisque les guichets doivent rester fermés").

L'intrigue est bien plate que le style de l'écrivain tente de transcender, en vain. Huysmans a beau inoculer une copieuse dose de vérisme dans son historiette, il se fourvoie : rien ne fonctionne véritablement. Trop de digressions (brillantes, évidemment), un populisme bavard qui abuse de l'argot du pavé parisien et une syntaxe fracturée (mélange de vulgarités assumées et de maniérismes qui, contrairement à ce qui nous a fait adorer Marthe, sonnent creux)...

Bien entendu, on se réjouira de la constante méchanceté de l'auteur et on ne rechignera pas devant les nombreuses fusées de génie qui parsèment l'ouvrage mais elles ne suffisent pas à le rendre aimable. le récit se traîne en longueur et les morceaux de bravoure sentent par trop son bateleur. Ainsi quand les deux frangines forcées à la chambre par un mauvais rhume observent par désoeuvrement le chemin de fer voisin. Leur attention se fixe alors "sur une machine en panne" et elles regardent "le monstrueux outillage de ses roues, le remuement d'abord silencieux et doux des pistons entrant dans les cylindres, puis leurs efforts multipliés, leurs va-et-vient rapides, toute l'effroyable mêlée de ces bielles et de ces tiges ; (...) les éclairs de la boîte à feu, les dégorgements des robinets de vidange et de purge", elles écoutent "le hoquet de la locomotive qui se met en marche, le sifflement saccadé de ses jets, ses cris stridulés, ses ahans rauques." le procédé grossier ("elles ne pensent qu'à ça...") surprend chez le raffiné Huysmans.

En glissant des copeaux de truffes sous la peau d'une vieille géline qui a fait son temps, on n'obtient pas une succulente poularde demi-deuil !
Lien : http://lavieerrante.over-blo..
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Céline et Désirée Vatard sont brocheuses. Quand elles quittent l'atelier, elles ont des occupations bien différentes. Elles rentrent ensemble chez leurs parents, mais alors que Désirée prend soin de leur mère malade et de leur père, Céline s'apprête pour ressortir rencontrer des hommes. « Un homme, ça ne tire pas à conséquence pour lui s'il s'amuse, une fille, ça l'empêche de se marier avec un garçon qui serait honnête. » (p. 59) le père Vatard est cependant satisfait de cette situation : elle aime sa petite Céline et sait qu'il ne peut pas la retenir et il est bien heureux que sa sage Désirée reste au foyer. Aussi, quand Désirée rencontre Auguste et souhaite l'épouser, le père Vatard s'oppose farouchement à cette union, causant bien des tourments aux jeunes amoureux. Pendant ce temps, Céline abandonne Anatole, canaille peu fréquentable, pour Cyprien, un peintre aux moeurs peu recommandables, mais au bras duquel elle est fière de s'afficher. Ses amours débridées ne sont pas pour la rendre heureuse et la calme harmonie de la maison Vatard est bien secouée. « J'ai deux filles, il y en a une qui ne veut épouser légitimement personne et elle encore plus insupportable que l'autre qui voudrait se marier et qui ne le peut pas. » (p. 136)

La dédicace liminaire à Émile Zola ne manque pas de piquant quand on sait le violent reniement du naturalisme ensuite opéré par Huysmans. À l'époque de l'écriture des Soeurs Vatard, Huysmans est encore un disciple ébloui par le maître et il dépeint avec force détails l'atelier, les attitudes des ouvriers et les chiffons des demoiselles. On sent cependant déjà poindre un certain goût pour la luxure qui annonce le décadentisme de ses futures oeuvres. Impossible de ne pas penser à un autre de ses textes, Marthe, histoire d'une fille, qui relatait le pauvre destin d'une ouvrière devenue prostituée. Les soeurs Vatard n'est certainement pas mon texte préféré de Joris-Karl Huysmans, mais c'est un texte qui prend toute sa place dans l'oeuvre de cet auteur.
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Le roman commence par une dédicace à Zola, et on comprend pourquoi. C'est un hommage, voire un pastiche, non dans le sens de parodie, mais dans celui d'exercice de style d'imitation. L'intrigue en elle-même est inspirée de Zola : deux soeurs presque adultes observées dans leur milieu social et géographique, les ouvriers de l'Ouest parisien. Il semble que l'auteur a tout fait pour reprendre plusieurs milieux décrits et présentés par Zola : les classes ouvrières dans ses ateliers, les prostituées et actrices de boulevard, les peintres bohèmes, la gare et ses fumées.. On retrouve des scènes habituelles chez Zola, comme le repas en famille décrit avec tous ses plats, les bagarres et insultes entre femmes, la réflexion sur la puberté et la naissance du désir chez les jeunes filles, les effets de l'alcoolisme...
L'originalité tient au contexte, à l'époque du récit : ce n'est plus le Second Empire comme chez Zola, mais la III ème République. Les jeunes hommes deviennent soldats de façon obligatoire, les chants patriotiques républicains sont connus de tous, les rues sont éclairées au gaz, Paris a été transformé par Haussman et ce sont maintenant les banlieues qui s'urbanisent...
Je ne vais pas multiplier les points communs et les différences. L'intrigue elle-même oppose ces deux soeurs, celle qui cède à ses désirs, celle qui résiste par ambition - une ambition limitée, à sa mesure : un mari qui ne boit pas, qui ne frappe pas sa femme, et qui rapporte suffisamment pour que le couple ait un petit logement bien propre avec quelques meubles et un cadre au mur. Ses rêves sont simples mais accessibles, on peut s'identifier à elle qui est moins un archétype que sa soeur, la coureuse - néanmoins, Céline est une ouvrière appliquée, une fille dévouée, une confidente et une amie pour Désirée... Ce n'est pas Nana.
Cependant, le roman se termine assez mal : on comprend que Céline s'enferme dans une nouvelle relation malsaine où elle sera encore battue et méprisée, et que Désirée ne sera pas forcément très heureuse.
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On devrait tous relire Huysmans ! Voici ce qui m'est venu en tete en refermant ce livre tant je l'ai apprécié . L'histoire est classique mais le style et le rythme du recit sont delicieux.Un livre classique qui reste moderne et agreable a decouvrir encore de nos jours.
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J'ai découvert ce roman sur le tard et, passé un mouvement de honte envers cette affreuse faille dans ma culture, je ne le regrette absolument pas car j'ai enfin lu un bon roman, ce qui ne m'était plus arrivé depuis très longtemps. Huysmans adore Zola et ça se sent, mais son style, davantage argotique, imagé et gouailleur que celui de cet auteur que j'admire tant, nous brosse un portrait très enthousiasmant, charnel et vivant d'un Paris ouvrier du XIXè, sans le côté fataliste. Huysmans a un don pour décrire les sentiments amoureux et la fin m'a vraiment prise aux tripes!
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