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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
L'auteur a choisi lui-même les nouvelles de ce recueil, écrites dans les années 1970. Elles sont en partie autobiographiques et donc parfaites pour découvrir Hwang Sok-yong si vous ne connaissez pas encore cet immense auteur coréen, ce qui était mon cas avant de le trouver sur le blog USVA dans une de ses superbes chroniques sans frontières.

La première histoire « Herbes folles » parle de souvenirs d'enfance dans les années 1950 (l'auteur avait sept ans) lors de la guerre fratricide qui a ravagé la Corée et conforté la partition du pays. J'ai aimé vivre, à travers le regard du petit garçon, la touchante complicité s'instaurant avec Taegeum, la jeune fille employée de maison. Comme souvent chez cet auteur, on sent une forte empathie pour ses personnages féminins dont il excelle à décrire la difficile condition, à partir de leur quotidien, dans son écriture réaliste mais prenant en compte les points de vues de chaque personnage.

La nouvelle « Oeils-de-biche » aborde le malaise du retour au pays de soldats coréens qui se sont engagés au côté de l'armée américaine au Vietnam, ce que l'auteur a réellement vécu en 1966-1967.

Le bateau vient de les ramener en Corée, l'art de l'écrivain est de capter ce temps suspendu lors de la première virée en ville, dans l'attente du train qui va les ramener chez eux. La sexualité, à travers les contacts avec les prostituées, est abordée comme une violence supplémentaire dans un pays divisé et hostile, où la prostitution est dopée par la guerre et l'afflux des étrangers.

« Les ambitions d'un champion de ssireum » : Llbong est un costaud reconnu dans son village pour ses talents dans cette forme de lutte spécifiquement coréenne, le ssireum. Il doit quitter le village après la mort de sa mère mais les nouvelles rencontres à la ville sont lourdes de désillusions. A travers cette histoire ce sont les mutations culturelles des années 1970 qui sont évoquées, la perte des traditions et la difficulté de trouver un équilibre dans ces nouveaux codes qui se sont imposés. Llong est engagé comme acteur et se rend compte avec retard qu'il doit jouer dans un film porno. Il tombe amoureux de l'actrice et part avec celle-ci vivre un improbable amour.

« La route de Sampo » : Hwang Sok-yong s'est inspiré d'un épisode de sa vie quand, après avoir participé à une manifestation d'étudiants interdite, il s'est retrouvé en prison. Libéré en même temps que son compagnon de cellule, un ouvrier, ils partent tous les deux sur la route. Ici, deux ouvriers, Yongdal et Jong, cherchant du travail, vont faire la route avec une prostituée nommée Baekwha. Un dernier portait touchant juste. le froid, la neige, l'incertitude du lendemain font de cette courte histoire un bijou de réalisme et d'humanité envers les déshérités cherchant un meilleur destin. Je l'ai lue en pensant à Charlie Chaplin et la célèbre image de Charlot avec « la gamine », vus de dos, s'éloignant sur le chemin... J'ai adoré la poésie qui se dégage de l'histoire à travers les descriptions de paysages enneigés.

Ecrivain coréen, Hwang Sok-yong est né en 1943 en Mandchourie. A la Libération (1945), la famille vient s'installer à Pyongyang, capitale de la partie nord de la péninsule coréenne, placée sous contrôle soviétique. En 1948, sa famille passe au sud, sous contrôle américain, où le père a trouvé du travail. Témoin attentif de l'évolution sociale et politique de son pays, il puise dans les turbulences que traverse la Corée dans la seconde partie du XXe siècle, la matière de ses essais, romans et nouvelles. Hwang Sok-yong ne cesse de lutter, aux coté des intellectuels et des étudiants, contre les régimes dictatoriaux qui se sont succédés à Séoul jusqu'à la fin des années 1980. Pour avoir voulu dialoguer avec la Corée du nord dans le cadre d'un congrès d'écrivain, il connaîtra plusieurs années d'exil et même une condamnation à la prison en 1993. Il est maintenant un écrivain reconnu dans le monde entier, ce que je trouve amplement mérité au vu de ce recueil et de Shim Chong, fille vendue, un roman porté par le souffle de l'histoire de toute l'Asie orientale dont je parlerai dans ma prochaine chronique.

Je suis vraiment ravi d'avoir découvert cet écrivain. Je vais poursuivre la découverte, c'est sûr. Je peux même dire qu'il y aura, pour moi, un avant et un après Hwang Sok-yong qui m'a rendu cette partie du monde et son peuple beaucoup plus proches d'une certaine façon.
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Chronique avec illustration sur le blog Bibliofeel. Livre avec photo personnelle de pivoines, magnifiques en ce moment, une plante utilisée dans la médecine traditionnelle chinoise !


Lien : https://clesbibliofeel.blog
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Un excellent recueil venu tout droit de Corée

Après quelques lectures plutôt moyennes, j'ai retrouvé avec bonheur et soulagement l'auteur coréen Hwang Sok-yong dont le roman Monsieur Han m'avait beaucoup plu en janvier. La route de Sampo est un petit recueil qui regroupe 4 récits, initialement publiés entre 1972 et 1974, où se mêlent drame, désillusion, humour et mélancolie.

Le premier récit "Herbes Folles" raconte la guerre civile qui a ravagé et divisé la Corée via le regard d'un enfant. Une nouvelle de qualité avec un style qui sonne juste.
Suit, la nouvelle "Oeils-de-biche" qui raconte le retour désenchanté de militaires sud-coréens, engagés volontaire pour le Vietnam. L'auteur y souligne, entre autres choses, le fossé béant qui sépare les illusions de ces jeunes soldats et la réalité de l'occupation occidentale du Vietnam.
La troisième nouvelle "Les ambitions d'un champion de ssireum" relate les désillusions d'un jeune homme campagnard aussi fort que naïf et qui monte en ville dans l'espoir d'y faire fortune. Là aussi, le rêve matérialiste du garçon se brise face à la réalité... Un bon cru également.
Enfin la route de Sampo s'achève sur la nouvelle éponyme : le narrateur est un ouvrier qui se traine de ville en ville et qui rencontre sur son chemin un autre ouvrier qui rentre chez lui sur l'ile de Sampo. Deux ouvriers se déplaçant de ville en ville croisent sur leur route une prostituée en fuite. Les trois protagonistes décident de faire un bout de chemin ensemble, cela au milieu d'une tempête de neige pour finalement se retrouver à une gare hésitant sur le chemin à prendre, rejoindre une nouvelle ville ou quitter la civilisation galopante au profit de la petite ile de Sampo, île natale d'un des protagonistes. Si j'ai trouvé les trois autres nouvelles très bonnes, celle-ci est tout simplement magistrale. Sans jouer sur un pathos facile, Hwang nous fait partager les émotions de ses personnages : espoirs, craintes, désillusion, mélancolie...

Comme dans Monsieur Han, Hwang utilise le petit bout de la lorgnette pour nous parler des difficultés socio-économiques que traverse alors son pays : déchirement idéologique, précarité économique, détresse sentimentale et sexuelle, difficile condition des femmes, extinction des liens traditionnels qui unissaient la société... Autant de maux qui accablent la Corée du Sud de 1970 (qui vient de vivre une « modernisation » à marche forcée) et que l'on ressent pleinement au travers de ces nouvelles qui expriment si bien le désenchantement et parfois le désespoir de leur auteur.

Difficile également de ne pas trouver dans chacune des nouvelles une part de la biographie de l'auteur, Hwang Sok-yong qui vécut la guerre de Corée comme enfant, et jeune homme s'engagea comme volontaire lors du conflit au Vietnam et en revint profondément dégouté. Quant à la dernière nouvelle, elle s'inspire d'une mésaventure arrivée à l'auteur, qui, après avoir été relâché par la police suite à une manifestation étudiante s'est retrouvé à cheminer sous la pluie en compagnie d'un ouvrier, coupable de tapage nocturne, avec qui il avait partagé sa cellule.

La route de Sampo est un recueil extrêmement prenant et plaisant à lire dont on regrette qu'il ne soit pas plus long. J'ai particulièrement apprécié l'écriture de l'auteur et ses personnages attachants et plus vrais que nature. Hwang Sok-yong est un écrivain qu'il me tarde de connaitre davantage et je vous recommande vivement ce recueil.
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